Vladimir Sviatoslavitch, dit « le Beau Soleil » (en vieux russe : Володимѣръ Свѧтославичь ; en russe : Владимир Святославич, Vladimir Sviatoslavitch ; en ukrainien : Володимир Святославич, Volodymyr Sviatoslavytch ; en biélorusse : Уладзімір Святаславіч, Ouladzimir Sviataslavitch ; en vieux norrois : Valdamarr Sveinaldsson ; en polonais : Włodzimierz Światosławowicz), dit Vladimir Ier, mais plus connu sous le nom de Vladimir le Grand, le Soleil Rouge[note 2] ou encore saint Vladimir[note 3], est un grand-prince de la Rus' de Kiev de la dynastie des Riourikides (né en 958[note 4] et mort le à Berestova, aujourd'hui Kiev), qui règne de 980 à 1015.
Vladimir, né en 958 au village Budyatino, dans la région de Volyn, Ukraine, est le fils naturel de Sviatoslav le Brave et de Maloucha[1], décrite dans certaines sagas nordiques comme une prophétesse qui vécut jusqu'à l'âge de 100 ans, ayant été amenée de sa cave jusqu'au palais princier pour prédire l'avenir. Le frère de Maloucha, Dobrynya(en) (gouverneur de Novgorod), est le tuteur de Vladimir et l'un de ses meilleurs généraux (qui forma plus tard le fils de Vladimir, Iaroslav).
À la mort de Sviatoslav en 972, une lutte fratricide s'installe jusqu'en 976 entre Iaropolk et un autre de leurs frères, Oleg, chef des Drevliens. En 977, après l'assassinat d'Oleg, Vladimir fuit chez un parent, Håkon Sigurdsson, jarl de Norvège. Il lève en Scandinavie une armée de mercenaires vikings qui l'aident l'année suivante à retourner sur les terres de la Rus' et à reprendre Novgorod, marchant contre Iaropolk son frère.
Sur le chemin de Kiev, il envoie des émissaires à Rogvold, prince de Polotsk, pour lui demander la main de sa fille Rogneda (en vieux norrois : Ragnhild). Devant le refus de la princesse de haut rang de se marier avec le fils d'une servante, Vladimir, fou de rage, attaque Polotsk, tue Rogvold et emmène Rogneda de force. Polotsk étant un point stratégique sur la route de Kiev, sa prise par Vladimir, ainsi que la prise de Smolensk facilitent la marche sur Kiev en 978.
En 980, après sa victoire par ruse sur Iaropolk[2], il le fait assassiner, et viole sa femme Julie (qui met au monde peu de temps après un fils, Sviatopolk, officiellement le fils de Iaropolk, mais certaines sources affirmant qu'il serait en réalité le dernier des fils de Vladimir). Le , il devient donc le nouveau « Grand-prince de toute La Rus' Kiévienne ».
En 987, l'empereur byzantinBasile II lui demande de l'aide pour mettre fin à la révolte de Bardas Phocas le Jeune[3]. Vladimir lui livre 6 000 guerriers varègues et obtient en échange la main de la princesse Anna Porphyrogénète, sœur des empereurs[3]. La princesse sera envoyée à Kiev malgré ses réticences avec une ambassade après que Vladimir eut assiégé et occupé la ville de Chersonèse devant les délais des Byzantins.
Dans la première, Vladimir, régnant à Kiev, fait appeler à lui les représentants des principales religions connues (ou envoie ses émissaires) : le christianisme de Rome, le christianisme byzantin ou orthodoxie, le judaïsme et l'islam. Il opte pour l'orthodoxie et fait baptiser son peuple[5],[6],[7],[8].
Dans la deuxième, il demande le baptême à Chersonèse en Crimée en échange de la prise de la ville, de la main de la princesse byzantine et de la guérison de ses yeux[9].
Selon les chroniques russes, un missionnaire musulman fut envoyé auprès de Vladimir pour le convertir. Il lui vanta les joies éternelles du Paradis où chaque homme recevrait soixante-dix épouses. Vladimir fut séduit par cette promesse, mais quand on lui dit qu'un musulman doit renoncer au vin, il déclara : « Boire, c'est la joie des Russes. On ne peut pas vivre sans ce plaisir »[10].
Le Grand-prince reçoit ensuite une délégation de catholiques romains. L'austérité du rite, notamment la pratique du jeûne, le rebute. Il dit : « Allez-vous en ! Nos pères n'ont jamais admis pareil principe ».
La troisième mission est celle de Khazars juifs. Vladimir chercha à connaître la raison pour laquelle les juifs avaient perdu Jérusalem. « Dieu s'irrita contre nos ancêtres », lui répondirent les juifs, « et les dispersa parmi les Gentils à cause de nos péchés ». Vladimir lança alors : « Comment espérez-vous enseigner autrui quand vous avez été chassés et dispersés par la main de Dieu ? Voudriez-vous que nous acceptions ce destin nous aussi ? ».
Le missionnaire envoyé par les Grecs de Byzance laissa Vladimir dubitatif. Les enquêteurs qu'il dépêcha[11] ensuite pour observer les différentes religions lui rapportèrent que le culte byzantin était « plus merveilleux que dans les autres pays »[6],[7],[8].
Au bout d'un an, il accepta finalement de recevoir le baptême en échange de la main de la princesse Anne, sœur des empereurs byzantins[6],[8].
L'adoption du christianisme entraina la construction de nouveaux édifices sacrés avec un programme iconographique de peintures monumentales[12],[7].
À sa mort, une guerre de succession fratricide (1015-1019) éclate entre son neveu Sviatopolk et plusieurs de ses nombreux fils, dont Gleb et Iaroslav.
Vladimir est enterré à l'église de la Dîme qu'il avait fait construire, comme sa femme et sa grand-mère. Considéré comme le principal fondateur de la « Sainte Russie », il est également un personnage récurrent des bylines russes qui se déroulent souvent sous son règne. Dans ces poèmes épiques, il est généralement représenté comme un souverain juste et respecté de ses sujets, à l'image du roi Arthur des légendes celtes.
Selon la Chronique de Nestor, Vladimir « se laissa aller à l'amour des femmes... car il était débauché comme Salomon ». L'évêque allemand Thietmar le décrit comme « fornicator immensus et crudelis », tandis que les chroniqueurs font référence à plusieurs centaines de concubines qu'il gardait dans son palais de Vychgorod. De ses différentes épouses, il eut au total onze fils.
Vladimir sera ensuite considéré comme « Saint » par l’Église Orthodoxe, du fait de son « changement de vie » après sa conversion (moins violent, vie plus austère). Le pape Jean-Paul II, à la fin du XXe siècle fera à son tour entrer ce roi slave dans le martyrologe de l’Église catholique[8].
Famille
Unions et postérité
On ne connaît pas le nombre exact de ses enfants, ni même si certains d'entre eux sont réellement ses enfants (plusieurs de ses enfants ont également une mère supposée) :
De sa première épouse Rogneda de Polotzk il a quatre fils et deux filles :
Iziaslav (mort en 1001), prince de Polatsk. Son fils Bryatchislav, mort en 1044, poursuit la lignée des princes de Polotzk,
↑ a et bHistoire de Yahya-Ibn-Said d'Antioche Continuateur de Sa'id-Ibn-Bitrik (texte arabe et français) éditée et traduite par I. Kratchkovsky et A. Vasilev, Patrologia orientalis ed par Graffin R et Nau F, XXIII, Paris, 1932.
↑Selon l'historien slavophile Chermontov, qui a compilé les différentes sources, cette dernière interprétation, plus politique, serait un pamphlet grec du XIe siècle pour éviter la canonisation de Vladimir. Voir là-dessus: Michale Klimenko, (de) Ausbreitung des Christentums in Russland seit Vladimir dem Heiligen bis zum 17. Jahrhundert: Versuch einer Übersicht nach russischen Quellen, Berlin & Hambourg, Lutherisches Verlagshaus, 1969, p. 38-39.
↑Louis Léger, Chronique dite de Nestor : traduite sur le texte slavon-russe avec introduction et commentaire critique, Paris, coll. « Publications de l'École des Langues orientales vivantes, 2e série ; 13 », , 282 p. (gallica.bnf.fr, lire en ligne), p. 88-90.
↑François Boespflug, La Crucifixion dans l’art : Un sujet planétaire, Montrouge, Bayard Éditions, , 559 p. (ISBN978-2-227-49502-9), p. 86.
Francis Dvornik, « La Russie de Kiev » dans le livre : Les Slaves : histoire et civilisation, de l'Antiquité aux débuts de l'Époque contemporaine, Paris, Seuil, 1970, p. 171-228.
Vladimir Volkoff, Vladimir, le Soleil rouge (traduit de l'anglais par Gérard Joulié), Julliard et L'Âge d'Homme, Paris et Lausanne, 1981, 410 p. (ISBN2-260-00268-4).