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La Constitution du 6 messidor an I (), Constitution de l’an I ou Constitution de 1793, est élaborée pendant la Révolution française par la Convention montagnarde et adoptée le 6messidoran I (). Promulguée le pour régir la Convention nationale de la Première République, elle n'a jamais été appliquée, la Convention ayant décrété, le 10 octobre 1793[1], que le gouvernement serait révolutionnaire jusqu'à la paix. Elle a toutefois emporté des conséquences juridiques, notamment en matière de nationalité.
Le , Hérault de Séchelles présente les travaux du comité[2] à la Convention et lit à la tribune le projet de constitution[3] que précède un projet de déclaration des droits[4].
La discussion s'ouvre le lendemain, . Sommaire, elle s'achève le , date à laquelle le projet de constitution amendé, lu par Hérault de Séchelles, est adopté.
Conformément au décret du , le texte est soumis au référendum. Il s'agit du premier référendum organisé en France[5].
Approuvée par référendum dans des circonstances assez spécifiques (il y eut plus de cinq millions d'abstentionnistes sur un contingent d'environ sept millions d'électeurs, en raison de la publicité du vote, à savoir que le caractère secret du vote n'était pas mis en avant[6]), cette constitution très démocratique (suffrage universel masculin, pouvoir important des assemblées locales dans l’édiction des lois) ne fut pas appliquée, en raison de conflits internes (Guerre de Vendée) ainsi qu'externes (guerre de la Première Coalition) sur le territoire français.
consécration de la théorie de la souveraineté populaire au détriment de la souveraineté nationale se traduisant par une ébauche de référendum (c'est le peuple réel qui est souverain, non la nation, le peuple sublimé, qui est plus large - notion sous-jacente de majorité) ;
l'insurrection devient un droit et un devoir (c'est-à-dire qu'elle est éventuellement de fait un droit) quand le gouvernement viole les droits du peuple,
interdiction de l'esclavage juridique — appropriation de fait d'un droit excessif confinant au privilège par une caste ou secteur de l'administration publique si d'aventure l'étendue des textes législatifs outrepasse le cadre populaire de la réglementation approuvée par le peuple[Quoi ?].
Régime d'assemblée
La Constitution de l'an I institue un régime d'assemblée où le pouvoir est plus ou moins concentré entre les mains d'une seule assemblée renouvelable tous les ans au suffrage universel direct. Elle exerce le pouvoir législatif, avec la participation des citoyens par une sorte de référendum. Elle tient sa légitimité du peuple, l'accession à la majorité des nouvelles générations, la disparition des anciennes, impose un renouvellement de l'approbation du peuple (article 28).
Le peuple français est distribué, pour l'exercice de sa souveraineté, en Assemblées primaires de canton. Les Assemblées primaires se composent des citoyens domiciliés depuis six mois dans chaque canton. Elles sont composées de deux cents citoyens au moins, de six cents au plus, appelés à voter.
Les projets de loi de l'Assemblée nationale sont envoyés à toutes les communes de la République, sous ce titre : loi proposée. Quarante jours après l'envoi de la loi proposée, si, dans la moitié des départements, plus un, le dixième des Assemblées primaires de chacun d'eux, régulièrement formées, n'a pas réclamé, le projet est accepté et devient loi.
Les lois, les décrets, les jugements et tous les actes publics sont intitulés : Au nom du peuple français, l'an… de la République française.
Un Conseil exécutif se compose de vingt-quatre membres. L'assemblée électorale (les citoyens réunis en Assemblées primaires nomment un électeur à raison de 200 citoyens, présents ou non ; deux depuis 301 jusqu'à 400 ; trois depuis 501 jusqu'à 600) de chaque département nomme un candidat. Le Corps législatif choisit, sur la liste générale, les membres du Conseil. Il est renouvelé par moitié à chaque législature. Le Conseil est chargé de la direction et de la surveillance de l'administration générale ; il ne peut agir qu'en exécution des lois et des décrets du Corps législatif.
Il nomme, hors de son sein, les agents en chef de l'administration générale de la République. Ces agents ne forment pas un conseil ; ils sont séparés, sans rapports immédiats entre eux ; ils n'exercent aucune autorité personnelle.
Le Conseil nomme, hors de son sein, les agents extérieurs de la République et il négocie les traités. Le Conseil est responsable de l'inexécution des lois et des décrets, et des abus qu'il ne dénonce pas.
Constitution jamais appliquée
Le , la Convention consacre l'établissement d'un gouvernement révolutionnaire dans le cadre d'un état d'exception, déclarant : « Le gouvernement provisoire de la France sera révolutionnaire jusqu'à la paix ». Il avait été convenu que la paix revenue, la constitution serait ressortie de son arche de cèdre pour être appliquée. La guerre intérieure, extérieure et surtout le renversement de la convention montagnarde le 10 thermidor an II sonnèrent le glas de son application.
Malgré sa non-application, la Constitution de l'an I garda un grand prestige auprès des forces politiques de la gauche démocratique française sous le Directoire, l'Empire et la Restauration. Ainsi, Gracchus Babeuf et la Conjuration des Égaux voulaient l'application de cette constitution qui, même avec son apologie de la propriété, leur semblait être la plus égalitaire.
Au XIXe siècle, d'après une jurisprudence bien établie par des décisions concordantes de cours d'appel[N 1], la Constitution de l'an I est entrée en vigueur à la suite de la proclamation de son acceptation, le [8],[9]. Le décret du 19 vendémiaire an II (), pris sur le rapport de Saint-Just et portant que « le gouvernement provisoire de la France est révolutionnaire jusqu'à la paix », n'a pas eu pour effet de différer dans le temps l'entrée en vigueur de la Constitution de l'an I : il en suspend l'effet, prouvant ainsi qu'elle était antérieurement entrée en vigueur[8]. L'effet suspensif du décret de l'an II est restreint aux dispositions de la Constitution de l'an I relatives au gouvernement[8]. Les autres dispositions de la constitution sont restées en vigueur. Au nombre de ces dispositions, figure l'article 4, alinéa 2, de l'Acte constitutionnel, aux termes duquel : « Tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année, y vit de son travail, ou acquiert une propriété, ou épouse une Française, ou adopte un enfant, ou nourrit un vieillard (...), est admis à l'exercice des droits de citoyen français. » Ces dispositions ont abrogé celles de l'article 3 du titre II de la Constitution du [N 2]. Elles sont restées en vigueur jusqu'à leur abrogation par l'article 10 de la Constitution de l'an III[N 3] qui est entrée en vigueur le , date de sa promulgation[8].
Au Japon, la constitution fut traduite par Chōmin Nakae en chinois classique en 1882 sous le titre « Déclaration des droits du peuple français de 1793 ». Le texte servit de modèle pour les partisans du Mouvement pour la liberté et les droits du peuple, réclamant alors une constitution démocratique et un parlement[21].
« Sont citoyens français : (...) — Ceux qui, nés hors du Royaume de parents étrangers, résident en France, deviennent citoyens français, après cinq ans de domicile continu dans le Royaume, s'ils y ont, en outre, acquis des immeubles ou épousé une Française, ou formé un établissement d'agriculture ou de commerce, et s'ils ont prêté le serment civique. »
« L'étranger devient citoyen français, lorsque après avoir atteint l'âge de vingt et un ans accomplis, et avoir déclaré l'intention de se fixer en France, il y a résidé pendant sept années consécutives, pourvu qu'il y paie une contribution directe, et qu'en outre il y possède une propriété foncière, ou un établissement d'agriculture ou de commerce, ou qu'il y ait épousé une femme française. »
↑Un étranger né le , installé en France depuis le [14].
↑Pierre Casati, né le à Molina, en Lombardie[15],[16].
↑Jean Martin est français en tant que fils légitime de Jacques-Joseph Marin et petit-fils de Jacques Martin. Celui-ci, né en à Turin, avait été naturalisé par l'article 4, alinéa 2, de l'Acte constitutionnel : domicilié à Antibes depuis , y vivant de son travail de tisserand, il avait épousé une Française en [12],[14].
↑Petrus Hutter, né en France, en tant que fils de Jean-Thomas Hutter[18].
↑Jacques Régis, né à Mont-de-Marsan, en tant que fils de Théodore Régis, né le à Mont-de-Marsan, et petit-fils de Conradin Régis. Celui-ci, né le en Suisse, a été naturalisé par l'article 4, alinéa 2, de l'Acte constitutionnel : établi en France dès , il y exerçait une industrie et avait épousé une Française en à Orthez[19],[20].
↑Projet de constitution, dans Archives parlementaires de 1787 à 1860 : première série (1787 à 1799), tome LXVI : du 3 au 19 juin 1793, pp.260-264 (consulté le 7 janvier 2014).
↑Projet de déclaration des droits, dans Archives parlementaires de 1787 à 1860 : première série (1787 à 1799), tome LXVI : du 3 au 19 juin 1793, pp.259-260 (consulté le 7 janvier 2014).
[Dalloz 1850] Désiré Dalloz (avec la collab. d'Armand Dalloz et al.), Jurisprudence générale : répertoire méthodique et alphabétique de législation, de doctrine et de jurisprudence en matière de droit civil, commercial, criminel, administratif, de droit des gens et de droit public [« Répertoire Dalloz »], t. XVIII, Paris, Bureau de la jurisprudence générale du royaume, , 1 vol., 28 cm (OCLC491639646, SUDOC076767949).
Boris Barraud, « La République révolutionnaire : modernité et archaïsme constitutionnels des premières institutions républicaines de France (1792-1799) », Revue juridique de l'Ouest, no 4, , p. 63-90 (ISSN2496-7564, lire en ligne).
Jean Bart (dir.), Jean-Jacques Clère (dir.), Claude Courvoisier (dir.), Michel Verpeaux (dir.) et Françoise Nadin-Patriat (dir.), La Constitution du 24 juin 1793 : l'utopie dans le droit public français ?, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, coll. « Publications de l'Université de Bourgogne » (no 88), , 431 p. (ISBN2-905965-22-3, présentation en ligne).
Michel Fridieff (préf. Gilbert Gidel), Les Origines du referendum dans la Constitution de 1793 (l'introduction du vote individuel), Paris, Presses universitaires de France, (1re éd. 1931), 326 p. (présentation en ligne).
Raymonde Monnier, « Un enjeu sous Thermidor : la mise en activité de la Constitution de 1793 », dans Jean-Paul Bertaud, Françoise Brunel, Catherine Duprat et al. (dir.), Mélanges Michel Vovelle : sur la Révolution, approches plurielles / volume de l'Institut d'histoire de la Révolution française, Paris, Société des Études Robespierristes, coll. « Bibliothèque d'histoire révolutionnaire / Nouvelle série » (no 2), , XXVI-598 p. (ISBN2-908327-39-2), p. 281-289.
Michel Pertué, « Les projets constitutionnels de 1793 », dans Michel Vovelle (dir.), Révolution et République : l'exception française, Paris, Kimé, , 699 p. (ISBN2-908212-70-6), p. 174-199.