Dans les premières versions du scénario, Merian C. Cooper envisageait que le nom du gorille serait simplement The Beast (« La Bête ») et que le film se nommerait Jungle Beast (« La Bête de la Jungle »). Mais la société de production RKO demanda un titre plus mystérieux et sauvage. Cooper choisit finalement pour son personnage le nom de Kong, qui était celui d'une chaîne montagneuse imaginaire, d'une cité et d'un royaume africain du XIXe siècle, dans le nord-est de l'actuelle Côte d'Ivoire[2], auquel il rajouta le nom de « King » (« roi » en anglais), pour que les spectateurs ne prennent pas le film pour un simple documentaire et comprennent bien qu'il s'agit d'une fiction.
Apparences et environnement
King Kong change d'apparence selon les adaptations et son lieu de vie peut également varier.
Dans le film original, le nom de Kong lui est donné par les indigènes de Skull Island (« Île du Crâne »), une île imaginaire située au large de Sumatra dans l'Océan Indien, où l'évolution s'est arrêtée il y a des milliers d'années. L'île renferme des dinosaures, comme des allosaures, et autres créatures féroces. Bien que simiesque en apparence, cette première version de King Kong peut toutefois marcher debout de manière anthropomorphique. Ce fut un choix de l'animateur Willis O'Brien, pionnier des effets spéciaux et de l'animation en volume, qui voulait en faire un « homme-singe » plus qu'un véritable gorille. Dans le film de Cooper et Schoedsack, l'un des personnages principaux décrit le monstre comme n'étant « ni Bête, ni Homme » (« no Beast, no Man »).
En 1976, un remake fut tourné par John Guillermin et produit par Dino De Laurentiis. Dans cette adaptation, Kong est un singe humanoïde marchant exclusivement debout. Il vit aussi sur une île appelée Skull Island, mais celle-ci est située dans le Pacifique et elle possède un important gisement de pétrole. Rick Baker, grand spécialiste des costumes et maquillages de monstres, et l'Italien Carlo Rambaldi donnèrent vie au personnage. Dans sa suite, King Kong Lives (1986), le gorille double de taille et devient quadrupède.
En 2005, une nouvelle version fait de King Kong un gorille géant quadrupède et herbivore. Le réalisateur Peter Jackson et l'équipe d'effets spéciaux Weta inventèrent un nom pour l'espèce fictive du gorille : Megaprimatus. Il y est interprété en capture de mouvement par Andy Serkis qui s'était rendu au Rwanda pour être au contact de vrais gorilles des montagnes. Dans ce film, Skull Island est redevenue une île peuplée de dinosaures et autres créatures préhistoriques située près de Sumatra comme dans la version originale.
Dans les films de la Toho, King Kong est un gorille humanoïde destructeur mesurant entre 45 mètres et 20 mètres de haut. Il vit sur une île près des îles Salomon ou de l'Australie. La version nippone du personnage croise plusieurs autres créatures du cinéma fantastique, notamment le célèbre reptile amphibie préhistorique irradié Godzilla dans un film de 1962, King Kong contre Godzilla (Kingu Kongu tai Gojira), réalisé par Ishirô Honda.
Dans le MonsterVerse, plus exactement dans le film Kong: Skull Island, Kong reprend une posture anthropomorphique. Dans le film, il est simplement appelé « Kong ». Il est le dernier représentant connu d'une espèce de primate gigantesque étant vraisemblablement apparue au cénozoïque qui vivait à une époque où des espèces gigantesques parcouraient la Terre. Kong mesure 31 m dans le film et continuera de grandir, étant un adolescent. Le primate vit toujours sur Skull Island (qui est de nouveau placée dans le Pacifique et non près de Sumatra) qui est peuplée de diverses créatures comme les Skullcrawlers (Les Rampants de l'Île du Crâne en VF), terrifiants reptiles lui ayant confisqué ses parents sous ses yeux. Il affronte Godzilla dans le film d'Adam Wingard, Godzilla vs Kong.
Thématique
King Kong est une adaptation cinématographique d'un thème à la mode depuis la moitié du XIXe siècle : la bestialité, qui avait inspiré d'autres artistes, tant des écrivains que des peintres ou des sculpteurs et que les premières observations de gorilles par les Occidentaux peu auparavant avait revivifié. Le jeune sculpteur animalier Emmanuel Frémiet en tira son œuvre scandaleuse Gorille enlevant une femme, refusée au salon de 1859. Exposée malgré tout au salon du Louvre dans une niche, elle était cachée par un rideau que seuls les hommes et les femmes mariées avaient licence de soulever. Le journal Le Temps (ancêtre du Monde) ayant relaté en 1880 que, dans un village gabonais, un gorille égaré et furieux aurait enlevé et molesté une femme, Frémiet réalisa en 1887 une nouvelle version de son Gorille enlevant une femme[3]. La charge érotique de cette œuvre alors célèbre fit grand scandale[4]. Il était prévu de la fondre en bronze afin de l'exposer au public parisien au Jardin des plantes, mais le Museum national d'histoire naturelle de Paris déclina l'offre par crainte de troubles à l'ordre public.
Il fut finalement fondu en 1899 pour être exposé sur la pelouse du Musée américain d'histoire naturelle de New York (aujourd'hui au parc Allerton dans l'Illinois). Le succès relatif de ses reproductions en statuettes les installa sur les cheminées et bureaux d'Américains peu puritains. En 1917, Harry Ryle Hopps s'en inspira pour composer sa fameuse affiche anti-allemande « Destroy this mad brute », dans ses bureaux de Los Angeles, non loin de Hollywood, seize ans avant la sortie du film King Kong.
La célébrité de ce sujet inspira ensuite des romans-feuilletons, des caricatures et, plus tard, les réalisateurs Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, qui passèrent du documentaire animalier, dont ils étaient spécialistes dans les années 1930, à une œuvre de fiction.
Dans le roman Les Voyages de Gulliver écrit par Jonathan Swift en 1721, au chapitre V, lors de son voyage à Brobdingnag, le héros est enlevé par un singe géant qui le tient dans sa main. Sans affirmer qu'il s'agit là d'une inspiration directe du film de 1933, on peut y voir une préfiguration[5].
Dans le film, des explorateurs américains en quête de sensationnel vont bouleverser les règles qui règnent sur cet écosystème très ancien en pénétrant sur Skull Island.
2016-2018 : Kong : King of the Apes, série en co-production américaine, japonaise, canadienne, produite par 41 Entertainment LLC, Arad Animation, et animée par OLM, Digital and Sprite Animation Studios.
Depuis les années 1930, King Kong a inspiré de nombreux films de monstres mettant en scène des gorilles géants et destructeurs. Beaucoup portent le nom de Kong mais ne sont pas pour autant officiels. Monsieur Joe (ou Mon Ami Joe), film RKO réalisé par Cooper et Schoedsack, peut être vu comme une version de King Kong destinée à un public plus familial.
↑F. Schrader, F. Prudent, E. Anthoine (dir.), Atlas de géographie moderne, Hachette, 1889, carte 19-G-d, et Louis Gustave Binger, Du Niger au Golfe de Guinée par le pays de Kong et le Mossi, Hachette, 1892.
↑« Cette sculpture obtient la médaille d'honneur, la plus haute distinction, au Salon de 1887, sous le titre Gorille-groupe plâtre - Troglodytes Gorilla (sav.)- du Gabon ». Voir Visiter l'exposition avec une classe, page 11, sur le site museum.nantes.fr
↑Jonathan Swift (trad. Guillaume Vileneuve), Les Voyages de Gulliver, Paris, Flammarion, 2014, 430 p. (ISBN978-2-0813-4243-9), Chapitre V, pages 185 et note 113
↑(en) Ray Morton, King Kong : The History of a Movie Icon from Fay Wray to Peter Jackson, Applause Books, , 349 p. (ISBN1-55783-669-8, lire en ligne), p. 123
(en) Ray Morton, King Kong : The History of a Movie Icon from Fay Wray to Peter Jackson, New York, Applause Theatre & Cinema Books, , 349 p. (ISBN978-1-55783-669-4, lire en ligne).
George E. Turner et Orville Goldner (trad. de l'anglais par Joëlle Baron, Françoise Brugneel, Patrick Kamenka, Marie Ploux), Comment nous avons fait « King Kong » : dans les coulisses d'un classique du cinéma [« Making of King Kong : The Story Behind a Film Classic »], Paris, La Courtille, coll. « L'Univers du cinéma », , 287 p. (ISBN2-7207-0037-1)
Réédition revue et augmentée : (en) George E. Turner, Orville Goldner, Michael H. Price et Douglas Turner, Spawn of Skull Island : The Making of King Kong, Luminary Press, , 256 p. (ISBN978-1887664455).
Edgar Wallace et Merian C. Cooper (trad. Robert Latour), King Kong, Paris, Albin Michel, , 220 p. (ISBN2-226-00402-5).