Il fut, avec Jean Behra, l'un des deux seuls pilotes français à courir en Formule 1 pour Ferrari dans les années 1950. Il a pris part à 81 Grands Prix de Formule 1 (en excluant le Grand Prix d'Italie[1]) pour 89 engagements, décroché deux victoires et dix podiums. Ses meilleurs classements au championnat sont une quatrième place en 1954 et 1955 (accompagné de son petit ours en peluche fétiche) et cinquième en 1959. En vingt-sept ans de carrière, Trintignant a pris part à 324 départs, toutes disciplines confondues. Son bilan est de 44 succès pour 124 abandons.
Maurice Trintignant est le benjamin des quatre fils d'un propriétaire de vignobles, tous passionnés de course automobile, et qui courent sur Bugatti.
En 1933, son frère Louis meurt en course au Grand Prix de Picardie à Péronne. Maurice, qui n'a alors que 16 ans, veut malgré tout devenir lui aussi pilote de course automobile professionnel.
Pilote de courses automobiles
En 1938, âgé de 21 ans, Maurice Trintignant commence sa carrière de pilote le 10 avril en terminant cinquième du Grand Prix de Pau sur une Bugatti Type 51 de 2,3 litres de cylindrée (le modèle même avec lequel son frère Louis s'est tué)[2].
Le 4 juillet1948, Maurice Trintignant est victime d'un terrible accident au quatrième tour du Grand Prix de Suisse. Parti en tête et alors qu'il est quatrième, Trintignant est éjecté de son véhicule et retrouvé inerte avec des commotions cérébrales, des côtes cassées et quatre dents manquantes. Sa rate éclate lorsqu'il est dans le coma. Comme il est déclaré un temps cliniquement mort, le chirurgien le recoud de manière peu soignée ce qui lui vaut une cicatrice très particulière d'une vingtaine de centimètres sur l'abdomen. Trintignant sort du coma deux semaines après l'accident ; sa femme lui offre un ours en peluche qui l’accompagnera dans son cockpit à chacune de ses courses. Selon la tradition suisse, comme tous ceux qui ont perdu la vie ou ont été blessés gravement, Maurice Trintignant y gagne un virage à son nom (sa mort étant même annoncée par certains journaux)[3]. En 1949, il reprend la compétition au volant d'une Simca-Gordini et remporte la course du Circuit des Remparts, à Angoulême, en Poitou-Charentes, ainsi que la catégorie 2 Litre de la Coupe du Salon sur T15S[4].
Pilote de Formule 1
En 1950, Maurice Trintignant rejoint l'élite des pilotes en prenant part aux premières éditions du championnat du monde de Formule 1. Ses premières saisons sont décevantes en raison du manque de performances des Simca-Gordini qui ne peuvent pas rivaliser avec les puissantes Alfa Romeo et Ferrari. Il remporte toutefois quelques épreuves hors-championnat du monde à Genève en 1950 et à Albi en 1953 ou monte sur le podium comme à Aix-les-Bains. Il court pour Amédée Gordini jusqu'en 1953. Il y a d'ailleurs une polémique sur le nombre de Grands Prix effectués en championnat pour cette équipe. Si on se réfère aux spécialistes de l'époque Gérard Crombac et Christian Huet, Jean Behra aurait effectivement remplacé (sans être inscrit ni crédité) Maurice Trintignant lors du Grand Prix d'Italie1951[5]. D'après Gérard Crombac : « Trintignant, victime d'une indigestion, était remplacé par Behra. Gordini s'était pourtant bien gardé d'en prévenir les organisateurs, on aurait diminué sa prime de départ[6]. »
En 1955, Maurice Trintignant entre dans la légende de la course automobile française en devenant le premier pilote français à remporter un Grand Prix du championnat du monde de Formule 1 en s'imposant au Grand Prix de Monaco le au volant de sa Ferrari. Il termine une nouvelle fois quatrième du championnat.
En 1956 il signe chez Vanwall. Il pilote également la Bugatti T251 au Grand Prix de France, mais ce retour à la compétition de la prestigieuse marque se révèle très décevant.
Il revient chez Ferrari dès 1957.
Il passe la saison 1962 chez Rob Walker Racing, sur Lotus. Profondément marqué par l'accident de Moss à Goodwood à Pâques, il n'a plus le cœur à courir au sein de cette écurie les saisons suivantes, effectue en 1963 deux Grands Prix pour Reg Parnell Racing (sur Lola puis Lotus), un sur la BRM P57 de la Scuderia Centro Sud, et termine sa carrière en F1 avec une BRM V8 en 1964, signant une cinquième place en Allemagne sur le Nürburgring[6].
Courses de côte
Après avoir remporté l'une des toutes dernières courses organisées en France avant-guerre, en 1939 à Saint-Eutrope par l'Automobile Club Orangeois sur Bugatti [8] (la Course de côte Nice - La Turbie étant encore organisée le de la même année), Maurice Trintignant devient le second triple vainqueur après-guerre de la course de côte du Mont Ventoux (après Robert Manzon), en 1949 (Simca-Gordini T11), 1960 (Cooper T43-Climax)[9], et 1964 (BRM P57)[10] peu avant sa retraite sportive. En 1963 il remporte également la course de côte du Mont-Dore[11].
Voitures de Sport
Maurice Trintignant dispute les 12 Heures de Paris en 1938 (en famille) et 1939 (seul) sur Bugatti. Après guerre, il finit troisième à Reims sur voiturette Gordini TMM en 1947, puis second deux ans plus tard du Grand Prix de Madrid toujours sur Gordini, avant de gagner successivement avec la T15S de ce dernier constructeur le Rheinland Nürburgring en 1950 et le Grand Prix de Roubaix ainsi qu'à Agen en 1952, avant une dernière course à Nîmes en 1953. Pour Ferrari la saison suivante, il assure d'emblée avec les modèles 250 Monza, 375 Plus et 750 Monza trois succès significatifs, aux 12 Heures de Hyères (avec Luigi Piotti), aux 24 Heures du Mans comme indiqué plus haut, et au RAC Tourist Trophy en fin de saison (avec Mike Hawthorn), ainsi que des deuxièmes places aux 2 Heures de Dakar et à Supercortemaggiore. En 1955 il gagne les 10 Heures de Messine avec Eugenio Castellotti sur la 750 Monza. Arrivent ensuite deux succès africains en début de saison 1956, aux Grand Prix d'Agadir et 2 Heures de Dakar sur la 857 S. Associé à Phil Hill il gagne encore les 1 000 kilomètres de Suède sur 290 MM après des troisièmes places aux 1 000 kilomètres de Paris et aux 24 Heures du Mans. 1957 le voit finir aussi troisième des 1 000 kilomètres du Nürburgring sur 315 Sport, ainsi que deuxième du Grand Prix de Suède sur 335 Sport. En 1958 il est encore deuxième lors du premier Trophée d'Auvergne (il récidive à cette place en 1961). En 1959 il échoue pour la victoire avec Paul Frère aux 24 Heures mancelles, pour son troisième podium (2e). En 1961 il termine la saison une nouvelle fois troisième des 1 000 kilomètres de Paris ; il a obtenu entretemps trois autres podiums au Tour de France automobile, deux successivement comme deuxième avec François Picard sur Ferrari 250 GT en 1957 et 1958, puis une troisième place avec Pierre Noblet sur le même modèle en 1961, également en Grand Tourisme. Un tout dernier podium clôture sa carrière Sport en 1965, avec une troisième place sur Ford GT40 lors du test du Mans associé à « Dikie » Attwood et Whitmore, à bord d'une Ford officielle. Il a assuré quinze départs aux 24 Heures du Mans entre 1950 et 1965, ayant ainsi pu conduire encore sur Aston Martin, Porsche ou Maserati (et Ferrari officielles de 1954 à 1957).
Retraite dans le Sud
Maurice Trintignant se retire alors à Vergèze à 20 km de Nîmes dans le Gard, où il est vigneron. (Enzo Ferrari le surnomme affectueusement le « Marchand de pinard » en référence à ses premiers pas en tant que viticulteur). Trintignant fut d'ailleurs maire de cette commune de 1958 à 1964.
Maurice Trintignant meurt dans la nuit du [12] à l'hôpital de Nîmes à l'âge de 87 ans. Le , la ville de Vergèze inaugure une sculpture en bronze du pilote et de sa Bugatti Type 51[13]. Il est inhumé au cimetière de Sainte-Cécile-les-Vignes (Vaucluse).
1982 : participation au rallye Dakar avec comme copilote le Français Joseph Cantarelli sur Toyota BJ (voiture n°171)[14]
Publications
Maurice Trintignant et Jean Reschofsky (illustrateur) , Pilote de courses, Bibliothèque verte, Hachette, 1957 ; réédition augmentée en 1958. Ce livre raconte ses débuts en course automobile, son accident à Berne, sa rencontre avec Jean-Pierre Wimille, ses premières courses après-guerre, et en détail l'épreuve de Monaco en 1955. Sont également évoqués son accident à Monza, la mort d'Alberto Ascari, la catastrophe des 24 Heures du Mans 1955. Le livre s'achève sur l'espoir suscité par la nouvelle Bugatti, de nombreuses anecdotes sur la Scuderia Ferrari. Réédité avec des ajouts, le livre est un succès de la collection et est maintenu au catalogue jusque vers 1980. C'est un des rares livres français (hors documentaire) pour la jeunesse consacré au sport automobile. Illustrations de Jean Reschofsky.
Maurice Trintignant, Comment conduire sa voiture, Hachette, 1967. Un manuel de conseils aux automobilistes. Ce livre est un témoignage frappant de l'évolution des mentalités, Maurice Trintignant n'hésitant pas à sous-titrer son premier chapitre : « Pour rouler prudemment, roulez rapidement ».
Dino, les autres Ferrari, coll. La Légende de l'automobile, Jean-Pierre Gabriel, 1989, éd. EPA (Nancy), préface de Maurice Trintignant.
Les heures glorieuses du circuit de Reims, Dominique Dameron, Jacques Pernet, Michel Hubert, 1991, éd. de l'Arelier Graphique (Reims), préface de Maurice Trintignant.
Discographie
Les 24 Heures du Mans, cinquantenaire de l'Automobile-Club de L'Ouest (1958), deux tours de cadran en deux faces de disque - reportage de Georges Fraichard, interview de Claude Joubert, avec les voix des pilotes, et notamment celle de Maurice Trintignant. Face A : 1- Historique, 2- Présentation des vieilles voitures, 3- Le départ, 4- Le tour du circuit; éd. Véga, réf. V 30 S 813.