Le territoire du gouvernement de Bessarabie se trouve de nos jours partagé entre la Moldavie (centre, 60 %) et l’Ukraine (nord et sud, 40 %).
Histoire
La principauté de Moldavie (rose) et la Bessarabie (administration militaire ottomane, en jaune) début 1812, la veille du rattachement à l’Empire russe. Carte napoléonienne française, par le capitaine Lapie.Un berger et des soldats roumains observent les villages moldaves incendiés par les cosaques sur la rive bessarabienne alors russe du Prut.
les territoires moldaves placés sous administration militaire ottomane (raïas) de Hotin (au nord) et du Boudjak (au sud).
Ce dernier territoire (appelé en turcBucak) avait auparavant appartenu à la principauté de Valachie dont la dynastie fondatrice est celle des Basarab : il était donc appelé Bessarabie en roumain et sur toutes les cartes européennes. C’est pourquoi le premier nom du nouveau territoire russe fut, pour quelques années, celui de « Moldavie et Bassarabie », abrégé en 1828 en « Bessarabie »[3].
Le prince moldaveScarlat Sturdza(ro) est nommé gouverneur du nouveau territoire autonome, mais il est destitué au bout d’un an, remplacé par des gouverneurs russes et l’autonomie est abolie en 1828. Une politique de russification se met en place : en 1829, l’usage de la « langue moldave » (nom russe du roumain) est interdit dans l’administration au profit du russe. En 1833, la langue moldave est interdite dans les églises et, en 1842, dans les établissements d’enseignement secondaire, puis dans les écoles primaires en 1860. Enfin en 1871 le moldave/roumain est purement et simplement interdit dans toute la sphère publique par le même oukase impérial qui érige le territoire en gouvernement[5]. En outre, les autorités russes encouragèrent l’émigration (ou déportèrent) des Moldaves dans d’autres provinces de l’Empire (notamment au Kouban, au Kazakhstan et en Sibérie), tandis que d’autres groupes ethniques, notamment russes et ukrainiens (appelés au XIXe siècle « Petits Russes »), étaient invités à s’installer dans la région.
Pour l’Empire russe, la Bessarabie est d’abord une région frontalière d’où la renaissance culturelle roumaine doit être extirpée, un accès aux bouches du Danube et un grenier agricole : des voies ferrées sont construites pour la relier au port d’Odessa afin d’exporter les céréales et le bois moldaves. Sur le plateau au-dessus du vieux bourg moldave de Chișinău, une ville nouvelle russe, Kichinev, au plan en damier est construite : là se trouvent administrations, casernes, cathédrale et manufactures[3].
Selon le géographe A. Zachtchouk[6] en 1862, la Bessarabie était peuplée à 73 % de Roumains (Moldaves), à 6 % de Russes et Lipovènes, à 4 % d’Ukrainiens, 7 % de Juifs, 5 % de Bulgares, 4 % d'Allemands et 1 % issus d’autres groupes ethniques. Trente-six ans plus tard, en 1897, la répartition ethnique des 1 933 436 habitants avait sensiblement évolué, avec 47,6 % de Roumains (Moldaves), 19,6 % d’Ukrainiens, 11,8 % de Juifs, 8 % de Russes, 5,3 % de Bulgares, 3,1 % d’Allemands et 2,9 % de Gagaouzes[1]: la part de la population autochtone avait donc fortement chuté dans les statistiques, mais il est possible que des Moldaves comprenant le russe aient été comptabilisés comme Russes en 1897 car le recensement roumain de 1930 trouve 56,2 % de Roumains/Moldaves, 12,3 % de Russes et 11 % d'Ukrainiens[7].
↑(de) K. Heitmann, « Moldauisch » dans G. Holtus, M. Metzeltin et C. Schmitt (dir.), Lexicon der Romanschinen Linguistik, Tübingen, vol. 3, p. 508-21, 1989.
↑(ru) А. Защук, Материалы для географии и статистики России, собранные офицерами Генерального штаба. Бессарабская область. Часть 2, Тип. Э. Веймара, 1862, sur [2].
↑Recensământul general al populației României din 29 decemvrie 1930, Vol. II, p. XXIV, tableau 4.