Après avoir répudié Berthe en 1092[5] et malgré les protestations du clergé, son père se remarie la même année[6] avec Bertrade de Montfort, comtesse d'Anjou. De cette deuxième union naissent quatre enfants, dont deux fils.
Biographie
Enfance
Louis, jeune prince issu du premier mariage de son père, est élevé avec Suger, futur abbé de Saint-Denis, qui devient son ami proche, puis son conseiller.
Enfin son père, devenu impotent, incapable de gouverner et de combattre, se réconcilie avec lui. Dans le courant de l'année 1101[3] ou 1103[7], il lui confie le gouvernement effectif du royaume en qualité de « rex designatus » (roi désigné) ; entre 1101 et 1105 il l'investit aussi du comté de Vermandois[3].
Roi de France
Accession au trône
Le , son père, Philippe Ier, meurt à Melun et, suivant sa dernière volonté, est inhumé en l'église abbatiale de Saint-Benoît-sur-Loire. L'inhumation terminée, Louis, se doutant que son demi-frère, Philippe de Montlhéry, souhaite l'empêcher d'accéder à Reims, se hâte de rejoindre Orléans située à quelques kilomètres de Saint-Benoît-sur-Loire afin de se faire sacrer au plus vite. Une raison supplémentaire pour ne pas se rendre à Reims était que l'archevêque de Reims d'alors, Raoul le Vert, avait été soutenu par le pape Pascal II mais n'avait pas été reconnu par son père, qui lui préférait Gervais de Rethel[8].
Le sacre a lieu le dans la cathédrale Sainte-Croix d'Orléans, il reçoit « l’onction très sainte » de la main de Daimbert, l’archevêque de Sens. Raoul le Vert envoya des messagers pour contester la validité du sacre, mais il était trop tard.
Règne
Louis VI encourage les mouvements communaux, associations professionnelles sociales ou religieuses. Dès , il octroie aux habitants des villes divers avantages fiscaux et le droit de s'administrer sous la direction d'un maire. Il lutte pendant plus de trente ans (1101-1135) contre le brigandage perpétré par certains seigneurs du nord du domaine royal, tels que Hugues du Puiset (1118), les seigneurs de Montmorency et de Beaumont (1101-1102) et Ebles II de Roucy. Il intervient aussi au sud de la Seine contre Gui le Rouge et son fils Hugues de Crécy de la famille de Montlhéry assurant aux capétiens la liberté de circuler entre Paris, Orléans et Melun[9].
Selon Orderic Vital, en lors de l'entrevue de l'Ormeteau-Ferré entre Louis VI le Gros et Henri Ier Beauclerc, le roi de France concède à son homologue « toute la Bretagne » c'est-à-dire la vassalité directe de la Bretagne. Alain Fergentprinceps des Bretons devient « l'homme lige du roi des Anglais ». Conan le fils d'Alain Fergent est alors fiancé avec Mathilde une des filles illégitimes d'Henri Ier[14]. Précisons qu'Orderic Vital est dans la mouvance du Roi d'Angleterre, ce qui rend son témoignage improbable. En effet, en 1124, face à la menace de l'Empereur germanique Henri V, Conan III de Bretagne répondra à l'appel à l'ost de Louis VI le batailleur.
Le dimanche des Rameaux , il est présent à Amiens, pour soutenir l'évêque et les habitants de cette ville dans leur conflit contre Thomas de Marle, lequel est intervenu militairement à la demande de son père Enguerrand de Boves, comte d'Amiens et seigneur de Coucy. Ce dernier refuse de reconnaître l'octroi d'une charte accordant des privilèges aux habitants de la commune[15]. Arrivé avec une armée pour aider les bourgeois à faire le siège du Castillon (forteresse dominant la ville d'Amiens, à partir de laquelle le père et le fils partaient en « expéditions punitives »), Louis VI reçoit une flèche dans son haubert, puis part sans vaincre les assiégés réfugiés dans la tour réputée imprenable qui ne tombe que deux années plus tard.
Le , se déroule la bataille de Brémule entre les rois d'Angleterre, Henri Ier Beauclerc, et de France, Louis VI. Résultat d'une rencontre fortuite, la bataille se termine par une défaite du Roi de France. Louis VI est contraint de fuir, se réfugiant aux Andelys[16].
L'assassinat du comte Charles Ier de Flandre en donne encore au roi l'occasion d'intervenir dans ce grand fief. Appelé pour punir les meurtriers, il organise l'élection d'un nouveau comte à Arras. Après avoir écarté plusieurs prétendants, il impose Guillaume Cliton, le fils de Robert Courte-Heuse, qui résidait à sa cour et à qui il avait fait épouser la sœur de la reine Adelaïde. L'élection est confirmée par les bourgeois de Gand, Bruges, Lille, Saint-Omer, qui profitent toutefois des circonstances pour obtenir des franchises. En , après la mort de Guillaume Cliton dans un combat contre ses vassaux révoltés, il intervient encore et intronise son concurrent Thierry d'Alsace comme comte de Flandre[19].
À partir de 1131, il ne peut plus monter à cheval. Il souffre d'insomnies chroniques, de diarrhées, d’œdèmes et de problèmes hépatiques peut-être consécutifs au poison de sa belle mère, Bertrade de Montfort.[réf. souhaitée]
Succession
La succession était destinée à son fils Philippe, couronné roi associé le , mais la mort accidentelle de ce dernier en 1131 amène le cadet, Louis le Jeune, destiné à une carrière ecclésiastique et non éduqué à la fonction royale, à devenir l'héritier. Il est donc couronné roi associé à son tour le et à partir de 1135 Louis VI règne désormais sans gouverner[20].
En , la paix est conclue avec Étienne de Blois, roi d'Angleterre, et le roi reçoit l'hommage d'Eustache fils de ce dernier, pour la Normandie. Louis VI avait noué des rapports amicaux avec Guillaume X d'Aquitaine, duc d'Aquitaine ; celui-ci avant de mourir, donne sa fille et héritière Aliénor au fils aîné du roi et lui confie sa terre, recevant ses envoyés début , permettant par là à la dynastie capétienne de reprendre de l'influence dans la France méridionale, par le contrôle de cet immense fief.
Mort
Alors qu'il rentre d'une expédition punitive contre le seigneur pillard de Saint-Brisson-sur-Loire, près de Gien, Louis le Gros tombe soudainement malade au château de Béthisy-Saint-Pierre situé dans la vallée de l'Automne, en forêt de Compiègne, entre Senlis et Compiègne. Louis VI, qui est devenu semi-impotent à l'approche de la cinquantaine et a dû renoncer aux plaisirs de la guerre et de la table, meurt le des suites d'une dysenterie[21], fréquente lorsque les conditions sanitaires sont insuffisantes, en particulier lorsque les aliments et l'eau ne sont pas propres. Il est inhumé en l'église de l'abbaye royale de Saint-Denis. Son fils Louis, âgé de 17 ans et couronné depuis six ans, lui succède sans contestation.
Un moyen-relief en pierre calcaire représentant un roi en pied, en position repliée, portant la maquette d'une église qu'il offre à saint Vincent se trouve sur un autel liturgique roman, dans la petite église d'Avenas, commune du Haut-Beaujolais située dans le département du Rhône. Exécuté entre 1118 et 1124 par le « Maître d'Avenas », dont le nom est resté inconnu à ce jour, ce bas-relief montre un roi, couronné, déjà bedonnant. Une inscription latine, sur la même pierre, le qualifie de « REX LVDOVICVS PIVS » (Roi, Louis le Pieux). Certains disent que ce roi serait Louis VI, d'autres disent qu'il correspond plutôt à Louis le Pieux ou encore à Louis VII de France[22],[23],[24].
Surnoms
Le roi eut divers surnoms de son vivant. Le plus fréquent est celui de « gros » (Grossus), ainsi que ceux de « gras » (Crassus) et « obèse » (Pinguis). Son obésité est due à celle héritée de ses parents et à l'alimentation excessive qui caractérise les guerriers chasseurs[25]. Les autres surnoms utilisés furent ceux d'« éveillé » (Non dormiens), en raison de ses insomnies, de « batailleur », en raison de ses incessantes campagnes guerrières, ou de « Thibaud », probablement en hommage à Thibaud III de Blois[26],[27].
Philippe (vers 1132/1133 - † 1161)[33], à ne pas confondre avec son frère aîné du même nom, mort des suites d'une chute de cheval. Sans alliance ni postérité. Nommé évêque de Paris, il refusa le poste et resta archidiacre. Il est inhumé à Notre-Dame de Paris. Son tombeau sera détruit lors de la rénovation du chœur, en 1699[34] ;
Avec une certaine maîtresse prénommée Marie, fille de Renaud de Breuillet de Dourdan, Louis VI est le père d'une fille :
Isabelle (vers 1101/1104 - † après 1175), dame de Liancourt-Saint-Pierre, épouse Guillaume Ier de Chaumont (en Vexin)[35], fils de Osmond Ier de Chaumont, seigneur de Chaumont-Quitry[36].
Bilan du règne
Exerçant un pouvoir sans partage, il s'entoure de conseillers comme Yves de Chartres, plusieurs membres de la famille de Garlande et surtout Suger. Il « défendit la paix et le bon droit, protégea les faibles et l'Église », compléta l'œuvre paternelle d'accroissement du domaine royal en intégrant les terres des familles de Rochefort, de La Ferté-Alais, de Montlhéry et du comté de Corbeil, et légua à son fils Louis VII de France un domaine à peu près pacifié. Comme roi et individu il se conduisit en chrétien, qualifié parfois de rex catholicus et christianissimus, se disant lui-même « propre fils de l'Église romaine[37] ». Il fut le premier souverain à toucher les écrouelles de façon habituelle. Il résida à Paris beaucoup plus qu'aucun de ses prédécesseurs.
C'est à partir des règnes de Louis VI et de Louis VII de France, tous deux conseillés par l'abbé Suger, que la royauté commence à exercer un rôle national, en répondant à l'appel de ses sujets. La justice du roi va se mettre à régler les conflits entre différents vassaux, confirmer des chartescommunales aux bourgeois des villes et garantir des propriétés d’abbaye.
Suger, La geste de Louis VI et autres œuvres, introduction de Michel Bur, Paris, Imprimerie nationale, coll. « Acteurs de l'histoire », 1994, 304 p., [présentation en ligne].
Recueil des actes de Louis VI, roi de France (1108-1137), publiés sous la direction de Robert-Henri Bautier par Jean Dufour, t. I : Actes antérieurs à l'avènement et 1108-1125, t. II : 1126-1137 et appendices, t. III : Introduction, t. IV : Tables, Paris, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, coll. « Chartes et diplômes relatifs à l'histoire de France », diffusion De Boccard, 1992-1994.
Éric Bournazel, Le gouvernement capétien au XIIe siècle, 1108-1180 : structures sociales et mutations institutionnelles, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Publications de la Faculté de droit et des sciences économiques de l'Université de Limoges » (no 2), , 199 p. (présentation en ligne).
(de) Julian Führer, König Ludwig VI. von Frankreich und die Kanonikerreform, Francfort-sur-le-Main, Peter Lang, coll. « Europäische Hochschulschriften. Reihe III » (no 1049), , 392 p. (ISBN978-3-631-54522-5, présentation en ligne).
Rolf Grosse, « La royauté des premiers Capétiens : « un mélange de misère et de grandeur » ? », Le Moyen Âge, Louvain-la-Neuve / Paris, De Boeck Supérieur, t. CXIV, , p. 255-271 (lire en ligne).
Achille Luchaire, Recherches historiques et diplomatiques sur les premières années de la vie de Louis le Gros (1081-1100), Paris, Alphonse Picard, , 51 p. (présentation en ligne).
Achille Luchaire, « Les Premiers Capétiens (987-1137) », dans Ernest Lavisse (dir.), Histoire de France des origines à la Révolution, t. II, seconde partie, Paris, Librairie Hachette et Cie, 1901, chap. V : « Le réveil de la Royauté. Louis VI le Gros », p. 311-331, [lire en ligne]. Réédition : Paris, J. Tallandier, 1980, p. 325-346, [lire en ligne].
François Menant, « Louis VI et la reconquête du domaine royal », dans François Menant, Henri Martin, Bernard Merdrignac et Monique Chauvin, Les Capétiens. Histoire et dictionnaire (987-1328), Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1999, p. 157-187 (ISBN978-2221056875).
Liens externes
(en) Charles Cawley, « Louis Thibaut de France (-1137) », dans « France, Capetian kings », ch. 1 : « Kings of France (Capet) », section C : « Kings of France 987-1328 », sur MedLands – Foundation for Medieval Genealogy.
↑Achille Luchaire, Louis VI le Gros. Annales de sa vie et de son règne (1081-1137), avec une introduction historique, Paris, Alphonse Picard, (lire en ligne), p. XI.
↑Augustin Fliche, Le règne de Philippe Ier, roi de France (1060-1108), Paris, Société française d'imprimerie et de librairie, (lire en ligne), p. 40.
↑Edmond Régnier, « Histoire de l'abbaye des Écharlis », Bulletin de la société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, (lire en ligne, consulté le ).
↑Guy Devailly, Le Berry du Xe siècle au milieu du XIIIe : Étude politique, religieuse, sociale, et économique., La Haye-Berlin, Mouton-De Gruyter, 1973-2017, p., 1973-2017, 636 p. (ISBN9783111631066, lire en ligne), p. 399.
↑Joëlle Quaghebeur et Bernard Merdrignac (dir.) Bretons et Normands au Moyen Âge. Rivalités, malentendus convergences, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 2008 (ISBN9782753505636) p. 154.
↑(en) Charles Cawley, « Lucienne de Rochefort (-1138) », dans « Paris Region - Corbeil & Rochefort », ch. 2 : « Rochefort », section A : « Comtes de Rochefort (seigneurs de Montlhery) », sur MedLands (consulté le ).
↑Henry d'Arbois de Jubainville et Léon Pigeotte, Histoire des ducs et des comtes de Champagne, t. 2, Paris, Aug. Durand, (lire en ligne), p. 177-178.
↑Jean Dufour, « Un faux de Louis VI relatif à Liancourt (Oise) », Bibliothèque de l'école des chartes, t. 144, livraison 1, , p. 40 (DOI10.3406/bec.1986.450405, lire en ligne).
↑dessin tiré de l'ouvrage d'Abel Hugo, France historique et monumentale : Histoire générale de France depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, vol. 3 : « France féodale. Capétiens », Delloye, (lire en ligne), p. 36-37, planche XXV.