L'« Office Nansen » délivra des passeports aux Russes blancs, anciens aristocrates, bourgeois, marchands (dont un grand nombre de juifs russes), prétendument koulaks, intellectuels, indépendantistes ukrainiens, anarchistes, paysans affamés, tous indistinctement classés comme « éléments contre-révolutionnaires » et devenus apatrides par le décret soviétique du [2] qui révoque la nationalité de tous les émigrés. Certains parviennent à passer la frontière occidentale de l'URSS vers la Finlande, les pays baltes, la Pologne ou la Roumanie, surtout de nuit, mais bien rares sont ceux qui parviennent à emporter quelque bagage, et beaucoup sont tués, noyés, ou capturés et envoyés au Goulag par les gardes-frontières soviétiques : parmi ceux qui leur échappent, plus d'un est rançonné par les garde-frontière des pays d'accueil avant de recevoir le « passeport Nansen »[3].
Ce passeport est étendu aux Arméniens qui fuient le génocide en mai 1924, puis, en 1933, aux Assyriens et autres minorités fuyant l'ex-Empire ottoman (en général des minorités chrétiennes ou romaniotes). Le roi d'Espagne Alphonse XIII, après avoir fui l'Espagne le 15 avril 1931 puis avoir été déclaré « hors la loi », coupable de « haute trahison » et déchu de tous ses droits par les Cortes républicaines par la loi du 26 novembre 1931 bénéficiera lui aussi de ce passeport.
Près de 450 000 passeports Nansen ont été distribués pendant l'entre-deux-guerres[4],[1].
Menahem Mendel Schneerson, également connu comme le Rabbi de Loubavitch, est le septième héritier de la dynastie du HassidismeHaBaD, né à Mykolaïv en Ukraine.
De son vrai nom Andreas Cornelis van Kuijk est né à Breda (Pays-Bas) en 1909, mort à Las Vegas (Nevada) en 1997. Homme d'affaires et impresario exclusif du chanteur Elvis Presley.
« La Société des Nations munissait les émigrés, qui avaient perdu leur citoyenneté russe, d'un passeport dit Nansen, document très accessoire, d'une nuance vert pâle. Son titulaire valait à peine mieux qu'un criminel libéré sur parole et devait passer par d'odieuses épreuves chaque fois qu'il voulait voyager d'un pays dans l'autre, et plus les pays étaient petits, plus ils étaient tatillons. Quelque part dans le fin fond de leurs glandes, les autorités sécrétaient cette notion que peu importait à quel point un État – disons la Russie soviétique – pouvait être mauvais, toute personne ayant fui cet État était intrinsèquement méprisable du fait qu'elle s'était soustraite à toute administration nationale : et par conséquent, on marquait à son endroit la désapprobation absurde avec laquelle certains milieux religieux regardent un enfant né hors mariage. Mais parmi nous, tous ne consentaient pas à être des bâtards et des fantômes. Délectables sont les souvenirs que certains émigrés russes gardent précieusement de la manière dont ils insultèrent ou bernèrent de hauts fonctionnaires dans divers ministries, préfectures et Polizeipraesidiums. »
Dans son premier roman, Machenka (1926), l'un des personnages, un vieux poète russe émigré, voulant fuir Berlin après la crise économique de 1923, perd son passeport Nansen, ultime espoir de départ.
Patrick Modiano et le passeport Nansen
Les passeports Nansen apparaissent plusieurs fois dans l'œuvre de Patrick Modiano, dont les personnages ont souvent ce passé trouble et ces origines incertaines, aux confins de l'Europe de l'entre-deux guerres. Le père de Modiano lui-même semblait posséder un passeport de la Société des Nations. « Qui étais-je au juste ? Mes papiers ? Un faux passeport Nansen. », La Ronde de nuit (1969).
Les documents qui le remplacent aujourd'hui
Pour obtenir un passeport Nansen, un réfugié devait passer devant une commission d'examen, composée de fonctionnaires et de représentants des exilés. Le passeport Nansen était délivré pour deux ans. Obtenu une première fois, il était renouvelable à vie.
Les passeports Nansen ont cessé d'avoir une valeur légale, d'être délivrés et d'être renouvelés avec la disparition de la Société des Nations en 1946. L'Organisation des Nations unies (ONU) – instituée en 1945 – a mis en place plusieurs dispositifs pour répondre aux situations des réfugiés :
Pour les apatrides, réfugiés et migrants en situation irrégulière qui ne relèvent pas des précédentes conventions, certains États délivrent, dans le cadre de la Convention de New York sur la réduction des cas d'apatridie, des documents aux normes OACI qui peuvent permettre de voyager à l'étranger. Chaque État a sa législation propre. En France, c'est le titre de séjour.
↑Anthony Babel, La Bessarabie, éd. Félix Alcan, Genève et Paris, 1932 et Anatol Petrencu, Les déportations staliniennes, Journal de Chisinau, n° 294 du 2 juillet 2004.
↑La version complète d'Autres Rivages contient des illustrations de la vie personnelle de Nabokov. Une des photos présentées est, justement,une photographie du passeport Nansen de l'épouse de Vladimir Nabokov, Véra Nabokov et de leur fils Dmitri Nabokov.