Durant les années 2000, il enchaîne plusieurs échecs critiques. Il retrouve pourtant Bryan Singer en 2006 pour incarner Lex Luthor dans le blockbuster Superman Returns.
Des accusations de violences sexuelles portées par plusieurs hommes à partir de 2017 atteignent durablement sa carrière : il est évincé de la dernière saison de House of Cards, ainsi que du film Tout l'argent du monde de Ridley Scott, sans par la suite retrouver aucun rôle notable. Spacey, qui a toujours nié ces accusations, est innocenté de tout acte répréhensible par la justice américaine en 2022 puis par la justice britannique en 2023.
Biographie
Enfance et formation
Kevin Spacey Fowler naît à South Orange, dans le New Jersey. Il est le plus jeune d'une famille de trois enfants, nés de Kathleen et Thomas Fowler, respectivement secrétaire et rédacteur technique. Le frère de Kevin, Randall Fowler, affirmera en 2017 avoir été violé par leur père[2]. Leurs missions successives conduisent la famille à se déplacer dans tout le pays. Ils s’établissent finalement dans le sud de la Californie.
Le jeune Kevin mène une existence de trublion ; il brûle la cabane de sa sœur, perchée dans l'arbre du jardin. À la suite de cet incident, il est envoyé à l'Académie militaire de Northridge, à Los Angeles, dont il sera renvoyé après avoir frappé un camarade de classe avec un pneu. Il rejoint l'école secondaire de Chatsworth, située non loin, et devient major de sa promotion[3]. Il y fait ses premières expériences sur scène avec la troupe de théâtre amateur de l'établissement, au sein de laquelle il tient le rôle du capitaine Georg von Trapp dans La Mélodie du bonheur, donnant la réplique à Mare Winningham (Blanche-Neige, Torchwood, Brothers). C'est aussi à l'école secondaire qu'il prend le nom de famille de sa mère, Spacy (qu'il change en « Spacey ») et qui appartenait à son arrière-grand-père gallois, et non selon les rumeurs en hommage à l'acteur Spencer Tracy[4].
Par la suite, il a souvent souligné que c'est à cette période qu'il commença à songer à la comédie et que c'est à force de regarder le Late Late Show qu'il développa sa culture cinématographique. À l'école secondaire, il séchait parfois les cours en compagnie de quelques amis pour aller voir les vieux films que proposait le NuArt Theatre[5] sur Santa Monica Boulevard. Fraîchement diplômé, il hésite néanmoins une dernière fois à s'inscrire au Los Angeles Valley College[6] mais se ravise sur le conseil d'un autre camarade, Val Kilmer, pour se diriger vers New York et intégrer la Juilliard School.
Voulant devenir acteur, il s'initie au stand-up[7] et peaufine ses talents d'imitateur (James Stewart et Johnny Carson sont ses deux grands modèles). De 1979 à 1981, il étudie l'art dramatique tout en se produisant au concours de talents de Bowling Alley[7]. Cependant, pressé de travailler, il quitte le cursus sans diplôme pour rejoindre le Festival Shakespeare.
Débuts au théâtre (1980-1985)
À l'été 1981, Kevin Spacey joue le rôle d'un page dans la pièce Henri IV de Shakespeare aux côtés de Val Kilmer et John Goodman[8]. Ce spectacle est donné dans le cadre du Festival Shakespeare de New York, notamment connu pour avoir donné leur chance à nombre de jeunes acteurs, comme Meryl Streep[9].
En 1984, Mike Nichols monte Hurlyburly[15], la dernière pièce de David Rabe[16], alors l'enfant terrible de Broadway. Nichols appelle le jeune Spacey et le présente à des acteurs de sa trempe : William Hurt, Ron Silver, Harvey Keitel, Judith Ivey et Sigourney Weaver. Avec Hurlyburly, Spacey incarne tour à tour les personnages de Phil, Eddie et Mickey (quatre ans plus tard, au cinéma, il joue à nouveau le rôle de Mickey dans Hollywood Sunrise) avec succès et obtient la reconnaissance de la profession).
En 1988, ses partenaires du Long Voyage vers la nuit, Jack Lemmon et Peter Gallagher, le font entrer dans la distribution d'un téléfilm pour la NBC : Le Meurtre de Mary Phagan. Il enchaîne alors les petits rôles, parfois assez éloignés de son registre habituel, dans diverses productions cinématographiques. Il croise la route d'un autre monstre sacré (après Nicholson) en la personne de Burt Lancaster, qui a récemment joué dans Le Rocher de Gibraltar (1988). Puis Mike Nichols lui confie un petit rôle dans Working Girl (1988) où il rencontre Harrison Ford, Sigourney Weaver et Alec Baldwin.
En 1989, il entame son premier véritable rôle à l'écran dans Pas nous, pas nous, une comédie policière loufoque reposant essentiellement sur le duo comique Richard Pryor/Gene Wilder que le réalisateur, Arthur Hiller, oppose à Kevin Spacey/Joan Severance. Ce dernier duo est d'ailleurs similaire à celui que ces deux acteurs composaient déjà dans Un flic dans la mafia.
Jack Lemmon l'entraîne à nouveau dans une comédie légère : Mon père, où il retrouve Olympia Dukakis, rencontrée sur les tournages d'Un flic dans la mafia et Working Girl. Il revient à la TV en jouant dans Fall from Grace, puis en faisant une courte apparition dans État de force, ce qui lui donne l'occasion d'approcher Andy García et Robert Duvall.
En 1991, John David Coles propose à Kevin Spacey le rôle-titre d'un téléfilm relatant l'histoire et le combat d'une des grandes figures de l'histoire des États-Unis : Clarence Darrow, surnommé l'« avocat des Damnés », pour lequel il prend du poids.
L'année d'après, Glengarry de James Foley le propulse au milieu d'un aréopage d'acteurs de premier plan. C'est à nouveau Jack Lemmon qui l'introduit auprès d'Ed Harris, Alec Baldwin et Al Pacino. Le film (adapté de la pièce de David Mamet) retrace deux jours de la vie de quatre vendeurs immobiliers, acculés par un représentant du siège social qui leur annonce le licenciement prochain de la moitié du bureau. Spacey interprète John Williamson, un fade et mesquin petit chef de bureau, ouvertement méprisé par ses collègues mais dont le rôle dans l'intrigue fait de lui le « catalyseur des événements », selon l'acteur lui-même[19].
Il change à nouveau de registre pour le film d'Alan J. Pakula, Jeux d'adultes, dans lequel il donne la réplique à Kevin Kline. Sans être un grand succès commercial, ce film lui permet de montrer sa capacité à jouer des personnages troubles et inquiétants.
En 1994, Kevin Spacey se lance dans la coproduction de Swimming with Sharks, un film indépendant qui reçoit le prix de la critique au Festival du cinéma américain de Deauville en 1995. Il y incarne un patron tortionnaire, ce qui ajoute à sa réputation d'acteur spécialisé dans les rôles de méchants.
En 1996, Al Pacino entreprend de réaliser un documentaire d'un nouveau genre, sorte de chronique d'une troupe à la poursuite d'un sommet du répertoire dramatique : Richard III, de William Shakespeare. L'ayant déjà joué vingt ans plus tôt sur Broadway, Pacino saisit l'occasion d'avoir enfin l'âge du rôle en plus d'une réputation éclatante pour réunir quelques comédiens connus de lui comme Estelle Parsons, Harris Yulin, Alec Baldwin et Kevin Spacey, mais aussi le chevronné Kevin Conway et la jeune surdouée d'alors, Winona Ryder.
Il revient sur les planches pour jouer dans The Iceman Cometh et une nouvelle fois servir l'un de ses auteurs fétiches : Eugene O'Neill.
En 2003, il réalise Beyond The Sea, un film sur le crooner Bobby Darin dont il interprète le rôle et, en 2005, il participe au film Edison où il retrouve Morgan Freeman, avec aussi Justin Timberlake.
Au théâtre, il devient le nouveau directeur artistique du théâtre de l’Old Vic[20], un des hauts lieux de la scène londonienne qui connut de beaux jours avec Laurence Olivier et John Gielgud, mais qui était menacé de disparition au tournant du troisième millénaire.
Animé d'une passion pour la scène, il fait tout pour rendre son lustre à l'Old Vic. Malgré deux premières saisons assez mitigées, les saisons suivantes sont une réussite : en 2006-2007, outre la pièce d'O'Neill, l'Old Vic présente La Mégère apprivoisée et La Nuit des rois de Shakespeare (interprétés par la jeune compagnie masculine Propeller d'Edward T. Hall), puis The Entertainer (l'Amuseur) de John Osborne, où Robert Lindsay reprend le rôle principal interprété en 1960 par Laurence Olivier. En 2007-2008, outre Speed-the-Plow de David Mamet, l'Old Vic donne une adaptation théâtrale de Tout sur ma mère de Pedro Almodóvar avec Diana Rigg dans le rôle principal, et une reprise de Pygmalion de George Bernard Shaw.
Parallèlement à sa fonction principale de directeur artistique de l'Old Vic, Kevin Spacey donne de nombreuses « master classes » et se fait l'ambassadeur infatigable du théâtre vivant des deux côtés de l'Atlantique.
En , il est nommé professeur d'art dramatique à l'université d'Oxford[23] et commence à enseigner au début de l'année universitaire, en octobre[24].
En 2007 et 2008, il co-produit deux films. Le premier, Las Vegas 21 pour lequel il retrouve pour la troisième fois Kate Bosworth et où il endosse à nouveau un rôle de professeur, le teintant cependant d'une subtile nuance de malignité. Le second, Recount, est un téléfilm diffusé par la chaîne HBO, résolument plus politique puisqu'il relate l'épisode très controversé des élections américaines de 2000[25].
Recount est une œuvre à caractère civique que Sydney Pollack devait réaliser, avant qu'il n'y renonce au profit de Jay Roach (Sydney Pollack meurt d'un cancer le lendemain de la diffusion, le ). Par ce choix, Spacey montre très nettement sinon une orientation pacifiste, du moins une intention de justice, invoquant la complexité de la psyché et des parcours humains au service de moins de violence et de barbarie, ce que des œuvres comme David Gale, et bien plus tôt L'Avocat des damnés explorent déjà.
Durant l'année 2010 sort discrètement la comédie dramatique Casino Jack, un biopic où l'acteur incarne le lobbyiste et homme d'affaires Jack Abramoff.
House of Cards et regain critique (années 2010)
En 2011, au théâtre, il reprend le rôle-titre de Richard III dont il confie la mise en scène à Sam Mendes[26].
Cette année est marquée par la sortie de trois longs-métrages : tout d'abord, il surprend en jouant un patron tyrannique dans la comédie à succès Comment tuer son boss ?, de Seth Gordon. Puis il porte la comédie dramatique indépendante Father of Invention, de Trent Cooper. Le film est un flop. Puis c'est le cinéaste J. C. Chandor qui le dirige dans le thriller financier Margin Call. Les critiques sont excellentes[27].
En 2014, il incarne aussi l'un des principaux antagonistes du jeu vidéo Call of Duty: Advanced Warfare, auquel il prête son apparence et sa voix[31].
L'année 2017 lui permet de renouer avec un rôle dramatique exigeant : il incarne l'antagoniste de la comédie d'action Baby Driver, réalisée par Edgar Wright. Le film lui permet de regagner les faveurs de la critique et du public[32]. Cependant, il retrouve aussi le scénariste de Recount, Danny Strong, pour sa première réalisation, le biopic Rebel in the Rye. Mais les critiques sont très mauvaises et le film passe inaperçu[33].
Scandale et interruption de carrière (2017-2018)
En , dans le contexte de l'affaire Harvey Weinstein et du phénomène #MeToo qui en a résulté, Kevin Spacey fait l'objet de multiples accusations de harcèlement sexuel et d'agressions sexuelles. Le premier accusateur est l'acteur Anthony Rapp qui affirme, le , que Kevin Spacey aurait tenté d'abuser de lui alors qu'il était âgé de quatorze ans et Spacey de vingt-six ans. CNN rapporte par ailleurs que huit employés, actuels et anciens, de la série phare de NetflixHouse of Cards, dont Spacey est la vedette, ont qualifié de « toxique » l'ambiance de travail sur les plateaux de la série en raison du comportement de « prédateur » de l'acteur. Son attitude au théâtre Old Vic est également critiquée par plusieurs témoins[34]. Le , BBC News rapporte qu'une enquête est ouverte par la police britannique[35].
Alors que les accusations s'accumulent, Netflix annonce que Kevin Spacey n'apparaîtra plus dans aucun épisode de House of Cards. La société annule également la sortie du long-métrage Gore, un film sur la vie de l'écrivain Gore Vidal que Kevin Spacey venait de réaliser[36]. Le cinéaste Ridley Scott, qui venait de tourner avec Spacey le film Tout l'argent du monde, choisit de refaire toutes les scènes où devait apparaître le comédien en le remplaçant par Christopher Plummer, un mois avant la sortie du long-métrage au cinéma[37]. L'agent de Kevin Spacey met un terme à sa collaboration avec l'acteur[36].
En , il est visé par une nouvelle enquête pour agressions sexuelles[38].
Dans la foulée, il est révélé dans la série documentaire de Netflix, Jeffrey Epstein : Filthy Rich qu'il était présent à bord du Lolita Express, surnom donné au jet privé de Jeffrey Epstein, accompagné de ce dernier, en 2002[39],[40]. Il entretenait également des relations avec sa femme, la pédocriminelle Ghislaine Maxwell[41],[42],[43].
En , William Little, son principal accusateur, abandonne son action en justice[45] et la défense, le , se prépare à demander l'abandon des charges, puisque le téléphone de la présumée victime qui a été utilisé pour filmer l’agression présumée a disparu alors que la police affirme l'avoir rendu[46]. Averti qu'une manipulation de la preuve pourrait lui valoir des poursuites judiciaires, William Little a invoqué le cinquième amendement de la Constitution des États-Unis[46]. Sa mère reconnaît avoir supprimé des images « embarrassantes », mais souligne ne pas avoir supprimé d'éléments qui soient liés à la présumée agression[46].
Le , les poursuites sont abandonnées du fait de l'indisponibilité du témoin[47].
En , Kevin Spacey est à nouveau accusé d'agression sexuelle par deux hommes qui affirment avoir été agressés sexuellement lorsqu'ils avaient 14 ans[48].
En , l'acteur a été condamné à verser 31 millions de dollars à la société de production à l'origine de la série House of Cards, MRC, qui réclamait des dommages et intérêts en raison des pertes de revenus liés à son évincement de la série[49].
En , il est inculpé d’agressions sexuelles entre et contre trois hommes au Royaume-Uni[50]. En octobre de la même année, l’acteur Anthony Rapp, qui l'accusait de lui avoir fait subir des attouchements à caractère sexuel lorsqu’il était adolescent, est débouté par un tribunal civil de New York. Rapp réclamait à Kevin Spacey 40 millions de dollars de dommages et intérêts[51].
Kevin Spacey est déclaré non coupable d'agressions sexuelles par le tribunal de Londres en [52],[53].
Vie privée
Kevin Spacey a longtemps cultivé la discrétion concernant sa vie privée. Il a déclaré en 1998 : « Moins vous en savez sur moi, plus il est facile de vous convaincre que je suis ce personnage à l'écran. Cela permet au public de venir dans une salle de cinéma et de lui faire croire que je suis cette personne »[54].
La presse lui a prêté des liaisons avec des actrices. Lors de la 72e cérémonie des Oscars, il présente comme sa compagne la scripte Dianne Dreyer, qu'il aurait fréquentée entre 1992 et 2000[55]. À la fin des années 1990, un article du magazine Esquire émet des suppositions sur une possible homosexualité de l'acteur, ce que l'intéressé conteste[56] ; il critique alors des méthodes journalistiques selon lui dignes du maccarthysme[57].
En , après avoir été accusé d'abus sexuel par Anthony Rapp, Kevin Spacey adresse viaTwitter un message à ce dernier : il assure ne pas se souvenir d'un tel épisode, tout en présentant ses excuses s'il a agi ainsi sous l'emprise de l'alcool. Dans le même message, le comédien en profite pour faire son coming out — un secret de polichinelle à Hollywood[58],[59] — en écrivant : « Les personnes qui me sont proches savent que j'ai eu des relations amoureuses avec des hommes et des femmes dans le passé et que je me considère maintenant comme gay. » Il essuie alors de vives critiques de la part de diverses personnalités et de membres de la communauté LGBT qui lui reprochent d'utiliser son coming out pour faire oublier la plainte dont il fait l'objet. L'humoriste lesbienne Wanda Sykes lui reproche ainsi de se « cacher derrière l'arc-en-ciel »[60],[61],[62].
↑(en) « The less you know about me, the easier it is to convince you that I am that character on screen. It allows an audience to come into a movie theatre and believe I am that person. » ; Source : « Kevin Spacey »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur thebiographychannel.co.uk, London Evening Standard, .