Un carillon est un instrument de musique composé de cloches, accordées à des fréquences différentes et émettant chacune leur son propre. Pour des carillons de grande taille, les battants des cloches sont actionnés par le carillonneur au moyen d'un clavier manuel et éventuellement d'un pédalier. D'autres sortes de carillon proches du carillon tubulaire et du chimes appelés carillons éoliens et semblables à des mobiles, tels que le fūrinjaponais ou le tintinnabulum de la Rome antique, sont généralement composés de multiples tubes en bois ou métal suspendus qui produisent du son en s'entrechoquant à cause de la force du vent.
Le mot carillon est une forme altérée de l'ancien français, issue du gallo-roman *QUADRINIONE, elle-même altération du bas latin quaternio, désignant un « groupe de quatre ». Un carillon comporte donc un ensemble d'au moins quatre cloches consonantes entre elles. Dans un carillon, les cloches restent immobiles, et c'est un marteau (ou battant) qui vient les frapper.
Cloches
La Fédération mondiale du carillon ne prend en compte que les carillons d'au moins 23 cloches (c'est-à-dire une étendue de deux octaves), mus par claviers manuels à bâtons. Cependant, en France la dénomination "carillon" peut être employée pour des instruments ayant au moins 4 cloches ("quadrillon").
Dans beaucoup de régions de France et en Suisse, on rencontre des carillons de taille plus modeste (3 à 22 cloches) dont le carillonneur ne joue pas forcément sur un clavier. Ce dernier actionne alors les battants des cloches directement en tirant sur leurs cordes. Pour certains carillons, le joueur saisit alors simplement les cordes à la main comme on peut le voir dans le tableau Les Sonneurs d'Alexandre-Gabriel Decamps[1].
Dans d'autres cas, il les accroche à ses coudes, ses genoux et ses pieds et en manipule deux autres à la main, puis, assis sur un banc, il carillonne par de grands gestes coordonnés (usage répandu également dans les églises orthodoxes). Il existe tout de même des carillons de taille modeste, mais étant confectionnés comme les instruments de 23 cloches et plus, avec clavier, pédalier, etc.
L'art du carillon est un art flamand dans un sens large, englobant le nord de la France, la Belgique et les Pays-Bas. Son apogée a été atteinte au XVIIe siècle. Malheureusement, la Révolution a eu des conséquences désastreuses sur le patrimoine campanaire, tout comme toutes les guerres précédentes. Avant 1788, on pouvait dénombrer 6 carillons à Cambrai, 8 à Lille et 11 à Valenciennes. Le décret de la Convention du 6 février 1793, ordonnant la fonte des cloches pour la fabrication de canons, a scellé le destin de presque tous les anciens carillons[2].
Ces traditions de sonner manuellement sur petits carillons tendent à disparaître, du fait de l'électrification des cloches et du remplacement des sonneurs par des programmateurs électroniques. Nous pouvons cependant remarquer une tendance à remettre ces instruments au goût du jour en restaurant les petits ensembles campanaires manuels, particulièrement dans le sud de la France.
Les carillonneurs possèdent une technique similaire à celle des organistes, car ils jouent aussi bien avec leurs mains qu'avec leurs pieds. Le clavier de carillon le plus ancien dont on a connaissance est celui d'Audenaarde, datant de 1510. Bien que la plupart des carillonneurs aient été remplacés par des systèmes automatisés, il y avait encore en 2001 16 carillonneurs dans le Nord de la France[2].
Localisation
Le plus grand carillon à clavier en France est celui de Chambéry (Château des Ducs de Savoie) qui comporte 70 cloches. Le plus grand carillon du monde se trouve au monastère de Mafra au Portugal avec 120 cloches. Le pays qui possède le plus grand nombre de carillons à clavier d'au moins 23 cloches sont les Pays-Bas, avec 189 instruments. La France possède 63 instruments d'au moins 23 cloches.
En France, les plus grands carillons sont en général placés dans les clochers des églises et les beffrois communaux. Sur tout le territoire de l'Occitanie, les carillons sont très nombreux mais de taille plus réduite : généralement une à deux octaves.
Il existe 11 carillons de plus de 23 cloches au Canada[5].
Metropolitan United Church à Toronto (Ontario) : 23 cloches en 1922, 35 cloches en 1960, 54 cloches en 1971 (le plus ancien carillon d'Amérique du Nord) ;
Norfolk War Memorial, Simcoe (Ontario) : 23 cloches en 1925 ;
St. George's Anglican Church, Guelph (Ontario): 23 cloches en 1926, 35 cloches en 2006 ;
Université de Toronto : 23 cloches en 1927, 42 cloches en 1952, 51 cloches en 1975 ;
The Netherlands Centennial Carillon, Victoria (Colombie-Britannique) : 49 cloches en 1967, 62 cloches en 1971 (le plus grand carillon du Canada) ;
Exhibition Place, Toronto : 50 cloches en 1974.
Suisse
En Suisse, il y a 6 carillons à clavier mécanique de plus de 23 cloches, dont 5 en Suisse Romande (à côté des dates, on trouvera le nom du fondeur des cloches):
Saint-Maurice, Abbaye, 49 cloches (sol#2, do#3, ré#3 - do#7; 2 Dreffet 1818, 1 Rüetschi 1947, 1 Paccard 2010, 45 Eijsbouts 2003), pour un poids total d'environ 14 tonnes de bronze, ce qui en fait le plus grand instrument de Suisse, inauguré le ;
En plus de leur répertoire propre, les carillons de cloches ont inspiré plusieurs musiciens à travers les époques. Tant au clavecin, à l'orgue, au piano qu'à l'orchestre, les compositeurs ont tenté de suggérer ou d'évoquer les sonorités des carillons dans des œuvres pittoresques. Quelques exemples :
William Byrd : The Bells, Fitzwilliam Virginal Book LXIX.
L-R Aram, sous la direction de Laurent PIE, Chants des cloches, voix de la terre, Carillons et traditions en Languedoc-Roussillon, Max Chaleil Éditeur. s.d.
H. Garnier Les carillons de France, Dijon 1985.
J. Goguet Le carillon des origines à nos jours, Paris, 1958.
E. Sutter, Ressources documentaires concernant les cloches, clochettes et carillons, Paris, [SFC], 3e édition, 1996.