SYRIZA trouve ses origines dans une coalition de partis de gauche et d'extrême gauche fondée en 2004. Celle-ci comprenait un large spectre de formations politiques (treize au total) et de politiciens indépendants, comme des communistespro-européens (eurocommunisme), des écologistes, des socialistes et des eurosceptiques. Aléxis Tsípras, ancien président de Synaspismós, le mouvement le plus important de la coalition, en devient le président le . La coalition est transformée en parti en 2013. SYRIZA est membre du Parti de la gauche européenne[22].
Lors des élections législatives de 2015, il obtient 36,3 % des voix et une quasi-majorité de sièges au Parlement[24]. Douze membres du parti sont membres du gouvernement Tsípras.
En 2019, SYRIZA perd quasiment la moitié de ses sièges, redevenant (4 ans après son accession au pouvoir - avec 86 sièges), un parti d'opposition derrière Nouvelle Démocratie de Kyriákos Mitsotákis.
La principale composante de SYRIZA, Synaspismós, se revendique également de l'écosocialisme[37] et de l'eurocommunisme[38], mais au sein de la coalition il y a aussi des réalités politiques bien différentes qui se réfèrent plus ou moins explicitement au maoïsme et au trotskysme[39].
SYRIZA a été décrit comme un parti antisystème[40], dont le succès a créé « une onde de choc dans l'Union européenne »[41]. Bien qu'il ait abandonné son ancienne identité, celle d'une voix de protestation de la gauche dure, devenant plus populiste de gauche, et qu'il ait déclaré qu'il n'abandonnerait pas la zone euro[42], son président Aléxis Tsípras a déclaré que « l'euro n'est pas mon fétiche »[43]. Le vice-président du Parlement européen et eurodéputé de Syriza, Dimítrios Papadimoúlis, a déclaré que la Grèce devrait « être un membre respectable de l'Union européenne et de la zone euro »[44], et qu'« il n'y a absolument aucune raison pour un Grexit »[45]. Tsipras a précisé que Syriza « ne soutient aucune forme d'euroscepticisme »[46], bien que le parti ait été considéré par certains observateurs comme une force eurosceptique douce pour avoir prôné une autre Europe sans austérité ni néolibéralisme[47]. Depuis qu'il gouverne, le parti a adopté une position plus pro-européenne, affirmant que ses réformes réglementaires, tout en restant dans la zone euro, permettaient au gouvernement, selon les termes de Filippa Chatzistavrou, « de mieux traiter les externalités négatives et les retombées entre la Grèce et les autres États membres de l'UE »[13]. En 2019, Syriza est devenu un grand parti de centre gauche, profitant de l'effondrement du PASOK, parti traditionnel de centre-gauche[13]. Tsipras a déclaré que son objectif était de construire un large front progressiste sans abandonner l'idéologie de base du parti et la coalition de gauche[48]. En outre, bien que le parti compte de nombreux adhérents de religion chrétienne, il défend la laïcité et dénonce les privilèges dont bénéficie l'Église orthodoxe de Grèce en tant que religion d'État[49].
En ce qui concerne les politiques économiques, SYRIZA s'est toujours déclaré contre les politiques néolibérales de l'Union européenne et, en général, les institutions économiques internationales. Le parti politique propose pour y contrer une « justice sociale » et une « protection des droits fondamentaux »[50],[51],[52].
Augmenter l'impôt sur le revenu à 75 % sur tous les salaires au-dessus de 500 000 €.
Interdire aux policiers de porter des masques et des armes à feu durant les manifestations. Réviser la formation des policiers sur les questions sociales.
Soins médicaux, et pharmaceutiques gratuits, pour les chômeurs sans assurance.
Programme de repas subventionnés pour 300 000 familles sans revenus.
Électricité gratuite pour 300 000 foyers.
Abolir les privilèges fiscaux dont jouissent l'Église et les armateurs.
Combattre le secret bancaire et la fuite des capitaux à l’étranger.
Utiliser les bâtiments du gouvernement, des banques et des églises pour loger les sans-abri.
Ouvrir des cafétérias dans les écoles publiques pour offrir un petit-déjeuner et un déjeuner gratuits aux enfants.
Égalité de rémunération entre hommes et femmes.
Réformer la constitution pour garantir la séparation entre l'Église et l'État et la protection du droit à l'éducation, à la santé et à l'environnement.
Retrait des troupes grecques d'Afghanistan et des Balkans: pas de soldat en dehors des frontières de la Grèce.
Abolir les accords de coopération militaire avec Israël. Soutenir la création d'un État palestinien sur les frontières de 1967.
Fermer toutes les bases étrangères en Grèce et quitter l'OTAN.
En , un député de SYRIZA, Tasos Kourakis présente au Parlement grec un projet de loi qui prévoit la séparation de l'Église et de l'État, jamais réalisé dans le pays. Des projets comme ceux-ci montrent la forte présence des idées laïques au sein du parti, soutenues par ses membres[55].
Positionnement politique
Opposé à l'orientation libérale de la politique de l'Union européenne actuelle, SYRIZA est, à son arrivée au pouvoir, décrit par les journalistes et commentateurs politiques, comme appartenant à l'extrême gauche[8],[9],[10] ou à la gauche radicale[56],[57],[58],[59].
Le congrès de 2022 de SYRIZA est marqué par le débat entre deux lignes, l’une, majoritaire, visant à faire du parti une « alliance progressiste » rassemblant toutes les sensibilités de la gauche ; l’autre poussant la formation à se forger son propre espace politique sur une ligne de transformation sociale[61]. Le repositionnement du parti au centre gauche est sanctionné par les électeurs aux législatives de 2023, avec seulement 20 % des voix, Syriza n'étant plus perçue comme capable de changer en profondeur la société[62].
Histoire
Création
Le processus de formation de SYRIZA fut lent et long. Le parti trouverait ses origines dans l'« Espace de dialogue pour l'unité et l'action commune de la gauche » (Χώρος Διαλόγου για την Ενότητα και Κοινή Δράση της Αριστεράς) né en 2001 pour débattre de questions telles que la guerre au Kosovo ou les privatisations.
Cet Espace amena à la création de coalitions électorales pour les élections locales de 2002. Une de ces coalitions les plus efficaces fut celle menée dans la circonscription d'Athènes-Le Pirée par Manólis Glézos.
La naissance officielle de SYRIZA est cependant liée aux élections législatives de 2004 [réf. souhaitée]. Les membres de l'Espace créèrent en effet alors un programme qui pourrait servir à une alliance électorale. Les partis fondateurs de cette alliance sont le Synaspismós, la Gauche du renouveau écologique et communiste (AKOA), la Gauche ouvrière internationaliste (DEA), le Mouvement de la gauche unifiée dans l'action (KEDA) (une scission du KKE), les Citoyens actifs (une organisation proche de Manólis Glézos).
SYRIZA recueillit 241 539 voix (3,3 %) et six députés, tous membres du Synaspismós, ce qui entraîna des tensions dans la coalition.
Crise et réconciliation
Les petits mouvements membres de SYRIZA accusèrent le Synaspismós de ne pas tenir l'engagement pré-électoral selon lequel un des élus démissionnerait pour permettre à Yannis Banias, représentant de l'AKOA, de siéger. La Gauche ouvrière internationaliste fit alors scission, ainsi que le Synaspismós qui décida de faire dorénavant cavalier seul pour les élections européennes de 2004.
Finalement, en , le 4e congrès du Synaspismós décida de revenir au sein de SYRIZA. Cette volonté fut matérialisée par l'élection d'Alekos Alavanos à la tête du Synaspismós.
SYRIZA, à laquelle se joignit la KOE, un mouvement communiste, ainsi qu'Intervention écologique, créa la surprise en recueillant 360 000 voix, soit plus de 5 %, et obtint 14 sièges principalement dans les grandes villes.
Échec aux élections européennes et nouvelle crise
En , SYRIZA était créditée par divers sondages de 7,5 % des intentions de vote. Mais la coalition obtint moins de 5 % des voix aux élections européennes. Alekos Alavanos blâma le nouveau représentant du Synaspismós, Aléxis Tsípras, pourtant son ancien protégé et successeur à la tête du Synaspismós. Il lui reprocha d'avoir nommé en tête de liste un eurosceptique convaincu. La coalition entra alors en crise[63]. Une partie en sort en 2010 pour fonder un nouveau parti, la Gauche démocrate (Grèce).
Lors des élections législatives anticipées du 6 mai 2012, SYRIZA fit une percée plus ample que prévu par les sondages avec 1 061 265 voix, soit 16,78 % (+ 12,18) et 52 députés à la Vouli (+ 39), et, à la suite de l’effondrement du PASOK (13,2 %, 41 députés), devint la première force à gauche et la deuxième du pays, derrière la Nouvelle Démocratie (18,85 %, 108 députés) et devant le PASOK[64].
Sa représentante Sofía Sakoráfa fut la parlementaire qui obtint le plus grand nombre de suffrages[65].
De la coalition au parti unitaire
Comme le système politique grec n'accorde la prime majoritaire (50 députés en plus de ceux élus à la proportionnelle intégrale) qu'aux partis politiques, et non pas aux coalitions de partis, SYRIZA décida de se transformer en parti politique. Le , le parti « SYRIZA Front Unioniste Social » (ΣΥΡΙΖΑ Ενωτικό Κοινωνικό Μέτωπο) fut déclaré auprès du procureur de la Cour suprême [réf. souhaitée]. L'emblème resta le même et le président de ce nouveau parti toujours Aléxis Tsípras. Il était géré et représenté par un comité directeur de 19 membres[66],[67].
Il est à noter que SYRIZA avait auparavant réussi à former une alliance avec Pacte social(en)[68].
Lors des élections législatives grecques du 17 juin 2012, SYRIZA connut à nouveau une très forte progression de plus de 60 %, obtenant 1 655 053 voix soit 26,89 % des suffrages exprimés. Elle gagna 19 sièges supplémentaires à la Vouli pour atteindre un total de 71 députés.
Le parti Nouvelle Démocratie réussit cependant à la devancer et parvint à former avec le PASOK et la Gauche démocrate (DIMAR) une coalition favorable au maintien des engagements envers l'UE, la BCE et le FMI, tout en insistant sur la nécessité de renégocier les termes du « mémorandum » conclu. La SYRIZA a fait entendre qu'elle est prête à une « opposition constructive » à cet égard.
Les députés de Syriza reversent une partie de leurs indemnités à l’organisme grec Solidarity4all, qui finance les cuisines et les pharmacies sociales, les dispensaires militants, les programmes de soutien juridique, etc[70].
Évolution en 2013
Le , en déplacement dans la ville de Patras, Alekos Alavanos annonça son intention de créer un nouveau parti à gauche, qui participerait aux prochaines élections séparément de SYRIZA et dont l'axe programmatique central serait la sortie de la Grèce de la zone euro (qui est également une revendication du KKE). Il proposerait la mise en place d’un « Plan B » : « interruption de tout paiement destiné à satisfaire les « créanciers » du pays, sortie de l'euro et réintroduction d’une monnaie nationale, autrement dit des liquidités massivement injectées sur le marché intérieur lui permettant déjà une certaine reprise du marché intérieur, et le renforcement des capacités d'exportation »[71]. Le parti Plan B, scission de SYRIZA, est créé en [72].
SYRIZA prévoit d'organiser son Congrès en afin de changer son mode d'organisation. Ce Congrès devrait être l'occasion de fusionner les composantes de la coalition en un seul parti[73]. Ce changement est nécessaire eu égard au mode de scrutin législatif grec qui accorde une prime majoritaire en termes de siège au parti arrivé en tête des suffrages[74].
Programme de Thessalonique
À l'occasion de l'exposition commerciale internationale de Thessalonique, qui s'est déroulée le , le président de SYRIZA, Aléxis Tsípras dévoile une série de mesures économiques contre l'austérité. Celles-ci constitueront le programme de Thessalonique, les bases de l'engagement économique de la coalition de gauche en cas de victoire aux élections[75].
Aléxis Tsípras choisit de former un gouvernement de coalition avec les Grecs indépendants, une formation politique composée de dissidents de l'aile droite de Nouvelle Démocratie opposés aux mesures d'austérité[77].
Lors de la période de tension dans les négociations internationales en juin autour de la crise de la dette publique grecque, SYRIZA soutient le « non » lors du référendum grec de 2015 proposé par le Premier ministre. Cependant le ministre des finances Yánis Varoufákis doit démissionner du gouvernement[78]. Le , la très grande majorité des députés du parti apportent leur soutien aux ultimes propositions du gouvernement, dont certaines ont une tonalité austéritaire, ce qui conduit quelques déçus à manifester leur déception place Syntagma[79].
Le , 25 députés, principalement issu du courant Plate-forme de gauche[80], menés par Panayiótis Lafazánis, qui n'acceptent pas l'accord avec la Troïka[81], quittent SYRIZA et fondent un nouveau parti, appelé Unité populaire[81].
Exercice du pouvoir
Bien que remportant les élections législatives de 2015 sur un programme anti-austérité, Aléxis Tsípras s'est vu dans l'obligation d'appliquer des mesures d'austérité comme la hausse de la TVA, le recul de l'âge de la retraite à 67 ans de manière rétroactive et la baisse des retraites des fonctionnaires[82].
Ce retournement se justifie pour Tsípras par sa volonté d'éviter un scénario catastrophique d'une sortie de la Grèce de la zone euro. Ses choix n'entament toutefois pas la confiance des délégués du parti qui le reconduisent très largement à la tête de Syriza avec plus de 90 % des voix[83].
Depuis 2019 : perte du pouvoir et affaiblissement politique
Cette défaite est alors analysée comme la conséquence du « désenchantement populaire » et de « l'échec d'une gauche radicale qui avait promis d'en finir avec l'austérité ». Par ailleurs, alors que, selon Filippa Chatzistavrou, professeur de sciences politiques à l’université d’Athènes, « nombre de ses électeurs attendaient des réformes hors du champ économique et budgétaire, comme la séparation de l’Eglise et de l’Etat, la réforme de l’administration ou la lutte contre la corruption », celles-ci n’ont pas été menées. Toujours selon Filippa Chatzistavrou, SYRIZA est un mouvement autrefois pluraliste devenu un parti avec ses « apparatchiks » et un fonctionnement « assez peu démocratique, de plus en plus hiérarchisé »[85].
Aux élections législatives de juin 2023, SYRIZA est la grande perdante se voyant « infliger un camouflet » encore plus importants qu'aux élections de mai de la même année, avec 17,8 % des voix pour 47 sièges. L'ancien Premier ministre Alexis Tsipras, n'a pas réussi à mobiliser derrière le naufrage d'un bateau de migrants au large des côtes grecques, ayant fait 80 morts et des centaines de disparus[86].
↑Yiannos Katsourides, Radical Left Parties in Government: The Cases of SYRIZA and AKEL, Palgrave Macmillan, , p. 58
↑della Porta, Donatella, et al., Movement Parties Against Austerity, John Wiley & Sons,
↑Işıl Zeynep Turkan İpek, The Impact of SYRIZA Politics on Turkish-Greek Relations, , p. 43
↑(en) Rachel Donadio, « Leftist Party’s Rise Upends Greek Political Order », sur nytimes.com, (consulté le ) : « On the spectrum, Syriza falls between the Greek Communist Party, which never broke with Moscow during the cold war and rejects the euro and the European Union, and the Socialist Party, known as Pasok, which is seen as more of a patronage network than an ideology. Syriza is an umbrella of leftist parties ranging from softer-line communists to Marxists to social democrats. The “radical” in its Greek name translates more accurately as “nontraditional.” ».
↑ a et bGlobal Struggles and Social Change: From Prehistory to World Revolution in the Twenty-First Century, JHU Press, (ISBN9781421438634, lire en ligne), p. 133 :
« The Arab Spring, the Latin American Pink Tide, the Indignados in Spain, the Occupy movement, the rise of progressive social movement–based parties in Spain (Podemos) and in Greece (Syriza), and the spike in mass protests in 2011 and… »
↑(en) Prebble Q. Ramswell, Euroscepticism and the Rising Threat from the Left and Right: The Concept of Millennial Fascism, Lexington Books, , 87 p. (ISBN978-1-4985-4604-1, lire en ligne)
↑Sarantis Michalopoulos, « Moscovici: Leftist Syriza government is not populist », sur Εuractiv : « As far as the Greek government is concerned, Moscovici was clear. “The left has the capacity to govern. I cannot consider Syriza today as a populist party,” »
↑(en) Harry Nedelcu, « Tribunes and Patricians : Radical Fringe parties in the 21st Century », Review of European and Russian Affairs, no 7, (ISSN1718-4835, lire en ligne).
↑(en) Rachel Donadio, « Leftist Party’s Rise Upends Greek Political Order », sur nytimes.com, (consulté le ) : « On the spectrum, Syriza falls between the Greek Communist Party, which never broke with Moscow during the cold war and rejects the euro and the European Union, and the Socialist Party, known as Pasok, which is seen as more of a patronage network than an ideology. Syriza is an umbrella of leftist parties ranging from softer-line communists to Marxists to social democrats. The “radical” in its Greek name translates more accurately as “nontraditional.” ».
Dimitri Kitsikis, « Le Synaspismos, tiraillé entre social-démocratie et anarchisme », Grande Europe, La Documentation française, no 16, (lire en ligne, consulté le ).