Albums de Alan Stivell
Trema'n Inis : Vers l'île(1976) Un dewezh 'barzh 'gêr : Journée à la maison(1978)
Singles
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'Raok Dilestra (Avant d'accoster en français, Before Landing en anglais) est le neuvième album original d'Alan Stivell et son septième album studio, paru à l'automne 1977. Il est réédité en CD en 1992 avec une distribution par Disques Dreyfus/Sony Music. Entièrement composé par Alan Stivell, c'est un album-concept qui retrace les étapes de l'histoire de la Bretagne dans un premier temps, puis les événements qu'ont connu les Bretons au XXe siècle, en finissant, tourné vers le futur, par un « Bretagne libre » scandé en trois langues. Avant de se tourner vers l'avenir, Alan Stivell considère ce travail historique comme une étape nécessaire dans son cycle tourné vers la transmission. La musique allie folk et rock progressif.
« Dans ce moment historique où l'espoir d'un changement de vie renaissant grâce aux chances de la gauche électorale d'être portée au pouvoir, il fallait encourager les Français et les Bretons (et autres peuples rassemblés par la même administration) à se libérer d'une Histoire falsifiée par le Bourgeoisie. Le mouvement de décolonisation de la Bretagne (comme d'autres mouvements luttant sur d'autres terrains) aidera la gauche française à combattre ses vieux démons nationalistes. La remise en valeur de civilisations autres, comme la civilisation celtique, aidera aussi les esprits à s'évader enfin des prisons romaines. »
— Alan Stivell, Texte de la pochette
Alan Stivell cherche à présenter à travers le disque l'histoire de la nation bretonne[1]. Le projet de la première partie – dédiée à Glenmor – est de revenir sur le passé des Bretons, d'en retracer les étapes importantes selon lui, depuis les anciens Celtes, titre de la première chanson. Suivent les « moments » historiques retenus par Alan Stivell : les Bretons exilés en Armorique, le royaume de Bretagne, le duché de Bretagne, le traité d'union avec la France, les révoltes, la Révolution française et le XXe siècle en deux parties. Musicalement, les chansons en breton s'enchaînent sans interruption pendant presque trente minutes.
Dans son livre Racines interdites (1979), il déclara : « [...] mes besoins de violence devraient exploser. À travers la musique. À travers les mots […] Réduire plus de vingt siècle d'histoire à dix chansons ? La tentative est délicate, mais je crois avoir respecté les faits importants. […] Raok Dilestra marque de façon évidente ma prise de position en faveur d'une libération nationale... et dont le but n'est pas de passer d'une bourgeoisie à l'autre[2]... » Cité par Jacques Vassal, le chanteur déclarait, pour présenter sa démarche : « Une histoire du peuple breton réduite à une dizaine de chansons [...] ne peut éviter de comporter quelques simplifications. Mais je crois cependant avoir respecté les faits importants de cette histoire interdite par l'école[3]. » Le chanteur reconnaîtra que certaines affirmations peuvent sembler exagérées, mais qu'elles arrivaient après des décennies, des siècles de domination et « qu'il n'y a rien de réellement contestable »[4]. « J'avais conçu ce disque alors que renaissait l'espoir d'un changement de vie, grâce aux chances de la gauche électorale d'accéder au pouvoir... »[2]
Le disque Raok Dilestra paraît à l'automne 1977 en France chez Phonogram (Philips) avec le chant franco-breton et quelques mois plus tôt chez son label historique Fontana dans sa version anglaise. Le 33 tours est réédité en CD par Disques Dreyfus en 1992, en se basant sur l'édition anglo-bretonne qui présentait les titres et une partie du chant en anglais. La version avec les voix en français n'est pas rééditée en digital.
Côté musique, il flirte avec des éléments du rock dit « progressif », c'est-à-dire la branche du rock la plus sophistiquée, ce qui fait que peu de personnes ont vraiment compris cet album lorsqu'il est paru[1]. Côté textes, pour beaucoup d'auditeurs, la compréhension n'est pas facilitée par l'expression en breton. Pourtant, l'album raconte une histoire réelle de la nation Bretonne, par moments du point de vue d'Alan Stivell, tout en pointant de vrais enjeux actuels comme la reconnaissance des minorités nationales[5].
André-Georges Hamon livre son avis dans son livre dédié à 20 ans de chanson bretonne : « ... un merveilleux album d'éducation musicale et politique pour le jeune Breton en mal de recherche. Les textes sont à la fois expressifs et finement ciselés. La musique est surprenante, forte dans son expression électrifiée et sensible dans sa forme acoustique. La beauté de ce disque vient à la fois du décalage voulu entre « texte historique » et musique planante et de l'alternance parfaitement réussie des passages « cool » avec intervention de la harpe celtique notamment et la dureté des sonorités rock. Il s'agit d'un véritable disque éducatif qui, sans annoncer totalement l'accostage, ouvre une voie tout à fait nouvelle dans l'expression bardique[6]... »
La composition du disque l'inscrit une fois de plus tout à fait dans la modernité musicale de son époque : du rock progressif (à noter le titre breton Raok qui signifie « avant » et « rock »), avec un Stivell sachant accueillir des musiciens de la galaxie de ce type de musique tout à fait virtuoses. En effet, avec l'appui de multi-instrumentistes anglais tels que Lyn Dobson (Soft Machine), Dave Swarbrick (Fairport Convention) et Richard Harvey (Gryphon), Stivell se révèle toujours comme un artiste en recherche, épousant son temps, sans jamais renier sa culture d'origine, ni ses convictions.
Musicalement, il présente un côté très rock (progressif ou fusion), avec la forte présence de la guitare de Dan Ar Braz, et ce pour la dernière fois, une plus forte présence de claviers (Alan s'y étant mis) et même de l'orgue sur The Breton Kingdom, l'utilisation de manière rock du fiddle (violon) de Patrig Kerre (remplaçant de René Werneer) ainsi que l'introduction du saxophone qui sonne très hargneux, le tout accompagné de la structure habituelle basse et batterie. Du côté acoustique traditionnel bien connu chez l'artiste, les instruments présents sont : sa harpe, enchanteresse sur Dead for his people, le dulcimer, le sitar de Lyn Dobson pour ouvrir et fermer l'album, le cromorne, qui date du Moyen Âge (sur The Breton Duchy) et puis bien évidemment les bombardes et cornemuses.
La première partie s'intitule Notre passé.
La partie Notre présent comprend six titres, dont deux sortis en 45 tours.
La pochette est une peinture (réalisée par Smart Art) d'une île verte et nue au milieu d'un océan entre bleu clair et sombre, sous un ciel voilé mystérieux. En haut, Alan Stivell est inscrit en lettres blanches stylisées, le logo de Keltia III à droite, en bas, le titre de l'album, complété par « avant d'accoster » et le logo de CBS. Une île qui rappelle le poème de Youenn Gwernig ouvrant le disque précédent, Trema'n Inis : Vers l'île. À l'intérieur, un beau cliché signé Phonogram : Alan, en veste de jean, barbu, les cheveux au vent, les yeux tournés vers le lointain, avec sa bombarde. Le texte en regard (cité plus haut) s'inscrit dans l'époque et, toujours, dans le projet celtique de Stivell.
Toutes les paroles sont écrites par Alan Stivell, toute la musique est composée par Alan Stivell.
Naw Breton 'ba' prizon et Gwriziad difennet (pistes 12 & 14) :