La France termine première nation de ces Mondiaux en battant son record de médailles avec six titres et treize podiums. Elle le doit essentiellement à son équipe féminine, avec en tête de liste Julia Simon, l'athlète la plus décorée de la compétition (quatre médailles d'or, une en bronze), Justine Braisaz-Bouchet (également cinq médailles, dont trois titres) et aussi Lou Jeanmonnot (quatre médailles, deux titres). Une seule épreuve leur échappe, l'Individuelle remportée par Lisa Vittozzi, mais les Françaises sont présentes sur la totalité des podiums, réalisent un quadruplé historique en sprint, remportent pour la première fois le titre du relais féminin, et règnent avec leurs coéquipiers masculins sur les épreuves mixtes. Chez les hommes, Johannes Thingnes Bø est au premier plan de la domination presque totale de la Norvège - avec notamment un triplé en sprint et un quintuplé en poursuite - en étant médaillé dans les sept épreuves auxquelles il participe, avec trois titres individuels. Il égale ainsi en carrière le record de son prestigieux compatriote Ole Einar Bjørndalen avec vingt titres mondiaux. Le seul titre masculin non remporté par la Norvège est le relais hommes gagné par la Suède.
La Vysočina Arena de Nové Město ne désemplit pas durant les douze jours de compétition qui se déroulent sur une bande de neige préparée dans un environnement qui en est totalement dépourvu.
Présentation
Choix du site organisateur
L'IBU annonce le 14 novembre 2020 que les championnats du monde 2024 se dérouleront sur le site de Nové Město, en Tchéquie, alors seul candidat en lice pour l'organisation de cette compétition[1]. Les championnats du monde avaient déjà eu lieu une première fois sur ce site en 2013. Entre ces deux éditions des mondiaux, Nové Město a accueilli à six reprises une étape de la Coupe du monde de biathlon[2].
Comme c'est le cas depuis 2011, les mondiaux débutent par le relais mixte. Les sprints et les poursuites complètent ensuite le programme de la première semaine. Les individuels se déroulent en milieu de seconde semaine, suivis du relais mixte simple. Enfin, ces championnats se terminent lors du second week-end, avec les relais par genre puis les mass-start[9].
Le relais mixte, désormais habituelle épreuve d'ouverture des mondiaux, a lieu le . L'équipe française (Éric Perrot, Quentin Fillon Maillet, Justine Braisaz-Bouchet et Julia Simon) est sacrée devant l'équipe norvégienne (Tarjei Bø, Johannes Bø, Karoline Knotten et Ingrid Tandrevold) et l'équipe suédoise (Sebastian Samuelsson, Martin Ponsiluoma, Hanna Öberg et Elvira Öberg)[10]. Les relayeurs français bénéficient en cette soirée pluvieuse de skis bien préparés, particulièrement efficaces sur la neige mouillée. Ainsi, Éric Perrot et Quentin Fillon Maillet se maintiennent aux avant-postes malgré cinq balles de pioche. À mi-course, la France n'est devancée que par l'Allemagne de quelques secondes. Largement la plus véloce sur la piste, Justine Braisaz-Bouchet perd cependant beaucoup de temps sur son tir couché et doit même visiter une fois l'anneau de pénalité, rétrogradant alors à une quarantaine de secondes de l'Allemande Preuss sortie en tête du pas de tir. Elle est en revanche irrésistible sur la suite de son relais (malgré une nouvelle pioche au tir debout), rattrapant et dépassant toutes ses adversaires pour finalement lancer Julia Simon en tête. Cette dernière effectue un cavalier seul. Forte de deux sans-fautes rapidement exécutés au stand de tir, elle s'octroie en effet au fil de la course une avance de plus en plus confortable et a ainsi le temps, en entrant dans le stade, de savourer ce nouveau titre de championne du monde de relais mixte pour l'équipe de France, le troisième de l'histoire après 2009 et 2016. Simon devance à l'arrivée d'une grosse quarantaine de secondes Ingrid Tandrevold, dernière relayeuse d'une équipe norvégienne qui s'était imposée lors des quatre précédentes éditions des Mondiaux sur ce format de course[10].
Le a lieu le sprint féminin. Grâce notamment à des skis bien préparés répondant bien sur la neige mouillée, l'équipe française réalise une performance collective exceptionnelle en signant le premier quadruplé de son histoire : Julia Simon (10/10 au tir) est sacrée championne du monde devant Justine Braisaz-Bouchet (9/10, médaille d'argent) et Lou Jeanmonnot (9/10, médaille de bronze), Sophie Chauveau (9/10) échouant au pied du podium[11]. Julia Simon fait la différence pour la victoire grâce à un sans-faute phénoménal au tir (42 secondes passées sur le tapis pour l'ensemble des tirs couché et debout). Elle devance de moins de cinq secondes à l'arrivée Justine Braisaz-Bouchet, de loin la biathlète la plus véloce de toutes sur la piste mais sanctionnée d'un tour de pénalité au tir couché. Lou Jeanmonnot, qui complète ce podium cent pour cent tricolore, termine à plus de quarante secondes. Un tel quadruplé sur une épreuve individuelle féminine des championnats du monde n'avait été réalisé qu'une seule fois, par l'URSS en 1984[12],[13].
Le a lieu le sprint masculin. L'équipe norvégienne réalise un triplé : Sturla Lægreid (10/10 au tir) est sacré champion du monde pour trois secondes et grâce à son sans-faute face aux cibles, devant Johannes Bø (9/10, un tour de pénalité) alors que Vetle Christiansen (9/10 également) prend la médaille de bronze[14].
Le a lieu la poursuite féminine. Julia Simon écrase la concurrence grâce à un 19/20 et est sacrée championne du monde de cette discipline ; elle conserve ainsi son titre et s'adjuge sa cinquième médaille d'or mondiale, la troisième individuelle. Durant la moitié du parcours (les deux tirs couchés) Julia Simon et Justine Braisaz-Bouchet se tiennent en respect à l'avant de la course. La tenante du titre fait la différence sur le premier tir debout où elle blanchit rapidement les cinq cibles alors que sa rivale et coéquipière part deux fois à la faute. En sortant de l'anneau de pénalité, Lisa Vittozzi qui est à 15 sur 15 est passée devant elle. Simon se montre à nouveau ultra-rapide et sans-faute sur le dernier tir debout et s'envole vers le doublé. Vittozzi (19 sur 20) tient la deuxième place jusqu'au bout, résistant au retour de Braisaz-Bouchet (16 sur 20) qui prend le bronze, tandis que Sophie Chauveau (17 sur 20) est à nouveau quatrième[15]. Le même jour a lieu la poursuite masculine sur laquelle les Norvégiens réalisent un quintuplé historique avec le sacre de Johannes Thingnes Bø (17/20) qui gagne sa dix-huitième médaille d'or mondiale (la huitième dans une course individuelle), devant Sturla Holm Lægreid (18/20) et Vetle Sjåstad Christiansen (17/20), Johannes Dale et Tarjei Bø restant au pied du podium[16].
L'épreuve suivante disputée le mardi est l'individuel féminin. À la faveur d'un 20 sur 20 au tir, Lisa Vittozzi est sacrée championne du monde de la spécialité. Sa relative lenteur sur le tapis pour assurer le plein au tir (soixante-treizième temps à près de cinquante secondes de J. Simon) est suffisamment compensée par sa vélocité sur les skis (troisième temps à plus d'une minute de Braisaz-Bouchet) pour lui permettre de s'imposer[17]. Elle devance de vingt secondes Janina Hettich-Walz elle aussi sans-faute sur le pas de tir[17]. Julia Simon se classe à moins de trente secondes et obtient avec le bronze sa quatrième médaille en quatre courses. La minute de pénalité qu'elle écope lors de son dernier tir debout la prive du meilleur résultat[18]. La course de Justine Braisaz-Bouchet, une fois encore largement la plus rapide sur la piste, est plombée par trois minutes de pénalité pour trois cibles manquées sur ses tirs debout. Elle manque ainsi la médaille (avec une seule faute elle se serait imposée) et se classe finalement septième[19]. Le lendemain, l'individuel masculin est survolé par Johannes Bø qui remporte son dix-neuvième titre planétaire et sa quatrième médaille dans ces Mondiaux. Intouchable sur la piste, et avec un 19 sur 20 (une erreur sur son premier tir couché), il devance de 58 secondes son frère aîné Tarjei et de près de deux minutes Benedikt Doll, tous les deux à 19 sur 20 comme lui. La Norvège se prive toute seule d'un nouveau carton plein avec les fautes commises par Christiansen, Dale-Skjevdal et Lægreid sur le pas de tir.
Avant un week-end final où ont lieu le samedi les deux relais et le dimanche les deux mass-start, le public du stade de Nové Město assiste au relais mixte simple, où la France gagne sa quatrième médaille d'or dans ces Mondiaux. Le tandem franc-comtois Quentin Fillon Maillet-Lou Jeanmonnot bataille sur la piste et le pas de tir avec le binôme norvégien Johannes Bø-Ingrid Tandrevold. Jusqu'au dernier tir debout, ils se tiennent. Ainsi, quand dans le dernier tir pour les hommes, Fillon Maillet rate deux cibles, Bø en fait de même[20]. Ce qui laisse Jeanmonnot et Tandrevold au coude à coude pour le final. Au dernier exercice debout face aux cibles, Tandrevold craque[20] et part faire un tour de pénalité, alors que Jeanmonnot n'a besoin que d'une pioche avant de s'imposer en solitaire. Derrière elle, Lisa Vittozzi, très affutée dans ces championnats du monde, revient sur Tandrevold et prend le meilleur en vue de la ligne d'arrivée pour s'emparer de la médaille d'argent[20].
Le jour des relais dames et hommes, samedi 17 février, le quatuor féminin français part grand favori... et finit par s'imposer, apportant une quatrième médaille d'or à Julia Simon, dernière relayeuse. Alors que Lou Jeanmonnot sans faute lance parfaitement son équipe, le deuxième relais est compliqué pour Sophie Chauveau qui part tourner sur l'anneau de pénalité après son tir couché, mais aussi après son tir debout. Elle lance Justine Braisaz-Bouchet en huitième position à 46 secondes de la tête de course, mais grâce à sa vitesse de déplacement et à une seule pioche sur ses deux tirs, elle transmet à Simon en tête, et cette dernière n'a plus qu'à finir le travail (une petite frayeur au dernier tir debout avec trois pioches), pour s'imposer très largement devant la Suède et l'Allemagne. Il s’agit de la première victoire française en relais dames aux championnats du monde, et sur un événement planétaire, elle intervient 32 ans après le titre olympique gagné à Albertville 1992[21]. La Suède s'impose ensuite chez les hommes. Elle le doit à la défaillance du norvégien Vetle Christiansen qui se présente au dernier tir debout avec une minute d'avance sur la concurrence, notamment grâce au travail des deux frères Bø. Mais il ne parvient à blanchir que deux cibles, utilise toutes ses pioches, et part tourner trois fois sur l'anneau de pénalité. Sebastian Samuelsson saute sur l'occasion pour prendre la tête et offrir la victoire à son équipe. Revenue du tréfonds du classement après les passages d'Eric Perrot et de Fabien Claude qui cumulent trois tours de pénalité en début de course, et grâce à un bon relais d'Émilien Jacquelin, la France accroche le bronze avec Quentin Fillon Maillet qui sort du pas de tir au moment où Christiansen en termine avec ses trois tours de pénalité, avant que ce dernier ne le domine dans le sprint final[22].
Les Mondiaux 2024 disputés devant un public copieux qui remplit à chaque épreuve la Vysočina Arena, s'achèvent le dimanche 18 février par les départs groupés. Chez les dames, Justine Braisaz-Bouchet, déjà championne olympique 2022 de la spécialité ne laisse aucune chance à la concurrence[23]. Elle prend la course en main d'entrée et se détache seule dès la sortie du second tir, creusant progressivement l'écart. Réalisant le 20 sur 20 sur le pas de tir tout en étant à nouveau nettement la plus rapide sur skis, la Française s'impose magistralement[24]. Lisa Vittozzi réalise également une course parfaite (sans faute sur le pas de tir et deuxième temps de ski). L'Italienne n'est cependant pas en mesure de rivaliser et termine à plus de trente secondes pour gagner la médaille d'argent, tandis que Lou Jeanmonnot, 19 sur 20, s'empare de la médaille de bronze devant Julia Simon (quatrième avec un 17 sur 20)[24],[23]. Johannes Thingnes Bø conclut quant à lui les championnats par son troisième titre individuel et sa septième médaille en sept épreuves. Il totalise désormais vingt titres mondiaux égalant ainsi le record de son glorieux compatriote Ole Einar Bjørndalen[25]. Johannes Bø remporte la mass start hommes avec une faute au tir et une nette supériorité sur les skis, puisque Andrejs Rastorgujevs, qui réalise le 20 sur 20, ne réussit pas à le suivre. Le biathlète letton réalise la plus belle performance de sa carrière gagnant avec l'argent sa première médaille à sa onzième participation aux Mondiaux depuis 2011. Le bronze revient à Quentin Fillon Maillet, 19 sur 20, qui signe à l'occasion le premier podium individuel de l'équipe de France masculine cette saison. La France termine en tête du classement des médailles avec la moitié des titres remportés (6 sur 12), portant à treize unités son record de total de médailles aux Mondiaux, soit deux de plus qu'en 2016[25].