Alexandre Guérin habite la région lyonnaise. Cadre bancaire épanoui d'une quarantaine d'années, époux d'une femme aimante et père de cinq enfants, c'est un catholique pratiquant, tout comme sa famille. Un jour, après une conversation avec un camarade jadis scout comme lui, il se rappelle les abus sexuels dont, enfant, il a été victime de la part d'un prêtre catholiquepédocriminel, le père Bernard Preynat. Les faits sont prescrits. Mais, assailli de souvenirs douloureux, Alexandre décide d'entreprendre une enquête. Il entre en contact avec la psychologue de l'archevêché, Régine Maire. Par son entremise, il obtient un rendez-vous avec le cardinalPhilippe Barbarin, archevêque de Lyon. Il découvre alors que malgré l'alerte de plusieurs parents, l'Église a étouffé l'affaire. Régine Maire organise une brève confrontation entre Alexandre et le père Preynat, qui se conclut par une prière commune quasi suréaliste[non neutre]. Malgré les nombreux courriers électroniques d'Alexandre, les autorités ecclésiastiques tergiversent et se défaussent. Pire, lors d'une messe, Alexandre constate que le père Preynat, maintenu en fonctions, se trouve toujours au contact d'enfants.
Alexandre ne parvient pas à trouver d'autres victimes qui accepteraient de témoigner. Il décide donc de déposer plainte seul. Le capitaine Courteau, qui a reçu sa déposition, recherche des victimes pour lesquelles les faits ne seraient pas prescrits. C'est ainsi qu'il rencontre François, aujourd'hui athée. Ce dernier décide de témoigner devant les médias et crée, à cette fin, l'association La Parole libérée. D'autres victimes le rejoignent, dont le chirurgien Gilles et Emmanuel, un être tourmenté qui garde de lourdes séquelles. Alexandre s'unit à eux. Ensemble, ils entament une action judiciaire.
Soumis à une pression grandissante et pressé d'agir par Régine Maire, le cardinal Philippe Barbarin organise une conférence de presse. Mais il laisse échapper que les faits sont « grâce à Dieu prescrits ». Cette parole malheureuse choque l'assistance. L'association obtient la mise en examen du père Preynat, qui reconnaît les faits. Les plaignants espèrent que leur action interpellera la hiérarchie catholique. Mais tous auront été confrontés à leur famille et à eux-mêmes. Alexandre s'interroge sur sa foi chrétienne.
Fiche technique
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Titre original : Grâce à Dieu
Titre anglophone international : By the Grace of God
Sociétés de production : Mandarin Cinéma ; FOZ et Scope Pictures, avec la participation de France 2 Cinéma ; en association avec les SOFICA A+ Images 8 et Manon 8
Le titre Grâce à Dieu a pour origine la phrase suivante prononcée par le cardinal Barbarin, en , lors d'une conférence de presse, à propos des accusations portées contre le père Preynat : « La majorité des faits, grâce à Dieu, sont prescrits, mais certains peut-être pas[5],[6],[7] », le cardinal remerciant immédiatement après, un journaliste qui l'interroge sur « la violence » de son propos, et jugeant « maladroite » la formulation de celui-ci[8]. Selon certains de ses proches, il voulait dire que la majorité des faits reprochés au père Preynat étant prescrits, cela signifiait peut-être qu'heureusement aucun autre ne s'était produit depuis 1991[9].
Initialement prévu en tant que documentaire, François Ozon opte pour le choix de la fiction. En 2023, Claire Duguet réalise un documentaire Il était une fois… « Grâce à Dieu » sous forme de court métrage, qui décrit le projet et le déroulement du tournage en collaboration avec une partie de l'équipe du film[10].
Le film reçoit de très bons retours, avec une note moyenne de 4,1/5 pour 34 titres de presse sur Allociné.
Elle accorde la note de 5/5 au film, « Un film engagé et brillant »[12]. Le Figaro écrit que « François Ozon traite avec rigueur du sujet de la pédophilie dans l'Église »[13].
Avant la sortie en salle prévue le , François Ozon est assigné en référé[17] deux fois car la défense veut obtenir le report de la sortie du film ou le retrait de la bande sonore des noms de Régine Maire et Bernard Preynat en raison de la protection de la vie privée pour la première et de la présomption d'innocence pour le second[18],[19],[20]. François Ozon se défend d'avoir établi un portrait à charge contre Régine Maire[21] et estime que son film « n’invente ni ne dit rien qui n’ait déjà été porté à la connaissance du public par la presse, les livres ou les documentaires consacrés déjà à cette affaire »[22]. Le , le tribunal de grande instance de Paris se prononce pour la sortie du film à la date initialement prévue, en relevant que le procès de Bernard Preynat n’est ni fixé ni prévu à une date proche et qu'un report « pourrait à l’évidence conduire, compte tenu des divers recours possibles, à ne permettre la sortie du film que dans plusieurs années » dans des conditions qui « porteraient atteinte à la liberté d’expression et de création » et « créeraient des conditions d’exploitation économiques insupportables »[23]. La demande de Bernard Preynat de suspension de l’exploitation du film est rejetée par la cour d’appel de Paris en [24]. Par ailleurs, le recours de Régine Maire, qui souhaitait que son nom soit retiré du film[25], est rejeté par le tribunal de grande instance de Lyon mardi [26],[27]. En , le pourvoi en cassation de Bernard Preynat est rejeté, indiquant que le film s'inscrivait dans un « débat d'intérêt général »[28].
Les Noces rouges, film de Claude Chabrol sorti en 1973, reste ainsi le dernier film français relatant une affaire judiciaire à avoir vu sa sortie reportée de 15 jours sur décision administrative et non judiciaire, car cette sortie devait tomber au beau milieu du procès aux assises[29].
Le scénario du film, ainsi que de nombreux documents utilisés dans son élaboration, ont également été retranscrits dans un texte théâtral publié par Les Solitaires intempestifs sous le même titre[31].
↑Renaud Machart, « Il était une fois… « Grâce à Dieu », sur Arte : retour sur le tournage du film de François Ozon », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑ a et bThomas Sotinel, « Berlinale : l'Ours d'or remis à Nadav Lapid pour Synonymes », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑« François Ozon : « L'Église est en train de prendre conscience du problème » de la pédophilie », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Pédophilie dans l'Église : la justice refuse le report de la sortie du film de François Ozon, Grâce à Dieu », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Pédophilie dans l'Église : le film Grâce à Dieu pourra être diffusé en VOD et à l’international », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
Caroline Girardon, « Lyon : « La mise à nu n'est pas toujours agréable », les victimes du père Preynat se confient sur le dernier film de François Ozon », 20 Minutes, (lire en ligne).
Entretien avec François Ozon. Propos recueillis par Philippe Rouyer et Yann Tobin, « La parole était forte, il fallait la restituer », Positif, no 696, Paris, Institut Lumière/Actes Sud, , p. 15-19, (ISSN0048-4911).