Le lycée Saint-Louis-de-Gonzague (parfois abrégé en SLG) est un établissement d'enseignement privécatholique sous contrat d'association avec l'État, communément appelé « Franklin » en référence à la rue où il est situé, dans le 16e arrondissement de Paris. Fondé en 1894, il est placé sous la tutelle des Jésuites et assure un enseignement allant de la maternelle aux classes préparatoires. Réputé pour son excellence académique, il est régulièrement classé comme meilleur lycée de France pour ses résultats au baccalauréat.
Localisation
L'établissement, implanté dans le 16e arrondissement de Paris, est réparti sur deux sites, distants d'environ 500 mètres :
Sa localisation géographique et son excellence académique font que le lycée est essentiellement fréquenté par des enfants de familles « bourgeoises et aristocratiques de l'Ouest parisien »[4],[5]. La sociologie de Saint-Louis-de-Gonzague a été notamment étudiée par le sociologue Jean-Pierre Faguer[6]. L'établissement est également mentionné par Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot dans leur travail sur la bourgeoisie et la reproduction des élites[7].
Au-delà de son appellation officielle, l'établissement est connu sous le nom de « Franklin » en raison de sa localisation rue Franklin (devenue la rue Benjamin-Franklin en 1988)[3],[8].
Chronologie
XIXe siècle
Le lycée Saint-Louis-de-Gonzague est fondé par les jésuites en 1894 sous le nom de « Petit Externat du Trocadéro ». Il s'installe au no 10 de la rue Franklin, dans des locaux jusqu'alors occupés par l'école Saint-Charles-d'Iéna[9], établissement rattaché au collège des Chartreux de Lyon. Trois collèges jésuites déjà implantés à Paris s'associent pour cette acquisition. Le nouvel établissement doit « servir d'avant-poste au collège Saint-Ignace de la rue de Madrid » en accueillant des enfants de la dixième à la sixième[10],[11].
Le Petit Externat est inauguré le , alors que l'Ouest parisien s'urbanise peu à peu. Il est initialement dirigé par le père Barbier, recteur du collège de la rue de Madrid. À la rentrée 1895, le collège compte 75 élèves ; en trois ans, les effectifs passent à 220 élèves[2].
Dernier ouvert des établissements jésuites de la capitale, il reste le seul après la fermeture des collèges des rues de Madrid et de Vaugirard. Il s'agrandit progressivement grâce à des opérations immobilières menées dans le voisinage immédiat et à l'ouverture de classes de niveaux supérieurs[2].
L'établissement a alors pour voisin Georges Clemenceau[12], qui habite au no 8 de la rue Franklin à partir de 1896, et dont l'appartement deviendra le musée Clemenceau après sa mort[13].
XXe siècle
Bien qu'affecté par les politiques d'expulsion des congrégations religieuses au début du XXe siècle, Franklin poursuit son développement et ouvre tout de même des classes sans autorisation. En 1920, l'établissement compte 885 élèves. La même année, une association amicale regroupant les anciens élèves est créée[2].
En 1923, Franklin subit la menace d'une mise en vente consécutive aux différents procès perdus depuis les lois anticléricales. Sous l'autorité du nouveau recteur, le père de La Chapelle, les bâtiments sont rachetés par la Société immobilière de Passy, détenue par les jésuites[2].
À l'initiative de son directeur, le père François Berlier de Vauplane, l'établissement est reconstruit entre 1933 et 1935 par l'architecte Henri Viollet[13]. Au sein de ce nouvel ensemble de style Art déco[14], se trouve notamment une chapelle de 1 300 places[15] réalisée en béton armé, dont le chœur est décoré d'une fresque représentant les principaux épisodes de la vie de saint Louis de Gonzague. Œuvre d'Henri de Maistre, directeur des Ateliers d'art sacré, cette fresque est inscrite en 1993 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques[16]. En 1935, à l'inauguration de la chapelle, huit plaques de marbre sont apposées en mémoire des anciens élèves morts pour la France lors de la Première Guerre mondiale ; sont également gravés les noms d'anciens élèves du collège jésuite de la rue de Madrid, entre-temps fermé[17].
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le père Arlot puis le père Datin assurent la gestion de l'établissement. Durant cette période, les effectifs sont fluctuants, les cours sont assurés dans les caves de la rue Franklin ou de la rue Le Tasse, et un internat est ouvert au château de Baville. En 1942, le père Datin acquiert une propriété rue Louis-David pour y ouvrir le « petit collège » (école primaire, équivalent d’un « petit lycée »). À la fin de la guerre, en 1945, Franklin compte 1 100 élèves[2].
Après-guerre, Franklin se laïcise progressivement, avec une diminution du nombre de religieux dans l'équipe éducative : alors qu'en 1956 on compte 24 pères pour 66 professeurs laïcs, il n'y a plus que 9 pères pour 86 professeurs en 1978. En 1969, un laïc est pour la première fois nommé préfet du collège[2].
L'établissement se féminise aussi peu à peu. En 1968, une femme, Mlle de Follin, est nommée directrice du petit collège. En 1980, Franklin s'ouvre à la mixité pour les élèves. En 1990, Françoise Bouissou devient la première femme à diriger l'établissement[2]. Les promotions du lycée deviennent mixtes à partir de 1992[18].
Les classes préparatoires ECE voient le jour sous la direction du père Célier en 1986[2], et dans les années 1990, de nombreux travaux sont effectués au petit et grand collèges pour répondre à un accroissement des effectifs[2].
XXIe siècle
Depuis 2012[2], sous la direction de Laurent Poupart, de nouveaux travaux sont menés pour rénover et agrandir l'établissement. En particulier, un nouveau bâtiment de 1 600 m2 est construit pour les classes préparatoires[19] et ouvre en septembre 2016[2]. L'ancien bâtiment, rénové, accueille à partir de septembre 2017 le centre Laennec, institution jésuite indépendante du lycée et ses étudiants en médecine, jusqu'alors situé rue d'Assas. Ce rapprochement vise à créer « un pôle éducatif et pédagogique jésuite » à Paris[20].
En 2021, sont engagés des travaux de rénovation de la chapelle confiés aux architectes Jean-Marie Duthilleul et Benoît Ferré ainsi qu'à l'artiste Patrick Rimoux[21], et partiellement financés par la Fondation du patrimoine[22],[23]. La chapelle rénovée est le cadre d'une messe de dédicace de son nouvel autel, rassemblant huit cent personnes le 22 mars 2022[24].
Le bâtiment « Madrid », situé rue Benjamin-Franklin, accueille les élèves du collège.
Le bâtiment « Vauplane », situé avenue de Camoëns, est perpendiculaire au bâtiment « Madrid » et accueille les élèves du lycée. Au premier étage, on distingue les vitraux de la chapelle.
Le nouveau bâtiment « Loyola » pour les classes préparatoires (ici vu depuis le boulevard Delessert) est inauguré en 2016.
Curiosités
Les bâtiments du grand collège sont construits sur d'anciennes carrières en piliers maçonnés, les carrières de Chaillot, autrefois utilisées comme champignonnières[25].
L'une des cours de récréation du grand collège est située sur les toits, offrant une vue directe sur la tour Eiffel[26]. Elle sert aussi de terrain de sport.
En 1960, le général de Gaulle demande personnellement à adhérer à l'association des anciens élèves de Franklin, sans pourtant jamais avoir été élève de l'établissement. En effet, la fermeture du collège jésuite de la rue de Vaugirard, où Charles de Gaulle a été élève de 1901 à 1906, a conduit à la fusion de l'association des anciens élèves avec celle de Franklin[27].
Organisation
Statut
Saint-Louis-de-Gonzague est un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association avec l'État. Son fonctionnement est assuré par l'Association Saint Louis de Gonzague (ASLG), composée d'enseignants, de pères jésuites et de parents d'élèves. Une association distincte, l'Association immobilière de Passy (AIP), est propriétaire des locaux. Ces deux entités sont contrôlées par la Compagnie de Jésus au travers de l'association Ignace de Loyola Éducation, qui coordonne la gestion des établissements jésuites en France[28].
La direction générale de l'établissement est assurée par Jérôme Wideman depuis 2024[29] et anciennement par Laurent Poupart (2011-2024)[19].
Le primaire, appelé « petit collège » ou « petit Franklin », compte quatre classes de maternelle (dont deux de douzième) et quinze classes d'élémentaire (trois par niveau). Par ailleurs, depuis 2013, une classe de maternelle adaptée aux troubles envahissants du développement, dite « classe Soleil », scolarise six enfants autistes âgés de 3 à 6 ans, avec un accompagnateur par enfant[1],[3],[31]. Financée par la fondation Jes-Franklin, la fondation Perce-Neige et des familles, elle est issue d'un partenariat avec l'hôpital Robert-Debré[32]. Le petit collège a son propre directeur, actuellement Françoise Llanos[1].
Le collège compte 24 classes (six par niveau) pour environ 700 élèves[33]. Chaque niveau est dirigé par un préfet des études, équivalent d'un conseiller principal d'éducation.
Le lycée compte quinze classes (cinq par niveau) pour environ 500 élèves[34]. Le préfet des études des classes de seconde est le même que celui des classes de troisième. En première et en terminale, la direction se fait par filière : un préfet pour la filière scientifique (S), un autre pour la filière économique et sociale (ES)[Note 1].
La pédagogie de l'établissement repose sur le Magis, nom latin qui désigne la recherche de l'excellence dans la tradition ignacienne. Cela se traduit par de fortes exigences académiques, mais aussi par une forte incitation au développement personnel et au service envers les autres[3]. Cette pédagogie est résumée dans la devise de l'école : « Des hommes et des femmes avec et pour les autres ».
Sur le plan académique, l'accent est notamment mis sur l'apprentissage des langues vivantes. Dans ce cadre, Franklin propose des échanges internationaux au travers de 22 jumelages avec des établissements étrangers[35].
En classe de première, les élèves doivent participer à un projet d'action sociale (« PAS ») auprès d'associations partenaires, où ils s'investissent dans le soutien scolaire, l'alphabétisation de réfugiés ou l'aide aux personnes handicapées[35].
Résultats académiques
Dès le début du XXe siècle, le lycée Saint-Louis-de-Gonzague est remarqué pour son excellence académique. Au début du XXIe siècle, il figure régulièrement parmi les meilleurs établissements de France pour ses résultats aux examens et concours.
Brevet des collèges
Le collège obtient parmi les meilleurs résultats de France à l'examen du diplôme national du brevet. En 2015, 99 % des élèves obtiennent une mention, permettant ainsi à Saint-Louis-de-Gonzague de se classer 1er du département de Paris au palmarès des collèges[42]. En 2018, 86 % des élèves obtiennent une mention « très bien » au brevet, avec un taux de mentions global identique à 2015[43].
En 1909, le journal catholique L'Univers, qui consacre un encart « Succès scolaires » à l'établissement, note que le pourcentage des élèves de Franklin admis au baccalauréat« dépasse du double la moyenne [nationale] »[46].
Depuis 2006, le lycée obtient toujours plus de 95 % de mentions à cet examen[47]. Le Figaro attribue ces résultats à la « forte tradition d’exigence » de l'établissement[48].
En 2016, le lycée Saint-Louis-de-Gonzague enregistre un taux record de mentions « très bien » au baccalauréat : 91,9 % pour la filière S et 89,2 % pour la filière ES, soit une moyenne de 90,7 %, avec un taux global de mentions de 100 %[49]. Ces résultats en font le meilleur lycée de France au baccalauréat[50].
En 2017, Franklin est, avec Stanislas, le seul lycée de France à obtenir 100 % de mentions au baccalauréat[51]. L'établissement obtient également 80 % de mentions « très bien »[52], ce qui en fait le meilleur lycée de France selon ce critère, en filière S (88 %) comme ES (67 %)[53].
En 2018, il est le seul lycée de France à obtenir 100 % de mentions au baccalauréat[54]. Il est par ailleurs classé premier lycée de France en proportion de mentions « très bien » (83 %) et figure en première place (ex æquo) du classement des meilleurs lycées de France établi par L'Express[48],[55].
En 2015, Franklin est la CPGE ayant envoyé le plus d'élèves à HEC Paris, en valeur absolue, depuis 2010, pour la filière ECE du concours d'entrée en première année[61].
En 2020, L'Étudiant classe Saint-Louis-de-Gonzague 5e sur 103 pour le taux d'élèves de filière ECE ayant intégré le « top 3 » (HEC Paris, ESSEC, ESCP)[62]. La même année, pour la seule intégration d'HEC Paris, Le Figaro place Franklin en 3e position après Daniélou et IPESUP, précisant qu'à eux trois, ces établissements « ont fourni à la grande école parisienne 41 % de ses nouveaux effectifs passés par la voie ECE »[63].
Classement des CPGE Saint-Louis-de-Gonzague par L'Étudiant (2020)
Michel Poniatowski (1922-2002), ministre de l’Intérieur, ministre de la Santé, député européen, sénateur, député, prince de la maison Poniatowski – promotion 1940
Luc Chatel (né en 1964), ministre de l'Éducation nationale, député – promotion 1982
Bruno Le Maire (né en 1969), ministre de l'Économie et des Finances, ministre de l'Agriculture, secrétaire d'État, député – promotion 1986
Jean Messiha (né en 1970), haut-fonctionnaire et homme politique
Guillaume Kasbarian (né en 1987), ministre de la Fonction publique, ministre délégué chargé du Logement, député
Médecin
Paul Milliez (1912-1994), professeur de médecine, résistant — promotion 1930
En 2016, un ancien élève, Jean-Pierre Martin-Vallasse, scolarisé dans l'établissement jésuite au cours des années 1950 et 1960, déclare publiquement avoir été victime à l'âge de huit ans des agissements pédophiles du prêtre Gilbert Lamande lors d'une colonie de vacances organisée par le lycée. À partir de 2010, il recueille plusieurs témoignages édifiants et réclame une enquête au père Jean-Yves Grenet, responsable des Jésuites de France, obtenant une fin de non-recevoir[66].
Jean-Pierre Martin-Vallasse rapporte : « Le Provincial a répondu : “J'estime que quarante ans après ces faits, ces enfants doivent avoir trouvé un équilibre de vie satisfaisant, qu'il n'y a pas lieu de les perturber. De plus, ce prêtre étant mort, il n'y a aucun intérêt à faire une enquête”. »
En 2014, il sollicite le Vatican et obtient la création d'un « groupe d'accueil et de veille pour les situations d'abus sur les personnes »[67]. Dans le contexte de l'affaire Barbarin, la décision de Jean-Yves Grenet évolue en se déclarant plus apte à l'écoute mais il n'engage pas d'enquête interne[68].
Notes et références
Notes
↑Cette organisation est modifiée par l'entrée en vigueur de la réforme du baccalauréat de 2018, qui supprime les filières générales au lycée.
Références
↑ ab et c« École », sur franklinparis.com (consulté le ).
↑« École Saint-Charles-d'Iéna », dans Henry Vuibert, Annuaire de la jeunesse pour l'année 1890, Paris, Librairie Nony & Cie, (lire en ligne sur Gallica).
↑Société française d'études mariales, Marie et la Fin des temps : III. Approche historico-théologique, Paris, (lire en ligne sur Gallica), p. 28 (note de bas de page).
↑« Un Clémenceau intime », Le Courrier de La Rochelle, no 87, , p. 1 (lire en ligne sur Gallica).
↑Institut technique du bâtiment et des travaux publics, « La construction d'un collège moderne », Le Génie civil : revue générale des industries françaises et étrangères, no 2790, , p. 120 (lire en ligne sur Gallica).
↑Alain Clément et Gilles Thomas, Atlas du Paris souterrain : la doublure sombre de la Ville lumière, Parigramme, , p. 61.
↑Agnès Verlet, Le Bouclier d'Alexandre, La Différence, (lire en ligne) :
« En passant, on entend les cris des élèves qui sont en classe et qui jouent à la récréation, dans la cour qui est sur le toit, tout en haut du collège des jésuites de la rue Franklin […]. La cour est tellement surélevée que, pour que personne ne tombe ou envoie son ballon dans la rue, il y a un grand toit en barres métalliques et un immense filet de métal au-dessus de la terrasse qui sert de cour et qui est tout en haut de l’immeuble, plus haute que tout Paris sauf la Tour Eiffel. »
« Sous la conduite du chef de chœur Roger Thirot, Les Petits Chanteurs de Chaillot enregistrent des disques, religieux et profanes. Et font des tournées. En France, en Europe et aux États-Unis. Les jeunes de Franklin se produisent même devant le pape Jean-Paul II et une foule immense au parc des Princes en juin 1980 ! »