Chef du gouvernement sous la présidence de Georges Pompidou, il préconise une « Nouvelle société », d'inspiration centriste et sociale. Candidat gaulliste à l'élection présidentielle de 1974 à la suite de la mort de Georges Pompidou, il subit la concurrence du libéral Valéry Giscard d'Estaing et est éliminé dès le premier tour ; cet échec est à l’origine du terme « chabanisation », un néologisme désignant la marginalisation rapide du favori d'un scrutin électoral.
Biographie
Origines
Fils de Pierre Delmas (1887-1980), ingénieur-conseil chez Delahaye[1], et de Georgette Barrouin (1895-1985)[2], professeur de musique à Bordeaux, il naît au 46 boulevard de l’Hôpital à Paris. Ses parents se séparent en 1927 et sa mère se remarie en 1928 avec Maurice Legendre, pilote de chasse pendant la Première Guerre mondiale, devenu marchand de meubles[3].
Il a 25 ans en . Démobilisé le 3 août 1940, il ne parvient pas à gagner Londres. Ne supportant pas l'humiliation de la défaite, il passe en zone libre, où il rencontre le colonel Groussard qui le met en contact avec le réseau de résistanceHector, organisation de résistance du Nord de la France commandée par le colonel Alfred Heurtaux en [7], d’abord sous le nom de Lakanal, en souvenir de son lycée à Sceaux. Il se lie avec Maurice Bourgès-Maunoury, Henri Sacquet et Félix Gaillard. De 1941 à 1942, il travaille comme contractuel, puis en préparant et en réussissant en mars 1943 le concours de l’Inspection des finances, au cabinet du secrétariat d'État à la Production industrielle, dirigé par Pierre Pucheu puis par François Lehideux sous Darlan, puis Jean Bichelonne, dans le deuxième gouvernement de Pierre Laval, dont les services parisiens étaient installés dans un hôtel particulier du XVIIIe siècle, rue de Grenelle dans le 7e arrondissement parisien. À la fin de l’année 1942, après la chute du réseau due à des arrestations, il entre directement en contact avec les représentants de Londres et se livre à un travail de renseignement dans les services du ministère de l'Industrie. Il poursuit son activité de renseignement avec l'Organisation civile et militaire (OCM), qui succède à Hector en fusionnant avec d'autres organismes résistants[8]. Comme haut fonctionnaire, il est sous les ordres de l'inspecteur des Finances Raymond Panié[9], qui sait [réf. nécessaire] que, sous le pseudonyme de Chaban — ce nom de résistant choisi en , un an avant la Libération, a pour origine un écriteau indiquant le château de Chaban[10],[11] —, il fournit des renseignements économiques à la France libre. Chaban représente le chef du service des relations extérieures aux conférences qui réunissent les représentants des services responsables de l'économie en zone occupée. En février 1944, aux côtés de Guillain de Bénouville, François Bloch-Lainé, René Courtin, André Debray et Michel Debré, Chaban est nommé au Comité financier de la Résistance (COFI), que Jacques Bingen et Georges Bidault viennent de créer pour financer l'action de l'armée des ombres[12],[13],[14].
Général de brigade
À l'extrême fin de l'été 1943, après plusieurs entretiens avec son ami Maurice Bourgès-Maunoury tout juste revenu en France comme délégué militaire régional, Jacques Delmas rejoint la Délégation militaire du CFLN en France. À partir du mois d'octobre 1943, devenu « Chaban », il fait fonction, à Paris, d'adjoint au délégué militaire national (DMN), le commandant Louis Mangin. Sur instruction de ce dernier, il travaille un temps avec André Boulloche, délégué militaire pour la Région parisienne[14]. En mai 1944, les responsabilités de Jacques Chaban-Delmas dans la Résistance sont stratégiques. En effet, responsable de la coordination militaire sur tout le territoire, il est le lien entre les FFI et le Haut commandement interallié auprès de Pierre Koenig et veille à leur application. Interlocuteur du Comité d'action militaire COMAC, institué par le CNR, il s'efforce de préparer la participation des forces paramilitaires de la Résistance à la libération du territoire.
En , il est nommé délégué militaire national par Socrate (Lazare Rachline), envoyé personnel du général de Gaulle. Devant peser dans les négociations, Socrate le recommande — alors qu'il n'est que lieutenant — au grade de général de brigade au général de Gaulle et au Gouvernement provisoire, qui entérinent. Il est le plus jeune général nommé depuis François Séverin Marceau, général à 24 ans à la Révolution, même s'il ne commande aucune troupe.
Il quitte Paris pour Londres le afin de rendre compte au Commandement allié des possibilités militaires de la Résistance. Avec le soutien d'Alexandre Parodi, délégué général, il s'oppose à la stratégie insurrectionnelle du COMAC. Il demande instamment que le plan d'opérations qui prévoyait la chute de Paris soit modifié de manière à éviter à la capitale destructions et massacres. Il repart de Londres le 13 août 1944 nanti des ordres du général Koenig. Amené au Mans par les Américains le , il arrive à Paris deux jours plus tard, à bicyclette. Il agit pendant l'insurrection parisienne de façon à permettre à la Résistance d'exercer une action d'un grand retentissement, tout en prévenant tout débordement de violence. Il accueille le général Leclerc à Arpajon le 24 août, et entre avec lui dans Paris[8].
Il est l'un des quatre généraux de brigade FFI, avec Pierre de Bénouville (1914-2001), Maurice Chevance-Bertin (1910-1996) et Alfred Malleret-Joinville (1911-1960). Un « Additif à l'annuaire des officiers généraux de 1946 », daté du , précise : « Ces officiers ont reçu le titre de général de brigade en raison de leurs fonctions dans la Résistance et pour la durée de leur mission. Ce titre a été transformé en celui de général honoraire après la libération de la France[15] ».
En novembre 1944, il est nommé au cabinet du ministre de la Guerre, André Diethelm, pour une mission d’inspection de l’armée (chef de l’Inspection générale de l’armée), puis est affecté en tant qu’inspecteur des finances dans le civil en , nommé secrétaire général du ministère de l’Information (auprès de Jacques Soustelle, puis d’André Malraux). Fonctionnaire « insoumis », il quitte le ministère début 1946, en désaccord avec la politique sur la presse sous l’Occupation et démissionne.
Quand il franchit le Rubicon en , le projet de Constitution, auquel de Gaulle est opposé, est rejeté par référendum. Il ne peut postuler pour la nouvelle Assemblée constituante, en place pour six mois, mais prend rang pour l'assemblée qui doit être élue en novembre 1946[16].
Il hésite entre Charente, Charente-Maritime et Gironde, trois départements où les radicaux, pour cause de divisions, n'avaient pas obtenu de siège en 1945. Lorrain Cruse a un faible pour la Charente-Maritime à cause des voix protestantes. Félix Gaillard préfère la Charente. Il reste donc la Gironde pour Chaban ; il indique à ce sujet : « J'étais avant tout un citadin. Plus grand serait le poids urbain dans le département où j'allais tenter ma chance, plus je serais à l'aise. » Bref, c'est un Parisien qui débarque à Bordeaux dans une traction-avant décapotable prêtée par un industriel parisien mécène du rugby. Il choisit d’entrer en politique à Bordeaux, comme « parachuté »[17].
Son ami Maurice Bourgès-Maunoury, radical et futur président du Conseil, est nommé commissaire de la République à Bordeaux en 1945. Ce dernier ne peut empêcher les radicaux du cru qui voient d'un mauvais œil ce parachuté. Ils contestent la bénédiction d'Édouard Herriot, le pape du radicalisme. Ils proposent la candidature de l'amiral Muselier qui a été le premier officier général à rallier Charles de Gaulle à Londres dès le [18]. Les premiers contacts politiques sont tendus, les premières réunions violentes. Il obtient l'investiture et deux sièges pour son parti. Il reconnaît, trente ans plus tard : « J'eusse dû y perdre sur le champ la naïveté que j'ai conservée longtemps »[17].
Jacques Chaban-Delmas se fait élire pour la première fois député de Bordeaux le sous l’étiquette radicale avec le soutien de De Gaulle et d'Herriot. Le , il réussit à préserver la double étiquette radicale (RGR) et gaulliste (RPF) en gagnant contre Henri Teitgen (MRP), mais les partis refusant la double appartenance, il choisit le camp gaulliste. Le , à la suite du second « discours de Bayeux », il fonde, avec René Capitant, Louis Vallon et Pierre Clostermann, l'Union gaulliste pour la IVe République, qui fusionne, le , dans le Rassemblement du peuple français (RPF), constitué autour du général de Gaulle. Il en devient l’une des figures comme membre du conseil de direction et du bureau politique. Il est directeur de publication des journaux du RPF, L'Étincelle (de 1947 à 1955), Le Rassemblement (de 1948 à 1954), Liberté de l'Esprit (de 1949 à 1954).
Il est président de l'Intergroupe d'Action pour une vraie démocratie à l'Assemblée nationale le , puis du groupe d'action démocratique et républicaine à l'Assemblée nationale le , et enfin président du groupe RPF à l'Assemblée nationale[19]. Après l'échec du RPF, il fonde et dirige, de 1953 à 1958, un autre mouvement gaulliste, l’Union des républicains d'action sociale, devenue le Centre national des républicains sociaux, et de son groupe à l’Assemblée nationale, dont la stratégie est de combattre le « système » de l’intérieur. Il est le directeur de publication du journal de ce parti politique, Le Télégramme de Paris, de 1953 à 1958[20].
Sous la IVe République, Jacques Chaban-Delmas est favorable au retour au pouvoir de De Gaulle. Le député de la Gironde intervient souvent à la tribune de l'Assemblée nationale. Ainsi le , il est entendu au cours du débat sur l'interpellation de Fernand Grenier relative à la dévolution des biens des entreprises de presse. Le et à nouveau le — cette fois-ci à l'occasion du débat sur l'investiture du Président du Conseil Georges Bidault auquel il accorde sa confiance en souvenir des combats communs — Jacques Chaban-Delmas appelle de ses vœux une révision constitutionnelle ; il souligne que l'Assemblée dans sa composition ne représente plus l'opinion publique et qu'elle devrait se séparer pour rendre la parole aux électeurs, comme le préconise le général de Gaulle depuis la fondation du RPF, auquel il appartient. Il n'oublie pas de défendre les intérêts de sa région, que ce soit en luttant contre les incendies de forêt des Landes ou en faveur du théâtre de Bordeaux[21].
Comme membre de la Commission des affaires économiques ou au nom du groupe gaulliste, Jacques Chaban-Delmas intervient sur les questions importantes. Ainsi, le , il s'oppose à la ratification du traité instituant la CECA, car en cas d'adoption la France, ne disposant plus de la maîtrise de son charbon et de son acier, serait en position d'infériorité lors de la négociation portant sur la défense européenne. En outre, il dénonce la méthode empruntée pour construire l'Europe et suggère des négociations globales sur l'édification d'une communauté européenne[21].
Européen convaincu, Jacques Chaban-Delmas milite pour la création de la Conférence européenne des pouvoirs locaux, aujourd'hui Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE), organe de représentation des collectivités locales et régionales et en est président du au . Le Congrès devient alors l'une des institutions du Conseil de l'Europe.
Il est plusieurs fois ministre sous la Quatrième République. Ministre des Travaux publics, des Transports et du Tourisme sous Pierre Mendès France, Jacques Chaban-Delmas démissionne le , en compagnie du général Koenig et de Maurice Lemaire[22]. La raison de leur démission trouve son explication dans les conclusions arrêtées par le gouvernement Mendès France concernant le « compromis » dessiné par ce dernier à propos du traité de la Communauté européenne de défense (CED). Ils font savoir, par ce geste, qu'il leur est impossible de s'associer à ces conclusions[23]. Le 3 septembre 1954, après le rejet du projet par l'Assemblée le 30 août et la démission des ministres qui en étaient partisans, Jacques Chaban-Delmas reçoit le portefeuille des Travaux publics, du logement et de la reconstruction et le garde jusqu'à la constitution du deuxième gouvernement Edgar Faure[21]. Le , il précipite la chute du gouvernement d’Edgar Faure (radical) sur la question algérienne, voulant une intégration des populations musulmanes dans la communauté nationale. Cet événement entraîne la dissolution de l’Assemblée nationale et la constitution d’un « Front républicain » auquel participent Pierre Mendès France, François Mitterrand et Jacques Chaban-Delmas.
Il est également ministre d’État du gouvernement Guy Mollet. Le 30 novembre 1956, il souhaite publiquement le retour rapide du général de Gaulle au pouvoir[21]. Il est ministre de la Défense nationale et des Forces armées du gouvernement Félix Gaillard. À ce titre, il inaugure le Centre d'instruction à la pacification et à la contre-guérilla de Philippeville, dans le Constantinois (Algérie), le ; il en confie la direction au colonel Marcel Bigeard que Chaban-Delmas considérait dans Mémoires pour demain (1997) comme « l’homme qu’il fallait pour faire subir aux officiers subalternes un véritable électrochoc psychologique qui changerait à jamais leur façon d’envisager les choses ». Ce centre a été notamment au cœur de la polémique sur la torture en Algérie en raison de son programme d’enseignement[24]. En tant que ministre de la Défense, il fait partie du lobby qui pousse le CEA, sous la direction de Francis Perrin, à prendre la décision de fabriquer la première bombe nucléaire française, donnant à la France son statut de puissance nucléaire. Pourtant partisan du retour au pouvoir de De Gaulle, Jacques Chaban-Delmas n’est pas ministre dans le dernier gouvernement de la IVe République dirigé par de Gaulle. Il crée le , et organise l’un des mouvements politiques à l’origine de la future UNR, le Mouvement pour la Ve République qui devient le 22 juillet 1958, l'Union civique pour le référendum présidée par Louis Pasteur Vallery-Radot[21].
Chaban-Delmas définit ainsi sa position sous la IVe République : « J’accompagnai de Gaulle dans sa traversée du désert et j’étais un marginal engagé dans les structures de la IVe République […] un des acteurs du mouvement gaulliste et […] un participant aux délices et aux poisons d’un système que le Général dénonçait »[25].
Maire de Bordeaux
En 1947, Jacques Chaban-Delmas devient maire de Bordeaux ; il le reste sans discontinuer jusqu’en 1995. Il industrialise la ville, avec comme élément moteur le domaine aéronautique et spatial en récupérant de nombreuses entreprises inhérentes à l'aviation militaire en parallèle de Toulouse qui récupère l'aviation civile[17]. Les urgences sont nombreuses à son élection en 1947, la construction de Claveau, la cité Carreire et la Benauge ont permis de faire face aux besoins immédiats[17]. Les travaux de dégagement de l’estuaire, encombré par les épaves allemandes, prennent trois ans. Un drame pour une économie largement basée sur les activités maritimes. La reconstruction, notamment pour la place de la Bourse, procure bien quelques emplois, mais ce n’est pas cela qui constitue une relance économique. Pour la venue de l’aérospatiale, il règle le dossier de la poudrerie[17].
En , la municipalité bordelaise se rend propriétaire d’un vaste espace inondable au nord de Bordeaux de 1 000hectares à aménager pour favoriser le rééquilibrage de la ville au nord. Le marais est asséché et un lac artificiel de 160 hectares est construit. Il s’agit de Bordeaux-Lac.
Le Grand Parc est un quartier d’urbanisation qui s’inscrit dans la politique de construction de grands ensembles menée en France après la guerre. Plus localement, il participe au projet d’extension de la ville de Bordeaux sur les terrains marécageux du Nord (assèchement des terrains marécageux). Les plans de la ville prévoient la construction d'une cité HLM de 4 000 logements. Les travaux entrepris en 1959 par la Société bordelaise d’urbanisme et de construction et l’office d’HLM Aquitanis aboutissent en 1975. La cité accueille des rapatriés d’Algérie, des habitants de Mériadeck dont la restructuration est en cours et des fonctionnaires mutés. Les 4 000 logements de « la cité du Grand Parc » s’organisent autour d’une grande zone de verdure centrale qui accueille la majorité des équipements associés. Il plante des arbres dans tous les quartiers de Bordeaux qu’il a réaménagés. Dans les années 1980, il réhabilite la cité des Aubiers, symbole d’une erreur architecturale absolue. L’implantation de Ford provoque, pendant l’été 1970, ce qui est resté sous le nom de « bataille de Bordeaux ». Il parle d’un plan chimie, d’un avant-port du Verdon et d’une presqu’île d’Ambès qui permettraient de faire jeu égal avec Lyon et Marseille. Jacques Chaban-Delmas est à l’origine du pont d’Aquitaine (1967) pour soulager le pont de pierre qui constituait l’un des goulets étranglement les plus célèbres de France. Ce pont sera un point-clé de la rocade, avec le pont d’Arcins venu bien plus tard (en 1993). Le pont Saint-Jean soulage des embouteillages catastrophiques. Le pont de pierre s’élargit et devient la preuve de ce que l’on a su conserver de la splendeur passée[17].
Jacques Chaban-Delmas est également l'un des principaux moteurs politiques qui conduisent à la construction et à l'inauguration en 1963 du campus de Bordeaux de l'école d'ingénieurs Arts et Métiers ParisTech. Il s'agit du premier établissement de cette école ouvert après celui de Paris (1912). Depuis lors, Jacques Chaban-Delmas est membre d'honneur, d'abord à vie, puis à titre posthume, de la Société des ingénieurs Arts et Métiers[26]. Au milieu du XXe siècle, l’université de Bordeaux (et les universités françaises en général) voit ses effectifs augmenter fortement. Les locaux situés en centre-ville deviennent trop petits et la plupart des facultés déménagent vers un nouveau campus : le domaine universitaire de Talence-Pessac-Gradignan (sciences en 1960, droit en 1966-67, lettres en 1971)[27]. Sur le plan culturel il crée de nombreuses institutions : le CAPC-musée d’Art contemporains de Bordeaux (1983), le Musée des Arts Décoratif et du Design (1955), le Musée national des Douanes (1984), le Centre national Jean-Moulin (1967), le Musée Goupil - Conservatoire de l’image industrielle (1991), le CAP Sciences (1995), le musée d’Aquitaine (1963), la Bibliothèque Mériadeck (1991). Dès 1965, Jacques Chaban-Delmas soutient, contre l'avis de son conseil municipal, la création du festival Sigma. Malgré les oppositions multiples, il soutient financièrement, année après année, cette manifestation d'avant-garde qui gagne très vite en réputation, en France et même à l'étranger[28].
Jacques Chaban-Delmas accueille très bien les rapatriés d’Algérie. Il a réalisé un programme de sédentarisation des gitans. En matière sociale il crée des foyers-restaurants, car il portait une attention particulière aux personnes âgées. En effet il ne manquait jamais de faire le tour des foyers à Noël. Il crée le comité de prévention de la délinquance, ce qui a permis à Bordeaux de sentir la montée de l’exclusion et de mettre en place des dispositions d’urgence qui, dès le premier jour, se sont occupées de 500 personnes alors qu’on en attendait une centaine. Quand, en 1985, Coluche lance Les Restaurants du Cœur, il est le premier homme politique à répondre oui et à agir. Il le fait sans ostentation. Il cherche l’efficacité. « Coluche nous offre sa popularité. Profitons-en, d’autant plus qu’il fait cela sans arrière-pensée ni vue carriériste », dit Jacques Chaban-Delmas. “Ce type est un mec bien”, répond Coluche[17].
Il décide d’abandonner le tramway en 1958 au profit de l’automobile. Les autobus remplacent les tramways comme solution marginale et provisoire. À terme, l’automobile serait l’unique moyen de locomotion. C’était à la ville de s’adapter à elle. Le , en compagnie du président de la SNCF Philippe Essig et du directeur régional Marc Cauty, Jacques Chaban-Delmas inaugure les nouvelles installations modernisées de la gare de Bordeaux-Saint-Jean qui devaient permettre l'accueil du futur TGV-Atlantique[29]. Le président Giscard d’Estaing lui propose l’installation d’un nouveau tramway qu’il décline[17]. À la fin de sa carrière, Jacques Chaban-Delmas tente également, sans succès, de faire construire un réseau de métro de type VAL à Bordeaux. Initialement approuvé par la Communauté urbaine de Bordeaux en 1986, le projet de métro affronte rapidement une vive opposition. Malgré la détermination du maire, il est finalement abandonné en 1994 après le rejet du traité de concession et l'annulation de la déclaration d'utilité publique par le Conseil d'État[30].
Un épisode électoral témoigne de la popularité de Jacques Chaban-Delmas, surnommé « le Duc d'Aquitaine » dans son fief[31]. En raison de la mort de son suppléant devenu député avec son arrivée à la tête du gouvernement, une élection partielle est organisée dans sa circonscription de Bordeaux le 20 septembre 1970. Jean-Jacques Servan-Schreiber, dirigeant historique du Parti radical tout juste élu député à Nancy, se présente contre le Premier ministre en souhaitant faire de cette partielle en Gironde une élection nationale. Après avoir encouragé la candidature de Robert Badinter ou d'Alain Savary, il se présente lui-même contre Jacques Chaban-Delmas, mais échoue dès le premier tour, le chef du gouvernement étant réélu avec 68,6 % contre 16,6 % pour le candidat radical.
Première présidence de l'Assemblée nationale
Jacques Chaban-Delmas est élu président de l'Assemblée nationale le , devenant ainsi le premier président de la chambre basse de la Ve République. Il est réélu en 1962, 1967 et 1968. Il présente sa candidature face à Paul Reynaud, qui faisait figure de candidat du général de Gaulle.
Deux jours après son élection à la présidence de la chambre basse, il prononce une allocution dans laquelle il déclare vouloir préserver le lien entre la représentation nationale et le peuple. En 1967, il modifie le règlement de l’Assemblée nationale pour donner aux présidents des groupes politiques un rôle primordial dans la définition de l’ordre du jour. Par ailleurs, en 1969, il souhaite que chaque député puisse bénéficier d’un bureau personnel : ce projet est finalisé en 1974, après l’acquisition du bâtiment du 101 rue de l’Université.
Dans L’Ardeur (1975), il explique ainsi ses prérogatives : « Le fauteuil du président est un tonneau de vigie, d’où l’on peut voir se lever les tempêtes […]. Au perchoir, je suis absorbé par la nécessité d’anticiper l’événement. Il faut sentir ce qui va se passer. Cela suppose une bonne connaissance des dossiers et des hommes. »
Enfin, à partir de 1959, Jacques Chaban-Delmas, théorise la notion de « domaine réservé », selon laquelle, dans certains domaines (défense, politique étrangère), le président de la République a la possibilité de travailler directement avec les ministres, échappant de fait au contrôle gouvernemental[32]. Il est le directeur de la publication du journal officiel du parti gaulliste pendant 39 ans : Notre République sous l’UNR (1958-1962) et La Lettre de la nation Magazine (1962-1997)[33].
Après avoir fait activement campagne pour le référendum du (notamment à Nantes), Jacques Chaban-Delmas soutient la candidature de Georges Pompidou contre Alain Poher à l’élection présidentielle anticipée.
Premier ministre
Le , il est nommé Premier ministre par Georges Pompidou, élu président de la République. Pour Georges Pompidou, la nomination de Jacques Chaban-Delmas constitue la caution des gaullistes historiques (« gaullistes de guerre ») et une certaine ouverture à gauche. Le cabinet du Premier ministre accueille le mendésiste Simon Nora, Jacques Delors (chargé des questions sociales) et Ernest-Antoine Seillière. Le nouveau chef du gouvernement a une excellente connaissance du milieu parlementaire et affiche un souci de préservation des droits du Parlement. Si les barons du gaullisme siègent massivement au gouvernement, celui-ci comprend également des centristes ralliés et une vingtaine de secrétaires d’État nommés à la demande du président[31].
Projet de « Nouvelle société »
Dans son discours de politique générale du , il propose une « Nouvelle société » — présentée comme une variante française des « nouvelles frontières » proposées par John Kennedy au début de la décennie —, qui affiche d’abord son souci du trop faible degré d’industrialisation de la France et de sa trop grande tendance à l’inflation. Le tableau dressé est celui d’une société « bloquée » et d’un « État tentaculaire et inefficace » qui a « peu à peu mis en tutelle la société française tout entière ». Cette situation est due selon Chaban-Delmas à la rencontre entre l’État-providence d’après-guerre et la « vieille tradition colbertiste et jacobine, faisant de l'État une nouvelle providence ». Or, cette route n’aurait pas abouti à l’harmonie sociale (« Nous sommes encore un pays de castes. Des écarts excessifs de revenus, une mobilité sociale insuffisante, maintiennent des cloisons anachroniques entre les groupes sociaux »)[34].
Au cours de ses trois années à la tête du gouvernement, il affiche deux priorités : le renforcement de la politique contractuelle (aidé en cela par son conseiller Jacques Delors) et le maintien de l’ordre (avec la polémique entourant la « loi anticasseurs », votée au printemps 1970). Le , le premier accord national interprofessionnel (ANI) est signé par la CGPME et le CNPF ainsi que par les cinq organisations salariales (CGT, CFDT, CFE-CGC, CFTC et FO) sur la formation et le perfectionnement professionnel. Le , la loi reconnaît l’existence d’un « droit des travailleurs à la négociation collective », instaure les accords d’entreprise et d’établissement sous un régime identique à celui de la convention de branche. La loi dite « Delors » du reprend l’accord interprofessionnel sur la formation professionnelle de : elle débouche sur le principe d’un financement privé de la formation professionnelle, institue le congé individuel de formation (CIF) et oblige les entreprises de plus de dix salariés à participer à la formation professionnelle continue de ces derniers. Pour récolter les fonds, les fonds d’assurance formation (FAF) et les associations formation (ASFO) voient le jour[35].
Jacques Chaban-Delmas est aussi à l'origine de la loi sur les fusions et regroupements de communes (1971) et de la Loi Anticasseurs (1970). Il porte la loi sur l'actionnariat ouvrier chez Renault (1969), et son gouvernement initie le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou à la fin de l’année 1969. Cette même année, il supprime les classes du samedi après-midi à l’école primaire ; la semaine est ramenée de 30 à 27 heures et le « tiers-temps pédagogique » est établi[36]. Il signe le décret no 72-9 relatif à l'enrichissement de la langue française, prévoyant la création de commissions ministérielles de terminologie pour l'enrichissement du vocabulaire français.
Une dévaluation du franc de 12,5 % a lieu le . Le Premier ministre introduit les stock options dans le droit des sociétés en 1970.
Jacques Chaban-Delmas est également à l’origine de la loi sur la réforme hospitalière qui instaure la carte sanitaire afin de mieux faire concorder l'offre et la demande en créant le service public hospitalier.
Le , il fait voter une loi qui institue l'autorité parentale partagée entre le père et la mère (auparavant seule l'autorité paternelle était reconnue). En décembre 1969, il décrète l'abandon par la France de la filière graphite-gaz pour la filière à eau pressurisée[38]. En juillet 1970, il décide la fusion des trois constructeurs aéronautiques publics français (Sud-Aviation, Nord-Aviation et SEREB) pour former la Société nationale industrielle aérospatiale (SNIAS ou tout simplement « Aérospatiale »). Celle-ci s'associe la même année avec l'allemand Deutsche Airbus pour créer le consortium (sous forme de GIE) Airbus. En 1971, il crée le ministère de l'Environnement et lance le projet de train à grande vitesse (TGV).
Parmi ses autres grands projets, une libéralisation de l'ORTF, qui indispose cependant des conseillers du président Pompidou en plus d'être ternie par le « Messieurs les censeurs, bonsoir ! », lancé par Maurice Clavel en quittant un plateau de télé par surprise.
Le , la loi Pleven procède à une extension du domaine de la lutte antiraciste et crée un nouveau délit, celui de « provocation à la haine, à la discrimination ou à la violence », puni à l’époque d’un mois à un an d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 francs. Ce texte intègre également de nouvelles dimensions en punissant les discriminations raciales dans les domaines du travail et du logement. Elle modifie la loi du sur les groupes de combat et milices privées, et permet de dissoudre des groupes incitant à la haine raciale. Enfin, elle reconnaît la faculté aux associations antiracistes de plus de cinq ans de se constituer partie civile. Robert Badinter, alors avocat de la LICRA, se saisit très vite de cette disposition pour plaider contre l’édition non critique de Mein Kampf par les Nouvelles éditions latines ou encore la publication des Protocoles des Sages de Sion[39].
La dernière loi qu'il fait voter est la loi créant les régions[40]. Par un décret en date du , il instaure un comité interministériel de la sécurité routière[41]. Il négocie le traité de Bruxelles pour l’élargissement de la Communauté économique européenne au Danemark, à l’Irlande, à la Norvège et au Royaume-Uni à compter du 1er janvier 1973. Seule la Norvège n’y adhère pas après un référendum. Il négocie pour la France l'accord de Bâle du , qui crée le Serpent monétaire européen (SME)[42].
Divergences avec Pompidou
Malgré cet activisme, la prééminence présidentielle reste entière : Georges Pompidou, Premier ministre pendant six ans, a une parfaite connaissance des dossiers de la France. La prééminence du président reste totale dans les domaines des Affaires étrangères et de la Défense. La formule de « domaine réservé » s’applique bien mal au couple Chaban-Delmas/Pompidou, le président se passionnant également pour la politique économique et industrielle de la France ou sa politique culturelle. Ainsi, des conseils restreints se tiennent souvent à l’Élysée, et sur des domaines étendus et variés. Les divergences entre le Premier ministre et le président — soutenu par la majorité des députés de l’UDR — s’accumulent. Une partie des députés UDR craint de voir l’électorat conservateur s’éloigner d’eux. Face à des députés UDR hostiles, début mai 1972, Chaban-Delmas aurait demandé à Pompidou ainsi son soutien : « Soutenez-moi ou mettez-moi à la porte » ; Pompidou lui aurait répondu : « Demandez donc un vote à l’Assemblée. On verra bien, vous n’avez rien à perdre. »[réf. nécessaire] Le , Chaban-Delmas reçoit un vote de confiance massif des députés (368 voix contre 96).
Mais début juillet, Jacques Chaban-Delmas est invité à démissionner par le président de la République, en délicatesse avec la thématique de la nouvelle société et en désaccord courtois sur la nature de l’équilibre des pouvoirs entre les deux têtes de l’exécutif[31].
Georges Pompidou lui propose d'occuper la présidence de la Commission européenne à partir du . Cette fonction doit alors revenir à un Français et Jacques Chaban-Delmas a notamment négocié le traité de Bruxelles pour l'agrandissement de la Communauté européenne. Le chef de l’État pense que cette responsabilité prestigieuse lui permettra de l'éloigner de la vie politique hexagonale. L'ancien Premier ministre refuse la proposition et François-Xavier Ortoli obtient le poste.
Face au Programme commun conclu entre le PS et le PCF en juillet 1972, l'UDR a peur de perdre les législatives de 1973 et se sépare de son secrétaire général, René Tomasini. Jacques Chaban-Delmas pense alors être l'homme de la situation pour remporter les élections grâce à son bilan à Matignon. Il se porte candidat à la fonction de secrétaire général face à Alain Peyrefitte et à Jean de Préaumont. Cependant les cadres du parti choisissent Alain Peyrefitte. Quand ce dernier quitte la fonction en , ayant été nommé ministre dans le gouvernement Messmer II, Jacques Chaban-Delmas se présente à nouveau face à Alexandre Sanguinetti, qui est choisi. En mars 1974, quand Roger Frey quitte la tête du groupe UDR de l'Assemblée nationale pour prendre la présidence du Conseil constitutionnel, Jacques Chaban-Delmas présente sa candidature face à Claude Labbé : une fois de plus, c’est un échec pour l’ancien chef du gouvernement.
En 1973, Jacques Chaban-Delmas est candidat à la présidence de l'Assemblée face à Edgar Faure, qui l'emporte grâce au soutien de l'Élysée[43]. Il est président de la Haute Cour de Justice entre 1973 et 1978[22].
Retiré sur ses terres bordelaises depuis 21 mois, Jacques Chaban-Delmas est décidé à se présenter à l’élection présidentielle prévue en 1976.
Après la mort de Georges Pompidou, malade, le , Jacques Chaban-Delmas se porte candidat à l’élection présidentielle anticipée. Son slogan de campagne (« Chaban pour la France, il l'a déjà prouvé ») met l'accent sur ses faits dans la Résistance. Il fait alors figure de favori[44].
Cependant, avant et pendant la campagne, il accumule les maladresses. Prévenu qu'un autre candidat de la majorité pourrait se déclarer à sa place, il officialise sa candidature dès le , alors que l'hommage de l'Assemblée nationale au président défunt n'est même pas terminé ; une partie de l'opinion juge le geste inélégant envers l'ancien président. Par ailleurs, sa feuille d'impôts, publiée par Le Canard enchaîné le , révèle qu'il ne paie que 16 808 francs d'impôts pour des revenus déclarés de 250 000 francs ; en effet, l'indemnité parlementaire est alors quasiment nette d'impôts : les revenus de son mandat de maire et de président du conseil général sont exonérés et l'avoir fiscal créé en 1965 correspond à ce qui lui resterait à payer pour ses autres revenus. De plus, l'inculpation des frères Dega le déstabilise : Édouard Dega, inspecteur des impôts, est accusé de favoriser la fraude fiscale de riches contribuables, conseillé par son frère Georges Dega, membre du cabinet de Chaban-Delmas lorsqu'il était président de l'Assemblée nationale et conseiller fiscal personnel de l'homme politique[45]. En outre, sa deuxième femme, Marie-Antoinette Iôn[b], est morte lors d'un accident automobile le . Il se remarie avec Micheline Chavelet un an après, le . Une rumeur se propage sur les causes de l'accident, favorisée notamment par une campagne contre lui dans la presse à scandales[46].
Lâché par trente-neuf parlementaires et quatre ministres de l'UDR, dont Jacques Chirac, qui soutiennent la candidature de Valéry Giscard d'Estaing dans l'« appel des 43 », soutenu froidement par le Premier ministre Pierre Messmer, affaibli par quelques maladresses (en particulier des retournements de position d'André Malraux, qui le soutient, sur un éventuel remplacement du livre par l'audiovisuel à l'école), il voit rapidement ses chances s'effondrer dans les sondages pendant la campagne du premier tour. Françoise Giroud, qui soutient François Mitterrand, accélère sa chute politique en lui réservant une petite phrase célèbre[c] dans un éditorial féroce qu'elle titre et conclut ainsi[47] : « On ne tire pas sur une ambulance[48] ».
Au premier tour, avec 15,1 % de suffrages, il arrive en troisième position, largement distancé par Valéry Giscard d'Estaing (32,6 %) et François Mitterrand (43,2 %). En vue du second tour, il apporte au candidat de centre-droit son « soutien conditionnel » contre François Mitterrand. Cette défaite entraîne la naissance du néologisme « se faire chabaniser ».
À nouveau président de l'Assemblée nationale
En décembre 1974, lorsque Alexandre Sanguinetti est débarqué de la direction (secrétariat général) de l'UDR par Jacques Chirac, Jacques Chaban-Delmas ne se présente pas en raison de son mauvais résultat à l’élection présidentielle, qui lui a fait perdre la confiance de nombreux cadres de l'UDR. En revanche, il pose à nouveau sa candidature pour la fonction de secrétaire général en juin 1975, face à André Bord, puis en avril 1976, face à Yves Guéna, mais il échoue dans les deux cas.
Lors de la formation du gouvernement Barre, Valéry Giscard d'Estaing lui propose le ministère des Affaires étrangères, mais il doit décliner l'offre sous l'injonction de Jacques Chirac. Jacques Chaban-Delmas ne peut en outre empêcher la création du RPR, qui est totalement dévolu à son fondateur, Jacques Chirac.
Un renversement d'alliances et l'appui du président Giscard d'Estaing lui permettent de récupérer en 1978 le « perchoir », évinçant Edgar Faure, qui l'occupait depuis 1973 et qui avait l'appui de Jacques Chirac, à l'époque très influencé par le tandem Garaud-Juillet.
En , il se voit confier une mission de renforcement des liens entre Moscou et Paris. Se trouvant à Moscou alors qu'Andreï Sakharov est assigné à résidence, il quitte l'URSS précipitamment afin de signifier le désaccord de la France.
Il soutient Michel Debré à l'élection présidentielle de 1981[49]. Il quitte la présidence de l’Assemblée nationale après la victoire de la gauche aux élections législatives de 1981.
Après les élections législatives de 1986, Jacques Chaban-Delmas fait partie des favoris pour devenir Premier ministre du premier gouvernement de cohabitation, tout comme Simone Veil, Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac. Finalement, ce dernier est nommé chef du gouvernement par le président de la République, François Mitterrand. Il y a des pierres d'achoppement pour former le gouvernement Chirac car pour les ministères relevant du « domaine réservé » (les Affaires étrangères et la Défense) François Mitterrand souhaiterait des personnalités qui à la fois ne sont pas des chefs de parti et ne lui sont pas hostiles. Jacques Chaban-Delmas ferait l'affaire, mais finalement l'Élysée et Matignon s'accordent sur l'ambassadeur à MoscouJean-Bernard Raimond[50]. En revanche, le , un accord avec Jacques Chirac lui permet de regagner facilement la présidence de l'Assemblée nationale[51] alors que Valéry Giscard d'Estaing visait visiblement le « perchoir ».
Bien qu’ayant désavoué l’alliance RPR-Front national aux élections municipales de 1983 à Dreux, il est réélu à la présidence du conseil régional d'Aquitaine grâce aux voix du Front national à la suite des élections régionales de 1986[52],[53],[54]. Il affirme ne pas avoir mené de négociations avec le FN et que chaque élu est libre de voter comme il l’entend[55]. Le , Jacques Chaban-Delmas apporte un soutien sans réserve à la candidature de Jacques Chirac à l’élection présidentielle.
Après la réélection de François Mitterrand, il tente sans succès de convaincre le chef de l’État de ne pas dissoudre l'Assemblée nationale. La chambre basse est finalement dissoute le 14 mai 1988. À la suite des législatives anticipées, Jacques Chaban-Delmas est le candidat des députés de droite à la présidence de l'Assemblée, mais, avec 268 voixcontre 301, il doit céder le perchoir à l'ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius. De 1988 à 1997, il préside le Comité d’action pour l’Europe (résurgence du Comité Jean Monnet), qui regroupe les anciens Présidents et Premiers ministres des pays européens. En , il est à nouveau candidat des députés de droite pour la présidence de l'Assemblée face au socialiste Henri Emmanuelli, qui l'emporte pour succéder à Laurent Fabius, devenu premier secrétaire du PS[56]. Cette même année, il devient président du comité d’action pour l’Europe[21].
Retrait de la vie politique
En 1995, à l'âge de 80 ans, Chaban-Delmas décide de ne pas se représenter à la mairie de Bordeaux. Après avoir soutenu la candidature victorieuse de Jacques Chirac à l'élection présidentielle[57], il se range derrière le nouveau Premier ministre, Alain Juppé, pour les élections municipales bordelaises, que ce dernier remporte. Dès lors, il se retire progressivement de la vie politique.
Le , pour le cinquantième anniversaire de sa première élection, Jacques Chaban-Delmas est désigné, par acclamations des députés, président d’honneur de l’Assemblée nationale, un titre attribué à un seul de ses deux cent quarante-cinq homologues jusqu’à maintenant, Édouard Herriot. Ce jour-là, il est le plus ancien député avec Raymond Marcellin à avoir été élu depuis 1946 sans interruption jusqu’à la dissolution de 1997.
Le RPR lui propose d'être candidat dans la liste aux élections municipales à Bordeaux en 1995, pour que le parti conserve la présidence de la communauté urbaine de Bordeaux, du fait qu'il serait le doyen d'âge de la nouvelle assemblée en cas de mauvais résultats électoraux, et il s’oppose catégoriquement[22]. Alain Juppé lui demande d'être son suppléant aux élections législatives de 1997 mais il veut quitter la vie politique[22]. Le RPR l'appelle pour être candidat aux élections cantonales de 1998 dans le canton de Bordeaux-2, candidat dans la liste aux élections régionales de 1998 en Aquitaine dans le département de la Gironde, candidat dans la liste aux élections sénatoriales de 1998 en Gironde ou encore candidat sur la liste conduite par Nicolas Sarkozy aux élections européennes de 1999 ; Jacques Chaban-Delmas décline toutes ces offres[22]. De même, Philippe Séguin lui propose la succession de Robert Fabre au Conseil constitutionnel en 1995, René Monory la succession d'Étienne Dailly également au Conseil constitutionnel en 1997, le gouvernement Juppé une nomination comme personnalité qualifiée au Conseil économique et social pour la période 1997-1999, le gouvernement Jospin la fonction de Médiateur de la République en 1998, mais Jacques Chaban-Delmas refuse ces propositions[22].
Il est membre du bureau de l'Association des médaillés de la Résistance française (1947-2000), du bureau de la Société d'entraide des Compagnons de la Libération (1948-2000), du bureau de la Fondation Maréchal de Lattre (1954-2000), du bureau de l'Association des Français libres (1958-2000), du bureau de l’Institut Charles-de-Gaulle (1971-2000), du bureau de la Fondation Maréchal Leclerc de Hauteclocque (1975-2000), du bureau de la Fondation Anne-de-Gaulle (1979-2000), du bureau de l’Institut Georges-Pompidou (1989-2000), du bureau de la Fondation Charles-de-Gaulle (1991-2000), du bureau de la Fondation de la France libre (1994-2000) et du bureau de l’Association des Amis de Michel Debré (1996-2000). Il est également membre du Conseil de l’ordre de la Libération (1958-2000) et de la commission nationale de la Médaille de la Résistance française (1962-2000)[22].
Mort et hommages
Le , âgé de 85 ans, il meurt d'une crise cardiaque à son domicile parisien du 1, rue de Lille. À son domicile, un cahier est dressé sur une table pour recevoir les hommages de citoyens tandis que de nombreuses personnalités politiques se succèdent pour le veiller.
Un hommage national a lieu aux Invalides, à la fin d’une messe avec chants basques du chœur Anaiki qui est célébrée par Jean-Marie Lustiger et l'archevêque de Bordeaux Pierre Eyt[58].
Les compagnons de la Libération sont à gauche du catafalque, derrière la famille arrivée avec les proches et les anciens conseillers, dont Jacques Delors. Le président Jacques Chirac déclare : « En précurseur, il avait compris que notre société moderne ne serait pas celle des certitudes acquises une fois pour toutes, des manichéismes, des idéologies en blanc et noir. Il savait que certains grands projets pour réussir doivent dépasser les clivages et rassembler des majorités d'opinion et d'enthousiasme. La Nouvelle Société qu'il appela de ses vœux était une société plus juste, plus solidaire, une société humaniste. Aujourd'hui, en ce début de XXIe siècle, Jacques Chaban-Delmas nous montre le chemin »[31]. Sont présents ceux qui lui succéderont, aussi bien à l’hôtel de Matignon (Pierre Messmer, Pierre Mauroy, Laurent Fabius, Michel Rocard, Édith Cresson, Édouard Balladur, Alain Juppé) qu’à l’hôtel de Lassay (Louis Mermaz, Henri Emmanuelli, Philippe Séguin, Raymond Forni), ainsi que Valéry Giscard d'Estaing, Claude Pompidou et Danielle Mitterrand.
L'Assemblée nationale, qui avait fait de lui son président d'honneur, observe, le lundi suivant le décès, une minute de silence en sa mémoire. Pendant une demi-heure les députés écoutent, debout, les éloges funèbres. Pour le Premier ministre Lionel Jospin, Chaban-Delmas avait eu « toute sa vie la passion de la France ». Pour Alain Juppé, tout à la fois gaulliste, maire de Bordeaux et ancien Premier ministre, il s’agit de saluer un homme « visionnaire et généreux » qui « symbolisait l'histoire de la France ». Raymond Forni déclare : « Le nom de Jacques Chaban-Delmas évoque immédiatement les mots de résistance, conviction, courage, fidélité. Jacques Chaban-Delmas, c'est un peu de la France qui part aujourd'hui. C'est pour moi le plus grand président de l'Assemblée nationale que nous ayons eu[59]. »
De son vivant, Jacques Chaban-Delmas s’est vu proposer par Jacques Chirac la dignité de grand-croix de l’ordre national du Mérite en tant qu’ancien Premier ministre pour la promotion du [62],[63]. Jacques Chirac lui a également proposé la dignité de grand officier et de grand-croix de la Légion d'honneur pour la promotion du [62], alors qu'il en était commandeur depuis 1958. Mais Jacques Chaban-Delmas estimait que personne ne pouvait prétendre lui remettre une telle décoration, personne n’ayant selon lui un passé comparable au sien[62]. De même, il a refusé la cravate de commandeur des Palmes académiques, du Mérite agricole, du Mérite maritime et des Arts et des Lettres, auquel il pouvait prétendre comme commandeur de la Légion d’honneur[62].
En 1980, une médaille d'art est éditée par la Monnaie de Paris : il s’agit d'une œuvre du graveur J. H. Coëffin ayant pour inscription « Jacques Chaban-Delmas, président de l'Assemblée nationale – Tout est amour ».
Un buste de Jacques Chaban-Delmas se trouve dans la salle du conseil municipal de Bordeaux[67]. Le a été installée sur la place Pey-Berland, au nord de la cathédrale, face au palais Rohan, une statue en hommage à Jacques Chaban-Delmas. L'œuvre de 3,2 mètres de haut pour 1,1 tonne a été réalisée par Jean Cardot[68].
Le conseil municipal de la ville de Bordeaux décide le de baptiser du nom « Jacques-Chaban-Delmas », le nouveau pont Bacalan-Bastide[69], inauguré le par le président de la République François Hollande.
L'immeuble dans lequel logent les députés, derrière le palais Bourbon, porte le nom de Jacques Chaban-Delmas[70].
Alain Juppé avait le projet de donner le nom de Jacques Chaban-Delmas à l'aéroport de Bordeaux-Mérignac. Michel Sainte-Marie et la chambre de commerce avaient donné leur accord mais cela n'a pu se réaliser avant sa mort[17].
Il existe une « Association bordelaise des amis de Jacques Chaban-Delmas » depuis 2006[71] et une « Association Chaban aujourd'hui » depuis 2009[72].
À l'occasion du centenaire de sa naissance en 2015, l'Assemblée nationale a organisé une exposition temporaire dans l'hôtel de Lassay[73].
Vie privée et familiale
Mariages et descendance
En 1933, Jacques Delmas entre en tant que journaliste stagiaire à L'Information économique et financière tout en suivant les cours de Sciences Po et de la faculté de droit. Le , il épouse Odile Hamelin, la fille du fondateur du journal. Ils ont trois enfants : Clotilde, née en [74], Christian, astrophysicien né en 1941, et Valérie, née en 1945.
Avant la guerre, Jacques Chaban-Delmas joue au tennis avec Marie-Antoinette Iôn. Ils se retrouvent à Londres en 1944[75]. Au début de l'année 1945, Jacques déserte le domicile conjugal pour aller retrouver Marie-Antoinette Iôn (qui divorce de François Geoffray, cadre dirigeant chez Renault). Il divorce également et se remarie le avec cette « petite blonde plantureuse aux yeux verts, d'origine belgo-roumaine, toujours très coquette. Outre son élégance un peu convenue, on souligne son bon goût classique, la qualité de ses conseils et la sûreté de son jugement sur les êtres »[76]. Ils ont un fils, Jean-Jacques, né le , marié à Diane de Oliveira-Cezar[77], le , avec qui il a deux enfants, Éléonore et Jacques-Olivier ; divorcé, Jean-Jacques se remarie à Joëlle Loubère, avec laquelle il a Guillaume — qui se présente aux élections municipales de 2020 à Bordeaux sur la liste du maire LR sortant, Nicolas Florian[78] —, puis il se marie en troisième noces avec Corinne Bretonneau le . Marie-Antoinette Iôn disparaît dans un accident de voiture le à Urrugne (Pyrénées-Atlantiques)[79].
Jacques Chaban-Delmas, veuf, se remarie le , alors qu'il est Premier ministre, avec Micheline Chavelet (1929-2024), que son ami François Mitterrand lui a présentée[80]. Il est ainsi le beau-frère de André Schmidt, qui est longtemps son collaborateur, et l’oncle par alliance de Philippe Guilhaume, un temps président d’Antenne 2 et de France Régions 3, également son collaborateur à l’Assemblée nationale ; il est aussi le grand-oncle de Virginie Guilhaume[62].
Sports
La carrière sportive de Jacques Chaban-Delmas, sportif de haut niveau, fut mise en avant dans le courant des années 1960 par le biais d'un reportage de l'émission Les Coulisses de l'exploit.
Jacques Chaban-Delmas a été licencié à la section tennis du Racing Club de France dès l'avant-guerre. Il pratiqua le sport à haut niveau, et fut notamment finaliste du double messieurs du championnats de France en 1965 (Le National), vainqueur à Roland-Garros des Internationaux de France vétérans en simple et en double en 1961 (avec Roland Journu), puis en double de 1965 à 1970 (avec Pierre Pellizza). Il a joué en double mixte à Roland-Garros avec Myrtil Dubois en 1956 et a participé à plusieurs tournois français réputés tels que la Coupe Marcel Porée en 1955 et 1959, au championnat de France de tennis en salle en 1961 et la Coupe Albert Canet en 1964. En 1960, il prend part à une rencontre interclub France-Angleterre aux côtés d'Henri Cochet[81]. En 1968, il dispute la première édition Open des Internationaux de France en double avec Henri Pellizza. Il a été classé en première série en double et à la tête de la seconde série en simple dans les années 1960[82].
↑« Chaban » est un des noms qu'il avait adoptés dans la Résistance, et qui s'est ensuite imposé à lui, jusqu'à le faire ensuite ajouter à son état civil.
↑Appelée par certains journalistes Madame Geoffray, du fait de son précédent mariage avec Monsieur Geoffray, cadre supérieur chez Renault. Jacques Chaban-Delmas a de son côté divorcé de sa première femme, Odette Hamelin, avant de se remarier avec Marie Antoinette Îon le .
↑Aphorisme métaphorique célèbre au point d'être répété et d'être devenu un proverbe anonyme. Cf Mirella Conenna, Georges Kleiber, « De la métaphore dans les proverbes », Langue française, no 134, , p. 62.
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يفتقر محتوى هذه المقالة إلى الاستشهاد بمصادر. فضلاً، ساهم في تطوير هذه المقالة من خلال إضافة مصادر موثوق بها. أي معلومات غير موثقة يمكن التشكيك بها وإزالتها. (ديسمبر 2018) 16° خط طول 16 غرب خريطة لجميع الإحداثيات من جوجل خريطة لجميع الإحداثيات من بينغ تصدير جميع الإحداثيات من كي...
Patio del Museo Poldi Pezzoli en Milán, enero de 2007. El Museo Poldi Pezzoli es un museo de origen privado que se encuentra en el centro de Milán, a pocos pasos del Teatro alla Scala, en Via Manzoni 12. El museo expone obras de Sandro Botticelli, Antonio Pollaiolo, Giovanni Bellini, Michelangelo Buonarroti, Filippo Lippi, Andrea Mantegna y Giovanni Battista Tiepolo, entre otros. Historia Nació como colección privada de Gian Giacomo Poldi Pezzoli y de sus predecesores, en particular de la...
Heroic archer-figure of Iranian mythology For other uses, see Arash (disambiguation) and Arash (name). ArashArash the Archer Arash the Archer (Persian: آرش کمانگیر Āraš-e Kamāngīr) is a heroic archer-figure of Iranian mythology. According to Iranian folklore, the boundary between Iran and Turan was set by an arrow launched by Arash, after he put his own life in the arrow's launch. The arrow was traveling for days before finally landing on the other side of the Oxus on the bark o...
2011 Canadian filmGoonTheatrical release posterDirected byMichael DowseWritten by Jay Baruchel Evan Goldberg Produced byHartley Gorenstein Don Carmody David Gross Jesse Shapira André Rouleau Jay Baruchel Ian Dimerman Starring Seann William Scott Jay Baruchel Alison Pill Marc-André Grondin Kim Coates Eugene Levy Liev Schreiber CinematographyBobby ShoreEdited byReginald HarkemaMusic byRamachandra BorcarProductioncompaniesNo Trace CampingCaramel FilmDon Carmody ProductionsInferno Pictures Inc....
Indian film studio Star StudiosLogo used as of May 27, 2022FormerlyFox Star Studios (2008–2022)TypeSubsidiaryIndustryMotion picturesFoundedMarch 2008; 15 years ago (2008-03)HeadquartersMumbai, Maharashtra, IndiaKey peopleBikram Duggal[1]OwnerNews Corporation (2008-2012)21st Century Fox (2013-2018)The Walt Disney Company (2019-present)ParentStar TV (2008-2014) Disney India (2019-present)Websitewww.disneystar.com/about-us/movies/ Star Studios (formerly known as ...
2020 mobile video game 2020 video gameRush RoyaleDeveloper(s)IT TerritoryPublisher(s)My.Games (Netherlands)Platform(s)iOS, AndroidReleaseWW: December 8, 2020Genre(s)Strategy, tower defense, collectible card gameMode(s)Player-vs-player, cooperative Rush Royale is a mobile game that combines elements of tower defense and card game genres. It was developed by the IT Territory studio and published by My.Games.[1] The game was released in December 2020.[2][3] Gameplay This ...
Japanese anime television series Not to be confused with Infinite Stratos. This article needs additional citations for verification. Please help improve this article by adding citations to reliable sources. Unsourced material may be challenged and removed.Find sources: Gunslinger Stratos: The Animation – news · newspapers · books · scholar · JSTOR (May 2017) (Learn how and when to remove this template message) Gunslinger Stratos: The Animationガンス...
American singer (1979–2001) Not to be confused with Aliyah. This article is about the singer. For the album, see Aaliyah (album). For other uses, see Aaliyah (disambiguation). AaliyahAaliyah in 2000BornAaliyah Dana Haughton(1979-01-16)January 16, 1979New York City, USDiedAugust 25, 2001(2001-08-25) (aged 22)Marsh Harbour, Abaco Islands, BahamasCause of deathAirplane crashBurial placeFerncliff Cemetery, Hartsdale, New York, USOther namesBaby GirlEducationDetroit School of Arts...
Questa voce o sezione sull'argomento competizioni calcistiche non è ancora formattata secondo gli standard. Contribuisci a migliorarla secondo le convenzioni di Wikipedia. Segui i suggerimenti del progetto di riferimento. Pro League 2009-2010Jupiler Pro League 2009-2010 Competizione Pro League Sport Calcio Edizione 107ª Organizzatore URBSFA/KBVB Date dal 1º agosto 2009al 9 maggio 2010 Luogo Belgio Partecipanti 16 Risultati Vincitore Anderlecht(30º titolo) Retroces...
The Most ReverendJohn PatersonArchbishop of GlasgowChurchChurch of ScotlandSeeArchdiocese of GlasgowIn office1687–1689PredecessorAlexander CairncrossSuccessorEpiscopacy abolishedOrdersConsecration1674by Robert LeightonPersonal detailsBorn1632ScotlandDied9 December 1708EdinburghPrevious post(s)Bishop of Galloway; Bishop of Edinburgh John Paterson (1632–1708) was the last archbishop of Glasgow in the Church of Scotland. He was the youngest son of John Paterson, bishop of Ross. John...