Comédie-Italienne ou Théâtre-Italien sont des noms qui ont été utilisés pour les pièces de théâtre de langue italienne lorsqu'elles ont été jouées par de nombreuses troupes en France, notamment à Paris.
La première utilisation officielle du nom de Comédie-Italienne remonte à 1680, année où il fut attribué à la troupe pour la distinguer de la troupe de la Comédie-Française, fondée cette année-là, et de la même manière que le nom de Théâtre-Français était couramment appliqué à ce dernier, le Théâtre-Italien était utilisé pour les Italiens. Au fil du temps, des phrases, des chansons, des scènes entières et éventuellement des pièces de théâtre françaises ont été incorporées dans les présentations de la Comédie-Italienne. En 1762, la troupe fusionnera avec l'Opéra-Comique, mais les noms continuèrent d'être utilisés, même si le répertoire devint bientôt presque exclusivement opéras-comiques. Les noms ont été complètement abandonnés en 1801, lors de la fusion de la compagnie avec le théâtre Feydeau.
De 1801 à 1878, le Théâtre-Italien a été utilisé pour une succession de troupes d'opéra parisiennes interprétant en italien. Depuis 1980, le nom de Comédie Italienne est utilisé pour un théâtre dans le quartier du Montparnasse, qui présente des pièces italiennes de la commedia dell'arte en traduction française.
La première troupe professionnelle, les Gelosi, occupe de 1600 à 1604 l'hôtel de Bourgogne, après deux tentatives malheureuses en 1577 et 1588. Ils sont suivis par plusieurs autres troupes, notamment celle des Comici fedeli entre 1610 et 1623 et celle de Giuseppe Bianchi qui s'installe en 1645 dans l'hôtel du Petit-Bourbon, salle qu'elle partage à partir de 1658 avec la troupe de Molière.
Après la destruction du Petit-Bourbon en 1660, les comédiens italiens sont transférés au Palais-Royal puis prennent possession en 1680 de l'hôtel de Bourgogne, rue Mauconseil (absorbée par la rue Étienne-Marcel). Ils s'y produisent avec succès jusqu'en 1697. L'annonce des représentations de La Fausse Prude, une pièce qui visait directement Madame de Maintenon[1], sert cette année-là de prétexte à Louis XIV pour fermer le théâtre (). Dès lors, la troupe se disperse et gagne la province.
Les comédiens italiens reviennent à Paris sous la Régence en 1716 et profitent de la protection du duc d'Orléans pour reprendre leurs représentations, sous la direction de Luigi Riccoboni, à l'hôtel de Bourgogne. La première pièce française de leur répertoire est Le Naufrage au Port-à-l'Anglois (1718) de Jacques Autreau. Pourvu d'une rente annuelle de 15 000 livres, ils enrichissent leur répertoire au fil des ans en abordant le répertoire lyrique, rivalisant dès lors avec la troupe de l'Opéra-Comique de Jean Monnet.
Cette concurrence débouche sur une fusion des deux troupes en 1762 sous le nom de Comédie-Italienne ou Opéra-Comique-Italien. Mais à la suite d'un arrêté de 1779 interdisant les comédies en italien, l'appellation Opéra-Comique lui est substituée, les artistes français étaient désormais en majorité. Les derniers comédiens italiens sont quant à eux renvoyés chez eux.
À l'étroit rue Mauconseil, l'Opéra-Comique inaugure sa nouvelle salle construite par l'architecte Jean-François Heurtier sur l'emplacement de l'hôtel du duc de Choiseul (IIe arr.) le . Elle est baptisée théâtre Favart, puis Opéra-Comique national.
Mais une nouvelle concurrence voit le jour : le Léonard-Alexis Autié, coiffeur de la reine Marie-Antoinette, et le violoniste Giovanni Battista Viotti, débarqué de Turin à la tête d'une nouvelle compagnie italienne, obtiennent du roi Louis XVI le privilège d'exploiter à nouveau le répertoire des opéras-comiques français et italiens. La troupe, baptisée théâtre de Monsieur en raison de la protection qui lui était offerte par Monsieur, frère du roi (futur Louis XVIII), s'installa dans la salle des Machines du palais des Tuileries puis le au tout nouveau théâtre Feydeau, distant de seulement quelques mètres de la salle Favart, sous le nom de Théâtre Français et Italien de la rue Feydeau.
Le XIXe siècle
Le , a lieu la fusion des deux troupes sous le nom d'Opéra-Comique. Hébergé salle Favart, puis de 1802 à 1823 au théâtre Feydeau, il reviendra ensuite salle Favart.
Les Italiens n'avaient pas pour autant dit leur dernier mot : Mlle Montansier, qui avait déjà fait édifier plusieurs théâtres, recrée dès 1801 une nouvelle troupe appelée Opera-Buffa, rapidement surnommée Italiens, au théâtre Olympique, rue de la Victoire pour jouer aussi bien rue de la Victoire (IXe arr.). En 1802, Napoléon Bonaparte, alors premier consul, décide son transfert dans la salle Favart (qui vient d'être abandonnée par la troupe de l'Opéra-Comique après sa fusion avec celle du théâtre Feydeau), jugeant cette dernière plus prestigieuse. Elle n'y reste toutefois que deux ans, la quittant à son tour en 1804 à l'occasion de travaux de restauration, pour fusionner avec la troupe du théâtre Louvois sous la direction de Louis-Benoît Picard et devenir le théâtre de l'Impératrice. Leur subsistance est assurée en 1807 par un décret fixant le nombre de salles parisiennes à huit (dont l'Opéra, l'Opéra-Comique, la Comédie-Française et le Théâtre de l'Impératrice, qui se voit attribuer pour l'occasion l'Odéon) mais ils ne peuvent plus représenter que des opéras-bouffes, un théâtre de cour privé créé par Napoléon ayant le privilège des opere serie aux Tuileries ou à Saint-Cloud.
Le , profitant du changement de régime, la cantatriceAngelica Catalani obtient de Louis XVIII d'un nouveau privilège lui permettant d'exploiter le répertoire italien. Rebaptisée Théâtre royal italien, la troupe occupe la salle Favart en 1815 puis, en 1819, à nouveau le Louvois (qu'elle partage en 1820-1821 avec l'Opéra). Sa direction est assurée au cours des années par Spontini, Paër et Rossini (en 1824).
En 1825, les Italiens regagnent la salle Favart, rachetée pour eux par Charles X, sous l'appellation désormais populaire de Théâtre-Italien. Laurent, puis Robert et Severini obtiennent successivement le privilège mais l'incendie de la salle le les chasse à nouveau. Ils passent alors de la salle Ventadour à l'Odéon, où débute la mezzo Pauline Viardot (sœur de la Malibran), puis au théâtre de la Renaissance, pour revenir le salle Ventadour et ne plus la quitter.
Le , la soprano italienne Marietta Piccolomini chante pour la première représentation de l'opéra de Giuseppe VerdiLa traviata au Théâtre-Italien. L'impératrice Eugénie, n'ayant pu assister à ce spectacle salué par les critiques et le public, ordonna à son directeur de l'époque, Calzado, de donner une représentation supplémentaire pour elle et son époux, Napoléon III[réf. nécessaire].
Mais le décret de 1864 rétablissant la liberté des théâtres relance une concurrence que les Italiens ne parviennent pas à endiguer. Après plus de 35 ans de services, le Théâtre-Italien disparait définitivement à la fermeture de la salle en 1878.
Dans cette petite salle sont programmées des pièces d’auteurs italiens, classiques (de Ruzzante à Carlo Goldoni) et contemporains, jouées en français. Le théâtre comprend aussi une école de commedia dell'arte ouverte aux jeunes comédiens où sont enseignées les techniques du jeu masqué traditionnel, animalier, baroque et autres.
Le Théâtre-Italien présente pour sa part des œuvres de Paër, Mozart ou Cimarosa, ainsi que les grands opéras de Rossini, venu s'installer à Paris en 1823. Ainsi le , Il viaggio a Reims (Le Voyage à Reims) y est créé avec une distribution exceptionnelle réunissant les plus grands chanteurs européens de l'époque en l'honneur du sacre de Charles X. Il monte par la suite les succès de Meyerbeer et de Verdi.
Castil-Blaze, L'Opéra italien de 1645 à 1855, Paris, Castil-Blaze, 1856.
Émile Campardon, Les Comédiens du roi de la troupe italienne, Paris, Berger-Levrault, 1880, 2 vol.
Albert Soubies, Le Théâtre italien de 1801 à 1913, Paris, Fischbacher, 1913.
Guy Boquet, « Les Comédiens Italiens à Paris au temps de Louis XIV », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. 26, no 3, , p. 422-438 (lire en ligne).
(it) Renzo Guardenti, Gli italiani a Parigi: La Comédie-Italienne (1660-1697). Storia, iconografia, pratica scenica, Roma, Bulzoni, 1990, 2 vol.
François Moureau, De Gherardi à Watteau: Présence d'Arlequin sous Louis XIV, Paris, Klincksieck, 1992.
Philippe Chauveau, Les Théâtres parisiens disparus (1402-1986), Ed. de l'Amandier, Paris, 1999 (ISBN2-907649-30-2)