Le Dicastère pour la Doctrine de la foi ou DDF (auparavant Congrégation pour la Doctrine de la foi) est l'une des neuf congrégations actuelles de la Curie romaine. Il a remplacé en 1965 la Sacrée congrégation du Saint-Office[1], qui a elle-même succédé à l'Inquisition romaine (de son nom complet « Sacrée Congrégation de l'Inquisition romaine et universelle ») instaurée initialement pour combattre les hérésies et les apostasies. Il joue un rôle déterminant au sein de l'Église catholique avec pour mission de « promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique ».
Historique
Le pape Paul III avait fondé une Sacrée congrégation de l'inquisition romaine et universelle, par la bulle Licet ab initio(de), le . Cette première congrégation permanente avait pour mission de lutter contre les hérésies, et plus particulièrement de faire obstacle au protestantisme[1].
Le pape Sixte V l'a conservée en première place de sa constitution apostoliqueImmensa æterni Dei introduisant en 1588 quinze congrégations permanentes pour gouverner l'Église et les États pontificaux.
Le pape Pie X a réformé cette institution le et l'a remplacée par la « Sacrée congrégation du Saint-Office ». Elle avait pour rôle de veiller à la pureté de la doctrine et des mœurs.
Le pape Paul VI a substitué au Saint-Office la Congrégation pour la doctrine de la foi à la suite du motu proprioIntegræ servandæ(en)[3], du , la veille de la clôture du concile Vatican II[4]. Il fit prévaloir sur l’aspect punitif de la condamnation l’aspect positif de la correction de l’erreur, de la garde, de la préservation et de la promotion de la foi.
Jean-Paul II a précisé sa fonction actuelle en 1988 par la constitution apostoliquePastor Bonus : « La tâche propre de la Congrégation pour la doctrine de la foi est de promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique : tout ce qui, de quelque manière, concerne ce domaine relève donc de sa compétence[5] ». De 1981 à 2005, elle est présidée par le cardinalJoseph Ratzinger qui deviendra le pape Benoît XVI. Avec la Congrégation pour la doctrine de la foi, l'Église a définitivement abandonné la structure et les méthodes de l'Inquisition. Comme l'explique Jean-Paul II[6] :
« L'institution de l'Inquisition a été abolie. Comme j'ai eu l'occasion de le dire aux participants au Symposium [Symposium international sur l'Inquisition, organisé au Vatican du 29 au 31 octobre 1998 par la Commission historique et théologique du Comité pour le grand Jubilé de l'An 2000], les fils de l'Église ne peuvent manquer de revenir dans un esprit de repentir sur « le consentement donné, surtout en certains siècles, à des méthodes d'intolérance et même de violence dans le service de la vérité ». »
La Congrégation a été présidée par le cardinal Gerhard Ludwig Müller de jusqu'à . Il a été remplacé le par Luis Ladaria Ferrer, jésuite, ancien secrétaire de la Congrégation (l'équivalent de numéro deux)[7].
Du au , le secrétaire de la Congrégation, soit son numéro deux, était le théologien jésuite espagnol Luis Ladaria Ferrer, consulteur de la Congrégation de la doctrine de la foi depuis 1995 et secrétaire de la Commission théologique internationale depuis 2004. Considéré comme un « conservateur modéré »[8], il remplaçait l'archevêque salésienAngelo Amato, nommé à la tête de la Congrégation pour les causes des saints. C'était la première fois qu'un membre de la compagnie de Jésus était nommé à cet office alors que cette congrégation a condamné plusieurs théologiens issus des rangs des Jésuites[9].
En 2018, le pape nomme pour la première fois des femmes en tant qu'expertes auprès de la congrégation: Laetitia Calmeyn, Linda Ghisoni et Michelina Tenace[11].
Le , par une Lettre apostolique en forme de Motu proprio[12], le pape François a supprimé la commission pontificale Ecclesia Dei, dont les compétences sont entièrement attribuées à la nouvelle troisième section de la Congrégation[13].
Compétences
Les compétences de la Congrégation sont définies par la constitution Pastor Bonus : « La tâche propre de la Congrégation pour la doctrine de la foi est de promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique : tout ce qui, de quelque manière, concerne ce domaine relève donc de sa compétence[5] ».
La Congrégation est compétente pour vérifier que les doctrines et enseignements catholiques restent dans le cadre de la foi de l'Église. La sanction disciplinaire la plus grave qu'elle puisse prononcer, en cas de doctrine contraire à la foi catholique, est l'excommunicationLatae sententiae[14], qui depuis Vatican II ne peut concerner que les baptisés catholiques.
La Congrégation pour la doctrine de la foi a toujours exercé un pouvoir judiciaire pour certaines causes spécifiques liées à la défense de la foi, de la morale, et de la dignité des sacrements, surtout de la réconciliation et de l’eucharistie. Certains délits plus graves (delicta graviora) ont toujours été de la compétence exclusive de la Congrégation pour la doctrine de la foi[15]. En particulier les délits graves contre la célébration des sacrements (par exemple : ordination de femmes, violation du secret de la confession…) en particulier si ces délits risquent d'entraîner la nullité du sacrement ou s'il y a volonté de le célébrer en dehors de la communion de l'Église catholique (par exemple célébrer la messe sans mentionner le nom du pape et de l'évêque diocésain dans la prière eucharistique).
Présidée par un préfet, la congrégation est composée de vingt-trois membres, cardinaux, archevêques et évêques provenant de nations diverses. Au jour le jour, le préfet est assisté d'un secrétaire, d'un sous-secrétaire et d'un promoteur de justice. L'administration du dicastère est divisée en trois sections, traitant chacune des différents secteurs de compétence de la Congrégation : doctrinale, disciplinaire et matrimoniale. Cette dernière s'occupe de tout ce qui concerne le privilegium fidei.
Pour améliorer le traitement de recours d'ecclésiastiques accusés de delicta graviora (délits graves contre la foi dont abus sur mineur), une commission spéciale est instituée en 2014. Le pape François nomme dès le José Luis Mollaghan(en), précédemment archevêque de Rosario en Argentine, membre de la Congrégation en charge spécialement de ce dossier[16]. Puis, le est publié un décret pontifical sous forme de rescrit du cardinal secrétaire d'ÉtatPietro Parolin créant au sein de la Congrégation une commission spéciale, composée de sept cardinaux et évêques, chargée du traitement de ces recours (la première instance étant traitée au niveau diocésain ou de l'ordre d'appartenance du religieux). Cette commission spéciale est une instance de la session ordinaire de la Congrégation, la session ordinaire restant seule compétente si la personne incriminée a rang d'évêque[17],[18]. La liste des membres de cette commission spéciale est rendue publique le .
En 2018, le Pape nomme pour la première fois des femmes en tant qu'expertes auprès de la congrégation : Laetitia Calmeyn, Linda Ghisoni et Michelina Tenace[11].
↑« Doctrine de la Foi : Mgr Ladaria succède au cardinal Müller », Vatican News, (lire en ligne, consulté le ).
↑(en) John L. Allen, Jr., « 'Kind' and 'reliable' Jesuit named to Vatican's top doctrinal post », National Catholic Reporter, vol. 7, no 42, 11/07/2008, article en ligne.
↑Isabelle de Gaulmyn, « Un nouveau préposé à la « fabrique des saints » », La Croix, 09/07/2008, article en ligne.