Depuis 1786, Lyon connaît divers soulèvements populaires contre un patriciat conservateur. Marie Joseph Chalier (1747-1793) soutient les revendications des sans-culottes, à la manière de Jean-Paul Marat (1743-1793). 32 clubs de section sont créés. Lyon participe aux Insurrections fédéralistes (1790-1793)[1].
Lyon devient en 1790 le chef-lieu du département de Rhône-et-Loire (1790-1793). La municipalité de Lyon est créée en 1790. Les élections municipales de 1792 puis de 1793 sont mouvementées. Les Chaliers occupent le pouvoir municipal pendant 80 jours : des mesures extraordinaires sont prises, auxquelles s'oppose une minorité active, qui devient majoritaire, et obtient le soutien du pouvoir parisien. Chalier est condamné à mort le et exécuté le . L'Armée des Alpes (1792-1797) est chargée de pacifier la ville, réputée en rébellion contre-révolutionnaire.
Colonne Reverchon (8 000 hommes arrivés le 1er septembre), au nord-ouest ;
Détachement de l'armée des Alpes emmené par Kellermann, Dubois-Crancé et Gauthier (9 000 hommes), au nord ;
Détachement de l'armée des Alpes emmené par Laporte (10 000 hommes), à l'est ;
Détachement de l'armée des Alpes emmené par Doppet (6 000 hommes arrivés de Savoie le ), au sud-est[3].
Après une offensive de l'armée sardo-piémontaise en Savoie, qui retarde Kellermann, les troupes républicaines font mouvement vers Lyon à partir du . Arrivés de l'est, Albitte et Laporte s'installent à La Guillotière. Dubois-Crancé et Gauthier, de leur côté, prennent position au château de La Pape, entre Rhône et Saône. À l'ouest, Reverchon descend de Villefranche, tandis que Javogues arrive de Montbrison. Les insurgés conservent cependant le contrôle de l'essentiel de l'ouest du département de Rhône-et-Loire[3].
Le , le département est séparé en Rhône et Loire. Le , Couthon, Châteauneuf-Randon et Maignet sont adjoints aux six autres représentants[3].
Face à ces quelque 65 000 hommes, les troupes insurgées comptent moins de 10 000 hommes. Tous les officiers généraux de l'armée républicaine ayant refusé de rejoindre l'insurrection, cette armée est commandée par d'anciens officers de l'armée royale, souvent nobles, comme Précy. Tous ont, au moins au début, prêté serment de fidélité à la République une et indivisible, et juré de s'opposer au royalisme et à l'anarchie[2].
Fin août, les premiers combats permettent aux colonnes républicaines d'avancer jusqu'aux redoutes, qui protègent les abords des ponts sur la Saône. Ainsi, dans la nuit du 15 au , les Lyonnais se replient sur leurs retranchements de La Croix-Rousse au nord et sur la tête-de-pont des Brotteaux à l'est. Avec l'avancée des troupes républicaines, qui réduit la portion de territoire aux mains des insurgés, la ville sombre dans la disette. Surtout, après une première sommation, le commence le bombardement de la ville, depuis La Guillotière, avec des boulets chauffés au rouge. Le 29, les assiégeants parviennent à s'emparer des dernières redoutes des Lyonnais, sur la rive droite de la Saône ; au sud-ouest de la ville, le fort de Sainte-Foy tombe, et les troupes républicaines descendent sur le confluent, achevant l'investissement de la ville[2],[3].
Puis une trêve interrompt les combats jusqu'au , avant le lancement de pourparlers, le lendemain. Dans la ville, après délibération des sections, et malgré Précy, une députation emmenée par l'ancien constituantPérisse du Luc se rend aux avant-postes des troupes de la Convention pour ouvrir des négociations. Le même jour tombent les forts Saint-Irénée et Saint-Just, à l'ouest, les troupes commandées par Étienne François Giraud des Écherolles ne parvenant pas à repousser l'ennemi[2],[3].
Le , à l'aube, Précy et ses principaux lieutenants tentent une sortie par le faubourg de Vaise[4] avec une troupe de 1 200 à 2 500 hommes divisés en trois corps, ainsi que quelques civils. L'objectif est de passer la Saône en aval de Trévoux, puis de gagner la Suisse. L'avant-garde, commandée par « Rimbert », et le corps principal, sous les ordres de Précy, parviennent à traverser les lignes sous le feu des assiégeants, mais l'arrière-garde, sous les ordres du comte de Virieu, est anéantie dans le défilé de Saint-Cyr.
Au terme d’un périple à travers le Lyonnais et le Beaujolais, les derniers hommes de Précy (80 ou 100) sont finalement rejoints, capturés ou taillés en pièces au mont Popey le , après que la plupart de leurs compagnons ont été capturés (comme Plantigny, Clermont-Tonnerre, « Arnaud » et « Rimbert ») ou tombés sous les coups des habitants des villages traversés durant leur véritable débandade à travers le Lyonnais et le Beaujolais. Le général, quant à lui, parvient à gagner Sainte-Agathe-en-Donzy, à s’y cacher quelques mois puis à gagner la Suisse en .
Le à midi, les autorités civiles de Lyon capitulent[2],[3].
Suites
La répression est énergique, sous la direction de Joseph Fouché, le mitrailleur de Lyon, avec plus de 1 900 rebelles tués (après jugements), mitraillés, fusillés, canonnés, ou guillotinés. Les victimes du siège même semblent ne pas avoir été dénombrées.
Lyon, punie, perd son nom, devient Ville Affranchie ou Commune-Affranchie. Elle est vouée à la destruction (Bertrand Barère). Mais sur les 600 immeubles promis à la démolition, seuls 50 sont effectivement détruits.
Et la population et la municipalité sont rapidement confrontées à des problèmes de subsistance et d'emploi. Puis, d'autres troubles politiques interfèrent au redressement. La première Terreur blanche frappe dès 1795.
Michel Biard, « Familles lyonnaise victimes du siège de Lyon en 1793 », Annales historiques de la Révolution française, no 339, , p. 170-172 (DOI10.4000/ahrf.2161, lire en ligne)
Michel Biard, 1793, le siège de Lyon: entre mythes et réalités, Clermont-Ferrand, Lemme Edit, coll. « Illustoria », , 113 p. (ISBN978-2-917575-36-9)
A. Bichot, Siège de Lyon en 1793, Paris, L. Martinet, , 48 p.
(extrait du Spectateur militaire, mars 1853)
Philippe Bourdin et Côme Simien, « Le jour où Lyon est devenu Ville-Affranchie : Mémoire d’un siège sous la Restauration », dans Jean-Claude Caron et Nathalie Ponsard, La France en guerre : Cinq « années terribles », Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », (ISBN978-2-7535-8891-2, DOIhttps://doi.org/10.4000/books.pur.170428, lire en ligne), p. 277-290.
Étienne Couriol, « Liens relationnels, identité et comportements de la noblesse provinciale sous la Révolution. L’exemple du siège de Lyon et de la Terreur », dans Philippe Bourdin, Les noblesses françaises dans l'Europe de la Révolution, Rennes, Presses universitaires de Rennes, , 333-354 p. (ISBN978-2-7535-6733-7, DOIhttps://doi.org/10.4000/books.pur.129768, lire en ligne).
Pierre-Yves Saunier, « Le Siège de Lyon et le culte du territoire », Cahiers d'histoire, vol. t.XXXVIII, n°3-4, , p. 351-354 (lire en ligne).
Articles connexes
Stendhal (1783-1842), présent en famille à une partie du siège, l'évoque en 1835 dans Vie de Henry Brulard (chap. 22).
↑ abcd et eRoger Dupuy, La République jacobine: Terreur, guerre et gouvernement révolutionnaire, 1792-1794, t. 2 de la Nouvelle histoire de la France contemporaine, Le Seuil, coll. Points Histoire, 2005, p. 125-131.
↑ abcde et fJean-René Suratteau, « Lyon (Ville-Affranchie/Commune-Affranchie) », dans Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, PUF, 1989 (rééd. Quadrige, 2005, p. 688-696).
↑Voir Jacques Branciard, Les Muscadins de Theizé - Histoire et mémoire, Villefranche sur Saône, Éditions du Poutan, 2009 ; sources : Bruno Benoît et Roland Saussac, Guide historique de la Révolution à Lyon (1789-1799), Lyon, Éditions de Trévoux, 1988 ; François-Amédée Doppet, Éclaircissements sur la fuite, l’arrestation et la mort des fuyards de Lyon lors de l’entrée de l’armée de la République dans cette ville rebelle, Ville affranchie, Vatar-Delaroche, 1793, 7 pages ; Louis Dussieux, « Siège de Lyon – sortie» dans Revue du Lyonnais, t. VIII, 1838, p. 246-250 ; Edme de la Chapelle, Souvenirs d’Edme de la Chapelle de Béarnès, Paris, Plon, 1913, pp I à XLIII et 83 à 160 ; Louis François Perrin de Précy, «Sortie des Lyonnais et retraite du général Précy racontée par lui-même», dans la Revue du Lyonnais, t. XXXVI, Lyon, Boitel, 1847, p. 181-206.