Son mandat présidentiel est marqué par la guerre froide et les conséquences du premier choc pétrolier. Gerald Ford intervient moins que ses prédécesseurs dans les affaires du Viêt Nam et signe, en 1975, les accords d'Helsinki dans le cadre de la CSCE, qui favorisent la détente avec l'URSS. Durant son mandat, le Congrès prend une importance croissante dans les affaires internationales, alors que le rôle du président s'amoindrit. En politique intérieure, il prend la décision controversée d'accorder la grâce présidentielle à Richard Nixon après le scandale du Watergate et, sur le plan économique, doit faire face à la récession et à l'inflation. Il échappe par ailleurs à deux tentatives d'assassinat au cours de sa présidence.
Après avoir été investi par le Parti républicain face à Ronald Reagan, il est battu de justesse par le démocrateJimmy Carter lors de l'élection présidentielle de 1976, l'une des plus serrées de l'histoire américaine. Du fait qu'il ait été nommé vice-président par Richard Nixon et non élu en même temps que ce dernier, puis qu'il soit devenu président en remplacement du président démissionnaire et enfin qu'il ait échoué à se faire élire pour un second mandat, Gerald Ford reste à ce jour le seul président des États-Unis à n'avoir jamais été élu ni au poste de président ni à celui de vice-président par le collège électoral[N 1].
Gerald R. Ford est né en 1913 dans la maison familiale du 3202 Woolworth Avenue dans la ville d'Omaha au Nebraska[1]. Ses parents, Dorothy Ayer Gardner et Leslie Lynch King, Sr. le nomment Leslie Lynch King, Jr. ; son père est le fils du banquierCharles Henry King(en) et de Martha Alicia Porter, exerçant la profession de négociant de laine.
Ses parents se séparèrent seize jours après sa naissance car Leslie Lynch King Sr était violent et battait son épouse[2],[3],[4]. James M. Cannon, l'un des membres de l'Administration Ford, écrivit dans une biographie consacrée au président que le couple se sépara après que le père eut menacé de les tuer tous les deux avec un couteau. Gerald Ford lui-même confia plus tard que son père avait frappé sa mère au cours de leur lune de miel parce qu'elle avait souri à un autre homme[5].
Dorothy Gardner s'installa avec son fils d'abord chez sa sœur[N 2] à Oak Park, dans la banlieue de Chicago (Illinois). Puis elle habita à Grand Rapids (Michigan), avec ses parents[N 3]. Le divorce fut prononcé en et Dorothy obtint la garde de son fils. Elle reçut l'aide financière du grand-père paternel de Gerald Ford jusqu'en 1930, juste avant que ce dernier ne décède[6].
Le , elle se remaria avec Gerald Rudolph Ford, un commerçant qui devint le patron de l'entreprise familiale de peinture et de vernis[7].
Leslie fut officieusement rebaptisé Gerald Rudolph Ford Jr[N 4]. Gerald grandit dès lors à Grand Rapids avec trois demi-frères issus de la nouvelle union de sa mère : Thomas Gardner (1918-1995), Richard Addison (1924-2015), James Francis (1927-2001). Gerald a par ailleurs eu trois autres demi-frères et sœurs du second mariage de son père : Marjorie King (1921-1993), Leslie Henry King (1923-1976) et Patricia Jane King (née en 1925). Il ne fit jamais leur connaissance et, pendant son enfance, ignora même leur existence comme celle de son père biologique. Il rencontra néanmoins ce dernier à l'âge de 17 ans dans un restaurant de Grand Rapids. Les deux hommes maintinrent ensuite des contacts sporadiques jusqu'à la mort de Leslie King Sr[4]. Le jeune Gerald Ford ne changea légalement de nom que le en choisissant une orthographe plus conventionnelle (Rudolph)[8].
Scoutisme et sport universitaire
Gerald Ford (dont le visage a été cerclé de rouge) en 1929.
Gerald Ford s'engagea dans le scoutisme et entra dans les Boy Scouts of America ; même après être devenu président, il restait fier d'avoir atteint le « grade » le plus élevé dans cette organisation, celui d’Eagle Scout[9],[10]. Il reste le seul président américain à avoir obtenu cette distinction[11]. Par ailleurs, il reçut des Boy Scouts of America les récompenses de Distinguished Eagle Scout Award en puis de Silver Buffalo Award.
Gerald Ford fréquenta l'école secondaire de Grand Rapids South où il devint le capitaine de son équipe de football américain. En 1930, il fut choisi afin de participer à la Grand Rapids City League et fut rapidement repéré par les sélectionneurs universitaires[12].
Son équipe remporta les deux saisons de 1932 et 1933. Ses performances lui valurent de recevoir des propositions de contrat dans des équipes professionnelles. Durant toute sa vie, il resta attaché à son université et à son équipe de football. Il assista à plusieurs de ses matches et, lors d'un sommet avec l'URSS, voulut être tenu au courant du score de la rencontre entre les universités du Michigan et de l'Ohio[15]. Au cours d'événements officiels, Ford demanda plusieurs fois à l'United States Marine Band de jouer l'hymne de son université (The Victors) à la place de la traditionnelle marche présidentielle (Hail to the Chief)[16],[17]. Il la choisit également afin d'accompagner la procession de ses funérailles au Capitole[18].
Gerald Ford participa au Shriner's East West Crippled Children Game, un match en faveur des enfants handicapés, qui eut lieu à San Francisco le [1]. En 1972, il reçut la médaille d'or de la National Football Foundation[1].
Gerald Ford jouant au football américain dans l'équipe de l'université du Michigan, en 1933.
À l'université du Michigan, Gerald Ford fit partie de la fraternité Delta Kappa Epsilon, où il travailla comme plongeur. En 1935, il obtint son diplôme universitaire[20],[1]. Il préféra décliner le poste d'entraîneur des équipes des Lions de Détroit et des Packers de Green Bay de la National Football League[2]. Il espérait plutôt faire son droit à l'université Yale où il entraîna les équipes de football américain et de boxe[21]. À cause de ces fonctions, son admission à la faculté de droit lui fut refusée. Durant l'été 1937, il étudia à celle de l'université du Michigan[22] avant d'être finalement accepté à Yale au printemps 1938[23], dont il sortit diplômé en 1941[20]. Pendant ses études à Yale, il fit la connaissance de Phyllis Brown, une étudiante dont il tomba amoureux[2]. Il fréquenta un groupe d'étudiants mené par R. Douglas Stuart Jr et signa la pétition en faveur de l'acte de neutralité de 1939. Le document allait dans le même sens que le comité America First qui militait pour que les États-Unis restent en dehors de la Seconde Guerre mondiale[24]. Gerald Ford connut sa première expérience politique en prenant part à la campagne présidentielle de Wendell Willkie pendant l'été 1940.
Gerald Ford rejoignit la réserve de l'United States Navy le . D'abord comme aspirant, puis il intégra l'école d'instructeurs d'Annapolis pour son service actif. Un mois plus tard, il devint instructeur sur la base de Chapel Hill en Caroline du Nord. Il enseigna les rudiments des capacités de navigateur, de l'artillerie et du maniement des armes. Il fut également entraîneur dans les neuf sports proposés sur la base, principalement en natation, boxe et football américain. Il devint lieutenant le [1].
Si le porte-avions sur lequel il fut affecté ne fut pas endommagé par les opérations militaires, il fut victime du typhonCobra les 18 et , ce qui causa la perte de trois destroyers et tua près de 800 hommes d'équipage[1]. Gerald Ford manqua de peu de mourir lui aussi au cours de l'incendie qui s'était déclaré à bord de son porte-avions[28].
L'USS Monterey fut finalement déclaré hors d'usage et se rendit à Ulithi le avant de rejoindre Bremerton (Washington) pour être réparé. Ford fut alors envoyé au département athlétique de l'école aéronavale de Sainte Marie (Athletic Department of the Navy Pre-Flight School) en Californie. Entre la fin et , il entra dans l'équipe du Naval Reserve Training Command, à la Naval Air Station Glenview dans l'Illinois. Puis il fut envoyé au Separation Center de la Naval Station Great Lakes.
Le , il fut promu lieutenant commander[N 5]. Le , il fut placé hors du service actif avec les honneurs[1] et le suivant, le secrétaire à la Marine accepta officiellement son retrait de la réserve de la marine américaine[29].
Le , à l'église épiscopale de Grace à Grand Rapids, Gerald Ford épousa Elizabeth Bloomer Warren[13],[20],[1], ancien mannequin et ancienne danseuse dans la troupe de Martha Graham, divorcée, qui avait été mariée en premières noces à William G. Warren. Le mariage avait été retardé pour ne pas nuire à la campagne de Gerald Ford pour son premier mandat de représentant. Le couple eut ensuite quatre enfants[13] : Michael Gerald Ford (né en 1950), John Gardner Ford (né en 1952), Steven Meigs Ford (né en 1956) et Susan Elizabeth Ford (née en 1957)[31].
Après son retour à Grand Rapids, il entra dans le cabinet d'avocats Butterfield, Keeney and Amberg[2]. Il devint un membre actif du parti républicain et il fut pressé de remplacer Bartel John Jonkman, représentant au Congrès américain pour le 5e district du Michigan, réputé pour son isolationnisme. L'engagement militaire de Gerald Ford dans la Seconde Guerre mondiale fit de lui un partisan de l'interventionnisme, dans le contexte de la guerre froide.
Il participa par ailleurs à deux commissions du Congrès américain, le House Appropriations Committee et le Defense Appropriations Subcommittee. Au début des années 1950, il refusa de se présenter comme sénateur et comme gouverneur du Michigan. Il porta plutôt son ambition sur le poste de président de la Chambre des représentants[33].
Participation à la Commission Warren
En , il fut choisi par le nouveau président américain, Lyndon B. Johnson pour participer à la commission Warren sur l'assassinat de John F. Kennedy le 22 novembre 1963. Il défendit toujours ses conclusions, rendues en , c'est-à-dire que Lee Harvey Oswald avait agi seul[2]. Cependant, à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'assassinat de John F. Kennedy, en , l'ancien président français Valéry Giscard d'Estaing révéla à la radio que Gérald Ford lui avait autrefois confié avoir toujours cru, lui et ses collègues de la commission Warren, à la théorie du complot. « Nous étions sûrs que c'était organisé. Mais nous n'avons pas pu découvrir par qui »[34].
Pour les besoins de l'enquête, Gerald Ford fut chargé de rédiger la biographie d'Oswald[35].
Il a été révélé lors du déclassement de son dossier personnel en 2008 par le FBI que Gerarld Ford avait été l'informateur de J. Edgar Hoover au sein de la Commission Warren, l'informant par le biais du numéro trois du bureau d'enquête fédéral Cartha de Loach des débats internes et des résultats au cours de la progression de l'enquête. J Edgar Hoover avait, en effet, fait disparaitre des éléments d'une affaire de fraude fiscale l'impliquant[36].
Il fut surtout un homme de compromis et se fit beaucoup d'amis dans les deux principaux partis du pays[37],[2]. Cependant, il critiqua à plusieurs reprises la politique du président démocrate Lyndon Johnson, notamment sa gestion de la guerre du Viêt Nam[32] et son programme de « grande société »[2]. Il soutint néanmoins les lois sur les droits civiques en faveur des Afro-Américains. Dans une série de conférences de presse télévisées, il exposa le contre-programme républicain aux côtés du sénateur de l'IllinoisEverett Dirksen. Elles furent ironiquement surnommées par les journalistes « The Ev and Jerry Show »[N 6],[38].
Sa vice-présidence de huit mois[2] fut marquée par le scandale du Watergate. Le , le Chef de cabinet de la Maison-BlancheAlexander Haig lui fit savoir que des preuves avaient été trouvées montrant l'implication de Nixon dans les écoutes. Gerald Ford fut un ardent défenseur de Nixon et il prononça de nombreux discours pour défendre la politique du président en considérant que l'affaire du Watergate ne fut qu'un épisode malencontreux[41].
Prestation de serment de Gerald Ford le comme 38e président américain devant le juge Warren Earl Burger et Mme Betty Ford.
Richard Nixon démissionna à la suite du scandale du Watergate, le . Le vice-président de celui-ci, Spiro Agnew, avait été contraint de démissionner, 8 mois auparavant, pour des faits de fraudes fiscales[42], Ford le remplaça et prêta officiellement serment le [43],[32] devant le juge en chef des États-Unis. Il prononça alors la formule devenue célèbre « Notre long cauchemar national est fini » (Our long national nightmare is over). La présidence de Gerald Ford dura au total vingt-neuf mois (895 jours[43]) jusqu'au .
Ayant accédé à la vice-présidence par nomination du président Richard Nixon (pour remplacer le vice-président démissionnaire Spiro Agnew), Gerald Ford fut ainsi le seul président des États-Unis à avoir occupé la Maison-Blanche sans avoir été élu par le collège électoral[45],[N 7].
Gerald Ford annonçant sa décision de gracier Nixon ().
La première action officielle du président Ford, très controversée, fut de gracier Richard Nixon le (Proclamation 4311)[54],[55],[56],[57],[43], ce qui eut pour effet de stopper toute procédure. Lors d'un discours télévisé, il mit en avant la situation médicale de l'ex-président et son désir de réconcilier tous les Américains pour motiver sa décision[54],[58].
La grâce présidentielle souleva de nombreuses réactions : son ami et attaché de presse Jerald terHorst décida de démissionner et la cote de popularité du président s'effondra dans les sondages[51]. Ford décida également d'amnistier sous conditions les déserteurs et les « planqués » de la guerre du Viêt Nam[54]. Nixon, avocat, fut cependant radié du barreau de l'État de New York en 1976[59]. Quant aux enregistrements qui avaient suscité d'interminables batailles juridiques, le président Ford en donna le contrôle à Nixon, qui fut le seul habilité à donner les autorisations pour leur consultation[60].
À la suite du scandale du Watergate, le Parti démocrate renforça sa présence à la Chambre des représentants et au Sénat aux élections de mi-mandat de 1974 (les démocrates enlevèrent quarante-sept sièges aux Républicains dans les deux chambres[51]) et atteint la majorité qualifiée des 2/3 pour passer outre au véto présidentiel. Le pouvoir législatif fut un terrain de lutte entre le président et le Congrès, Ford mettant son veto aux propositions démocrates. Il usa de ce pouvoir trente-neuf fois pendant les quatorze premiers mois de sa présidence[13] et fut le président républicain qui a le plus utilisé son droit de veto[61]. Étant donné que les démocrates représentaient alors plus des deux-tiers de la Chambre des représentants, ils purent à de nombreuses reprises outrepasser le veto présidentiel[62]. Les démocrates étaient également majoritaires au Sénat (60 sièges sur 100)[63].
Économie et affaires intérieures
L'économie fut l'une des grandes préoccupations de l'administration de Ford. À l'époque, l'inflation atteignait environ 7 %[64], un taux suffisant pour décourager les investissements aux États-Unis et pour freiner les investissements directs à l'étranger. En réponse à la hausse des prix qu'il pensait être causée par la surconsommation[65], le président déclara l'inflation « ennemi public numéro un » devant le Congrès le .
Adresse à la nation par Ford au Congrès le , devant le vice-président Nelson Rockefeller et le président de la Chambre, Carl Albert.
Il demanda au peuple américain de « donner un coup de torchon (ou essuyer) le plus vite possible sur l'inflation » (« Whip Inflation Now ») ; les initiales de l'expression américaine donnaient l'acronyme « WIN » qui signifie « gagner » en anglais[66]. Il recommanda même aux Américains, dans une partie de son programme, de limiter leurs dépenses[65] et de porter des badges « WIN » (produits à douze millions d'exemplaires[51]). La majorité les considéra comme un gadget qui n'offrait pas de solutions réelles pour résoudre le problème[67]. Certains les tournèrent en ridicule en les portant à l'envers : les lettres « NIM » signifiaient pour eux « No Immediate Miracles », « Nonstop Inflation Merry-go-round » ou encore « Need Immediate Money ». Gerald Ford mit en place également un comité WIN de 22 citoyens (Whip Inflation Now committee).
La focalisation sur l'économie évolua quand le pays entra dans une récession modeste. Le taux de chômage s'éleva de 6,5 % en novembre 1974 à 9,1 % en 1976[51]. Ford s'opposa au Congrès démocrate qui souhaitait augmenter les dépenses de l'État fédéral[52]. En mars 1975, il signa avec le Congrès des dégrèvements d'impôts afin de relancer l'économie (Tax Reduction Act). Il tenta de convaincre les parlementaires de lever le contrôle des prix du pétrole américain décidé par Nixon et qui contribua au choc pétrolier de 1973[68] ; mais il n'obtint pas gain de cause avant (Omnibus Energy bill prévoyant une baisse des prix du pétrole américain et la levée temporaire du contrôle des prix[51]). Au moment de la cessation de paiements de la municipalité de New York en , le maire Abraham Beame ne réussit pas à obtenir l'aide de l'État fédéral[51]. La une du Daily News titra le « Ford à la ville : Crevez ! » (Ford to City: Drop Dead)[69]. Ford changea finalement d'avis à la fin de l'année, ce qui permit d'écarter le risque de faillite[69],[51].
Ford fut également confronté à une épidémie de grippe porcine en 1976 qui fit vingt-cinq morts aux États-Unis. Face au risque de pandémie, l'Administration américaine lança un vaste programme de vaccination[70].
Dans le domaine de l'éducation, le président signa l’Education for All Handicapped Children Act en 1975 : la loi prévoyait un enseignement spécial pour les enfants handicapés aux États-Unis. Il fut également un ferme soutien de l’Equal Rights Amendment, voté par le Congrès en 1972, un texte réaffirmant l'égalité de tous les Américains. Il décréta le « jour de l'égalité des femmes » (Women's Equality Day). Cependant, il refusa d'intervenir dans le problème du busing à Boston en 1974[47], alors qu'il était favorable à la mixité raciale dans les écoles[51].
La vie politique américaine au milieu des années 1970 fut marquée par les tentatives du Congrès de renforcer son contrôle sur la Présidence et sur les activités de la CIA[71]. Ford mit en place la Rockefeller Commission[71].
Ford et Léonid Brejnev signant l'accord de Vladivostok sur le traité SALT.Mao Zedong, Gerald Ford et Henry Kissinger (2 décembre 1975).Gerald Ford pendant l'incident du Mayagüez (14 mai 1975).
L'armée américaine se retira totalement du Viêt Nam sous la présidence de Richard Nixon en 1973 après plusieurs années de guerre. À la fin de l'année 1974, Ford obtint du Congrès une aide de 700 millions de dollars pour le Viêt Nam[46]. En 1975, les troupes du Nord-Viêt Nam envahirent le Sud. Le président ordonna le départ des civils américains (opération Frequent Wind) : au total, 100 000 réfugiés s'installèrent aux États-Unis[1]. Saïgon tomba aux mains du Nord Viêt Nam et du Viet Cong le .
Il participa à la séance inaugurale du G7 qui remplaçait le G5 et se déclara favorable au règlement international des crises diplomatiques[77].
Dans ses mémoires, Gerald Ford confessa qu'il fut alors très préoccupé par la dégradation de la situation au Moyen-Orient et en Indochine[78]. Ainsi, il dut affronter une crise internationale lors de l'incident du Mayagüez. En mai 1975, un peu après la prise du pouvoir par les Khmers rouges au Cambodge, ces derniers s'emparèrent d'un navire marchand américain, le Mayagüez, dans les eaux internationales du golfe de Thaïlande[1]. Ford envoya, sans consulter le Congrès[52], des Marines pour sauver l'équipage que l'on crut retenu sur l'île de Koh Tang mais les soldats rencontrèrent une résistance inattendue ; pendant l'opération, les marins du Mayagüez qui avaient été relâchés, furent récupérés par les forces américaines. Durant les combats de Koh Tang, quinze Américains furent tués et cinquante furent blessés, les pertes khmères étant estimées à une soixantaine sur un total de trois cents combattants[79]. Le président américain demanda une aide financière de 222 millions de dollars pour le Cambodge, qui fut repoussée par le Congrès[80]. Il renouvela sa demande pour le Sud Viêt Nam et essuya un nouveau refus de la part des représentants[80]. Mais six mois plus tard l'administration Ford aida l'Indonésie à envahir et annexer le le Timor oriental, colonie portugaise qui avait clamé quelques semaines plus tôt son indépendance. Cet appui militaire républicain à la politique répressive indonésienne fut poursuivi par son successeur démocrate Jimmy Carter[81].
En Asie occidentale, l'invasion de Chypre par la Turquie provoqua de fortes tensions à l'intérieur de l'OTAN[N 9]. Le , un coup d'État, soutenu par les colonels grecs, entraîna des violences entre les communautés grecque et turque de l'île. Les événements aboutirent à la partition de Chypre et au retrait de la Grèce du commandement intégré de l'OTAN. À la mi-septembre, le Congrès vota le retrait du soutien militaire américain à la Turquie. Le président mit son veto à cette décision. L'autre enjeu dans la diplomatie de Washington fut le conflit israélo-arabe : les États-Unis refusèrent de conclure de nouveaux accords militaires avec Israël entre mars et . Le , les autorités américaines signèrent l'accord sur le Sinaï en vue de renforcer les relations avec l'Égypte et Israël[82].
Pendant la présidence de Gerald Ford, le Congrès s'attaqua à la CIA dont le rôle dans le scandale du Watergate et dans la surveillance de 10 000 citoyens américains fut mis au jour[46],[83]. À la fin de l'année 1975, son directeur William Colby fut renvoyé. Les activités de l'agence furent soumises au contrôle de commissions permanentes de la présidence et du Congrès[84]. Ce dernier et l'Administration Ford s'affrontèrent également sur l'implication de la CIA en Angola.
Sur le continent américain, Ford fut critiqué pour son manque de fermeté face à l'extension des guérillas communistes en Amérique centrale[85] au Nicaragua, au Salvador et au Guatemala. Le , sur demande insistante des pays latino-américains, il accepta de faire lever à l'égard de Cuba l'embargo économique et diplomatique voté par l'O.E.A. en sur demande du président Kennedy. Ce geste s'adressait également au monde communiste où il avait fait quelques semaines plus tôt une tournée (Pologne, Roumanie, Yougoslavie, rencontre en Finlande avec Brejnev) et avec lequel il négociait la libre circulation des personnes et des idées. Le Panama souhaitant reprendre le contrôle de la zone du canal, des négociations furent entamées entre le gouvernement américain et les autorités panaméennes. Mais ce fut le successeur de Gerald Ford qui signa les traités Torrijos-Carter. En Amérique du Sud, il continue de soutenir le régime de Pinochet au Chili et en Argentine appuie le coup d'État du 24 mars 1976, qui renverse la présidente Isabel Martínez de Perón[86]. Ce soutien sans faille à ces dictatures a un effet contre-productif pour son image peu avant l'élection, comme pour la sécurité des États-Unis où s'étend l'opération Condor. Un opposant chilien au général Pinochet, Orlando Letelier, est assassiné à Washington le .
Alors qu'il était en déplacement à Sacramento en Californie le , Lynette Fromme, une adepte de la secte de Charles Manson, pointa son arme sur Gerald Ford ; mais Larry Buendorf[88], l'agent du Secret Service chargé de sa protection, empêche le coup de partir. Fromme est arrêtée et condamnée à la prison à vie ; elle purgera trente-quatre ans de prison avant d'être placée en liberté conditionnelle le .
Le , Sara Jane Moore essaye également de tuer le président à San Francisco, mais sa tentative est déjouée par un spectateur nommé Oliver Sipple. Elle fut condamnée à la prison à perpétuité[89],[90].
Carte électorale de 1976 (les États remportés par Ford sont en rouge)
Après les primaires démocrates, remportées par Jimmy Carter, les sondages donnent Gerald Ford largement défait, Gallup le créditant de 29 % contre 62 % pour son adversaire démocrate. Les primaires républicaines de 1976 sont très disputées. Finalement, lors de la Convention républicaine de Kansas City, Gerald Ford est choisi comme candidat à l'élection présidentielle contre Ronald Reagan[91].
Dick Cheney dirige la campagne de Gerald Ford aux côtés de James Baker. Le président sortant parvient peu à peu à combler son retard et est considéré comme vainqueur du premier débat face à Jimmy Carter. Mais une gaffe commise lors du deuxième débat, lors duquel il affirme que l'Europe de l'Est n'est pas dominée par l'Union soviétique[92], stoppe sa remontée. Sa campagne est aussi handicapée par les dissensions au sein de son propre parti, où certains soutenaient la candidature de Ronald Reagan, et par une campagne agressive du candidat démocrate, Jimmy Carter. Mais selon l'avis des spécialistes, ses plus gros handicaps sont le pardon accordé à Nixon en 1974 et la persistance des problèmes économiques[54].
Le , il obtient 48,02 % des suffrages et 240 grands électeurs contre 50,08 % et 297 grands électeurs à Jimmy Carter[20]. L'élection est tellement serrée qu'il faut attendre le lendemain de l'élection pour connaitre le vainqueur. Ford arrive en tête dans la majorité des États américains, 27 sur 50, ce qui fait de lui le candidat battu ayant remporté le plus d'États lors d'une élection présidentielle américaine. Il emporte notamment tous les États de l'Ouest (dont la Californie) et la majorité de ceux du Midwest et de la région des Grands Lacs. Jimmy Carter doit son élection aux États sudistes, à l'État de New York et aux États de la ceinture industrielle du Nord-Est (Ohio, Pennsylvanie).
Gerald Ford reste relativement actif après son départ de la Maison-Blanche. Il donne des conférences universitaires[93] et fait plusieurs apparitions à l'occasion d'événements et de diverses cérémonies. En 1977, il accorde une interview au journaliste du New York Times James M. Naughton. En 1979, il publie son autobiographie intitulée A Time to Heal[1]. Il est sollicité par l'Administration Carter pour donner son avis sur les relations internationales et les affaires intérieures. Il est par ailleurs invité à plusieurs reprises pour déjeuner à la Maison-Blanche à chaque fois qu'il se rend à Washington. Ces liens amicaux se renforcent après la fin du mandat de Carter notamment lorsque les deux hommes vont ensemble aux funérailles du président égyptienAnouar el-Sadate en 1981[94]. Jusqu'à la mort de Gerald Ford, Jimmy Carter et son épouse Rosalynn lui rendent de nombreuses visites[95]. En 2001, les deux anciens présidents américains travaillèrent ensemble pour la National Commission on Federal Election Reform[93]. Ford est également membre du Conseil pour l'excellence dans la gouvernance. Ronald Reagan pense un temps à en faire son vice-président, mais les négociations échouent finalement à la Convention nationale républicaine et Reagan choisit George H. W. Bush pour cette fonction[96].
En 2001, on lui remet le Profile in Courage Award pour sa décision de gracier Richard Nixon après le scandale du Watergate[99]. Pendant sa retraite, Ford consacre beaucoup de temps à sa passion du golf et joue notamment dans des compétitions publiques avec son ami, l'acteur Bob Hope.
En , Ford rompt avec les conservateurs du Parti républicain en défendant l'égalité pour les couples gays et lesbiens. Il s'engage en faveur d'un amendement fédéral pour interdire la discrimination contre les homosexuels dans le travail[100]. Il entra dans la Republican Unity Coalition pour faire avancer les droits des homosexuels[101].
Le , le gouverneur républicain de l'État de New YorkGeorge Pataki nomme Ford et les autres ex-présidents (Carter, George H. W. Bush et Bill Clinton) membres honoraires du conseil pour la reconstruction du World Trade Center. Dans un entretien avec Bob Woodward du Washington Post en , Ford critique la décision prise par George W. Bush d'attaquer l'Irak. Les propos de l'ancien président ne seront néanmoins rendus publics qu'après sa mort, comme il l'avait souhaité[102],[103].
George W. Bush en compagnie de Gerald et Betty Ford, le .Exposition du cercueil de Gerald Ford au Capitole
La santé de Gerald Ford décline au début des années 2000, alors qu'il approche de ses 90 ans. Lors de la convention républicaine de 2000, il est victime de deux accidents vasculaires cérébraux et effectue un séjour à l'hôpital universitaire d'Hahnemann (Philadelphie)[104],[105]. L'ancien président américain est hospitalisé le , pour traiter une pneumonie, au Centre médical Eisenhower, près de son domicile de Rancho Mirage, dans le sud de la Californie[106] ; il en sort le 25 janvier suivant. La dernière apparition publique de Gerald Ford a lieu le , lorsque le président George W. Bush lui rend visite chez lui.
Gerald Ford meurt à l'âge de 93 ans, chez lui, d'une crise cardiaque, le , à 18 h 45 heure du Pacifique (le 27 décembre, 2 h 45 UTC), entouré de son épouse et de ses trois fils ; sa fille Susan était quant à elle repartie le jour de Noël à Albuquerque. Michael, le fils aîné qui était pasteur, administra l'onction des malades à son père[110]. Dans la soirée, Betty annonce la mort de son mari et le corps de celui-ci est transporté au Centre médical Eisenhower le .
La tombe de Gerald et Betty Ford avec l'épitaphe « Des vies au service de Dieu, du Pays et de l'Amour ». Une autre inscription, à l'opposé de la tombe, porte des versets bibliques (Proverbes, 3:5-6) qu'il prononça lors de son inauguration[111],[112].
Malgré son passé athlétique, Ford avait la réputation d'être maladroit. Les bêtisiers le montraient en train de se cogner la tête sur la porte d'Air Force One lors de sa visite en Autriche[51]. Cette image fut reprise par des émissions de télévision comme le Saturday Night Live, qui le caricaturaient comme une personne incapable de marcher sans casser quelque chose en tombant. Les journalistes reprenaient la remarque de Lyndon Johnson, selon laquelle son opposant aurait trop joué au football sans casque[51]. Ce dernier le décrivait également comme quelqu'un qui était incapable de faire deux choses en même temps comme marcher et mâcher un chewing-gum[115]. Beaucoup de partisans de Ford dénoncent cette image, estimant qu'il n'était pas plus maladroit que quiconque.
Pendant sa carrière politique, Ford avait la réputation d'un homme ouvert et intègre[13],[43],[16].
Gérald Ford était franc-maçon[116].
La Grande Loge du Michigan rend hommage à Gerald Ford, dernier président des États-Unis franc-maçon[117].
Héritage et hommages
Comme pour d'autres présidents américains, le nom de Gerald Ford a été donné à plusieurs lieux et constructions aux États-Unis : une autoroute du Nebraska et du Michigan (Gerald R. Ford Freeway), deux États importants dans sa vie. Plusieurs infrastructures du Michigan honorent sa mémoire : un aéroport (1999) et un musée à Grand Rapids, une bibliothèque et un établissement d'enseignement supérieur à Ann Arbor[118].
Des images d’archives de Gerald Ford sont présentes dans plusieurs films. La tentative d’assassinat de Ford est en partie visible dans le film Forrest Gump (1994). Ce sujet est également traité dans le film Network : Main basse sur la télévision (1976)[122]. Gerald Ford apparaît dans le film Le Procès de Henry Kissinger (2002) qui traite du procès de son secrétaire d'État Henry Kissinger ainsi que dans le film Nixon, qui raconte l’histoire de son prédécesseur au poste de président[122].
(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Gerald Ford » (voir la liste des auteurs).
Notes
↑Theodore Roosevelt, qui avait été élu vice-président pour son premier mandat de transition de président, qui débuta en septembre 1901, fut élu comme président le . Il en fut de même pour Calvin Coolidge (août 1923 - novembre 1924), Harry Truman (avril 1945 - novembre 1948) et Lyndon B. Johnson (novembre 1963 - novembre 1964) : en effet, tous furent élus à l’issue de leur mandat de transition.
D'autres présidents, comme Andrew Johnson (1865-1869) et Chester A. Arthur (1881-1885), qui succédèrent respectivement aux présidents assassinés Abraham Lincoln et James A. Garfield, ont été considérés comme « élus en tant que vice-présidents ». Mais, ils ne furent ensuite pas élus présidents.
↑La sœur de Dorothy Gardner, donc la tante de Gerald Ford, s'appelait Tannisse et son mari Clarence Haskins James.
↑Jusqu’à son changement officiel de nom en 1935, Leslie Lynch King Jr. est demeuré le nom officiel de l'enfant, son beau-père Gerald Rudolff Ford n'ayant jamais adopté officiellement le fils de Dorothy Gardner.
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La version du 25 janvier 2010 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.