Rahavard Farahani est née le à Téhéran. Elle est la fille de l'acteur et metteur en scène de théâtre Behzad Farahani(en) et de la comédienne et peintre[1]Fahimeh Rahimnia. Son père, opposant de gauche au chah puis à l’ayatollah Khomeini[2], lui donne un second prénom persan unique, en complément de son prénom officiel Rahavard, composé de gol, « fleur », et shifteh, « éprise », qui signifie « éprise de fleur ». Elle a une sœur et un frère aînés : Shaghayegh Farahani(en), actrice ; Azarakhsh Farahani, musicien et peintre[1].
Golshifteh Farahani est une enfant virtuose : jonglant avec les gammes au piano dès l'âge de 6 ans[2], elle intègre à 12 ans l'école de musique de Téhéran. Sélectionnée pour se présenter au conservatoire de Vienne, elle refuse cette possibilité, voulant rester en Iran. Elle se passionne alors pour le théâtre[3].
Entre-temps, elle tourne son premier film, Le Poirier, drame romantique du réalisateur iranien Dariush Mehrjui qui lui vaut le prix de la meilleure actrice au Festival du film de Fajr. Elle n'a que 14 ans, mais elle est résolue à rester dans le cinéma[2]. Dès lors, la jeune fille trilingue (persan, anglais, français) enchaîne les tournages, alignant dix-neuf films en dix ans. Adolescente, elle est attaquée à l’acide en pleine ville par un homme qui la jugeait insuffisamment « couverte ». Elle est protégée par son sac à dos et son manteau, l'acide ne causant que quelques brûlures à la main[2]. Pour pouvoir se promener librement dans Téhéran, elle décide de se raser la tête et de s'habiller comme un garçon[4].
Revue en 2007 dans Chacun son Cinéma, collectif prestigieux de trente-trois courts-métrages, Golshifteh Farahani voit sa cote internationale s'envoler en 2008 avec Mensonges d'État. En décrochant au côté de Leonardo DiCaprio le rôle féminin du thriller de Ridley Scott, elle devient la première actrice iranienne à franchir les portes d'Hollywood depuis la révolution islamique de 1979[5].
Le fait qu'elle participe à la conférence de presse sans voile irrite le pouvoir qui lui signifie, en , une interdiction temporaire de sortie du territoire et lui confisque son passeport[5],[3]. Elle réussit cependant à quitter le pays pour rejoindre les tournages où elle est engagée, mais vit ensuite en exil de peur de regagner son pays[5],[6].
Elle se réfugie alors en France où elle trouve la liberté dont elle a toujours rêvé, elle affirme : « Paris est le seul endroit de la planète où les femmes ne sont pas coupables. En Orient, tu l'es tout le temps »[7].
Carrière internationale
Golshifteh Farahani termine le tournage du film Au prix du sang de Roland Joffé, et vit alors à Paris avec son mari, Amin Mahdavi.
L'année 2014 est marquée par la sortie de trois films : elle figure dans la distribution du film biographique français Eden, de Mia Hansen-Løve ; elle tient le premier rôle féminin du drame politique américain Rosewater, première réalisation de l'animateur de télévision, humoriste et satiriste américain Jon Stewart ; elle prête ses traits à Néfertari dans le blockbuster Exodus: Gods and Kings, qui lui permet de retrouver Ridley Scott.
D'autres retrouvailles sont pour l'année suivante, celles avec Louis Garrel et Vincent Macaigne pour Les Deux Amis, premier long-métrage de Louis Garrel. La même année, elle tient le premier rôle d'une co-production internationale indépendante, Go Home, de Jihane Chouaib.
Dans le clip de la chanson Paradis du chanteur Orelsan[9], elle interprète le rôle de sa compagne.
En mars 2019, elle reçoit au Festival du Printemps Persan à Hambourg le Hamburg Award for Cultural Freedom (Prix de Hambourg pour la liberté culturelle) avec Zar Amir Ebrahimi[10].
Controverses
En 2012, Golshifteh Farahani montre le bout d'un sein dans une vidéo pour les Césars. Un représentant de la cour suprême d'Iran, enragé par cet acte, convoque son père et le menace sévèrement. En 2015, la revue Égoïste publie en couverture une photo de Golshifteh Farahani nue, prise deux ans plus tôt par Paolo Roversi[1],[11].
Prises de position
Même s'ils ne sont pas des opposants politiques, ses parents désapprouvent le régime et Golshifteh se proclame libre depuis toute petite refusant les normes imposées dans son pays. Elle défie les autorités dans les années 1990 en mangeant des choux à la crème sur la place principale de Téhéran dans une journée en période de Ramadan[3]. Refusant aussi de porter le voile, elle se rase la tête et se serre la poitrine avec une bande de tissu pour ressembler à un garçon et pouvoir circuler librement dans Téhéran[12].
Exilée depuis 2008, l'actrice défend la jeune génération, qui se révolte en Iran à partir de septembre 2022.« Cette génération Z n’a connu ni la révolution ni la guerre, elle est née dans le marasme, coincée dans un pays qui est une dictature. Mais elle a Instagram, TikTok, elle sait ce qu’il se passe dans le monde, elle est irrévérencieuse, sans complexe ni timidité. J’ai l’impression qu’elle ne craint rien »[13],[14].
En 2022, l'actrice revient sur la sortie du film Mensonges d'État en 2008 qui a entraîné des sanctions de la part du régime iranien la poussant à l'exil : « Lorsque je me suis permis d'apparaître la tête découverte, à 24 ans, à New York, le soir de la première du film de Ridley Scott dans lequel je jouais, tout le pays m'est tombé dessus. C'est comme si j'avais lancé une bombe atomique. Personne ne m'a soutenue. Personne ! Pas même le réalisateur Asghar Farhadi, avec qui je venais de tourner À propos d'Elly et qui m'a bannie »[13].
Vie privée
En 2003, Golshifteh Farahani épouse Amin Mahdavi, frère de la décoratrice India Mahdavi. Ils divorcent en 2011[6].
Elle a été la compagne de Louis Garrel[1], réalisateur et son partenaire dans Les Deux Amis (sorti en 2015)[15]. Elle se sépare de Garrel qu'elle voit comme « un génie »[16], et avec qui elle a vécu « une expérience enrichissante mais difficile à vivre à cause de ses réactions sur le tournage, […] pour la première fois, j'ai eu l'impression d'être une mauvaise actrice […] et une fois le tournage terminé, j'étais complètement détruite[16]. » Dans la même interview, elle déclare vouloir quitter la France à cause de sa bureaucratie et des « bâtons dans les roues que lui a mis la banque[16]. »
Dans le magazine Grazia du , elle confie avoir épousé un Français d'origine australienne, le psychologue Christos Dorje Walker, cinq mois auparavant[16],[17]. En , elle déclare être séparée de son mari[2].
En 2018, elle déclare qu'après « avoir vécu huit ans à Paris », elle « se partage désormais entre Porto et Ibiza, avec une préférence pour l’île des Baléares[2]. »
Dans les livres
Golshifteh Farahani sert de modèle au personnage de Sheyda dans l'ouvrage de la romancière Nahal Tajadod intitulé Elle joue (Albin Michel, 2012). La vie de ce personnage d'actrice iranienne s'inspire largement de sa vie réelle[18].
Elle a témoigné dans le livre Nous n'avons pas peur : le courage des femmes iraniennes paru aux Éditions du Faubourg en mars 2024[19], qui rassemble les voix de seize femmes iraniennes[20] recueillies par Düzen Tekkal et Natalie Amiri et traduit de l'allemand par Mathilde Ramadier.
Filmographie
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par le site IMDb.
Dans une scène du film Si tu meurs, je te tue réalisé par Hiner Saleem et sorti en 2011, Golshifteh Farahani joue du piano[32], qu'elle a travaillé au conservatoire dans sa jeunesse à un excellent niveau[réf. nécessaire].
En mai et , on la voit pianiste dans Anna Karénine, au théâtre de la Tempête.
Dans plusieurs scènes du film Altamira réalisé par Hugh Hudson et sorti en 2016, elle interprète au piano plusieurs morceaux de musique romantique.
↑ a et b« Qui sont les lauréats du prix Danielle Mitterrand 2018 ? », sur france-libertes.org, (consulté le ) : « Cette année, France Libertés a choisi de décerner les prix Danielle-Mitterrand à deux lauréats dont l’engagement est remarquable : le peuple autochtone Krenak du Brésil et la comédienne franco-iranienne Golshifteh Farahani. Deux combats, celui d’un peuple pour la justice et celui d’une femme libre qui se répercutent et dialoguent en écho. »
↑Thierry Chèze, « Golshifteh Farahani : "Avec Elle joue, Nahal Tajajod voulait que mes paroles rentrent en elle" », sur lexpress.fr, (consulté le ) : « Ce roman raconte l'Iran des années 70 à nos jours comme si on y était, à travers la vie de deux femmes, l'auteur qui a grandi dans ce pays à l'époque du Shah et une comédienne — largement inspirée par Golshifteh Farahani — véritable star dans son pays qui en est aujourd'hui bannie pour avoir tourné dans un film américain puis posé dénudée pour le photographe Jean-Baptiste Mondino. »
↑Natalie Amiri et Düzen Tekkal, Nous n'avons pas peur : le courage des femmes iraniennes, editions du faubourg, (ISBN978-2-493594-60-0)
↑ a et b« Dossier de presse du film My Sweet Pepper Land de Hiner Saleem » [PDF], sur memento-films.com, (consulté le ) : « Dans mon précédent film [Si tu meurs, je te tue, sorti en 2011], Golshifteh Farahani jouait du piano. C'est une excellente pianiste, même si elle privilégie aujourd'hui sa carrière de comédienne. Mais je ne voulais pas me priver de son talent de musicienne. J’avais envie d’entendre cet instrument peu connu qu’est le hang, dont elle sait jouer. Cet instrument a été inventé par deux Suisses. Il se rapproche du piano et des percussions, tout en dégageant des sonorités magnifiques. Certains pensent que c'est un instrument kurde traditionnel, mais personne ne pourrait s'imaginer qu'il a été mis au point par des hippies suisses ! », page 6, colonnes 3 et 4.
Catherine Valenti, Les femmes qui s'engagent sont dangereuses, Paris, Gründ, , 165 p. (ISBN978-2324-020926), p. 156-161.
Presse
Mathilde Cesbron, « Golshifteh Farahani : “Je voulais qu'on regarde ce corps...” », Le Point, Paris, Société d'exploitation de l'hebdomadaire Le Point-Hebdo, no 2385, , p. 108-111.
« Soutenons les Iraniens : "Soyez leur voix" », Elle, no 4023, , p. 9-15