On retient de lui l'image d'un pape de bonne foi, qui manquait toutefois d'audace et d'esprit de décision, autant par tempérament qu'en raison d'une santé déclinante[2], et qui permit l’abrogation de l'ordre du Temple lors du Concile de Vienne, en se soumettant au roi Philippe le Bel.
Après un court pontificat, la mort de Benoît XI en fit ouvrir le conclave de Pérouse et laissa éclater les dissensions du Sacré Collège entre cardinaux bonifaciens et anti-bonifaciens[3]. Les discussions durèrent jusqu’au mois de , et les cardinaux se mirent d'accord pour choisir un pontife hors de leurs rangs, qui n'aurait pas été mêlé aux problèmes de la politique bonifacienne[4]. Ainsi, le désignèrent-ils l’archevêque de Bordeaux, dont le nom fut choisi par Napoléon Orsini, parmi trois prélats choisis hors du Sacré Collège[5].
Différents récits se contredisent sur le déroulement de l'élection. Selon le récit du chroniqueur Giovanni Villani[6], le parti italien du Sacré Collège, bonifacien, devait nommer trois évêques de France, et le parti français choisir celui des trois qu'il préférerait. Mis au courant de la liste, Philippe le Bel alla trouver Bertrand de Got pour s'accorder avec lui, en échange de son élection au trône pontifical. Selon Villani, ils se seraient rencontrés en forêt près de Saint-Jean-d'Angély et le roi de France aurait fait promettre l'archevêque de réaliser six actions dès lors qu'il débuterait son pontificat : révoquer les actions de Boniface VIII à son encontre, redonner aux Colonna leur honneur et dignité, ou encore accorder à la France les décimes du Clergé pour une durée de cinq ans[7]. Cependant, cette rencontre n'a pu être vérifiée et serait contredite par plusieurs chroniques prouvant que les deux hommes ne se trouvaient pas à Saint-Jean-d'Angély à cette date. D'après Ferretto de Vicente, les habitants de Pérouse, las de voir les cardinaux préférer leurs maisons personnelles au palais pontifical et à son conclave, les poussèrent à se réunir à nouveau au palais, les y enfermèrent, et les privèrent du toit et des vivres tant qu'ils ne se seraient pas accordés[7]. Un troisième récit fait intervenir Robert d’Anjou à la tête de « trois cents cavaliers aragonais armés et d’une multitude d’Almogavres qui ne l’étaient pas moins »[réf. nécessaire]. Impressionnés par tant de lances, les cardinaux français et italiens qui étaient représentés à égalité dans le conclave s’empressèrent de se mettre d’accord sur une seule chose : choisir un pontife hors de leurs rangs. Selon Jean Favier, enfin, la nomination de Bertrand de Got est à la fois désirée par le roi de France et considérée comme acceptable par Francesco Caetani, neveu de Boniface VIII et chef de file de son parti depuis la sortie du conclave de Matteo Rosso, malade, qui s'opposait à un candidat extérieur au Sacré Collège. Napoléon Orsini, allié des Colonna, convainc Caetani de favoriser de Got, et de rallier son parti à cette candidature[8].
Le nouveau pape choisit de régner sous le nom de Clément, le cinquième, le [9].
Son refus de rejoindre Rome
Bertrand de Got aurait voulu se faire couronner à Vienne (Dauphiné) comme son lointain prédécesseur Gui de Bourgogne qui en fut l’archevêque de 1083 à 1110 et qui régna, jusqu’en 1124, sous le nom de Calixte II. Mais Philippe le Bel préféra Lyon et le nouveau pape obtempéra. Dans un froid glacial[10], Clément V se dirigeait vers la vallée du Rhône, puis remonta vers Lyon pour son couronnement. La cérémonie déploya ses fastes devant le roi de France, en la basilique Saint-Just, le dimanche .
C'est alors que se produisit un événement qui devait coûter la vie au duc de BretagneJean II, venu à Lyon pour le sacre du papeClément V afin de régler ses différends avec l'épiscopat breton. Au retour de l'église Saint-Just, alors que le duc tenait la bride de la mule pontificale, un mur sur lequel une foule de spectateurs s'était placée s'effondra, renversa le souverain pontife et ensevelit Jean II : on l'en retira mourant, il expira quatre jours plus tard, entre le 16 et le .
Peu décidé à se rendre à Rome où régnait le marasme le plus total (les troupes pontificales étant en guerre contre Venise pour le contrôle de Ferrare), il semblerait que la prime intention de Clément V fut de passer son pontificat à Bordeaux. Rome au XIIIe siècle n'était pas encore la capitale politique et administrative de l'Église, la cour pontificale étant itinérante[N 1], mais elle gardait la prééminence car elle conservait les reliques des apôtres Pierre et Paul. Entre février et mars, il séjourna à Cluny, Nevers et Bourges avant de rejoindre son ancien archevêché, traînant d’abbayes en diocèses de France et nommant des cardinaux à sa dévotion[N 2].
Quand il s'approcha de Bordeaux les Gascons tout au long du chemin le saluaient et l'acclamaient. Il trouva une ville en liesse lors de son arrivée en juillet 1306. Cela entraîna la prise de mesures de sécurité et de ravitaillement par le sénéchal d'Aquitaine. Le , le pape quitta son ancienne ville épiscopale et, en chemin, passa à Villandraut où il était né et dont il était le seigneur.
Clément V fut d'abord le pape du procès de l'ordre du Temple. Philippe le Bel, le , lui avait fait parvenir les aveux de hauts dignitaires templiers. En Guyenne, le pape, malade, malgré ces premiers aveux et la promesse royale de lui remettre tous les coupables, manquait d’enthousiasme[11]. Cela était insupportable à Guillaume de Nogaret. Le garde des Sceaux pensa avoir trouvé la parade en faisant prononcer par Pierre Dubois, avocat de Coutances, une diatribe en place publique « contre ceux qui refusaient de faire manger le pain du roi » aux chevaliers du Temple[N 3].
Cette affaire est notamment évoquée dans la suite romanesque Les Rois maudits.
Le pape s'installe près d'Avignon dans le Comtat Venaissin
Troublé par la tournure des événements et pour tenter d’amadouer le roi de France, Clément V décida de s’installer provisoirement en pays plus neutre que la Guyenne anglaise[12]. Il choisit le Comtat Venaissin, fief pontifical. Le Comtat Venaissin avait été cédé, en 1229 selon les termes du traité de Paris, par Raymond VII de Toulouse à la papauté. Rome en prit officiellement possession quelques décennies plus tard, en 1274, après la mort d’Alphonse de Poitiers et de son épouse, Jeanne de Toulouse, fille du comte Raymond.
Malgré les positions favorables à son égard du comte de Provence et du Dauphin du Viennois, Clément V n’avait pas pris en compte que la pression française sur ses fiefs de la rive gauche du Rhône devenait de plus en plus prégnante. Au bas de Villeneuve-lès-Avignon elle était matérialisée par la tour Philippe le Bel, véritable donjon contrôlant le pont Saint-Bénézet[14],[15]. Elle venait d’être achevée en 1307 après quinze ans de travaux. Quant au pont, qui reliait Avignon (terre d’Empire) à Villeneuve-lès-Avignon (royaume de France), il avait été construit entre 1177 et 1184. Cet ouvrage mesurait neuf cent quinze mètres de long, avait vingt-deux piles et de nombreuses arches de bois. Personne ne se doutait à cet instant que sept pontifes allaient se succéder dans cette ville pendant près de soixante-dix ans.
Clément V temporisait tant qu’en définitive le concile au cours duquel le premier pape du Comtat devait condamner les Templiers ne fut convoqué qu’en 1311 et ceci sur ferme injonction du roi de France. Le Souverain Pontife quitta sa résidence de Notre-Dame du Groseau[16], près de Malaucène, le pour rejoindre Vienne.
En Provence qui jouxtait Avignon et le Comtat Venaissin, ni Charles II ni son successeur Robert d’Anjou ne cédèrent de bonne grâce les commanderies templières aux Hospitaliers. Certaines d’entre elles étaient encore en possession du comte de Provence en 1319.
La mort de Clément V
Dans le Comtat Venaissin Clément V tomba malade, sans doute atteint d'un cancer de l'intestin. Ses « physiciens » (médecins), pour tenter d’apaiser ses douleurs, lui faisaient ingurgiter des émeraudes pilées. Rongé par la maladie, il publia le les décrétales du concile et quitta sa retraite de Monteux, avec l’espoir de rejoindre Villandraut, le fief de sa famille près de Langon. Le pape atteignit les rives du Rhône le pour s’éteindre, quinze jours plus tard le à Roquemaure (rue Louis Chambon anciennement rue des avocats) dans la demeure du chevalier Guillaume de Ricavi qui l’avait hébergé.
La dépouille de Clément V fut ramenée à Carpentras pour des hommages solennels. Durant la veillée funèbre, un cierge renversé mit le feu au catafalque et carbonisa le mollet du pontife défunt[réf. nécessaire],[17].
Son transfert en Aquitaine
Le , le Sacré Collège arriva à Carpentras pour élire un nouveau pape. On sait que le jeune Pétrarque assista au défilé préalable au conclave qui réunissait vingt-trois cardinaux dont quinze cisalpins et huit transalpins. Les luttes de tendances entre Italiens, Gascons et Français furent telles que deux longs mois passèrent sans qu’un accord fût possible pour trouver un successeur à Clément V.
Sous prétexte de donner une vraie sépulture au pontife défunt le , le conclave fut attaqué aux cris de « Patria Venaissini[18] ! Mort aux Italiens ! Nous voulons un pape ! ».
Les responsables de ce coup de force étaient Bertrand de Got, seigneur de Monteux et Raymond Guilhem de Budos, recteur du Comtat, neveux de Clément V. Ils pillèrent la ville, incendièrent nombre de demeures et surtout emportèrent avec eux le trésor de guerre de leur oncle, un million de florins destinés à la croisade. Affolés, les cardinaux s’égaillèrent comme des moineaux.
À la fin du mois d’, ses restes furent transférés à Uzeste, dans la collégiale comme il en avait exprimé le souhait dans son codicille du . Dante Alighieri, qui ne l’aimait pas, le plaça en son Enfer tout en le traitant, pour sa servilité face au roi de France, de pasteur sans principe capable des œuvres les plus basses.
Les faits marquants de son pontificat
Couronnement de Clément V à Lyon.
Héthoum de Korikos remettant à Clément V un exemplaire de La Flor des Estoires d'Orient.
Clément V transportant le reliquaire de saint Bertrand Fresque de la cathédrale de Saint-Bertrand-de-Comminges.
Cardinaux ayant participé au conclave de Pérouse et qui élurent Clément V
Niccolò Alberti di Prato, évêque d’Ostie et Velletri, doyen du Sacré Collège,
Giovanni Minio, évêque de Porto et Sainte-Rufine, sous-doyen du Sacré Collège,
Giovanni Boccamazza (ou Boccamiti), évêque de Frascati,
Teodorico Ranieri de Orvieto, évêque de Palestrina,
Se trouvaient dans l’impossibilité de participer les cardinaux déposés par Boniface VIII :
Giacomo Colonna
Pietro Colonna.
Les trois consistoires
Le , à Lyon, le nouveau pontife désigne ses premiers cardinaux. Il remet leurs chapeaux à cinq de ses neveux : Bérenger Frédol le Vieux, Arnaud Frangier de Chanteloup, Arnaud de Pellegrue, Raymond de Got et Guillaume Ruffat de Fargues. Sont aussi de la promotion : Pierre de La Chapelle-Taillefert, Pierre Arnaud, Thomas Jorz, dit Anglicus, confesseur d’Édouard II, Nicolas Caignet de Fréauville, confesseur de Philippe le Bel et Étienne de Suisy, vice-chancelier du roi de France.
Le , il procède à sa seconde nomination de cardinaux. Ils sont au nombre de cinq : Arnaud de Faugères (ou Falguières), Bertrand des Bordes, Arnaud Nouvel, Raymond-Guilhem de Fargues, son neveu, et Bernard Jarre (ou Garve) de Sainte-Livrade, son parent.
Le , pour la troisième fois, il désigne ses cardinaux. Entrent dans le Sacré et Antique Collège : Guillaume de Mandagout, Arnaud d’Aux de Lescout, Jacques Arnaud Duèze, le futur Jean XXII, Béranger Frédol le Jeune, petit-cousin du pape, Michel de Bec-Crespin, Guillaume-Pierre Gaudin, Vital du Four et Raymond Pierre.
Clément V est passé dans l'histoire pour avoir ordonné la suppression (sous la pression de Philippe le Bel) de l'ordre du Temple et pour avoir, en 1309, installé le Saint-Siège à Avignon. Or, ce dernier point est une erreur largement répandue : en effet, sous Clément V la curie était itinérante. Le premier pape qui fixa la curie à Avignon fut en fait son successeur Jean XXII qui, avant d'être pape, fut évêque de la ville (voir la liste des évêques et archevêques d'Avignon).
Famille et népotisme
Clément V est resté célèbre pour avoir couvert de bienfaits, d'honneurs, de charges juteuses et autres faveurs, sa famille[19],[20] proche ou plus éloignée, des amis de confiance, ou des compatriotes aquitains. Par exemple[21],[22] :
Béraud de Goth († dès 1305) : son gendre (ou beau-frère) Reginald/Renaud vicomte de Bruniquel, mari de sa fille (ou sœur) Brayda de Got , fut vicaire pontifical à Ferrare
Reine de Got avait épousé Sansaniers de Pins, un parent de Raimond de Pins – nonce en Angleterre - et de Jean de Pins, chanoine de Bazas
Marquise/Marquèse de Gout avait marié Arnaud de Durfort, d'où Reine/Régine de Durfort ci-dessous ; la dernière sœur de Marquise, autre Reine de Goth, était la femme de Bernard de Durfort de Flamarens : ils étaient des parents de Gaillard de Durfort, chanoine de Saintes et d'Agen, archidiacre d'Orléans et de Tours
Indie de Goth, dame de Veyrines, était la femme d'Amanieu/Armaudin/Amauvin IIIde Varesio alias de Barès, sire de Montferrand à St-Louis et Bassens : parents de Bertrand Ier de Montferrand (marié à Reine de Durfort ci-dessus), lui-même père de Bertrand II et grand-père de Bertrand III de Montferrand
sa sœur Vidal/Vitale/Gailharde de Got, femme d'Arnaud-Bernard Ier de Préchac (Préchacet Preyssac à Daignac), soudan de la Trau : d'où - Arnaud-Bernard II, aussi sire d'Uzeste, un ancêtre d'Isabelle de Préchac — la femme de Bertrand III de Montferrand ci-dessus — sans doute le même qu'Arnaud-Bernard de Préchac recteur de Massa Trabaria, Urbino et Città di Castello ; - Gaillard de Préchac, évêque de Toulouse en 1305 mais déchu par Jean XXII car impliqué dans le complot d'Hugues Géraud, oncle semble-t-il d'un autre Gaillard de Préchac chanoine d'Evreux, Bordeaux, Poitiers, Tours et Comminges ; - et peut-être aussi un autre Arnaud-Bernard de Préchac assimilé à Arnaud-Buard abbé de Saint-Maixent ?
Portrait de Clément V dans la cathédrale de saint-Bertrand-de-Comminges.
Camée à l'effigie de Clément V.
Portrait de Clément V, XIXe siècle.
Gravure de Clément V, XVIe siècle.
Représentation de Clément V
Il ne reste que deux statues le représentant : l'une a la tête mutilée et est située sur son tombeau à Uzeste, et l'autre à Bordeaux[23].
Giambattista Tiepolo a peint vers 1735, un retable pour la chapelle du palais de Nymphenburg, à l'extérieur de Munich. Il est aujourd'hui conservé à l'Alte Pinakothek[24]. Une esquisse se trouve à National Gallery de Londres[25]. Clément s'agenouille au premier plan, une vision de la Trinité au-dessus de lui. Dieu le Père et le Christ, qui porte un linceul et tient la croix, sont assis sur un nuage ; la colombe du Saint-Esprit plane en dessous.
Bibliographie
Chroniques contemporaines
G. de. Nangis, Chronique latine de Guillaume de Nangis de 1113 à 1300 avec les continuations de cette chronique de 1300 à 1368, t. I et II, Société de l’Histoire de France, Paris, 1843.
Études générales
É. Baluze, Vitæ paparum Avenionensium, sive collectio actorum veterum, vol. I et II. Paris, 1693.
Tessier, Histoire des souverains pontifes qui ont siégé dans Avignon, Avignon, 1774.
Abbé André, Histoire de la monarchie pontificale au XIVe siècle ou la Papauté à Avignon, Paris, 1845.
J. B. Christophe, Histoire de la papauté pendant le XIVe siècle avec des notes et des pièces justificatives, t. I et II, Paris, 1853.
J. B. Joudou, Histoire des souverains pontifes qui ont siégé à Avignon, Avignon, t. I et II, 1855.
Guillaume Mollat, Les papes d’Avignon 1305-1378, Letouzey & Ané, Paris, 1949, neuvième édition, 598 p.
Y. Renouard, La papauté à Avignon, Paris, 1954.
É. G. Léonard, Les angevins de Naples, Presses Universitaires de France, Paris, 1954, 576 p.
B. Guillemain, La cour pontificale d’Avignon (1309 – 1376). Étude d’une société, Paris, 1962.
D. Paladilhe, Les papes en Avignon, Paris, 1975.
R. L. Mouliérac-Lamoureux, Le comtat Venaissin pontifical, 1229-1791, Publications de l’institut vauclusien d’études rhodaniennes, Vedène, 1977.
B. Guillemain, Les papes d’Avignon (1309 – 1376), Paris, 1998.
Florian Mazel, La noblesse et l’église en Provence, fin Xe- début XIVe siècle, Comité des travaux historiques et scientifiques, Paris, 2002.
Jean Favier, Les papes d’Avignon, Fayard, Paris, 2006, 826 p.
Yannick Boutot, Le pape Clément V en son château bordelais, Gunten, 2018, 110 p. (ISBN9782366821659)
Études particulières
Edgard Boutaric, Clément V, Philippe le Bel et les Templiers, Éd. Victor Palmé, Paris, édition de 1874 et 1910.
↑Comme il savait que sa grandeur et sa gloire seraient fortifiées par ses libéralités, et pour faire face aux luttes des factions italiennes, le nouveau pontife voulut un Sacré Collège à sa dévotion. Comme l’a expliqué J. Heers : « Le pape, aussitôt proclamé, songe inévitablement à s’imposer, à asseoir son autorité, à se réserver des revenus suffisants pour ne pas décevoir ses partisans et même accroître sa clientèle, à s’entourer d’un important groupe de fidèles. Le seul véritable appui se trouve dans la famille, dans le clan, les amis, les parents proches ou lointains que le souverain pontife, dispensateur de nombreux bénéfices, peut rassembler autour de lui, assurant leur fortune, les comblant d’avantages de toutes sortes, les plaçant aux postes de confiance et de décision ».
↑C'est-à-dire de les remettre au roi de France pour les faire emprisonner. L’avocat de Coutances conclut son virulent pamphlet en clouant au pilori « Les indécis [qui] sont les nerfs des testicules du Liévathan » ! Ce Pierre Dubois avait d’ailleurs des idées très avancées sur son temps. Quelques mois auparavant, il avait publié un projet de paix perpétuelle intitulé « De Recuperatione Terræ Sanctæ » sous-titré « Traité de politique générale ». Il y préconisait l’union des princes chrétiens contre les infidèles et proposait de « forcer à vivre en Orient » les ordres templier et hospitalier en suggérant au roi que leurs commanderies et prieurés fussent utilisés sur place pour installer « des écoles pour les garçons et les filles adoptés par l’œuvre des croisades, où les arts mécaniques, l’astronomie et les langues orientales seraient simultanément enseignés ». Il décéda après 1321. Ses positions laïques et progressistes déchaînèrent la haine et le firent encore qualifier, au xixe siècle, de « Richelieu au petit pied » ou de « Robespierre en puissance ».
Références
↑Brun, Guillaume Curé d'Uzeste, Uzeste et Clément V : notes d'Histoire et d'archéologie, Bordeaux, Cadoret, , 159 p. (lire en ligne).
↑Georges Bordonove, La tragédie des Templiers, Éditions Tallandier, 2011.
↑Alain Pujol, Clément V, le pape maudit, Éd. Vivisques, , p. 196.
↑Bertrand de Got, illustre canoniste, avait été évêque d’Agen, de Langres et de Comminges avant de devenir archevêque de Bordeaux, où il était vassal du roi d’Angleterre mais sujet du roi de France.
↑Toutes les chroniques de l’époque ont décrit l’hiver de 1305 comme fort rigoureux. Pour se réchauffer, le pontife se fit suivre par vingt tonneaux de vin nouveau de Bordeaux, donnés par le roi d’Angleterre.
↑À Beaucaire, trois commandeurs mis à la torture — moyen infaillible de connaître la vérité — avaient avoué que, dans un chapitre tenu à Montpellier, avait été exposée une « tête » et que, aussitôt, le diable était apparu sous la forme d’un chat. Tandis que ce greffier parlait avec bonté aux participants, ceux-ci l’avaient adoré puis étaient venus des démons sous la forme de femmes et chaque frère avait eu la sienne ! Geoffroy de Gonneville, précepteur d’Aquitaine, révéla que ces pratiques s’étaient répandues dans l’ordre sous l’influence de Maître Roncelin. Guy de la Tour, frère du Dauphin d’Auvergne, expliqua que ce Roncelin, un noble natif de Fos, avait été, à partir de 1265, maître de l’ordre à Orange et, depuis 1281, maître de la milice en Provence. À la fin du XVIIIe siècle, en fouillant les Archives apostoliques du Vatican, l’évêque Munther de Zélande affirma avoir découvert un manuscrit qui indiquait : « Ici commence le livre du baptême du feu ou statuts secrets donnés aux Frères par le Maître Roncelinus ». D’après ce prélat une partie de ce document était chiffré et portait en exergue : « Ici commencent les signes secrets que Maître Roncelinus a réunis ». Malheureusement seul le prélat hollandais a fait état de ces textes qui sont restés toujours introuvables dans la Bibliothèque apostolique vaticane.
↑Jacques Mercier, Vingt siècles d'histoire du Vatican. De Saint-Pierre à Jean-Paul II, Lavauzelle, , p. 208.
↑Nicolas Faucherre & Bernard Sournia, « Rapport d'opérations archéologiques (décapage, prospection à la parcelle, observations sur le bâti) à la tour Philippe le Bel de Villeneuve-lès-Avignon (30) », Pavage, 7-9 déc. 2012 (lire en ligne, consulté le ).
↑Clément V nommait sa résidence du Groseau, au pied du Ventoux, « le jardin de mes délices ».
↑étude de la tiare de Clément V dans Mémoires de L'Institut royal de France, Académie des inscriptions et belles-lettres par l'Académie des inscriptions & belles-lettres (France), 1833.