Penzé (/pɛ̃ze/), autrefois Penzez, désigne trois choses, un village, un aber et le cours d'eau qui l'alimente.
La Penzé est un petit fleuve côtier du Léon, dans le Finistère, qui tire son nom d'un lieu-dit, un écart situé au fond de son aber, le bourg de Penzé. Siège d'une seigneurie instituée au XIIIe siècle sur un vaste territoire situé à l'ouest de la baie de Morlaix, le village devient entre le XVe siècle et le XXe siècle le plus peuplé entre Morlaix et Saint-Pol. S'il est comme par défaut érigé en paroisse en 1947, il est toujours partagé administrativement entre les communes de Plouénan et de Taulé.
Le mot vient du bas-latinpeceia[1], qui ne semble pas avoir de racinelatine et a également donné en ancien françaispeçoi, qui signifie l'action de briser et par métonymie le droit de bris[2]. Le terme de bris dans l'expression droit de bris est une création moderne[3], qui traduit fractura navium, latin de cuisine pour fractio navium[1], c'est-à-dire destruction de navires.
L'aber de la Penzé à marée haute vu vers le nord et la mer. Rive droite, en aval du pré en herbe, la digue de l'anse de Trogriffon. À l'horizon, le quartier de Ker an Treiz en Henvic.
« La Penzé, Penzez ou Pensé, qui naît au voisinage de Plounéour-Ménez, coule près de Guimiliau sous un viaduc de 32 mètres de haut (chemin de fer de Paris à Brest), laissant à droite le bourg de Saint-Thégonnec, boit son alter ego le Coatoulzac'h, long de plus de 20 kilomètres, qui, lui aussi, a passé sous la ligne de Paris à Brest, laquelle franchit son vallon par un remblai de plus de cent pieds de hauteur. C'est un ruisseau sinueux de 5 mètres à peine de largeur quand elle arrive (...) au hameau de Penzé ; là, elle se heurte au flot de la mer, devient aussitôt navigable aux vaisseaux, jusqu'à la Manche, distante de 6 km, et en même temps s'amplifie dans un fjord que la ligne de Morlaix à Roscoff franchit par un viaduc de 30 mètres de hauteur sur 256 mètres de long ; elle se termine dans la baie de Saint-Pol-de-Léon, sous-baie de la baie de Morlaix, après un cours d'environ 35 kilomètres en un bassin de 18500 hectares[7]. »
Parcours
La Penzé près du moulin de Penhoat Huon en Guimiliau.La Penzé amont, à un sixième de son parcours, faisant frontière entre Saint-Sauveur et Loc-Eguiner.
Depuis le territoire de la commune de Plounéour-Ménez, il coule d'abord vers l'ouest jusqu'à Loc Eguiner, puis vers le nord, et passe par Guimiliau, Saint-Thégonnec, Guiclan. À partir du bourg de Penzé, village qui donne son nom à la rivière et qui se partage entre les communes de Taulé et de Plouénan, le ruisseau, d'à peine cinq mètres de large, s'élargit subitement en un aber.
Le Coatoulzac'h (ou Coat Toulzac'h), littéralement bois du cul de sac, est son principal affluent. Long d'une vingtaine de kilomètres, il conflue sur la rive droite en aval de Saint-Thégonnec. Il reçoit en rive droite, à deux mil neuf cent mètres du centre de Saint-Thégonnec par la route, lieu dit Val du Pont, un ruisseau boisé et pittoresque, le Dour Ruz, c'est-à-dire Eau rouge, qui bordait une motte castrale construite au XIe siècle à la sortie ouest de Pleyber-Christ, en amont du cromlech de Coatilézec[8], et détruite durant les guerres de la Ligue[9].
Rive gauche, le Goaz ar C'haor, ou ruisseau de la fourche, débouche dans le bourg de Penzé et la rivière d'Eon, issue de la confluence du Cosquériou et du Guern, plus en aval dans l'aber.
Estuaire et diverticules
Brigantin amarré à l'entrée de l'aber de la Penzé, à Roscoff, et son personnel à pied, photographiés avant 1888[10].L'estuaire de la Penzé à marée basse : vue vers l'amont depuis la Pointe Saint-Jean en Saint-Pol-de-Léon.
L'aber s'étire sur un peu plus de onze kilomètres. Son gradient de salinité diminue à mesure qu'il s'enfonce dans la terre. Il reçoit les eaux de pluie de six vallons qui se terminent en anses et forment à marée haute autant de diverticules. Du nord au sud, de la mer vers l'intérieur des terres, ce sont, rive gauche, l'anse Saint Yves, le Milinou, le confluent de l'Eon. Rive droite, ce sont l'anse Sainte Marguerite, le Trogriffon et le Quistillic. Les vallons des deux derniers conduisent respectivement au bourg de Henvic et à l'ancienne trève de celui-ci, Taulé. Les cours d'eau y sont réduits à un fossé ou une rigole. Quelques autres vallons, encore plus petits, animent le relief du rivage, tel le ru du moulin à marée de Kerlaudy en Plouénan.
L'entrée de l'aber est marquée, rive gauche, par la pointe Saint Jean, qui est sur le territoire de Saint-Paul-de-Léon, quartier de Trégondern, et rive droite par la presqu'ïle Inizan, sur le territoire de Carantec à la limite de Henvic. Entre ces deux amers, à gauche du lit de la Penzé, se dresse l'îlot Toull ar Houarn, c'est-à-dire « Trou du Fer ». Un peu plus en aval, se dressent les rochers de l'île Blanche, à distance de la rive gauche, et d'Ar Pigued, « Le Piquet », à distance de la rive droite.
Un peu plus en amont sur la rive droite, la pointe de Lingoz, anciennement Lenn goz, le « Vieil étang », porte un amer pyramidal en pierre, dont le mur nord est peint en blanc et barré d'un trait vertical noir. Il marque l'entrée de la zone abritée où au moins cent cinquante bateaux ont l'habitude de mouiller.
Écologie
Vasières
La configuration et les caractéristiques hydrogéomorphologiques de la Penzé, encaissée mais à faible pente, font qu'elle a produit des vasières exceptionnelles.
Les vases qui se déposent dans le fond du lit et sur les berges, prennent leur aspect gris-bleuâtre de la décomposition en argile des schistesprécambriens que traverse la rivière[′ 2]. Elles se couvrent à marée basse d'un biofilm algal et bactérien qui est la base d'un réseau trophique particulier. En période de crue, les berges sont autocurées. Un bouchon vaseux se déplace avec la marée.
La qualité des eaux de la Penzé est régulièrement contrôlée par le Syndicat Mixte pour l’Aménagement et la Gestion des Bassins du Haut-Léon, dont le siège est Saint-Thégonnec. Le seuil de nitrates, 50 mg/l, est, à de rares exceptions près, respecté. Les traces de pesticide, dont le glyphosate et l'acide aminométhylphosphonique, sont régulièrement trouvées sur l'ensemble des stations de suivi.
Le , le réservoir de lisier de SOFALIM[11], un des plus gros élevages porcins du département[12],[13],[14]situé au lieu dit Kerjean, en Taulé, sur la rive droite en amont du bourg de Penzé, déborde et se déverse le long des sept cent cinquante mètres de l'affluentMoulin du Roy avant d'atteindre l'embouchure mil trois cent mètres plus en aval[15]. Plusieurs dizaines de milliers voire de centaines de milliers de litres de matière fécale, compremettant notamment la conchyliculture, se répandent dans l'estuaire sur plus de trois kilomètres et l'AAPPMA de Morlaix porte plainte[16]. Pêche à pied et baignade sont interdites à Carantec, Saint Pol de Léon, Roscoff[17]. L'associationEau et rivières de Bretagne dénonce les défauts techniques des infrastructures financées à grand frais depuis 1994 par le Plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole et le manque de formation des manipulateurs[18].
Le saumon remonte la Penzé, où l'on pêche également la truite. Les affluents sont aussi des rivières à truite. Le mulet gite dans le haut de l'aber. Le bas de la baie de la Penzé, en face de Saint-Pol-de-Léon, est un lieu de pêche à pied, réglementée, des crevettes, palourdes et bigorneaux.
Mammifères
Depuis la fin des années 1990, la loutre, appelée « chien d'eau » ((br) ki dour, autrefois dourgi, pl. dourgon), a recolonisé le bassin de la Penzé depuis celui du Blavet[′ 8]. Les foyers se trouvent le long des cours d'eau du bassin supérieur, dans la zone du Parc naturel régional d'Armorique qui s'étend sur les territoires de Commana et Plounéour-Ménez, mais les indices de présence sont régulièrement relevés jusque sur la côte[′ 9]. Les autres mammifères endémiques et sauvages les plus remarquables sont le putois, la fouine, la martre.
La vallée est fréquentée par cinq espèces de chauve souris, dont le grand rhinolophe. Des abris leur sont aménagés, dans le clocher de Penzé et, à mi-parcours du fleuve, dans la grotte de Roc'h-Toul.
Aujourd'hui, les ostréiculteurs déposent leurs poches sur les rives les plus en aval de l'aber, en bordure de la baie de Saint Pol et le long des rives occidentales de l'Île Callot.
La grotte épipaléolithique, soit ca. -8000, de Roc'h Toul, une double chambre sur quarante mètres de profondeur, témoigne du plus ancien site d'implantation connu sur les bords de la Penzé. L'entrée de la grotte, qui abrite des chauves souris, est fermée.
Moulin neuf de Milinou, en amont de l'anse du Milinou (« Les Mouiins » en breton), en Plouénan.
Vieux moulin (milin coz en breton) de Milinou, en aval du précédent, détruit dans les années cinquante mais toujours hanté par un meunier voleur estropié par sa meule et condamné au purgatoire[19].
Moulin à marée de Kerlaudy, dont il ne reste que la digue fermant une petite anse alimentée par un ru.
Moulin à marée de Trogriffon, aujourd'hui en ruines, qui fonctionnait grâce à la digue fermant un diverticule de la Penzé.
Moulin du Band, minoterie de la paroisse de Henvic qui appartenait aussi aux sieurs de Trogriffon.
En 1832[° 1], est construit à Penzé sur un bief, quelques mètres en amont du pont de Pen ar Pont et du fond de l'aber, une minoterie industrielle « modèle américain » de quatre étages, les Moulins Borgnis-Desbordes. Avec ses deux roues et ses huit meules, elle restera pendant plus d'un siècle la plus importante usine à farine du Finistère, fournissant les boulangeries de Saint-Pol-de-Léon à Morlaix[° 1]. Cette minoterie a cessé de fonctionner en 1996 et a été transformée en Centre d'art contemporain.
Ponts piétons
Le pont du Moulin Bas du Bois de la Roche et son calvaire.
Le pont de Penhoadic, simple passerelle en bois reconstruite en que franchit le Circuit des moulins, relie le bourg de Saint-Thégonnec à celui de Guiclan.
La passerelle du moulin de Kernabat, idem en aval du précédent.
La passerelle de Bian, idem en aval du précédent et en amont de Penhoat.
Port
Le fleuve est accessible depuis la mer par un aber qui remonte jusqu'au lieu-dit Pen ar Pont, c'est-à-dire « bout du pont ». Au-delà, l'arche basse d'un petit pont interdit toute navigation sur un cours tout juste utile à l'alimentation des moulins.
En 1849 une cale d'accostage en pierre, garnie de granit rose, est construite pour faciliter le débarquement du traez et son transport par charrette directement vers les exploitations agricoles. À la fin du XIXe siècle, elle est complétée d'un quai de soixante quatorze mètres[° 2]. Il s'étend sur la rive droite au-dessus du dernier banc d'échouage. En face, à Pen ar Pont, c'est-à-dire sur le territoire de la commune de Plouénan, l'auberge lésée par la municipalité de Taulé fait construire un quai, plus court, pour attirer les clients. Administrativement, la rive droite dépend du port de Morlaix, la rive gauche de celui de Roscoff[21].
Cales
La bas de l'aber sert de zone de mouillage pour de petits bateaux. Deux cales, la cale de Saint Nep et, un peu plus en amont, la cale de Saint Yves, facilitent le débarquement sur le territoire de Saint-Pol-de-Léon, sur la rive gauche. Elles ont été construites à la fin de la guerre de 1914-1918 dans le cadre du débarquement en à Brest de 780 000 soldats américains et de la sécurisation de convois logistiques vers Cherbourg[22]. Le passage du la Corde à Penzé avait été choisi pour servir à la marine française de poste de combat aérien. Transformé le en Centre d'aviation maritime (CAM), le poste a mené trois missions de combat.
Sur la rive droite dans le prolongement de la cale de Saint Yves, la cale de Coatigariou, en Henvic, est le dernier vestige de l'ancien bac de la Corde. Quatre cent cinquante mètres en amont, une seconde cale, au débouché de l'anse Sainte Marguerite, fait du quartier de Kerantreiz un mouillage pratique. Entre les deux, à hauteur du pont de la Corde, un petit quai se prolonge d'une troisième cale.
Le bac de la Corde
L'estuaire de la Penzé, une ria, a toujours constitué un obstacle aux communications terrestres, dressant une frontière naturelle entre le Minihy de Léon, à l'ouest, et le pays Pouched, lequel comprend les communes de Carantec, Henvic, Taulé et Locquénolé.
Au Bas Moyen Âge, le franchissement de l'estuaire de la Penzé se faisait à un gué dénommé passage des Bœufs. Au début du XVe siècle, Henvic obtient le privilège de tenir une foire. Un bac, guidé vraisemblablement par une corde tendue entre les deux rives, assure la liaison avec la capitale du Léon, le Minihy de Léon. Le passage des Bœufs devient le passage de la Corde. Ce bac appartient aux seigneurs de Lézireur jusqu'à la Révolution française. Des adjudicataires le font fonctionner tout au long du XIXe siècle.
En 1885 est abandonné le passage de Kerantreiz pour un franchissement situé quelques dizaines de mètres plus en aval, à hauteur de Treiz Nevez. Entre 1889 et 1918, le passeur est Adrien Herrec (1863-1934). Un viaduc ferroviaire ayant été mis en service en 1883, le projet d'un bac à vapeur est abandonné en 1912.
Le dolmen de Prat Louc Houarn en Plouénan gouverne sur la rive gauche, en face de la chapelle Sainte-Marguerite, non loin du pont de la Corde[25], l'entrée de la gorge de la Penzé, qui, à l'époque de la construction, n'était pas en aber, le niveau de la mer étant alors beaucoup plus bas dans le lit de l'ancien fleuve qui est devenu, à la fin de la dernière époque glaciaire, La Manche.
Le dolmen et le menhir de Lingoz, sur la rive d'en face, en Henvic, ont été détruits, comme beaucoup de mégalithes du Haut Léon.
De ces deux points de part et d'autre de l'estuaire de la Penzé, on pouvait, par ce qui est aujourd'hui envahi par la mer, rejoindre à pied au nord le site de Saint-Barbe, à Roscoff, et à l'est le site de Barnenez, jumeau du précédent et seul préservé.
Cimetières protohistoriques
Cimetière du Mouster Blanc
Encore mentionné dans les archives de la fin du XVIIe siècle, le cimetière a été découvert le long de la route de Plouénan à Saint-Pol au début du XXe siècle lors de la construction d'une habitation[26]. Il se trouvait à l'actuel lieu-dit Le Mouster, c'est-à-dire Le Moutier, à la source du ru qui se jette dans l'aber de la Penzé en formant l'anse de Saint-Yves. Dédié à saint Grégoire, un oratoire, qui n'a pas laissé de traces, accueillait l'office funèbre[26].
C'est un cimetière, distinct du cimetière actuel, qui n'a pas été fouillé et qui est antérieur à l'occupation romaine.
La chapelle de Lopréden et ses filles
Notre-Dame de Lopréden, au lieu-dit du même nom en Plouénan, dominait le cours aval de la rivière d'Eon. Déjà en ruine au milieu du XVIIIe siècle, elle est vendue à l'état de matériau sous la Révolution. C'était un antique Loci Bridanni, Loc'h Preden en léonard, c'est-à-dire « sanctuaire de saint Brandan », passé au Bas Moyen Âge de la propriété de l'abbayerennaise de Saint-Melaine[27], à l'époque, une des plus puissantes de Bretagne, à celle de Fineterre[28], port international alors très actif qui était la principale source de revenu du Comte évêque de Léon. La veille de la Saint Brandan, un feu de joie était allumé près de la chapelle[28]. En 1717, un mariage y était encore célébré[28].
La chapelle Saint-Yves, située en bas du même ru du même nom à moins d'un kilomètre du Mouster, a elle aussi disparu. Elle annonçait rive gauche le passage de la Corde[29]. Dédiée à saint Yves, on n'en sait rien que le nom mais celui-ci indique une dédicace tardive.
La chapelle Saint-Jean, dédiée à l'Évangéliste, se voit toujours, à un peu plus d'un kilomètre de Lopréden, plus bas sur le cours de la rivière d'Eon. Elle a été élevée par les seigneurs de Lannuzouarn vers 1400 au lieu-dit Pont-Eon, sur le confluent avec la Penzé[30].
La chapelle Sainte-Marguerite
Erigée au XVe siècle près du gué aux bœufs, devenu gué de la Corde, sur la rive droite de l'aber, en Henvic, la petite chapelle Sainte-Marguerite, un simple bâtiment rectangulaire dont le clocheton forme une toiture en bâtière, a été remaniée au XVIe siècle et restaurée en 1878. La statue de sainte Marguerite est du XVe siècle. Les lambris du fond du chœur dessinent une vingtaine de motifs géométriques. Les fenêtres gothiques sont ornées de trilobes et de quatre-feuilles.
La fontaine et la chapelle de Notre-Dame de Penzé
Le bourg de Penzé s'est développé grâce à une source, point d'alimentation indispensable à tout port. Celle-ci est située une centaine de mètres au-dessus du gué, rive droite, côté Taulé. Aménagée en fontaine, la source est sacrée et fait l'objet d'une dévotion qui s'est concrétisée par l'érection d'une chapelle, qui en 1185 relève de l'abbaye Saint-Melaine, dont le siège est à Rennes. Elle était une étape sur le trajet du Tro Breiz[31]. La source alimentait un grand lavoir[° 4].
La chapelle est agrandie après la Seconde Guerre mondiale sur les plans de l'architecte Heuzé d'un collatéral, dont l'architrave est portée sans chapiteaux par des piliers cylindriques[33]. La façade est conservée et son granit clair de Callot contraste désormais avec les nouveaux parements en granit plus gris de Brennilis. L'escalier extérieur est fait d'un granit de Huelgoat plus clair. L'intérieur est dallé de schiste de Locquirec, célèbre pour sa rareté et ses reflets verdoyants.
La fontaine et la chapelle de Saint Visias
La chapelle, qui date du XVIe siècle, se trouve rive gauche à deux mil cinq mètres en amont du bourg de Penzé, après le confluent avec le Coat Toulzac'h sur le territoire de Guiclan, au sud du carrefour de la route départementale 19 avec la route de Kerfaven Menguen. Remaniée plusieurs fois, la chapelle était celle du manoir de Notéric. Elle abrite les statues de saint Visias ou Vizien, représenté en moine, et des évêquessaint Thivisiau et saint Mériadec.
La fontaine se trouve à cinq cents mètres à l'est de la chapelle, au fond des bois qui dominent la Penzé, au bout d'un chemin de terre et au-delà du ruisseau qu'elle alimente. La croyance est que saint Visias incite les enfants à faire leurs premiers pas et guérit les membres débiles. L'eau dans laquelle la tête de l'enfant est plongée est réputée faire disparaître « la veine de saint Visias » ((br) gwazenn Sant Vizia), qui gonfle au front des nourrissons, après qu'au retour à la chapelle, il ait fait, porté dans les bras, trois fois le tour de l'autel sans un mot. En guise d'ex voto, les mères revêtaient la statue de la fontaine d'habits d’enfants neufs.
La fontaine se trouve entre route et ruisseau à quelques dizaines de mètres de la chapelle. C’est un appareillage très simple de granit construit vraisemblablement au XVIIIe siècle[′ 11] au pied de la roche, à laquelle s'accrochent les fougères. L’eau s’écoule d'une petite niche, dont la maçonnerie est altérée et d'où la statuette a disparu[′ 11], sur une dalle creusée d'une rigole, laquelle débouche sur un petit bassin rectangulaire. Elle s'échappe de celui-ci par le bord opposé, lui-même ouvert par une autre petite rigole.
Une dévotion lui est rendue par les futurs couples. Une épingle, placée sur un morceau de papier puis continuant de flotter une fois le papier habilement retiré, présage du mariage dans l’année.
Les fontaines et l'église de Loc Eguiner
La fontaine de Saint-Eguiner est doublée d'une fontaine Saint-Jean. Les constructions actuelles, en grand appareil de granit, datent respectivement de 1566[35] et 1690[36]. Elles jouxtent l'église de Loc-Eguiner-Saint-Thégonnec.
Un troisième château de Penhoat, un simple manoir, a été reconstruit en Plounéour-Ménez sur la terre d'un vassal, Coëtlosquet, pour servir aux chasses.
Le manoir de Lingoz ((br) « étang vieux »), aujourd'hui simple ferme, est situé à l'entrée de la baie de Penzé sur le territoire de Henvic et date du XVIIe siècle. Seules la porte cintrée et les deux grandes cheminées de pignon laissent deviné la noblesse ancienne de cette sobre maison construites à l'origine en granit gris de l'île de Batz.
Le manoir de Trogriffon ((br) « autour du griffon »), qui conserve une tourelle du XVe siècle et un colombier du XVIe siècle, a été reconstruit aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il mélange par endroits aux micaschistes locaux le granit rose de Callot et le granit blanc de Ploujean. Il est situé sur le territoire de Henvic au fond d'une anse de l'aber qu'une digue est venue fermer. La seigneurie de Trogriffon s'étendait au sud de celle de Lingoz jusqu'à l'anse Sainte-Marguerite, une autre anse de l'aber au nord de la précédente. Propriété de Jean Le Moyne, seigneur de Coatudavel, au XVe siècle, elle passe en 1578 à la maison de Tournemouche puis à celle de Quintin-Kerscao. Elle appartenait quand la Révolution s'est déclenchée, à Pierre-Joseph de Coëtamlem (1749-1827), un descendant de Nicolas Coetanlem, puis est passé par mariage aux L'Espine de Grainville, famille normande qui a donné deux maires à la commune.
Le manoir de Kerassel, en amont de l'anse du Quitillic, au nord est du bourg de Penzé, réunit à angle droit une aile du XVIIIe siècle à un corps de logis du XVIe siècle, d'anciennes écuries fermant la cour.
Le manoir de Kerbic, se situe au sud de Kerkaudy et à l'est de Plouénan, à mi chemin entre le bourg et la rive de la Penzé, à la source du ru central qui alimente l'anse du Milinou. Du bâtiment en moyen appareil du XVe siècle, qui appartenait en 1426 au bailli de Morlaix Derrien Auffray, on voit encore une tourelle en cul de lampe, des croisées de fenêtres parfois aveuglées, un portail décoré d'un accolade en ogive et d'écussons, dont celui des Auffray, losangé d'argent et de sable à la fasce de gueules brochant[37].
Le manoir de Kerbalanec ((br) « Les genêts »), au sud est du bourg de Plouénan, est aujourd'hui en ruines. La ferme qui se dresse à son emplacement, se situe à l'extrémité de l'affluent sud du vallon du Milinou, entre Kerlaudy et Pennaneac'h. Demeure au XVIe siècle des Kersauzen, famille illustrée par Jean Kersauzen, qui était notaire royal de la cour de Léon au bailliage de Lesneven en 1576 et mourut en 1613 riche donataire de l'église de Plouénan[38], le manoir appartenait au XVIIIe siècle à des Bolloré[39].
Le manoir de Pont Eon (prononcer « pondéon ») se trouve au lieu-dit du même nom, à l'embouchure sur la Penzé de la rivière d'Eon. Distingué par un escalier extérieur, il appartenait au domaine de Lannuzouarn après avoir été, en 1427, la demeure d'Alain Kermellec[40].
Le manoir de Coatarcousquet ((br) « Bois dormant », anciennement Coat ar Cousquer, (br) « Bois communal »), voisin du précédent, n'est plus qu'un bâtiment de ferme distingué par une tourelle ronde et un double portail en granit. En 1900, il appartenait à la famille Drouillard de la Mare[40].
Le manoir de Pennaneac'h ((br) « Fin des soucis ») se trouve en Plouénan sur l'Eon, entre les écarts de Lopreden et Pont-Éon, à distance du confluent avec l'aber de la Penzé. Riche demeure du XVe siècle transformée en ferme dès 1780, les bâtiments, récupérés dans les années quatre-vingt-dix, ne laissent plus paraître de la construction originale que des murs épais, un puits et les restes d’un vieux four à pain. C'est là qu'était cachés durant la Terreur le recteurréfractaire de Plouénan, François Le Gall, et l'aumônier des Ursulines de Saint-Pol, François Corrigou. Ils ont été guillotinés à Quimper le avec la fermière de Kerlaudy, Anne Le Saint[41].
Le manoir de Lannuzouarn ((br) « Champs de fer »), aujourd'hui en ruines, se trouve aussi en Plouénan en amont du précédent. Propriété en 1426 et 1443 de Hervé de Lannuzouarn[42], il a été reconstruit par Jacques de Lannuzouarn[43], fils d'Yves et de Catherine de Brézal, époux de Françoise de Gouzillon, mort en 1569, ou bien un de ses cinq enfants. Il en reste un colombier de la fin du XVIe siècle, une fontaine et un bois, vestige d'une des dernières forêts du Léonais. Le domaine seigneurial, entre l'Eon et le Goaz ar C'haor, incluait le manoir de Pennaneac'h ainsi que l'écart de Pont-Éon et descendait jusqu'aux rives de la Penzé[42]. En 1554, un Hervé de Lannuzouarn est chanoine et official du chapitre de Nantes[42]. En 1571, un autre Hervé de Lannuzouarn est chantre et chanoine de Léon[42]. Le domaine est passé à la famille Le Ny, qui portait d'argent à l'écu d'azur en abîme, accompagné de 6 annelets de gueules en orle et criait « Endurer pour durer ».
Le manoir de Kermorvan est situé au sud immédiat du bourg de Penzé au sommet du mamelon que contournent la Penzé et le Goaz ar C'haor avant de se rejoindre. Le plus ancien bâtiment, aujourd'hui réduit à l'état de hangar de ferme, date du XVIIe siècle.
Le manoir de Penhoat se trouve au milieu de ses bois, au nord-ouest du bourg de Plounéour. Un logis appartenant en 1481 à Alain Le Scanff, chambellan de Bretagne, est agrandi et complété au XVe siècle[′ 14]. La cour est embellie d'une fontaine monumentale en 1619 par Sébastien de Rosmadec, abbécommendataire de Paimpont, qui vend le domaine en 1624 à Olivier de Coëtlosquet, principal seigneur de Plounéour et petit-fils par sa mère de François de Kersauson, seigneur de Penhoat en Saint-Frégant. L'ensemble est transformé à la fin du XVIIe siècle[′ 14] en une résidence dédiée à la chasse. Le parc est aménagé à partir de 1865 et planté d'essences rares. Les bâtiments et le parc, propriété privée, sont restaurés et reconstruits depuis 1988.
Le manoir de Coat ar Roch.
Le manoir du Bois de la Roche ou Coat ar Roch, appelé aussi château de Bouvans, du nom de leurs propriétaires savoyards au XVIIe siècle, conserve son corps de logis, un étang, un vivier et, à l'emplacement d'une chapelle disparue, la fontaine dédiée à saint Roch, qui protège des épidémies les enfants baignés dans son eau[44]. Les vestiges d'un hypocauste ayant servi au chauffage d'importants thermesgallo-romains ont été mis au jour au XIXe siècle. La façade arrière montre les armes jointes d'Olivier de Cornouaille, gouverneur de Lesneven et fondateur du fief de la Cornouaille de Kerinou en Guipavas, et sa femme, Marguerite de Kerriec, propriétaires en 1540 de la seigneurie du Bois de la Roche détenue antérieurement par les Kermellec. C'est dans ce manoir que le folkloristeErnest du Laurens de la Barre, héritier du domaine saisi et revendu au cours de la Révolution, écrit ses contes et meurt en 1881.
Le beau manoir de Coatlosquet étend son parc à l'est du territoire de Plounéour aux sources du Bulz, affluent du Queffleuth, et n'appartient pas au bassin de la Penzé.
La motte de Loc Eguiner
La motte castrale a été construite à une date non connue, probablement au Xe siècle, pour contrôler le franchissement de la Penzé à son mi parcours par la route qui reliait déjà dans l'AntiquitéVorgium à Tolente[45]. Vraisemblablement réaménagée jusqu'au XIIIe siècle, il n'en reste plus qu'une butte boisée, lieu de légendes que les archéologues n'ont pas étudié.
Situé sur huit hectares le long de la Penzé au sud de l'anse Sainte-Marguerite, c'est une collection privée d'environ trois mil six cents espèces originaires du monde entier que parcouraient les armateurs léonards, une des plus importantes de Bretagne.
Comme Pyrame et Thisbé, comme Roméo et Juliette, c'est l'histoire des amours contrariées de deux jeunes gens appartenant à des clans opposés, les Pennhoat et les Pennaneac'h, et de l'assassinat du futur et méchant beau père, qui fit périr ses héritiers à la guerre et mourir sa femme de chagrin, par le splendide et valeureux prétendant.
Les lavandières de la nuit, kannerezed noz en breton, ces femmes pales vêtues de blanc qui battaient le linge des morts au clair de lune en punition de leurs péchés, invitaient les voyageurs attardés à tordre les draps pour les enchaîner à leur propre damnation. Le conte a été collecté par Émile Souvestre aux alentours de l'année 1833 dans la région de l'estuaire de la Penzé et a inspiré le peintre Yan' Dargent. Le thème se retrouve dans le mythe irlandais du guerrier Cúchulainn[47], champion des Ulates.
« Elles secouaient leurs cheveux épars, en levant leurs battoirs blancs et, à tous les douez de la vallée, le long de toutes les haies, au haut de toutes les landes, des voix répétaient : Mille malheurs ! Mille malheurs ! »[48]
Romans évoquant Penzé
Jakez Kerrien, Ar Roc'h Toull, collect° Levraoueg vol. I, Gwalarn, 1926, 89 p., rééd. Emgleo Breiz, Brest, 1957.
A. Six & J. Le Bel, Le Patrimoine des communes de France, vol. XIX "Le Patrimoine des communes du Finistère", Flohic, Paris, 1998 (ISBN9782842340391).
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