L’armée de terre française, en temps de paix, compte début 1939 vingt divisions d’infanterie métropolitaines, cinq divisions de cavalerie dont deux mécanisées et huit divisions d’infanterie coloniales ou nord-africaines, ainsi que des troupes de souveraineté dans son Empire colonial[1].
Le général Gamelin est le commandant en chef de l'armée française (il est remplacé par le général Weygand le 17 mai 1940). Au déclenchement de la bataille de France, le 10 mai 1940, le territoire métropolitain est composé de deux théâtres d’opération : le théâtre d’opération du nord–est, le plus important, de la mer du Nord au Jura, commandé par le général Georges et le théâtre d’opération du sud–est (Alpes), du Jura à la Corse, commandé par le général Olry. L’armée française dispose à cette date sur le front du nord-est de trois groupes d’armées, de huit armées (une armée de plus est en réserve face à la Suisse), de vingt-six corps d’armée et de cavalerie (deux corps de plus sont en réserve), de quatre-vingt-quatorze divisions
(dont dix-neuf sont en réserve) et de quatre brigades de cavalerie et de spahis.
L'organigramme de l'armée de terre dans les différents théâtres d’opération le 10 mai 1940 ainsi que les différents types d'unité et leur équipement sont présentés ci dessous.
Groupes d'armées du théâtre d'opérations du nord-est (général Georges)
Le théâtre d’opération nord-est (TONE) qui s'étend de la mer du Nord au Jura, sur la frontière avec la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne, est commandé par le général Georges. Trois groupes d'armées (GA1, GA2 et GA3) créés en septembre 1939, commandés respectivement par les généraux Billotte, Prételat et Besson, couvrent ce front. Un quatrième groupe d'armées, formé en mai 1940, entre en ligne le 6 juin, commandé par le général Huntziger.
Au 10 mai 1940, les réserves stratégiques sont de 22 divisions sur les 94 divisions françaises et les 10 divisions du Corps expéditionnaire britannique en France métropolitaine soit 21 % du total. Mais sur ces 22 divisions, théoriquement, six constituent le « lot belge » et ne sont pas des réserves puisqu’elles doivent être envoyées en Belgique dès le premier jour de l’attaque allemande contre ce pays ; 5 constituent le « lot suisse » vers Vesoul-Belfort pour parer à une hypothétique attaque contre la Suisse ; 3 constituent le « lot alpin » au sud de Chaumont (menace italienne). Restent 8 divisions (6 DI et 2 DCR) réellement disponibles. Si on y ajoute le lot alpin, cela fait 11 divisions, soit 10 % c’est-à-dire alors que la norme veut que l’on ait de 25 à 33 % de ses effectifs totaux en réserve stratégique (les réserves allemandes sont de 42 divisions sur 117 à la même date). Le général Gamelin qui perçut le problème d'avoir trop de divisions derrière la ligne Maginot n'a pas pu imposer son allégement. Notons qu'au jour du déclenchement de l'offensive allemande, l’armée française comptait 15 % de permissionnaires.
Types de grandes unités dans l'armée française de 1940
Les divisions d'infanterie sont les unités les plus répandues à l'époque, elles se répartissent en trois séries :
d'active, qui existent en temps de paix ;
de série A, créées à la mobilisation par dédoublement des unités d'active, elles comportent plus de 50 % de réservistes, l'encadrement et le matériel y sont à peu près équivalents à celui de ces dernières ;
de série B, également dérivées des unités d'active, elles sont majoritairement (90 %) composées de réservistes, le matériel et les effectifs sont bien souvent incomplets. Lorsqu'elles reçoivent des matériels plus modernes, les réservistes n'ont jamais côtoyé de tels équipements lors de leurs classes[7].
Elles sont aussi réparties en types correspondant à une organisation et une dotation différentes. On trouve ainsi des :
Trois divisions légères, la 1re et la 2e de chasseurs et la 3e d'infanterie, sont également formées pour la Scandinavie[1].
Début mai 1940, 67 divisions d'infanterie dont 7 motorisées, 24 d’active, 20 de série A et 16 de série B sont aptes à faire campagne front Nord-Est ainsi que 16 divisions d'infanterie de forteresse[réf. souhaitée].
Ce sont des divisions semi-motorisées, issues de deux réformes successives : la réforme de cavalerie de 1932 et la transformation, en janvier 1940, des divisions de cavalerie (DC) en divisions légères de cavalerie (DLC), allégées d'une partie de leurs effectifs pour former des unités supplémentaires ; le commandement voulait avoir des unités plus nombreuses et plus mobiles. Ces divisions étaient familièrement appelées « divisions essence-picotin », car elles combinaient deux brigades de cavalerie :
une brigade à cheval (BC) composée de :
2 régiments de cavalerie.
une brigade motorisée (BLM) composée :
1 bataillon de dragons portés ;
1 régiment d'automitrailleuses (RAM).
Dans la pratique, cet assemblage se révèlera peu commode, les engins motorisés devant souvent attendre les chevaux, sous peine d'avoir à combattre seuls. Ces divisions sont dites légères, pour leur aptitude à passer plus rapidement de l'ordre de marche à l'ordre de bataille.
Les 1re, 2e, 3e, 4e et 5e divisions légères de cavalerie, ont toutes les cinq été créées par conversion des trois dernières divisions de cavalerie d'active, en février 1940.
La 6e DLC, elle, a été créée en Algérie par absorption de diverses unités stationnées en Afrique du Nord.
Les cinq premières seront en première ligne, lors de l'entrée en Luxembourg et en Belgique, cherchant à couvrir le terrain, pour permettre le déploiement de l'infanterie dans le cadre de la manœuvre Dyle.
Ce sont des améliorations des divisions de cavalerie d'active, en remplaçant les régiments à cheval par des unités d'automitrailleuses de combat, en pratique des chars de combat. Elles sont le plus proche équivalent français des Panzerdivisions allemandes, assez bien équilibrées, regroupant presque toutes les armes nécessaires à la guerre mécanisée. Avec 260 véhicules de combat en première ligne (sans compter les véhicules de commandement et de volant au nombre de 47 unités), elles souffrent d'être un peu moins puissantes et peu nombreuses.
Ce seront des unités et de renforts de circonstance issues d'unités éprouvé des écoles, sans réelle cohésion et qui seront envoyées au combat sans préparation.
Ces nouvelles unités apparaissent le 16 janvier 1940, quand sont créées les 1re et 2e issues des 1re et 2e brigades cuirassées. La 3e suivra en mars, et enfin la 4e, le 15 mai. Ce sont des regroupements de bataillons de chars de combat destinés au départ au soutien d'infanterie, associés à un bataillon de chasseurs portés et un régiment d'artillerie tractée tout-terrain. Elles sont bien moins réussies que les divisions légères mécaniques, manquant d'infanterie d'accompagnement et d'unités de reconnaissance. Elles possèdent un atout, cependant, avec leurs 2 bataillons de chars de bataille B1 bis, qu'aucun panzer ne peut détruire directement. L'appellation de réserve que l'on lit souvent n'est pas juste. L'acronyme DCr se veut juste différent de DC ou division de cavalerie.
Les groupes de reconnaissance sont des petites unités de cavalerie, motorisées ou non, qui sont formées à la mobilisation pour fournir des unités de reconnaissance aux grandes unités, on en trouve six types :
groupe de reconnaissance de corps d'armée de type normal (deux escadrons à cheval, un de fusiliers motocyclistes et un de mitrailleuses et de canon motorisé) ;
groupe de reconnaissance de division d'infanterie de type motorisé (deux escadrons de fusiliers motocyclistes et un de mitrailleuses et de canon motorisé) ;
groupe de reconnaissance de division d'infanterie de type normal (un escadron à cheval, un de fusiliers motocyclistes et un de mitrailleuses et de canon motorisé) ;
groupe de reconnaissance de division d'infanterie de type outre-mer (deux escadrons à cheval et un de mitrailleuses et de canon hippomobile).
Équipement de l'armée française
Abréviations
BCC : bataillon de chars de combat
BCTC : bataillon de chars des troupes coloniales
CACC : compagnie autonome de chars de combat
CEFS : corps expéditionnaire français de Scandinavie
cie : compagnie
CPTICC : centre pratique de tir et d'instruction des chars de combat
Le décompte des dotations en véhicules automobiles prévues pour l’Armée de Terre se monte à 300 000, plus de 400 000 si l’on ajoute les besoins des forces aériennes. L’armée du temps de paix ne possédant que 10 % de ces dotations, il est fait massivement appel à la réquisition des véhicules civils.
45 000 voitures particulières (3 % du parc national de 1,7 million) sont réquisitionnées.
Pour les camions et camionnettes, 225 000 véhicules de plus de 0,8 tonne (sur 450 000 disponible en France)[9] dont 123 000 camions militaires et civils furent réquisitionnés[10] ainsi qu'environ la moitié autobus et 400 000 chevaux. Un déficit initial de 20 % demeure irréductible.
L'artillerie française était en meilleure posture qu'en 1914 avec un assez bon parc de matériel de tous calibres. Cependant, une bonne moitié est à traction hippomobile, comme pour l'artillerie allemande, et la conception de la grande majorité de ses matériels datait de la précédente guerre[14] ; par ailleurs, elle manquait cruellement de canons antiaériens. Plus de 1 400 pièces étaient affectées aux régiments d'artillerie de position défendant entre autres la ligne Maginot.
Les batteries antichars appartenant à l'artillerie sont équipées du canon de 47 mm modèle 1937 APX, remplacé par des 75 mm modèle 1897 dans certaines unités de réserve. Le Laffly W15 TCC entre en service en 1940.
Au sein des unités de l'Armée de Terre, l'arme antiaérienne de base est la Saint-Étienne modèle 1907, la Hotchkiss modèle 1914, et le moderne canon de 20 mm CA modèle 1939, en service en seulement 283 exemplaires.
L'uniforme de campagne standard pour l'infanterie comprenait[19] :
le casque Adrian modèle 1926. La rondache et la couleur indiquaient le corps ou l'armée. On trouve encore en 1940 des casques modèle 1915 mais en petite quantité.
en dehors du combat, le bonnet de police modèle 1918. Les troupes d'Afrique portaient la chéchia, tandis que les chasseurs et les troupes de forteresse portaient le béret.
capote modèle 1920/1935 ou 1938 en drap kaki avec boutons peints en kaki mat.
vareuse modèle 1920/35 ou 1938 en drap kaki (bleu pour les chasseurs).
chemise modèle 1935 en toile kaki (les teintes peuvent varier, du vert au jaune) ou bleu foncé pour les chasseurs ; cravate "régate" modèle 1935 en toile kaki ou noir pour les chasseurs.
bretelles de suspension modèle 1892/1914 en cuir fauve.
ceinturon toutes armes modèle 1903/14 en cuir fauve.
pantalon-culotte modèle 1922 en drap kaki (gris de fer foncé pour les chasseurs) ou pantalon-golf modèle 1938 en drap peigné de nuance kaki (gris de fer foncé pour les chasseurs).
bandes molletières modèle 1918 en tissu kaki (gris de fer foncé pour les chasseurs) cintrées ou droites (les guêtres commencèrent à apparaître tardivement en 1940, et n'équipèrent donc quasiment pas l'infanterie française).
↑Nicolas Neiertz, La coordination des transports en France de 1918 à nos jours, Institut de la gestion publique et du développement économique, , 802 p. (lire en ligne), p. 167-208
↑ abcdefghijklmnopqrstuvwxy et zFrançois Vauvillier, « Notre cavalerie mécanique à son apogée le 10 mai 1940 », Histoire de guerre, blindés et matériel, Histoire & Collections, no 75, , p. 40-49
↑ ab et cAlain Adam, « Les chars FT dans la défense du territoire français », Histomag 39-45, no 88, , p. 41-63 (ISSN2267-0785, lire en ligne)
↑Luc Guillou, « Un centenaire bien oublié : le fusil Gras modifié 14 : "le fusil des pépères" », La Gazette des Armes, no 463, , p. 32–36 (lire en ligne)