Elle constitue la ligne 070 000[1] du réseau ferré national sous le nom de « ligne de Noisy-le-Sec à Strasbourg-Ville ». Le court tronçon de Paris-Est à Noisy-le-Sec fait en effet partie de la ligne 001 000[1] de Paris-Est à Mulhouse-Ville, bien que cette dernière ait été réalisée ultérieurement. Dans l'ancienne nomenclature de la région Est de la SNCF, elle était numérotée « ligne 1 » et désignée en tant que « ligne Paris – Strasbourg (Kehl)[2] ».
Après avoir été améliorée surtout pour des raisons militaires, puisqu'elle se dirige vers l'Allemagne, la desserte de Strasbourg a été l'une des grandes oubliées du TGV, jusqu'à ce qu'en 2002 les travaux de la LGV Est européenne soient lancés.
Depuis la mise en service de la LGV Est en 2007, la ligne a perdu une grande partie de ses trains de voyageurs de « grandes lignes », notamment ceux desservant ses principales gares intermédiaires ; son exploitation est alors principalement réalisée sur des tronçons distincts, par des trains express régionaux (TER). Des TER, utilisant des voitures Corail, empruntant néanmoins la totalité de la ligne existent depuis le ; à cela s'ajoutent des trains Nightjet (NJ), reliant Paris à Vienne à partir du , mais également Paris à Berlin depuis le . En outre, la ligne est utilisée par des trains de fret.
Histoire
Origine
En 1826, l'ingénieur Henri Navier propose une ligne de Paris à Strasbourg par Vitry-le-François et Nancy. C'est à partir de 1833 que le tracé de cette ligne fait l'objet d'un débat politique. Pendant longtemps, elle va être en concurrence avec un tracé se débranchant de la ligne Paris – Lyon à Dijon, pour relier Strasbourg par Mulhouse. Cette proposition, beaucoup moins favorable pour la desserte des places fortes, est rejetée par certains responsables militaires comme le colonel Paixhans ; beaucoup moins chère, elle sera cependant choisie par le gouvernement après la crise économique de 1838 – 1839. Metz proposera également un embranchement de la ligne Paris – Lille, passant par Reims et Verdun avant de rejoindre Sarrebruck ; cette hypothèse sera fermement combattue par le Bas-Rhin, qui craint d'être marginalisé. Les ministres Humann et Soult parviennent finalement à faire adopter le tracé direct par Nancy, principalement par intérêt stratégique[3].
En 1842, l'étoile de Legrand prévoit une ligne de chemin de fer devant relier Paris à la frontière d'Allemagne, par Nancy et Strasbourg. Une loi du autorise l'adjudication de la ligne, ainsi que d'un embranchement vers Reims et un autre « sur Metz et la frontière de Prusse vers Saarbruck[4] ».
Compagnie de Paris à Strasbourg
La construction et la concession de la ligne sont adjugées le à Messieurs Despens de Cubières, de Pellapra, duc de Galliera et Blacque-Belair. Cette adjudication est approuvée par ordonnance royale le [5]. Le , est créée la Compagnie du chemin de fer de Paris à Strasbourg. Cette compagnie est agréée par ordonnance royale du , qui valide dans le même temps le transfert de la concession à la compagnie[6].
Vu l'ampleur de la tâche, les travaux se font par étapes, et les mises en service sont échelonnées de 1849 à 1852.
La chronologie des mises en service est la suivante :
La guerre de 1870 et ses conséquences pour la ligne
La guerre franco-prussienne, achevée en 1871 sur une lourde défaite française, conduit à la cession de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine. La section correspondante de la ligne, ainsi qu'une partie du réseau de la Compagnie de l'Est, passe alors sous contrôle germanique dans le cadre d'une administration spécifique, la Kaiserliche Generaldirektion der Eisenbahnen in Elsass-Lothringen (Direction générale impériale des chemins de fer d'Alsace-Lorraine, abrégé en Elsass-Lothringen, EL), qui impose ses standards techniques, dont la circulation à droite. Une gare frontière allemande est construite à Nouvel-Avricourt, aux frais de la France. Elle est achevée en 1875.
Dans le cadre d'un ajustement des limites entre les réseaux de la Compagnie des chemins de fer de l'Est et de l'Administration des chemins de fer d'Alsace et de Lorraine, une convention est signée le entre le ministre des Travaux publics et les compagnies, aux termes de laquelle l'État attribue à l'Administration des chemins de fer d'Alsace et de Lorraine la concession de la section de ligne entre Nouvel-Avricourt (ancienne frontière) et Igney - Avricourt. Cette convention est approuvée par une loi le [7].
Ambulant postal
Un service d'ambulant postal a fonctionné sur cette ligne avant la Première Guerre mondiale. Les lettres étaient déposées dans les gares et, dans le train, un employé oblitérait le courrier avec un timbre à date rond à créneaux, typique des cachets d'ambulants postaux français du début du XXe siècle.
Caractéristiques
Tracé
Le profil est excellent sur la majeure partie de la ligne, où les déclivités ne dépassent pas 6 mm/m, sauf sur le parcours entre Bar-le-Duc et Lérouville où elles atteignent 8 mm/m.
Le rayon des courbes permet des vitesses de 150 / 160 km/h, sauf lors de la traversée des contreforts vosgiens vers la trouée de Saverne, où la vitesse maximum s'abaisse alors à 120 / 130 km/h.
La ligne de Paris-Est à Strasbourg-Ville constituait la ligne 1 dans l'ancienne nomenclature de la région Est SNCF. D'un point de vue administratif, elle est aujourd'hui formée de deux lignes distinctes : un premier tronçon de 9 km, de Paris-Est à Noisy-le-Sec, faisant partie de la ligne de Paris-Est à Mulhouse-Ville (ligne 001 000)[1], bien que cette dernière ait été réalisée ultérieurement, puis un second, long de 493 km, désigné comme la ligne de Noisy-le-Sec à Strasbourg-Ville (ligne 070 000)[1].
Voies
La ligne (Paris) Noisy-le-Sec – Strasbourg est intégralement à double voie, avec des sections à voies multiples :
Vendenheim – Strasbourg : 4 voies ; la quatrième voie a été mise en service le [8].
La plate-forme est dimensionnée pour 4 voies[Depuis quand ?] de Vitry-le-François à Lérouville et de Blainville à Sarrebourg.
Les 4 voies entre Blainville et Sarrebourg ont été mises en place en 1933, puis déposées en 1943[9].
Ouvrages d'art
Tunnels
Elle comporte 12 tunnels, dont la longueur cumulée est de 8 455 mètres, soit 1,7 % du parcours.
Le tunnel de Chalifert (168 m), situé entre les gares de Lagny et d'Esbly, a été abandonné en raison de son mauvais état. En 1985, une déviation de 2 423 m a été construite au nord de l'ancien tracé, avec un nouveau tunnel légèrement plus long (194 m[10]). L'ancienne plate-forme est conservée dans l'hypothèse d'une future mise à 4 voies du tronçon de Lagny à Meaux, ce qui nécessitera la réfection complète des anciens pont et tunnel, qui n'était pas réalisable sans arrêter complètement les circulations pour une longue durée.
Le tunnel de Hoffmuhl est constitué de deux galeries (328 et 248 m) à voie unique.
Ponts
Elle comporte de nombreux ponts sur des cours d'eau, mais pas de viaducs de grandes dimensions. Le viaduc sur la Zorn, à proximité d'Arzviller, a une longueur de 91 m.
Un saut-de-mouton de changement de sens de circulation est situé au km 426,629, sur le territoire des communes de Xouaxange et d'Imling, peu avant Sarrebourg. Il permet de passer de la circulation à gauche à la circulation à droite comme c'est la règle pour l'ensemble du réseau de l'ex-Alsace-Lorraine.
Les vitesses limites de la ligne en 2012 pour les TGV sur les voies directes, en sens impair (voie 1L1 de Pantin à Lagny - Thorigny), sont indiquées dans le tableau ci-dessous ; toutefois, les trains de certaines catégories, comme les automotrices de banlieue ou les trains de marchandises, sont soumis à des vitesses limites plus faibles[11].
De
À
Limite
Paris-Est (km 0)
km 0,9
30
km 0,9
Bondy (km 10,3)
120
Bondy (km 10,3)
Gagny (km 14,1)
130
Gagny (km 14,1)
Le Chénay-Gagny (km 16,1)
160
Le Chénay-Gagny (km 16,1)
Bif. LGV Est (km 22,7)
220
Bif. LGV Est (km 22,7)
km 41
160
km 41
km 60,3
150
km 60,3
km 85,5
160
km 85,5
Troissy (km 121,5)
150
Troissy (km 121,5)
km 139
160
km 139
km 143,6
150
km 143,6
Châlons-en-Champagne (km 172,2)
160
Châlons-en-Champagne (km 172,2)
Mairy-sur-Marne (km 182,9)
150
Mairy-sur-Marne (km 182,9)
Revigny (km 238)
160
Revigny (km 238)
km 266,5
150
km 266,5
Ernecourt-Loxéville (km 275,6)
160
Ernecourt-Loxéville (km 275,6)
Bif. ligne Lérouville – Pont-Maugis (km 286,4)
150
Bif. ligne Lérouville – Pont-Maugis (km 286,4)
km 291,5
140
km 291,5
Sorcy (km 302,2)
160
Sorcy (km 302,2)
Frouard (km 344,3)
140
Frouard (km 344,3)
Jarville-la-Malgrange (km 355,5)
120
Jarville-la-Malgrange (km 355,5)
Lunéville (km 385,2)
150
Lunéville (km 385,2)
Héming (km 423,3)
160
Héming (km 423,3)
Réding (km 435,2)
140
Réding (km 435,2)
Arzviller (km 442,8)
130
Arzviller (km 442,8)
Stambach (km 453,5)
120
Stambach (km 453,5)
Zornhoff-Monswiller (km 459,8)
130
Zornhoff-Monswiller (km 459,8)
Steinbourg (km 462,5)
140
Steinbourg (km 462,5)
km 498,9
160
km 498,9
km 499,9
130
km 499,9
km 501,3
90
km 501,3
Strasbourg-Ville (km 502)
30
Les vitesses limites de la ligne en 2012 pour les TGV, les AGC et les trains V 160, en sens impair sur les voies locales (1B1), sont indiquées dans le tableau ci-dessous.
Afin d'atténuer le bruit des trains, en particulier celui des rames du TGV Est, une première phase des travaux d'installation d'écrans anti-bruits commence mi-2011 à Chelles et Vaires-sur-Marne, en Seine-et-Marne.
Trafic
Chronologie
: électrification complète entraînant la fin de la traction à vapeur sur la ligne ; exploitation des trains de grandes lignes avec des locomotives électriques BB 16000.
1971 : mise en service des premières BB 15000, plus puissantes, qui remplacent progressivement — sur les trains de grandes lignes — les BB 16000, lesquelles sont mutées sur d'autres réseaux.
: création du TEEKléber, entre Paris et Strasbourg via Nancy.
: création du TEE Stanislas, entre Paris et Strasbourg via Nancy.
1976 : premières circulations des trains Paris – Strasbourg assurés avec des voitures Corail, qui remplaceront progressivement les anciennes voitures — héritées de la Compagnie de l'Est — sur toutes les liaisons de grandes lignes entre Paris et l'Est de la France.
: dernier jour de circulation des trains Corail sur la ligne classique Paris – Strasbourg via Nancy, ce qui va également entraîner la fin des trains de « grandes lignes » (hors TGV) sur cette liaison.
: face à la concurrence croissante du transport par autocar et à la baisse de la fréquentation des TGV dues à des prix jugés trop élevés, la SNCF remet en place des trains Corail, sous la marque commerciale Intercités 100 % Éco. Cependant, ces trains circulent uniquement le week-end (un aller-retour le vendredi, le samedi et le dimanche).
: les Intercités de nuit reliant Luxembourg à Nice et Cerbère (avec arrêts à Nancy et Toul) sont supprimés. Ils empruntaient la ligne entre Frouard et Toul (au nord-ouest de Nancy-Ville, gare où ils devaient rebrousser).
: mise en service de la deuxième section de la LGV Est européenne (entre Baudrecourt et Vendenheim), utilisée par les TGV Paris – Strasbourg en prolongement de la 1re section.
: des TER, assurés par du matériel Corail, sont créés entre Paris et Strasbourg, en assurant deux aller-retours du lundi au vendredi.
: dernier jour de circulation de l'Intercités 100 % Éco précité.
: une liaison Nightjet est créée entre Paris et Vienne, via Strasbourg[12].
: Nightjet lance une liaison entre Paris et Berlin[13].
Entre Strasbourg et Réding (3 km à l'est de Sarrebourg), la ligne est en tronc commun avec le trafic de l'axe Strasbourg – Metz. En attendant la mise en service de la seconde phase de la LGV Est européenne, entre Baudrecourt et Vendenheim, les TGV en provenance de Strasbourg, de Colmar et du sud de l'Allemagne circulaient au maximum à 160 km/h sur la ligne classique jusqu'à la gare de Réding, puis sur la ligne Réding – Metz ; ils bifurquent désormais sur la LGV au nord de la gare de Vendenheim, tout en empruntant une courte section de la ligne de Vendenheim à Wissembourg pour accéder au raccordement concerné. Les quelques TGV desservant Saverne, Sarrebourg et Nancy empruntent la ligne jusqu'à la gare de Frouard, puis la ligne de Frouard à Novéant afin de rejoindre la LGV.
Jusqu'au , le tronçon entre Strasbourg et Réding était emprunté par des trains EuroCity en direction de Metz, de Luxembourg et de Bruxelles. La ligne était également parcourue par le Moscou express, qui reliait Paris à Moscou via Sarrebruck (Strasbourg jusqu'en décembre 2019) ; il ne circule plus depuis 2020. Le seul train de « grandes lignes » à emprunter la ligne de bout en bout, en service commercial régulier, est le Venise-Simplon-Orient-Express (qui ne dessert cependant pas Strasbourg). Les deux relations internationales précitées n'ont toutefois jamais marqué d'arrêt dans les gares intermédiaires, exception faite d'Épernay pour le Paris – Moscou en 2016[14].
Depuis le , la ligne est à nouveau empruntée de bout en bout par des trains Corail, avec le lancement d'une relation Intercités 100 % Éco, les samedis et dimanches[15]. À partir du , ils circulent également les vendredis, en desservant en plus de Nancy les gares de Lunéville, Sarrebourg et Saverne. Ce service est complété du lundi au vendredi par des trains régionaux à long parcours du réseau TER Grand Est (par prolongement d'une liaison « TER Vallée de la Marne »), depuis le ; à partir de , ces TER circulent tous les jours. Néanmoins, l'Intercités 100 % Éco est supprimé en (dernier jour de circulation le 19) ; ainsi, seul subsiste le TER précité[16]. Par ailleurs, un train de nuit « Nightjet », reliant Paris à Vienne via Strasbourg, Munich et Salzbourg, est lancé depuis le [12] ; la liaison Paris – Berlin est ajoutée par Nightjet le [13].
Enfin, elle est empruntée par des trains de marchandises.
Notes et références
↑ abc et dFascicule Gares et lignes du nord, édité par le COPEF (Cercle Ouest Parisien d'Études Ferroviaires) en 1985.
↑« N° 12131 - Loi relative aux chemins de fer de Tours à Nantes, et de Paris à Strasbourg : 19 juillet 1845 », Bulletin des lois du royaume de France, Paris, Imprimerie royale, iX, vol. 31, no 1226, , p. 329-368 (lire en ligne).
↑« N° 12424 - Ordonnance du roi qui approuve l'adjudication passé, le 25 novembre 1845, pour la concession du chemin de fer de Paris à Strasbourg : 27 novembre 1845 », Bulletin des lois du royaume de France, Paris, Imprimerie royale, iX, vol. 31, no 1259, , p. 1092-1094 (lire en ligne).
↑« N° 20167 - Ordonnance du roi portant autorisation de la société anonyme formée à Paris sous la dénomination de Compagnie du chemin de fer de Paris à Strasbourg : 17 décembre 1845 », Bulletin des lois du royaume de France, Paris, Imprimerie royale, iX, vol. 28 « Partie supplémentaire », no 818, , p. 761-776.
↑« Loi approuvant une convention relative à la fixation de nouvelles limites entre les réseaux de l'Est et d'Alsace et de Lorraine : 8 juillet 1933 », Journal officiel de la République Française, Paris, Imprimerie Nationale, no 171, , p. 7672-7673 (lire en ligne).