C’est le soir de cette victoire que René Lévesque proclame au centre Paul-Sauvé de Montréal, devant ses partisans, la phrase devenue célèbre : « Je n’ai jamais pensé que je pourrais être aussi fier d’être Québécois ».
Malgré leur confortable majorité parlementaire, les choses ne vont pas très bien pour les libéraux. Les débats sur la langue (loi 22) font rage, plusieurs grèves touchent différents secteurs de l'économie, le chantier de la baie James est saccagé lors d'un conflit inter-syndical, et le coût des Jeux olympiques de Montréal augmente en flèche.
Le Parti québécois adopte en 1974 une résolution selon laquelle la souveraineté du Québec serait décidée par référendum, et non déclarée immédiatement lors de l'arrivée au pouvoir du parti. Cette décision a un impact important, rassurant un grand nombre d'électeurs qui s'inquiétaient des intentions du parti.
Comme en 1973, Robert Bourassa déclenche des élections anticipées, espérant prendre de court le Parti québécois.
Marketing politique
Parti libéral du Québec
En 1976, le Parti libéral du Québec est aux prises avec de nombreux problèmes sur les bras au niveau de l’éthique et sur la question linguistique. L’adoption par le gouvernement Bourassa de la loi 22, visant à instaurer le français comme langue officielle du Québec, a créé beaucoup de remous au sein des communautés allophones et de la communauté anglophone traditionnellement acquise par ce parti. Bien que les communautés juives et anglophones demeurent majoritairement fidèles au Parti libéral, les Italiens menacent de voter pour l’Union nationale et certains anglophones pensent opter pour le Parti québécois[1].
En début de campagne, l’objectif des libéraux est de contenir cette grogne en se positionnant comme les champions de l’économie ainsi que comme la seule formation politique capable de contenir la menace séparatiste. Les libéraux sont quand même confiants puisque depuis 1970, ils ont une « machine électorale » redoutable qui leur a permis de gagner les deux dernières élections. Leur organisation politique ressemble à celle d’une armée, puisque toutes les décisions de la campagne électorale sont centralisées vers un comité de campagne qui transmet des ordres partout au Québec afin que les employés du parti fassent la promotion de celui-ci. Directement inspirés des campagnes américaines, les libéraux utilisent abondamment les sondages afin de définir leurs angles d’attaque et l’image du chef[2]. Affaibli par la grogne populaire et les commentaires de Pierre Elliott Trudeau[3], Robert Bourassa se lance donc dans une vaste campagne de publicité pour redorer son image de chef. Les stratèges libéraux lancent des campagnes publicitaires afin de faire paraître Robert Bourassa comme un chef décidé et menaçant envers ses adversaires. Ils organisent même une émission questions-réponses sur les ondes de Télé-métropole (aujourd’hui TVA) pour rapprocher le chef de la population.
L’autre objectif des libéraux était de rendre l’option indépendantiste répulsive et d’exploiter cette peur afin de se maintenir au pouvoir. C’est dans cette veine qu’ils lancent une chanson de campagne anti-indépendantiste, chantée par Jean Lapointe. Mille exemplaires seront vendus et des milliers d’autres distribués gratuitement aux stations de radio et dans le métro de Montréal[4]. Malgré une utilisation importante des médias, combinées à une multiplication des annonces gouvernementales précédant l’élection, dû à la centralisation des communications gouvernementales au Ministère du Conseil exécutif[5], le Parti libéral est incapable de fédérer le vote en sa faveur.
Parti québécois
En 1976, le Parti québécois est sur le terrain pour préparer son élection depuis déjà trois ans. Les stratèges du parti achètent du temps d'antenne à Télé-métropole afin de réaliser deux séries d’émissions d’affaires publiques sous le thème « J’ai le goût du Québec ». L’émission ressemble beaucoup à l'émission Point de mire, le succès télévisuel ayant fait connaître René Lévesque auprès des Québécois avant son entrée en politique. On voulait montrer l’image d’un chef informé qui voulait partager son savoir avec le peuple et ainsi lui démontrer le bien-fondé de l’émancipation du Québec. L’autre objectif est de vendre l’indépendance auprès des femmes à la maison et aux personnes âgées qui constitue l’électorat le moins favorable au projet d’indépendance. Pour ce faire, des vedettes comme Pierre Nadeau, Lise Payette, Doris Lussier et bien d’autres sont appelés en renfort pour les convaincre. On lance aussi des campagnes radios dans des stations nationales et locales pour faire connaître le chef et les candidats locaux. La location d’un panneau publicitaire, en plein Jeux Olympiques de Montréal, permet au Parti québécois de faire connaître le « combat » du Québec aux visiteurs étrangers[6].
Lorsque l’élection est déclenchée, le Parti québécois diffuse des publicités qui montrent Robert Bourassa comme un premier ministre faible et qui utilisent le balai comme logo afin d'illustrer la volonté de se débarrasser du gouvernement libéral. Le PQ mise sur la proposition de tenir un référendum avant toute déclaration d’indépendance[7] ainsi que sur le fait qu’il se réclame comme le seul parti possédant une caisse électorale « propre ». Le parti distribue lui aussi une chanson de campagne électorale écrite par Stéphane Venne qui devient un vrai succès[8].
Le Parti québécois commence, depuis 1973, à fonctionner comme une organisation syndicale avec un comité national de direction qui produit des guides d’éducation à ses organisateurs locaux, mais aussi en misant grandement sur les associations locales ainsi que sur son grand nombre de membres afin de gagner les élections. Le PQ n’ayant pas autant d’argent que les libéraux, il lui faut trouver des techniques plus compétitives que celles du Parti libéral et c’est en misant sur la grande force d’attraction de bénévoles que la formation souverainiste réussit à monter sa « machine électorale » durant la campagne[9]. Le contexte politique et la préparation du Parti québécois lui permet de déloger le Parti libéral et ainsi prendre le pouvoir. Le point négatif de sa campagne est l’incapacité du parti à rallier les communautés ethniques qui étaient pourtant en grogne contre le PLQ.
Déroulement de la campagne
Dates importantes
: émission du bref d'élection.
: scrutin
: ouverture de la session.
Débats
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Sondages
Les résultats indiqués le cas échéant entre parenthèses sont ceux avant répartition proportionnelle des répondants.
Le taux de participation lors de l'élection était de 85,3 % et 70 446 bulletins ont été rejetés. Il y avait 4 023 743 personnes inscrites sur la liste électorale pour l'élection.
↑Dont seulement 990 ont répondu à toutes les questions.
↑Dont seulement 978 ont répondu à toutes les questions.
Références
↑Jack Jedwab, « Le comportement électoral des minorités au Québec lors des élections de 1976 », Bulletin d'histoire politique, , p. 5 à 15 (lire en ligne)
↑Alain Lavigne, Bourassa et Lévesque: Marketing de raison contre marketing de passion, Québec, Septentrion, , p. 29-32