En France, le feuilleton a été diffusé entre le et le sur France 3, en heure de grande écoute[4].
Synopsis
L'action se déroule à Saint-Tite, en Mauricie, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. La fille de Caleb Bordeleau, Émilie, au caractère bien trempé, poursuit ses études et devient maîtresse d’école. Déchirée entre sa vocation d’institutrice et son amour pour Ovila, son élève de deux ans plus jeune qu'elle, la vie d'Émilie sera marquée de choix et de passion.
Prix Gémeaux pour direction photographique, meilleur montage, meilleur son d'ensemble, meilleurs décors, meilleurs costumes et meilleure musique originale
Commentaires
Succès
Ce téléroman est l'un des plus grands succès de l’histoire de la télévision québécoise. Le , le téléroman a attiré 3 664 000 téléspectateurs, ce qui constituait un record qui n'a été surpassé que par La Petite Vie en 1995[5]. Il y a eu des rediffusions dans les années qui ont suivi. De nos jours, ce feuilleton est resté l'un des plus marquants et populaires de l'histoire de la télévision québécoise.
En France, 4 millions de téléspectateurs ont suivi la série en moyenne[4].
Doublage français
Pour la diffusion française, les acteurs ont été doublés afin de gommer l'accent québécois, et certains dialogues et certaines expressions ont été réécrits pour être compris par les téléspectateurs de France.
Références historiques
Même si le téléroman est une fiction romanesque, se déroulant entre 1892 et 1917[6], la trame narrative s’appuie sur une période historique importante du Québec et fournit une représentation des familles préindustrielles[7],[6].
Dans les petites communautés rurales de l’époque, la lutte pour la survie des familles québécoises était particulièrement difficile. L’instruction était rare. Pour toute une génération de Québécoises, c’était un exploit de devenir maîtresse d’école laïque. Elles devaient d’abord avoir fréquenté les pensionnats ou les écoles religieuses. Ces femmes ont permis aux enfants des villes et des villages du Québec de faire leurs études de niveau primaire. Cela leur permet d'apprendre à lire et à compter.
Dans une culture catholique très croyante, les religieuses demeuraient nombreuses à assumer cette fonction, mais le téléroman relate l’époque où les premières femmes laïques sont devenues institutrices. Une étude expose d’ailleurs le peu d’instruction et d’expérience de ces femmes souvent engagées très jeunes dans le métier[8]. Leur vocation se conciliait difficilement avec un projet familial c’est pourquoi, c’était surtout des femmes célibataires qui occupaient ses fonctions qu’elles quittaient au moment de leur mariage. Le récit évoque bien les rôles traditionnels des parents dans la famille québécoise d'alors, avec la mère seule au foyer et le père agriculteur en été et coureur des bois en hiver.
Les composantes de la famille traditionnelle
La famille traditionnelle du XXe siècle est caractérisée par un nombre élevé d’enfants. La taille des familles au cours du siècle reste élevée et ce en raison de l’influence de la religion sur la vie familiale[9]. La famille, dans Les filles de Caleb, représente bien les familles nucléaires et élargie[10] d’époque. La série illustre les mécanismes de transmission du patrimoine, la redistribution des terres[10], l’importance des familles nombreuses malgré un taux de mortalité infantile élevé, la place du catholicisme et la dévotion qui l’accompagne[6]. Au XXe siècle, le nombre d’enfants est un facteur essentiel pour l’expansion agraire[11], ce qui oblige l’enfant d’occuper un rôle de soutien monétaire, que ce soit en travaillant ou en aidant sur la terre[12]. En d'autres mots, ils ne profitent pas de leur jeunesse, ils sont donc des « adultes en réduction »[12].
Les filles se marient avec des bons partis, pouvant aider financièrement et assurer une certaine stabilité économique aux dépens de leurs sentiments[11]. Ce phénomène est illustré dans la scène où Émilie considère sérieusement épouser Henri Douville qui occupe une place enviable dans la société. Caleb, le père d’Émilie, l’invite pourtant à écouter son cœur avant la stabilité matérielle[6]. Par conséquent, Les Filles de Caleb, illustre un père de famille considéré en avance sur son époque[6].
Les garçons aussi subissent des pressions, celui de reprendre les terres familiales. Ovila, qui ne veut pas de la terre familiale, représente le rôle masculin imposé[6]. Ce refus est expliqué par l’essor de l’industrialisation[6]. Bien qu’il ne soit pas au centre du scénario, cet essor reste tout de même un élément très important qui influence la place des traditions familiales de l’époque[6]. Le parcours d'Ovila à la ville illustre les bouleversements socioéconomiques liés au développement du Québec. Il y a donc à cette époque, une tension entre les villes et la campagne[6]
Formation du couple
Le couple au XXe siècle se doit de respecter plusieurs règles selon le modèle prédéfini par les mœurs de la culture québécoise traditionnelle. Le choix du partenaire se fait habituellement au sein d’un petit échantillon de candidats potentiels à l’intérieur du groupe restreint d’individus qui constituent la communauté[13]. Les parents des jeunes célibataires y jouent d’ailleurs un rôle indispensable de conseiller sur le meilleur parti à épouser. Ils jugent les jeunes hommes et femmes selon certaines considérations culturelles[13]. Le couple se concrétise enfin par le mariage, une étape cruciale dans la religion catholique.
Rôles paternels et maternels
Dans la société traditionnelle telle que représentée dans Les Filles de Caleb, les rôles familiaux sont divisés et se complètent entre eux. La population rurale représentant 63 % de la population canadienne totale au début du XXe siècle[14], Les Filles de Caleb expose la réalité historique entourant ces dites fonctions. Le rôle du père type est illustré par les personnages de Caleb et de Dosithé. Ce sont généralement les pères qui dirigent les travaux agricoles et qui détiennent l’autorité quasi-absolue sur les décisions concernant la famille. Les premières minutes de la télésérie permettent de constater rapidement la relation que le père entretient avec ses enfants, Caleb réprimandant fermement sa fille sur son inconduite en lien avec la religion[15]. L'homme est représenté comme le pilier économique qui a comme devoir de subvenir aux besoins de l’entièreté de la famille et d’enseigner les bases de l’agriculture aux fils puisqu’il en va de la survie du groupe[16].
Pour ce qui est du rôle attendu de la mère, son travail est d’éduquer et de former un lien de confiance avec les enfants. Les travaux ménagers sont au cœur de son quotidien et sont essentiels au bon fonctionnement de la maison. Ce rôle clé de la famille traditionnelle s’illustre par le biais des personnages de Félicité Pronovost et de Célina Bordeleau dans la télésérie. L’autorité de la femme dans la famille traditionnelle est plus importante qu’on ne le croit, car sa position de mère et d’épouse lui confère la possibilité d’influencer les décisions de l’autorité officielle, c’est-à-dire l’homme[16]. Elle est aussi celle qui enseigne les valeurs religieuses, aspect central de la vie en communauté rurale au XXe siècle.
Accueil critique
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En , Louise Cousineau de La Presse titrait son article « La scène la plus érotique de la télé québécoise ? »[17],[18].
↑Jean-Pierre Desaulniers, De La famille Plouffe à La petite vie : les Québécois et leurs téléromans, Musée de la civilisation du Québec / Fides, , 119 p. (ISBN2-7621-1937-5), p. 18
↑ abcdefgh et iFrédéric Demers, « La ville, la campagne, l’anglais, Les Filles de Caleb et la mémoire historique : notes sur quelques liens difficiles à démêler », Francophonies d'Amérique, no 21, , p. 67–81 (ISSN1183-2487 et 1710-1158, DOI10.7202/1005366ar, lire en ligne, consulté le )
↑ a et bAlain Collomp, « Ménage et famille : Études comparatives sur la dimension et la structure du groupe domestique », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 29, no 3, , p. 777–786 (ISSN0395-2649 et 1953-8146, DOI10.3406/ahess.1974.293510, lire en ligne, consulté le )
↑ a et bGérard Bouchard, « L'étude des structures familiales pré-industrielles : pour un renversement des perspectives », Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine, vol. 28, no 4, , p. 545–571 (DOI10.3406/rhmc.1981.1166, lire en ligne, consulté le )
↑Frédéric Demers, « Souvenir, mémoire et imaginaire de la francité dans Les Filles de Caleb », Mens : revue d'histoire intellectuelle de l’Amérique française, vol. 7, no 1, , p. 73–115 (ISSN1492-8647 et 1927-9299, DOI10.7202/1024223ar, lire en ligne, consulté le )
↑ a et bJocelyne Valois, « Famille traditionnelle et famille moderne, réalités de notre société », Les Cahiers de droit, vol. 7, no 2, , p. 149–154 (ISSN0007-974X et 1918-8218, DOI10.7202/1004223ar, lire en ligne, consulté le )