Les élections législatives de juin 2018 ne dégagent pas de majorité claire, le parti de centre gauche dit Parti du centre moderne du président du gouvernement Miro Cerar essuyant un net recul en perdant plus des deux tiers de ses sièges. Le parti de droite SDS arrive en tête avec 25 % des voix et 25 sièges sur 90 après une campagne axée sur les effets de la crise migratoire en Europe[1], les forces de gauche étant pour leur part éclatées en de nombreux partis. La Liste de Marjan Šarec et le parti La Gauche (Levica), nouvellement créés, font leur entrée au parlement, tandis que le Parti national slovène y retourne après dix années d'absence.
Après deux mois de négociations, un nouveau gouvernement de centre gauche est finalement annoncé début août, avant de prendre officiellement forme le . Marjan Šarec prend la tête d'une coalition LMS-SD-SMC-SAB-DeSUS. Ce gouvernement minoritaire réunit ainsi 43 sièges sur 90, en comptant sur le soutien sans participation de Levica[2] et ses 9 députés, portant les appuis du gouvernement dans l'assemblée à 52 sièges. Le SDS, bien qu'ayant réuni le plus grand nombre de suffrages lors du scrutin, siège à nouveau dans l'opposition pour cette législature, en compagnie du NSi et du SNS.
Chute du gouvernement
La coalition gouvernementale se déchire fin 2019 sur la question d'une réforme du système de santé visant à en combler le déficit, une des principales promesses de campagne de la liste Marjan Šarec. Le ministre des Finances Andrej Bertoncelj s'oppose publiquement au projet porté par le LMS avant de présenter sa démission, tandis que Levica retire son soutien à la coalition. Devant l'échec de son projet et la mise en minorité de son gouvernement à l'assemblée, Marjan Šarec présente à son tour sa démission le , déclarant « ne pas pouvoir répondre aux attentes du peuple » tout en s'affirmant confiant d'en être à même « après des élections ». Son parti mène alors largement en tête des intentions de vote depuis plusieurs mois[3],[4].
Des élections anticipées pour la deuxième quinzaine d'avril sont alors jugées très probables, le Parti démocratique slovène (SDS) - qui seul pourrait former autour de lui une nouvelle coalition susceptible d'éviter un retour aux urnes - s'y déclarant lui aussi favorable par la voix de son dirigeant, Janez Janša[3]. Le président Borut Pahor entame néanmoins des consultations avec les différents partis au lendemain de la démission de Šarec, au cours desquelles le SDS finit par envisager sérieusement la formation d'une coalition[5]. Pahor a jusqu'au pour nommer un nouveau président du gouvernement pouvant compter sur un vote de confiance de l'assemblée, ou annoncer à cette dernière ne pas être en mesure de le faire, auquel cas les partis ont toute liberté pour en proposer un pendant une nouvelle période de seize jours. L'absence d'un président du gouvernement doté d'une majorité renouvelée à l'issue de ces périodes de négociations conduirait le président à convoquer de nouvelles élections[6].
Janez Janša parvient finalement a rassembler autour du Parti démocratique slovène le Parti du centre moderne (SMC), le Parti démocrate des retraités slovènes (DeSUS) et Nouvelle Slovénie (NSi). L'accord de coalition entre les quatre partenaires - qui totalisent alors 48 sièges sur 90 en raison d'une défection d'un député en faveur du SDS - est annoncé le avant d'être communiqué au président Pahor[7]. Ce dernier charge Janša de former un gouvernement le lendemain[8]. Le , le parlement vote la confiance par 52 voix favorables et 31 contres à Janša, qui prête serment le jour même[9].
Les deux autres sièges sont réservés aux minorités italiennes et hongroises à raison d'un député chacune, élus en un seul tour à l'aide d'un système de vote pondéré : la méthode Borda. Les électeurs concernés classent les candidats sur le bulletin de vote en leur attribuant des chiffres en partant de 1 pour leur candidat favori. Le candidat classé en premier reçoit autant de voix que de candidats dans la liste, celui classé deuxième une de moins, et ainsi de suite. Le candidat ayant recueilli le plus de voix est déclaré élu. Les slovènes votant pour les représentants des minorités peuvent aussi participer à l'élection des 88 autres sièges[11].
La loi électorale impose que chaque liste présente au moins 35 % de candidats de l'un et l'autre sexe. Les listes ne comportant que trois noms doivent ainsi compter au moins un homme et une femme[10].
Le scrutin est marqué par une participation en nette hausse avec près de 70 % de votants contre 52 % quatre ans plus tôt, soit le taux le plus haut depuis les élections d'octobre 2000[14]. Les votes anticipés, effectués du 19 au 21 avril, représentent à eux seuls 7,67 % des inscrits, un record dans le pays. La hausse du taux de participation bénéficie en particulier aux partis d'opposition. Comme en 2011 et 2014, le scrutin voit arriver largement en tête un nouveau parti composé de personnalités jusqu'alors peu connues, confirmant la tendance de l'électorat slovène à l’expérimentation politique et sa défiance envers les partis en place[15],[16].
Arrivé en tête avec plus de dix points de pourcentages d'avance sur le parti suivant, le Mouvement pour la liberté (GS) mené par Robert Golob est largement considéré comme le vainqueur du scrutin, le parti manquant même de peu la majorité absolue des sièges. Arrivé deuxième, le Parti démocratique slovène (SDS) du Président du gouvernement sortant Janez Janša en est le grand perdant. Malgré une légère progression en termes de sièges, le SDS voit ses partenaires de coalitions s'effondrer, le privant de sa majorité. Janez Janša reconnait ainsi sa défaite au soir du scrutin, avant de féliciter le vainqueur tout en lui lançant avec amertume, qu'« il est facile de se payer des affiches, d'avoir le soutien des médias et de la prétendue société civile mais [que] rien de tout cela ne vous aidera dans la dure tâche qui vous attend »[17],[18]. Devant le fort recul de sa formation, le dirigeant de La Gauche (Levica) Luka Mesec annonce son intention de présenter sa démission de la tête du parti[19].
Âgé de 55 ans, nouveau en politique après une carrière d'entrepreneur dans l'énergie solaire et considéré comme un écologiste libéral, Robert Golob aurait bénéficié d'un effet de vote utile, le GS étant perçu comme le parti d'opposition le plus à même de renverser Janša, au détriment de la Liste de Marjan Šarec (LMŠ) et du Parti d'Alenka Bratušek (SAB), qui échouent tous deux à franchir le seuil électoral de 4 % et perdent toute représentation à l'assemblée nationale[20],[21]. La victoire du GS est notamment perçue comme une victoire des « forces libérales » contre celles « illibérales » dans le contexte de la récente victoire du Premier ministre hongrois Viktor Orbán aux élections législatives organisées le même mois. Proche allié de Viktor Orbán, Janez Janša était comme lui critiqué pour ses atteintes à l'état de droit et ses attaques envers l'Union européenne, bien que soutenant l'Ukraine lors du conflit l'opposant à la Russie, au contraire du dirigeant hongrois[20],[22].
Formation du gouvernement
La formation par le Mouvement pour la liberté d'un gouvernement de coalition avec les Sociaux-démocrates (SD) et La Gauche (Levica) est attendue, Golob s'étant déclaré ouvert avant le scrutin à une telle alliance[21]. Après une rencontre le 26 avril avec le présidentBorut Pahor, ce dernier fait part de son intention de nommer Golob à la tête d'un nouveau gouvernement dès le 23 mai, à l'issue des négociations avec le SD et Levica[23].
La coalition attendue se concrétise le 11 mai avec l'annonce par Robert Golob de la conclusion d'un accord entre les trois partis[24]. Il devient président du gouvernement le 25 mai, et le gouvernement Golob reçoit la confiance de l'assemblée le 1er juin par 53 voix pour et 28 contre[25],[26].
Notes et références
Notes
↑Le quotient de Droop est obtenu par division du nombre total de suffrages exprimés par le nombre total de sièges à pourvoir augmenté de un, plus un.