Hervé Le Bras, d'ascendance bretonne, est le fils du juriste et universitaire Gabriel Le Bras, professeur et doyen à la faculté de droit de l'université de Paris, et de Marthe Folain[2].
Après une année de droit et sciences économiques à l'université de Paris (1960-1961), il s'oriente vers les mathématiques supérieures et spéciales au lycée Louis-le-Grand (1961-1963). De 1963 à 1965, il est élève à l'École polytechnique (X1963), puis obtient un diplôme de recherche opérationnelle du CIRO (1965-1966).
Il part vivre auprès des Massa, au Tchad, en 1966 en tant qu'« anthropologue stagiaire ». À son retour, il est élève à l'Institut de démographie de Paris (IDUP) (mastère de démographie) et passe un DEA de mathématiques économiques de la faculté des sciences de Paris (1966-1967).
Hervé Le Bras se marie le 11 mars 1968 avec Annie Villers, avec laquelle il a deux enfants : Véronique et Romain[2].
Par la suite, il enseigne et fait de la recherche au sein de plusieurs institutions. En 1974, il devient maître de recherche, et est nommé directeur d'études en 1979. Entre 1980 et 1991, il est directeur du département Méthodes et projections de l'institut. Il est professeur émérite depuis 2008.
Entre 1969 et 1990, il est également professeur de géométrie, représentation et morphologie à l'École nationale d'architecture de Paris-Belleville. Il est professeur associé dans la même discipline à l'École nationale supérieure des beaux-arts entre 1972 et 1990.
En 1980, il est nommé directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales. Entre 1987 et 2007, il est directeur du laboratoire de démographie historique (EHESS/CNRS). Il est également fondateur, en 1990, du DEA Démographie et sciences sociales de l'école. Il conserve ce poste jusqu'en 1996.
En 2002, Hervé Le Bras est accusé par une ancienne doctorante de harcèlement sexuel. En 2004, il bénéficie d'un non-lieu, la juge estimant qu'il « n'est pas établi qu' [Hervé Le Bras] ait par ordre, menaces, contrainte ou l'exercice de pressions graves tenté d'obtenir les faveurs sexuelles[4] » de la part de la jeune femme, suivant la définition légale du harcèlement sexuel en vigueur à l'époque.
L'affaire a un retentissement important dans la communauté universitaire et joue un rôle majeur (aux côtés des accusations visant Daniel Welzer-Lang à la même période) dans la formation du Collectif de lutte contre le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur[5]. Celui-ci proteste encore en 2018 contre l'intervention d'Hervé Le Bras lors de journées d'études consacrées à la question du harcèlement sexuel au travail[6],[7].
Membre en outre des conseils scientifiques du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) (2000-2004), de la Bibliothèque nationale (1976-1980), des actions concertées de Villes et Espace du Territoire (1998-2005)
Ce débat entraîna une campagne de dénigrement, notamment de la part du Club de l'horloge[8], à laquelle il a répondu en publiant deux ouvrages dénonçant l'un, en 1992, l'obsession démographique française, Marianne et les Lapins : L'Obsession démographique, et l'autre, en 1998, Le Démon des origines : Démographie et Extrême Droite. Ce dernier ouvrage lui valut un procès intenté par l'INED[9].
Contre les statistiques ethniques
En 1998, Hervé Le Bras s'oppose au projet de statistiques ethniques, ce qui contredit une nouvelle fois la position de l'INED et, en particulier, celle de la démographe Michèle Tribalat, qui soutient que « le seul critère de la nationalité ne permet pas d'analyser les phénomènes de discrimination »[10]. Pour Hervé Le Bras, ce sont les catégories ethniques introduites par Michèle Tribalat qui posent problème : « La collecte de données n'est pas une menace en elle-même. Ce qui constitue une menace ce sont les catégories utilisées pour classer les données »[11][source insuffisante].
Dans un article du Monde, Philippe Bernard et Nicolas Weill résument ainsi la position du démographe : « S'interroger, comme le faisait Michèle Tribalat en 1991, sur les stratifications de la population française en fonction des vagues migratoires, conduit, par défaut, à utiliser la catégorie des "Français de souche" ». Hervé Le Bras se dit « révulsé » par l'expression « Français de souche », qui flatte le « vieux fond ethnique » de la droite :
« Du Français de souche, on glisse insensiblement vers l'Indo-Européen, cher à l'extrême droite païenne[10]. »
Engagements politiques
En 2020, il fait partie des premières personnalités à avoir répondu à l'appel de Laurent Joffrin ayant l'intention de lancer un mouvement pour la « refondation d’une gauche réaliste, réformiste »[12].
Ouvrages
L'Enfant et la Famille dans les pays développés, OCDE, 1978 (traduit en anglais)
Statistical Studies of Historical Social Structure (avec Peter Laslett, Kenneth W. Wachter, Eugene A. Hammel), Academic Press, 1979
Le Sol et le Sang : Théories de l'invasion au XXe siècle, Éditions de l'Aube, 1993 ; rééd. 1996, 1998, 2007 (traduit en slovène, 2003)
Les Limites de la planète : mythes de la nature et de la population, Flammarion, 1994 (traduit en espagnol, arabe, portugais). Édition en poche, coll. « Champs », 1996[13]
Les Libertés de la ville (dir., avec Emile Malet), Unesco, 1995
Démographie et Politique (dir., avec Francis Ronsin et Élisabeth Zucker-Rouvillois), université de Dijon, 1997
Le Démon des origines : Démographie et Extrême Droite, Éditions de l'Aube, 1998 (traduit en italien, éd. Feltrinelli)
Naissance de la mortalité : L'Origine politique de la statistique et de la démographie, Gallimard-Le Seuil, 2000
Essai de géométrie sociale, Odile Jacob, 2000 (traduit en portugais, éd. Piaget)
L'Invention des populations : Biologie, Idéologie, Politique (dir.), Odile Jacob, 2000 (traduit en portugais)
Kafka y la familia (ill. Hervé di Rosa), Ediciones Sin Nombre, 2001
Une autre France : Votes, Réseaux de relations, Classes sociales, Odile Jacob, 2002
365 jours pour la Terre, La Martinière (commentaire des photos d'Yann Arthus-Bertrand), 2002
L'Adieu aux masses : Population et Politique, éd. de l'Aube, 2003 ; rééd. 2006 (traduit en italien, Adio alle masse : critica della ragion demografica, éd. Eleuthera, 2008)
L'Invention de la France (avec Emmanuel Todd), Gallimard, nouvelle édition complétée d'un chapitre final sur la crise idéologique et politique actuelle, 2012 (ISBN978-2-07-013643-8)
Crise des liens, crise des lieux : pour un logement social solidaire vol.1, Éditions de l'Aube, 2012
L'Invention de l'immigré, Éditions de l'Aube, 2012 ; rééd. 2014
Le Mystère français (avec Emmanuel Todd), Paris, Le Seuil, coll. « La République des idées », 2013 (ISBN2021102165)
Mathematical Demography, édition avec Kenneth W. Wachter, les auteurs sont David P. Smith et Nathan Keyfitz, Springer, 2013 (ISBN978-3-642-35857-9)
Pays de la Loire : la forme d'une région, Éditions de l'Aube, 2014 (ISBN978-2815910330)
La Religion dévoilée avec Jérôme Fourquet, éd. Fondation Jean-Jaurès, 2014
Atlas des inégalités, Autrement, 2014
Le Pari du FN, Autrement, 2015
Le Nouvel ordre électoral à l'âge du tripartisme, Seuil, La République des idées, 2016 (ISBN978-2021300284)
Anatomie sociale de la France. Ce que les big data disent de nous, Éditions Robert Laffont et Maison des sciences de l'homme, coll. « Le monde comme il va » et « Interventions », 2016, (ISBN978-2-221-19123-1) et (ISBN978-2-7351-2103-8)
Le sol et le sang. Rhétoriques de l'invasion, Éditions de l'Aube, 2016
↑« Non-lieu pour Hervé Le Bras, accusé de harcèlement sexuel », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑Armelle Andro, « Mind the Gap : avancées et résistances dans la prise en charge des violences sexuelles et sexistes dans le monde académique (2002-2022) », Mouvements, vol. 113, no 1, , p. 109–118 (ISSN1291-6412, DOI10.3917/mouv.113.0109, lire en ligne, consulté le )