Ses œuvres font le portrait des processus de production industrielle, des phénomènes naturels, des conflits sociaux et sont marqués par sa sympathie pour le communisme. Ivens est considéré comme l'un des plus grands documentaristes du XXe siècle[3].
Biographie
Le père de Joris Ivens était propriétaire de la société CAPI, une entreprise de vente de matériels de prise de vue et de produits pour la photographie. En 1911, à l'âge de 13 ans, Joris Ivens tourne son premier court métrage, La Flèche ardente, une parodie de western dans lequel il filme toute sa famille déguisée en Indiens d'Amérique[4]. Entre 1917 et 1920, il fait des études d'économie à Rotterdam, puis de photochimie à Berlin. En 1926, il est directeur d'une filiale de la société CAPI à Amsterdam, où il filme ses premiers essais et participe activement au manifeste de la Filmliga d'Amsterdam.
À partir de 1927, sur les traces du cinéaste soviétique Dziga Vertov, il travaille à la réalisation de plusieurs courts métrages expérimentaux : Étude de mouvement à Paris et Le Pont en 1928, Pluie en 1929, et le cycle Nous construisons en 1929 et 1930[5]. Ces films ne sont pas seulement des recherches esthétiques, Joris Ivens cherche à filmer la trace de l'homme dans son environnement. En 1930, répondant à une invitation de Vsevolod Poudovkine, il effectue une tournée de quelques mois en URSS pour présenter ses films. Il y réalise un film de propagande à la gloire du régime stalinien, Komsomol, dans les aciéries de Magnitogorsk[6].
En 1933, il réalise avec Henri Storck l'une de ses œuvres majeures, le documentaire Misère au Borinage, qui dénonce la misère des mineurs et la sauvagerie de l'exploitation prolétarienne dans le Borinage et qui est interdit de projection publique pendant plusieurs années[7].
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Joris Ivens repart aux quatre coins du monde et filme les peuples en lutte pour leur indépendance. En 1946, il tourne Indonesia Calling pendant une grève des dockers et des marins indonésiens contre la colonisation de leur pays. Entre 1947 et 1951, il s'intéresse aux démocraties populaires en Europe centrale et filme Les Premières Années et La paix vaincra. En 1954, il travaille sur un film de montage, Le Chant des fleuves, dans lequel il montre la vie des hommes dans différents pays du monde.
Beaucoup de pays d'Afrique francophone obtiennent leur indépendance au début des années 1960 ; c'est dans ce contexte que Joris Ivens filme les conditions de vie des Maliens pour Demain à Nanguila (1960).
Joris Ivens rencontre Marceline Loridan, de trente ans sa cadette, à l’avant-première d’un documentaire qu'il a réalisé, À Valparaiso, en 1963[9].
En 1964, il filme la troisième campagne électorale présidentielle de Salvador Allende et tourne Le Train de la victoire. Durant cette période, il forme des cinéastes et des techniciens dans les pays où il séjourne. Il met en avant une esthétique du documentaire fondée à la fois sur un travail objectif, mais aussi sur une poésie de l'image. En 1967, il coréalise avec d'autres cinéastes (Claude Lelouch, Alain Resnais, Agnès Varda, Chris Marker, Jean-Luc Godard et William Klein), le film Loin du Vietnam[11].
Durant les années 1970, il tourne très souvent en Asie et notamment en Chine pour chanter la gloire de la révolution communiste. Entre 1971 et 1976, il regroupe plusieurs films sous le titre Comment Yukong déplaça les montagnes. Cette série de 12 films sur la Chine représente plus de 11 heures de projection et exprime diverses perceptions d'un pays alors en pleine mutation[12]. Le philosophe Bernard Sichère, militant maoïste dans les années 1970, juge avec le recul ce documentaire « inouï [...], irremplaçable dans le dogmatisme même de son parti pris »[13].
Pour son ultime film, Une histoire de vent, il retourne en Chine en 1988 alors l'aube de son 90e anniversaire. Ce documentaire est co-réalisé avec son épouse Marceline Loridan-Ivens, sa collaboratrice sur de nombreux projets. Ce dernier film est une œuvre lyrique, dans laquelle le cinéaste raconte son histoire, celle d'un homme qui tente de filmer le vent[14].
« L'art d’Ivens se qualifie en trois mots : l’amour des autres… Cette profonde humanité qui fait la fraîcheur et la jeunesse éternelle d’Ivens, cette vocation fraternelle qui l’entraîne à travers le monde pour se mettre au service de l’homme, l’aider à se faire entendre, à exposer ses problèmes, à chercher leurs solutions. Voilà ce qui caractérise l'unité de l'œuvre et de la vie d’Ivens. »
Depuis 1990, il existe une Fondation européenne Joris Ivens installée à Nimègue.
Filmographie
Les films d'Ivens ont été montrés à des millions de spectateurs, principalement dans les pays socialistes. En France, beaucoup furent interdits et peu sortirent commercialement.
↑(es) « Real Decreto 1727/1983, de 22 de junio, por el que se concede la Medalla al Mérito en las Bellas Artes, en su categoría de oro, a don Julio Caro Baroja », Boletin Oficial del Estado, Madrid, no 150, , p. 18387 (lire en ligne).
Anonyme (rencontre avec Joris Ivens), « Bonjour, Joris Ivens! », Téléciné no 127, Paris, Fédération des Loisirs et Culture Cinématographique (FLECC), , p. 3-6, (ISSN0049-3287)