Ernest Spiridion Jean Nicolas Psichari dit Ernest Psichari (né le à Paris et mort le à Rossignol) est un officier et écrivainfrançais. Lieutenant dans les troupes coloniales, il est l'auteur de plusieurs œuvres autobiographiques. Converti au catholicisme à la fin de sa vie, il combat en Belgique durant la Première Guerre mondiale et meurt à l'âge de 30 ans.
Biographie
Jeunesse
Ernest Psichari naît le à Paris. Il est le fils de Jean Psichari, d'origine grecque, professeur de philologie grecque à l'École pratique des hautes études. Sa mère, Noémi Psichari, est la fille du philosophe Ernest Renan[3]. Élevé au sein d'une famille de la haute bourgeoisie intellectuelle parisienne[4], Ernest est baptisé à la demande de sa mère selon le rite orthodoxe[5], bien qu'elle ait elle-même reçu une éducation protestante. Ses parents se disputent souvent et Ernest, avec son frère Michel (1887-1917, également mort pour la France, marié à la fille d'Anatole France) et sa sœur Henriette, vit principalement avec sa mère et sa grand-mère[6]. Il est l'arrière petit-neveu du peintre Ary Scheffer, dans la demeure duquel il vit à Paris plusieurs années à partir de 1900.
Il grandit en compagnie d'intellectuels, comme Charles Péguy, qu'il rencontre en 1901[4], et tombe amoureux à 19 ans de la sœur de Jacques Maritain, Jeanne, de sept ans son aînée. Elle le quitte pour un autre homme et, peu après le mariage de celle-ci, Psichari tente de mettre fin à ses jours en prenant une dose excessive de drogues. Sauvé par son ami Maurice Reclus, il tente ensuite de se tuer avec un revolver mais est une nouvelle fois sauvé par Reclus. Par la suite, Ernest Psichari passe plusieurs jours dans les quartiers défavorisés de Paris et effectue des métiers manuels avant d'être découvert par ses parents puis envoyé à la campagne pour se reposer[8].
Service dans les troupes coloniales
Après son service militaire obligatoire[9], où il a retrouvé la joie de vivre, Psichari s'engage au 51e régiment d'infanterie à Beauvais le [7], un choix qui scandalise ses amis. Il est nommé caporal en , puis sergent en . Insatisfait avec la vie de garnison en métropole, il arrange son transfert dans les troupes coloniales en tant que sous-officier d'artillerie. À la veille de son départ pour l'Afrique, Psichari rencontre Henri Massis, qui se dit fortement impressionné par le jeune militaire[10].
Psichari effectue un séjour au Congo de à sous les ordres du commandant Eugène Lenfant, un ami de la famille[4]. De retour en France l'année suivante, il raconte ses expériences dans Terres de soleil et de sommeil (1908)[8]. Il est également décoré de la médaille militaire en de la même année[4]. Il rejette désormais l'anti-militarisme de sa jeunesse et fait l'éloge de l'armée et de la nation, devenant une idole de la droite nationaliste[11]. Il entame une correspondance avec Maurice Barrès, qui grâce à ses articles contribue à sa gloire littéraire[12]. Ayant choisi l’armée par idéal, Psichari y éprouve la satisfaction d’appartenir à un corps dépositaire d’une longue tradition. Il se met également à soutenir les idées de Charles Maurras et de l'Action française.
Diplômé de l'école militaire d'artillerie de Versailles, le sous-lieutenant Psichari est envoyé en Mauritanie de 1909 à 1912. Il est d'abord réticent à l'idée de servir dans une région de l'empire colonial français relativement pacifiée, mais il tombe amoureux des paysages et du peuple mauritaniens. Il participe à une escarmouche contre des indigènes au cours de laquelle deux de ses hommes sont tués[13].
En 1913, il publie L’Appel des armes, contre l’humanitarismepacifiste et le déclin moral qui lui semble en être la conséquence, au profit d’un idéal de dévouement et de grandeur. Cette nouvelle devient le guide de la jeunesse nationaliste française[3].
L'homosexualité de Psichari était notable de son vivant, aussi bien dans sa famille que parmi les membres du cercle amical.[réf. nécessaire] Longtemps après sa mort, une biographie parue en 2019,[Laquelle ?] la publication de ses Carnets de route par Théodore Monod et divers témoignages sont venus confirmer cette orientation sexuelle[14][source détournée]. Il aurait eu de nombreuses liaisons intimes en Afrique – comme André Gide[réf. nécessaire] – et a eu recours à des prostitués masculins en métropole.[réf. nécessaire] André Gide n'a pas hésité à désigner Psichari[De quoi ?] dans un article de La Nouvelle Revue française en septembre 1932.[réf. nécessaire] L'écrivain catholique Paul Claudel, très attristé par cette révélation, propose une contre-attaque: si Ernest s’est converti alors qu'il était homosexuel, c'est une victoire merveilleuse de Dieu.[réf. nécessaire] Et Claudel de résumer l'argument: « L'œuvre de Dieu dans une telle âme n'en est que plus admirable »[15].[source insuffisante].
Sa relation amicale avec Jacques Maritain reste l'objet de nombreux débats : un biographe de Maritain, Jean-Luc Barré confirme leur relation homosexuelle tandis que le fondateur du cercle Jacques Maritain, Yves Floucat, philosophe thomiste et spécialiste de l'œuvre de Maritain, confirme que leur relation était « indéniablement homophile »[16]. L'universitaire Frédéric Martel a consacré un chapitre[Lequel ?] de son livre Sodoma au « code Maritain » de l'homosexualité réelle ou supposée avec Psichari suscitant un intense débat[pourquoi ?][17].
Conversion et mort à la bataille de Rossignol
En juin de la même année, Psichari retourne dans la garnison du 2e régiment d'artillerie coloniale à Cherbourg[18]. C'est là qu'il compose son livre, publié à titre posthume, Le Voyage du centurion (1916)[7]. Il s’agit de la transposition à peine masquée de son expérience et de son évolution spirituelle.
Longtemps à la recherche de certitudes intellectuelles, le jeune homme se tourne vers la foi catholique et la méditation, sous l'influence du RP Humbert Clérissac, un dominicain[19], et surtout de Jacques Maritain. Il se convertit au catholicisme, puis devient tertiaire dominicain de la Fraternité du Saint-Sacrement de Paris. Il se prépare à la prêtrise mais la guerre, qui éclate peu après, l’empêche de concrétiser son vœu[20].
Ernest Psichari est, par sa personnalité, ses préoccupations, ses aspirations morales et son engagement, emblématique d’une jeunesse exaltée dont font aussi partie Charles Péguy et Jacques Maritain, ses amis et contemporains. Les monarchistes de l'Action française, tels Henri Massis et Paul Bourget, mais aussi Maurice Barrès ont vu en Psichari un héros national et ont entretenu sa mémoire par diverses publications. Charles Péguy, notamment, voit en lui un « ami lointain », un « homme jeune, plein de sang », qu'il intègre dans le parti des anti-modernes et des « mécontemporains[4] ». Lecteur fervent de Psichari, le général de Gaulle le salua un jour comme un « admirable semeur »[24].
L'Appel des armes, préface de Monseigneur Alfred Baudrillart de l'Académie française, Paris, G. Oudin, 1913. [lire en ligne], prix Alfred-Née de l’Académie française en 1915. Rééd. La Délégation des siècles, 203 p., 2020.
Le Voyage du centurion, préface de Paul Bourget de l'Académie française, Paris, Louis Conard, 1916. [lire en ligne]
↑Sur l'homosexualité d'Ernest Psichari, voir: Frédéric Martel, Sodoma, Enquête au cœur du Vatican, Robert Laffont, ; Frédérique Neau-Dufour, Ernest Psichari: l'ordre et l’errance, édition du Cerf, ; Théodore Monod, Maxence au désert. Un voyage en Mauritanie, Actes Sud/Babel, (qui décrit Psichari en homosexuel à la Oscar Wilde). Voir aussi : Jacques Maritain, Antimoderne, chap. V, p. 205-247 sur Ernest Psichari).
↑Voir sur la polémique autour de l'homosexualité d'Ernest Psichari, voir : Frédéric Martel, Sodoma, Enquête au cœur du Vatican, Robert Laffont, .
Don Sauveur Paganelli, Un petit-fils de Renan, Ernest Psichari, Saint-Raphaël, Éditions des Tablettes, 1923.
Abbés Jos. Hubert et Jos. Neujean. Rossignol. Le drame de l'invasion allemande dans le Luxembourg belge. Imprimerie Duculot-Roulin, Tamines. 1929. 226 pages.
Jacques Maritain, Antimoderne, qui regroupe plusieurs textes, dont l'un rendant hommage à Ernest Psichari.
Thomas Braun Discours à Rossignol, première pierre de l'autel élevé à la mémoire d'Ernest Psichari. dans Amour de l'Ardenne, 1933, Éditions Rex, p. 40–49
(en) Major Rex W. Beasley, « Critical analysis of the operations of the French Colonial Corps in the Battle of the Ardennes, with particular attention to the operations of the 3d Colonial Division at Rossignol. », Command and General Staff School Student Papers, 1930-1936, (lire en ligne [archive du ], consulté le )
Geneviève Duhamelet, Ernest Psichari. Le centurion, Bruxelles, Foyer Notre-Dame, coll. « Convertis du XXe siècle » (no 23), .
Henri Massis, Évocations. Souvenirs (1905-1911), 1931.
Henri Massis, La Vie d'Ernest Psichari, 1916.— Réédité en 2008, à la suite du Voyage du centurion d'Ernest Psichari (Paris, Éditions Saint-Lubin (ISBN9782917302026)).
A. M. Goichon, Ernest Psichari, d'après des documents inédits, préface de Jacques Maritain, couronné par l'Académie française, Louis Conard, Paris 1933. 450 pages.
Claude Quinard. Psichari soldat d'Afrique. Éditions des Loisirs. 1944, 153 pages.
Jean Peyrade. Psichari, maître de grandeur. Les témoins de l'Esprit. Avec postface de Daniel Rops. Julliard. 1948, 169 pages.
Louis Aguettant. Ernest Psichari Lardanchet Ed. Lyon, 1920. 69 pages.
Le Figaro Littéraire, Ernest Psichari, 2-8 avril 1964.
Frédérique Neau-Dufour, Ernest Psichari, l’ordre et l’errance, Paris, Éditions du Cerf, 2001.
Hugues Moutouh, Ernest Psichari : L'aventure et la grâce, Editions du Rocher, coll.Biographie, 2007.