La Haute Autorité est chargée de recevoir, contrôler, avec l’administration fiscale, et publier les déclarations de situation patrimoniale et les déclarations d’intérêts de certains responsables publics. Elle peut également être consultée par ces derniers sur des questions de déontologie et de conflit d'intérêts relatifs à l’exercice de leur fonction et émettre des recommandations à la demande du Premier ministre ou de sa propre initiative.
Jusqu’en 1988, la lutte contre les atteintes à la déontologie de la vie politique repose essentiellement sur la répression pénale de délits tels que la concussion, la corruption, la prise illégale d’intérêts ou le favoritisme. Il n’existe pas de moyens de prévention[1].
En 1988, après l’affaire Luchaire, la première loi de transparence est promulguée. Elle met en place le financement public des partis politiques, et l’obligation, pour les élus locaux et les membres du gouvernement, d’une déclaration de situation patrimoniale adressée à la Commission pour la transparence financière de la vie politique nouvellement créée[1],[J 1],[2],[3],[J 2].
En 1994, le groupe de travail parlementaire « politique et argent » dirigé par Philippe Séguin, formule dix-huit propositions préconisant notamment la réduction du plafond des dépenses électorales et une réforme du statut des partis politiques, l’extension de l'obligation de déclaration de patrimoine à de nouveaux élus et à des personnes non élues mais exerçant des fonctions publiques ainsi qu’ un renforcement des incompatibilités entre fonctions politiques et professionnelles[4].
En 2011 et 2012, les rapports de la commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique (Commission Sauvé)[5] et de la commission pour la rénovation et la déontologie de la vie publique (Commission Jospin)[6] préconisent tous les deux d’introduire dans le droit français une définition précise de la notion de conflits d’intérêts, et de développer des mécanismes de prévention des conflits d’intérêts dans la sphère publique, grâce notamment à la mise en place de déclarations d’intérêts. Ils proposent également la création d’une autorité déontologique indépendante, aux pouvoirs et aux moyens rénovés.
En , après la nomination du gouvernement Valls II, la vérification de la situation fiscale de Thomas Thévenoud révèle que, depuis 2012, il déclarait ses revenus et payait ses impôts avec un retard systématique et troublant. Il démissionne immédiatement[10]. Un nouveau rapport est demandé par le président de la République à Jean-Louis Nadal. Remis le et intitulé « Renouer la confiance publique », il comporte vingt propositions qui s’articulent autour de quatre axes : guider l’action des responsables publics, associer et informer le citoyen, garantir le juste usage des moyens publics et améliorer la sanction des manquements à l’exemplarité. Il préconise notamment la vérification des déclarations fiscales des candidats à la fonction de ministre avant leur nomination, et d’étendre les principes déontologiques prévus par la loi aux fonctionnaires et aux magistrats de l’ordre judiciaire[11].
Les lois pour la confiance dans la vie politique de 2017 donnent à la Haute autorité de nouvelles missions concernant les emplois familiaux et sur l’obligation pour les candidats à l’élection présidentielle de déclarer leurs intérêts, en plus de leur patrimoine[J 7].
Les personnes suivantes adressent une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d’intérêts au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique :
les candidats à l’élection présidentielle : leurs déclarations sont rendues publiques au moins quinze jours avant le premier tour[J 8] ;
les membres du gouvernement : leurs déclarations d’intérêts et de patrimoine sont rendues publiques sur le site internet de la Haute Autorité[Loi 1],[J 9], en pratique des vérifications peuvent être faites avant la nomination d’un ministre[15] ;
les députés, les sénateurs, les déclarations d’intérêts et d’activité sont rendues publiques sur le site de la Haute Autorité, les déclarations de patrimoine sont consultables par les électeurs en préfecture[Loi 2],[Loi 3] ;
les députés français au Parlement européen, les déclarations d’intérêts (et de patrimoine à compter de 2019) sont rendues publiques sur le site internet de la Haute Autorité[Loi 4] ;
L’absence de déclaration ou les omissions et fausses déclarations sur celle-ci entraîne une action publique et est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende[Loi 5].
La HATVP édite un Guide du déclarant pour les déclarations de patrimoine et d'intérêts[16].
Missions et décisions
La Haute Autorité exerce divers types de missions.
Prévention des conflits d’intérêts des principaux dirigeants publics
Pour la première fois, la loi donne une définition de conflit d’intérêts dans l’article 2 de la loi no 2013-907 du relative à la transparence de la vie publique. Est donc considéré comme conflit d’intérêts « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction »[17].
La Haute Autorité reçoit les déclarations d’intérêts, en assure la vérification, le contrôle et, le cas échéant, la publicité[Loi 6]. La déclaration d’intérêts recense les liens d’intérêts provenant, des participations financières détenues ou des participations aux organes dirigeants d’organismes publics ou privés, des activités bénévoles, des activités professionnelles du conjoint du déclarant.
La Haute Autorité se prononce sur les situations pouvant constituer un conflit d’intérêts[Loi 7]. Ainsi, en , un conseiller du cabinet du Garde des Sceaux, qui continuait en même temps son métier d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, a dû quitter ses fonctions après avoir été alerté par la Haute Autorité sur un « conflit d’intérêts apparent »[18].
Elle répond aux demandes d’avis des déclarants sur les questions d’ordre déontologique qu’ils rencontrent dans l’exercice de leur mandat ou de leurs fonctions[Loi 8]. Ces avis, ainsi que les documents sur la base desquels ils sont rendus, ne sont pas rendus publics. Dans ce cadre, la médiatrice du crédit a choisi par exemple de quitter ses fonctions à la date à laquelle son époux est devenu le président du groupe BNP Paribas en [19].
Elle contrôle également le « pantouflage » des anciens membres du Gouvernement, de certains anciens élus locaux (maires et présidents d’exécutifs) ainsi que des anciens membres d’autorités administratives ou publiques indépendantes[20]. Elle se prononce sur la compatibilité de l’exercice d’une activité libérale ou d’une activité rémunérée au sein d’un organisme ou d’une entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé avec des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales. Pendant une durée de trois ans, la Haute Autorité examine si les nouvelles activités privées que ces personnes envisagent d’exercer sont compatibles avec leurs anciennes fonctions. Sont concernées les activités libérales (par exemple l’exercice de la profession d’avocat) ou les activités privées rémunérées au sein d’une entreprise publique ou privée (activité salariée, création d’une société, etc.) ainsi que celles exercées au sein d’un établissement public à caractère industriel et commercial ou au sein d’un groupement d’intérêt public à caractère industriel et commercial.
Lorsqu’elle identifie des difficultés, elle peut rendre un avis d’incompatibilité, qui empêche la personne d’exercer l’activité envisagée, ou de compatibilité sous réserves, dans lequel elle impose des mesures de précaution.
La loi prévoit que la Haute Autorité peut publier les avis[21] qu’elle rend après avoir recueilli les observations de la personne concernée et avoir retiré les mentions qui portent atteinte à un secret protégé par la loi[20].
Surveillance de l'évolution des patrimoines des principaux responsables publics
La Haute Autorité reçoit, en début et en fin de mandat, les déclarations de situation patrimoniale, en assure la vérification, le contrôle et, le cas échéant, la publicité. Le patrimoine comprend les biens immobiliers, les valeurs mobilières, les assurances vie, les comptes bancaires ou encore les véhicules, ainsi que les emprunts en cours et les dettes[Loi 6].
En , la Haute Autorité a par exemple signifié au secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement qu’il avait initialement sous-évalué certains de ses biens immobiliers. Après un échange contradictoire avec les services de la Haute Autorité, l’intéressé les a réévalués[22],[23]. Cette dernière a tout de même publié la déclaration de l'intéressé avec une appréciation, c’est-à-dire une « observation que fait la Haute Autorité sur le contenu d’une déclaration à la lumière des informations qu’elle a recueillies »[24].
Signalement des entorses aux obligations déclaratives
Lorsque la Haute Autorité constate qu’une personne ne respecte pas les obligations prévues, elle en informe :
le président de l’autorité administrative indépendante ou de l’autorité publique indépendante, ainsi que l’autorité de nomination ;
le ministre qui a autorité ou qui exerce la tutelle sur l’organisme concerné[Loi 9],[Loi 10].
La Haute Autorité est une administration comme les autres, tenue d’appliquer l’article 40 du code de procédure pénale. Autrement dit, elle doit porter les faits susceptibles de constituer des infractions pénales (comme une déclaration de patrimoine irrégulière) à la connaissance du procureur de la République. Auparavant, elle permet à l’élu, dont la déclaration de patrimoine lui paraît suspecte, de présenter ses observations : si elle n’est pas satisfaite par les explications fournies, elle effectue un signalement au procureur de la République.
Lorsqu’une personne est chargée de fonctions gouvernementales ou de fonctions exécutives locales et pratique une activité en méconnaissance d’un avis de la Haute autorité, cette dernière informe le parquet de la situation de conflit d’intérêts dont elle a connaissance et qui perdure malgré une mise en demeure adressée à l’intéressée[Loi 11].
La Haute Autorité est chargée de superviser la procédure de vérification fiscale qui s’applique dès la nomination d’un ou plusieurs nouveaux membres du Gouvernement. L’administration fiscale informe la Haute Autorité des investigations mises en œuvre et cette dernière peut également demander des informations ou mesures complémentaires. Au terme de la procédure, l’administration fiscale informe la Haute Autorité de ses conclusions et, le cas échéant, des suites qu’elle entend donner.
Emplois familiaux
Depuis 2017, certains élus ne peuvent employer les membres proches de leur famille dans leur cabinet. L'emploi de membres plus éloignés doit être signalé à la Haute Autorité[J 17],[J 18],[J 19],[J 20],[J 21],[J 22].
Relations avec les représentants d'intérêts
La haute autorité rend public un répertoire numérique[25] qui assure l’information des citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics[Loi 12].
Tout représentant d'intérêts communique à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique les informations suivantes :
son identité ;
le champ de ses activités de représentation d'intérêts ;
les actions relevant du champ de la représentation d’intérêts menées auprès des pouvoirs publics, en précisant le montant des dépenses liées à ces actions ;
le nombre de personnes qu’il emploie dans l’accomplissement de sa mission de représentation d’intérêts et, le cas échéant, son chiffre d’affaires ;
les organisations professionnelles ou syndicales ou les associations en lien avec les intérêts représentés auxquelles il appartient[Loi 13].
La haute autorité met à disposition des représentants d’intérêts des lignes directrices destinées à les aider dans leurs démarches et à les informer sur les éléments pouvant faire l’objet d’un contrôle. Elles précisent notamment la définition du représentant d’intérêts ainsi que les informations à déclarer[26].
Dans le bilan que dresse l'institution en , elle indique que 816 représentants d'intérêts se sont inscrits au répertoire dans le délai légal imparti. 36 % d'entre eux sont des sociétés civiles ou commerciales, 40 % des organismes représentatifs tels des syndicats, 14 % des ONG et 8 % des cabinets d'avocats[27].
Rôle de proposition et d'information des pouvoirs publics
La Haute autorité dispose de la faculté d’émettre des propositions et des recommandations auprès du Premier ministre et des autorités publiques intéressées qu’elle détermine. Elle définit, à ce titre, des recommandations portant sur les relations avec les représentants d’intérêts et la pratique des libéralités et avantages donnés et reçus dans l’exercice des fonctions et mandats des personnalités assujetties aux obligations déclaratives[Loi 14].
Dans ce cadre, en , son président a remis au président de la République un rapport sur l’exemplarité des responsables publics[28].En 2016, elle a notamment rendu un rapport sur « Les clubs parlementaires »[29] à la demande du président de l’Assemblée Nationale, un autre sur « La déontologie dans les établissements publics culturels »[30] à la demande de la ministre de la culture ainsi qu’un rapport intitulé « Open data & intégrité publique »[31] à l’occasion du sommet du Partenariat pour un Gouvernement Ouvert (PGO) organisé à Paris en décembre.
La Haute autorité remet chaque année un rapport public au chef de l’État, au chef du Gouvernement et au Parlement, en l'application de l'article 21 de la loi no 2017-55 du [32], dans lequel elle rend compte de l’exécution de ses missions. Ce rapport est publié au Journal officiel[Loi 14]. Le tout premier rapport d'activité de la Haute Autorité, portant sur ses deux premières années d'existence (2014 et 2015), a été remis au président de la République en [33],[34]. Les rapports d'activités suivants ont été rendus :
Agrément des associations de lutte contre la corruption
La Haute Autorité est habilitée à agréer certaines associations se proposant, dans leurs statuts, de lutter contre la corruption et les conflits d’intérêts[Loi 15]. Ces associations ont la possibilité de saisir la Haute Autorité lorsqu’elles ont connaissance d’une situation ou des faits qui sont susceptibles de constituer un manquement aux différentes obligations prévues par la loi[43]. La procédure et les critères d’agrément sont détaillés dans son règlement intérieur[J 23].
Depuis sa création, la Haute Autorité a agréé les associations suivantes :
La Haute Autorité fait partie d’un réseau de coopération internationale appelé « Réseau pour l’intégrité »[48]. Ce réseau regroupe 14 institutions issues d’Arménie, de Côte d’Ivoire, de Croatie, de France, de Géorgie, de Grèce, de Lettonie, du Mexique, du Pérou, de Corée, de Moldavie, de Roumanie, d’Ukraine et du Sénégal qui partagent un statut non-juridictionnel, une indépendance vis-à-vis des pouvoirs exécutif et législatif et des missions liées à la transparence, l’éthique ou l’intégrité des responsables publics. Fondé sur le partage d’expériences et la coopération technique, ce réseau a pour objectif de promouvoir une culture de l’intégrité, afin de contribuer au renforcement de la confiance que les citoyens placent dans leurs gouvernements et leurs administrations.
Le président fixe l’ordre du jour et convoque la haute autorité. Il a voix prépondérante en cas de partage égal des voix lors du vote des délibérations[J 27].
Les six membres élus le sont selon les principes de la parité femme-homme. Le mandat est de six ans, non renouvelable.
Les membres du collège sont soumis aux obligations déclaratives prévues par la loi sur la transparence de la vie publique, ils déposent donc des déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts. Ces déclarations sont contrôlées et publiées sur le site internet de la HATVP[Loi 16].
Administration
Le secrétaire général de la Haute Autorité, nommé par arrêté du Premier ministre, est chargé de la direction et du fonctionnement des services, dont il assure la gestion administrative et financière sous l’autorité du président[Loi 16],[J 27].
La Haute Autorité est assistée de rapporteurs et peut bénéficier de la mise à disposition de fonctionnaires[Loi 16].
Le budget de la Haute Autorité est l’action 10 du programme 308 « Protection des droits et des libertés » de la mission « Direction de l’action du gouvernement ». La loi de finances initiale pour 2014 a attribué à la Haute Autorité vingt emplois temps plein travaillés (ETPT) et une dotation de 3 750 000 € en autorisations d’engagement et 2 850 000 € en crédits de paiement[52]. Ce plafond d'emplois s'est rapidement révélé insuffisant et a nécessité un réajustement en 2015 et en 2016[53]. Pour 2017, la Haute Autorité comptait 50 ETPT et disposait d’un budget de 6 152 344 euros en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiements (CP), dont 4 147 108 euros affectés aux dépenses de personnels et 2 005 236 euros aux dépenses de fonctionnement. Dans le projet de loi de finances pour 2018, le budget et le plafond d’emploi sont stables[54]. En 2023, la Haute Autorité compte 71 agents et dispose d'un budget de près de 10 millions d'euros[55].
Le rapport 2003 fait apparaitre l'insuffisance des moyens de l'institution pour faire face à ses missions. Didier Migaud, son président, le relève dans une déclaration au journal Le Monde[56], en y déplorant aussi l'absence de pouvoir de sanction administrative de cette autorité administrative.
Affaires ouvertes
Le nombre de dossiers transmis à la justice par la Haute Autorité entre 2014 et 2020 s’élève à 112, dont 80 font toujours l’objet d’investigations, pour 32 condamnations ou mesures alternatives aux poursuites (composition pénale, rappel à la loi)[57]. Ainsi,
Yasmina Benguigui (ministre) est condamnée en appel à un an d'inéligibilité et deux mois de prison avec sursis et 5 000 € d'amende pour omissions dans ses déclarations de patrimoine et d’intérêts entre 2012 et 2014[58].
Lucien Degauchy (député) est condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 € d'amende pour omission d'avoirs détenus à l'étranger[59].
Josette Pons (députée) a plaidé coupable d'avoir sous-évalué son patrimoine de plus de deux millions d'euros dans sa déclaration de 2014. Elle est condamnée en 2016 à une amende de 45 000 € pour ces faits[60].
Bruno Sido (sénateur) est condamné définitivement à six mois de prison avec sursis et 6 000 € d'amende pour omission dans sa déclaration de patrimoine et blanchiment de fraude fiscale[61].
Dominique Tian (député) est condamnée à 18 mois de prison avec sursis, cinq ans d'inéligibilité et 900 000 € d'amende pour déclaration mensongère de patrimoine et blanchiment de fraude fiscale[62].
François-Xavier Villain (député) est condamné à deux mois de prison avec sursis et 100 000 € d'amende pour déclaration mensongère de patrimoine[63].
Patrick Balkany est condamné pour blanchiment aggravé de fraude fiscale et déclaration mensongère[64].
Gaston Flosse (sénateur) est condamné à six mois de prison avec sursis et 45 000 € d'amende pour déclaration mensongère de patrimoine[65].
Alain Griset (ministre) est condamné à six mois de prison avec sursis, trois ans d'inéligibilité avec sursis pour déclaration mensongère de patrimoine[66].
Alfred Marie-Jeanne (député) est condamné à 2 mois de prison avec sursis, deux ans d'inéligibilité et 100 000 € d'amende pour déclaration mensongère de patrimoine[67].
Bernard Brochand (député) est condamné à un an de prison avec sursis, trois ans d'inéligibilité avec sursis et 375 000 € d'amende pour déclaration mensongère de patrimoine[68].
En , la procédure de contrôle fiscal des membres du Gouvernement a entraîné la démission de Thomas Thévenoud, alors secrétaire d'État au Commerce extérieur, neuf jours après sa nomination[69],[70],[71]. Il est condamné pour fraude fiscale à un an de prison avec sursis et trois ans d’inéligibilité[72].
En matière de contrôle de la reconversion professionnelle, le nombre de saisine de la Haute Autorité entre 2014 et 2020 s’élève à 18, dont 2 avis rendu d’incompatibilité[73]. Elle rend en 2022 un avis d’incompatibilité sur à Jean-Baptiste Djebbari, ancien ministre des transports, qui souhaitait rejoindre CMA CGM en qualité de vice-président exécutif chargé du pôle spatial que la société envisage de créer[74]. Jean-Baptiste Djebbari a de plus bénéficié d’un avis de compatibilité avec réserves sur son projet de rejoindre la société Hopium, en qualité de membre ou de président de son conseil d’administration[75], et sur son projet de créer une société de conseil[76].
En matière de compatibilité de l’exercice d’une activité privée avec des fonctions publiques, la Haute Autorité a rendu des avis d’incompatibilité pour
Nicolas Bays, ancien député et ancien chef de cabinet et compagnon d’Agnès Pannier-Runacher (ministre de l’Industrie), qui souhaitait rejoindre Soitec en 2021, alors que cette société avait bénéficié d’aides de l’État[78].
Prises de position
2018: Michel Sapin
Michel Sapin, ministre de l’Économie et des Finances à la fin du mandat de François Hollande en 2016, est l'artisan de la loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, plus communément appelé « loi Sapin II »[79]. Parmi les thèmes abordés par le texte, la prévention et la sanction des pratiques de corruption, la protection des lanceurs d'alertes, ou encore l'encadrement des lobbies. Présenté en conseil des ministres le , le projet de loi a été définitivement adopté par le Parlement le [80],[81]
Dans son premier rapport annuel, la HATVP critique les « exigences réduites », les « restrictions excessives », et un « affaiblissement de la volonté du législateur » imputables à la publication du décret d'application, qui, selon le quotidien Libération, « avait vidé de sa substance l’essentiel de [la loi Sapin], ratifiée cinq mois plus tôt par le Parlement, visant à encadrer tant que se peut le lobbying »[82]. Le décret d'application réduit drastiquement les obligations déclaratives des lobbyistes, notamment en n'exigeant pas la publication de leur agenda précis[82].
L'ancien ministre Michel Sapin justifie la publication du décret dans un contexte particulier, le surlendemain de l'élection d'Emmanuel Macron, en invoquant d'une part ses doutes sur la volonté de la nouvelle majorité de poursuivre le travail de transparence entrepris, et en rappelant d'autre part les réticences mentionnées par le Conseil constitutionnel. Michel Sapin rappelle que dans l’ultime ligne droite du décret d’application de sa loi Sapin II, le volet lobbying étant celui ou il avait « le plus de soucis », entre partisans du moins ou mieux disant déclaratif, « le président de la République se faisait le porte-parole de certains intérêts », pas forcément les plus transparents, là où François Hollande avait précédemment proclamé : « Les citoyens sauront qui est intervenu et à quel niveau auprès des décideurs publics »[82].
2019: fin du mandat de Jean-Louis Nadal
Jean-Louis Nadal, premier président de la HATPV de 2013 à 2019, appelle également avant son départ à renforcer "le contrôle des lobbyistes, ces représentants d’intérêts qui tentent d’influencer la loi et les décisions publiques dans un sens qui sert des intérêts particuliers ou une cause. Un objectif qui passera par l’amélioration des informations versées au tout nouveau registre des représentants d’intérêts créé par la loi du sur la transparence et la lutte contre la corruption, dite Sapin 2, et confié à la HATVP en ", "C’est un défi majeur, une idée centrale pour restaurer le lien de confiance sérieusement altéré dans notre société, déclare celui qui aura présidé l’autorité administrative indépendante depuis sa création en 2013. Les citoyens ont le droit de savoir comment se fabrique la loi et quelles interactions il y a entre les lobbyistes et les responsables publics, afin de savoir d’où viennent les décisions publiques et qui influence la loi." Trois domaines particulièrement sensibles nécessitent un contrôle sans faille : "L’agriculture, l’environnement et la finance"[83].
Depuis , la loi impose à tous les « porteurs d’intérêts » de publier des rapports d’activité détaillant leurs actions de lobbying pour l’année précédente, moins de trois mois après l’arrêté des comptes, et les dépenses allouées dans un registre consultable par tous sur la plate-forme dénommée Agora. Fin 2019, le registre compte 2 000 inscrits avec 15 000 actions de lobbying répertoriées. Le constat de Jean-Louis Nadal est partagé par l’ONG anticorruption Transparency International, partisane d’une « révision rapide du décret qui a paramétré le registre en le limitant à des données lacunaires, vidant la loi de sa substance », « Le registre de la HATVP est encore trop lacunaire et ne permet pas une traçabilité de la décision publique. » Car parmi les vingt-deux entreprises et associations inscrites identifiées et inscrites sur le registre, « vingt n’y renseignent pas d’informations claires et accessibles sur leur position défendue vis-à-vis de la loi hydrocarbures »[83].
↑Article 11 de la loi no 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique
↑Article 110 de la loi no 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
↑Article 122-18-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie
↑Article 72-6 de l'ordonnance no 2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs
↑Articles 64, 114 et 161 de la loi organique no 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie
↑Articles 86 et 129 de la loi organique no 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française
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↑Décret du 19 décembre 2013 portant nomination du président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique : M. NADAL (Jean-Louis) (lire en ligne)
↑Les dispositions sur certains magistrats administratifs n'ont pas été formellement censurées pas ne sont pas appliquées par extension de la décision du 28 juillet 2016. Voir le rapport de la HATVP de 2017 p. 119
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