L'épreuve comptait pour le championnat national américain (USAC) mais également pour le championnat du monde des pilotes, dont elle constituait la soixante-dix-septième épreuve courue depuis 1950, et la deuxième manche de la saison.
Contexte avant la course
Le championnat du monde
Bien que réservée aux monoplaces américaines suivant la réglementation Indycar, l'épreuve des 500 miles d'Indianapolis constitue néanmoins une manche du championnat du monde de formule 1. En général, seuls les pilotes américains y participent, rares étant les protagonistes des grands prix de F1 ayant tenté leur chance sur la piste ovale. Parmi les plus célèbres, Alberto Ascari s'était brillamment qualifié en 1952, sans succès en course, alors qu'en 1958 Juan Manuel Fangio avait participé aux entraînements préliminaires avant de renoncer, faute de disposer d'une monoplace capable de s'imposer. Alors que les moteurs de F1 sont limités à 2500 cm3, les roadsters américains disposent de moteurs atmosphériques de 4200 cm3 ou de moteurs suralimentés de 2800 cm3.
L'autodrome d'Indianapolis fut créé en 1909 à l'initiative de l'homme d'affaires Carl Fisher[1]. Initialement en pierres compressées, le revêtement de ce circuit rectangulaire (comportant quatre virages relevés) fut rapidement remplacé par des briques, jugées moins glissantes. Environ trois millions de briques furent utilisées pour recouvrir les quatre kilomètres de piste. En 1935, le circuit fut recouvert d'asphalte sur sa majeure partie, à l'exception de la ligne droite des stands[2]. Le revêtement fut entièrement renouvelé en 1956, l'asphalte recouvrant l'intégralité de la piste à l'exception d'une symbolique bande de briques matérialisant la ligne de départ. Le record de la piste est détenu par Dick Rathmann, qui s'est qualifié à près de 235 km/h de moyenne en 1958.
Contrairement aux Grands Prix de formule un le départ est de type lancé, les pilotes devant accomplir deux tours de circuit derrière la voiture de sécurité (cette année un cabriolet Buick Electra) avant que la course soit ouverte.
Monoplaces en lice
Pour exploiter au mieux les spécificités des courses sur ovale, les constructeurs américains ont développé des monoplaces à moteur décentré sur la gauche et utilisent des pneumatiques conçus à cet effet. Bien qu'étant toujours les plus nombreux, les roadsters Kurtis Kraft sont en perte de vitesse, supplantés depuis 1956 par les Watson et Epperly. Presque tous les concurrents font confiance au moteur 4 cylindres atmosphérique Offenhauser, malgré sa puissance inférieure à 400 chevaux contre près de 600 pour le V8 Novi à compresseur mécanique, qui permet une bien meilleure vitesse de pointe mais se révèle par contre nettement plus lourd, gourmand en carburant et moins fiable.
Remarque : Un pilote peut être inscrit sur plusieurs voitures. De même, plusieurs pilotes peuvent tenter de qualifier une même voiture.
Qualifications
Les essais qualificatifs sont organisés les deux week-ends précédant la course, les 16/17 et 23/.
Pour les qualifications, les pilotes sont chronométrés sur 4 tours lancés (10 miles). Le premier jour, déterminant les premières positions de la grille de départ, est appelé "Pole Day", les pilotes se qualifiant les jours suivants ne pouvant prétendre aux premières places. En 1958, lors de la première journée de qualifications, Ed Elisian avait effectué un de ses quatre tours lancés à 235,782 km/h de moyenne, record actuel de la piste ; il n'avait cependant pas obtenu la pole position, Dick Rathmann l'ayant devancé de quelques centièmes de seconde sur l'ensemble des quatre tours[5].
Le "Pole Day" a lieu le samedi . Deux semaines auparavant, lors des essais préliminaires, Jerry Unser a été victime d'un très grave accident au cours duquel son roadster Kuzma a pris feu ; très sévèrement brûlé, il est dans un état critique. À la suite de ce drame, les organisateurs de l'épreuve ont décidé d'imposer aux pilotes le port d'une combinaison ignifugée. Quelques minutes avant le début de la première séance qualificative, Tony Bettenhausen effectue une spectaculaire sortie de route ; il en sort indemne mais l'état de sa monoplace ne lui permet pas de participer à la session. Les conditions de piste sont excellentes et Johnny Thomson va améliorer d'un centième de seconde le record d'Elisian, à 235,820 km/h. Il se montre de loin le plus rapide de la journée, se qualifiant à la moyenne de 234,816 km/h. Eddie Sachs et Jim Rathmann complètent la première ligne, douze pilotes s'étant qualifiés au terme de cette première séance. La météo est moins clémente le lendemain. Seuls Jimmy Daywalt et Jack Turner parviennent à se qualifier avant que rafales de vent et averses ne viennent perturber la session. Ce même jour, Jerry Unser succombe à ses blessures à l’âge de vingt-six ans.
Entre les deux week-ends de qualifications est survenu un nouveau drame : le mardi , Bob Cortner s’est tué après avoir perdu le contrôle de sa monoplace dans le virage nord-est à cause d'une brusque rafale de vent. Le samedi suivant, la piste semble moins rapide que la semaine précédente. Il reste encore dix-neuf places à prendre sur la grille de départ. Flaherty peut enfin participer et se montre le plus rapide de la journée, mais il est à 5 km/h de la pole position réalisée par Thomson. Il devance de peu Paul Goldsmith et A. J. Foyt. Six autres pilotes se sont également qualifiés. Il reste donc dix places sur la grille quand commence la dernière session, le dimanche 24. Bob Christie se montre le plus rapide, à 230,5 km/h de moyenne. Aucun des pilotes Novi (moteur) n'est parvenu à se qualifier, leur nouveau système d'injection n'étant pas encore au point[6].
Malgré un ciel couvert, il fait chaud et sec au moment du départ. Environ deux cent mille spectateurs assistent à la course[7]. Trente-deux concurrents seulement s'élancent derrière la voiture de sécurité, alors que Jimmy Bryan, dernier vainqueur en date, reste immobilisé sur la piste, ses mécaniciens ne parvenant pas à démarrer le moteur de sa monoplace. À l'issue du tour de lancement, les bolides sont libérés ; Johnny Thomson exploite pleinement sa pole position et aborde le premier virage en tête devant Dick Rathmann. Au cours de ce premier tour, il creuse l'écart sur ses poursuivants et repasse devant les stands avec quelques longueurs d’avance sur Dick Rathmann et Rodger Ward. Ce dernier s'empare bientôt de la seconde place tandis qu'Eddie Sachs, après un départ relativement prudent depuis la première ligne, est remonté en quatrième position. Lorsque les pilotent achèvent leur troisième tour, toujours emmenés par Thomson, Bryan parvient enfin à s'élancer derrière la meute, mais ne va effectuer qu'une seule boucle avant de renoncer, moteur hors d'usage. Ward revient rapidement dans les roues de Thomson et le déborde à la fin du cinquième tour. Les deux hommes restent quelques tours roues dans roues, puis Ward parvient à se détacher légèrement de son adversaire. Jim Rathmann a débordé Sachs ; ce dernier essaie de reprendre sa quatrième place mais effectue un spectaculaire tête à queue qui le relègue en queue de peloton. Jim Rathmann poursuit sa remontée et dépasse peu après son frère Dick pour le gain de la troisième place, tandis que le vétéran Pat Flaherty, revenu en cinquième position, se rapproche progressivement du groupe de tête. Continuant sa progression, Jim Rathmann dépossède Thomson de sa seconde place et revient rapidement dans les roues de Ward. À partir du treizième tour, Ward et Jim Rathmann vont s'échanger à plusieurs reprises le commandement de la course tandis que derrière eux Dick Rathmann a repris la troisième place, devant Thomson maintenant sérieusement menacé par Flaherty. Au vingt-et-unième tour, ce dernier s'empare de la quatrième place, au suivant de la troisième, et au vingt-troisième tour déborde Ward pour le gain de la seconde place, dans les roues de Jim Rathmann. Le rythme des hommes de tête est extrêmement soutenu : toujours emmenés par Jim Rathmann, ils couvrent les 75 premiers à plus de 225 km/h de moyenne. Après plusieurs attaques, Flaherty parvient à s'emparer du commandement au trente-et-unième tour, mais Jim rathmann résiste et durant une quinzaine de minutes les deux hommes vont se livrer une superbe bataille, échangeant continuellement leurs positions. Leur duel cesse à la fin du quarante-quatrième tour, lorsque Jim Rathmann effectue son premier ravitaillement et reprend la piste vingt secondes derrière Flaherty. Ce dernier effectue la même opération trois tours plus tard, cédant le commandement à Ward et Thomson. Aussitôt après, une collision impliquant quatre voitures entraîne la neutralisation de la course, permettant pilotes n'ayant pas encore ravitaillé d'effectuer leur arrêt en perdant un minimum de temps. Thomson en profite pour reprendre la tête de la course, devant Ward, Flaherty et Jim Rathmann. Il va graduellement porter son avance à dix secondes, jusqu'à son deuxième ravitaillement, au quatre-vingt-quatrième tour. Ward, qui a repris le commandement, va alors accélérer la cadence, se détachant progressivement de Jim Rathmann et Flaherty. Ces derniers effectuent leur second arrêt avant la mi-course, laissant Ward avec une confortable avance de trente secondes sur Thomson. L'homme de tête possède une avance suffisante pour effectuer son deuxième ravitaillement sans perdre l'avantage. L'opération a lieu au cent-troisième tour, et Ward parvient à reprendre la piste avec encore douze secondes de marge sur Thomson. Celui-ci n'abandonne cependant pas la lutte, grignotant à chaque passage quelques dixièmes de secondes sur son adversaire. Au moment d'effectuer son troisième arrêt, aux trois quarts de la course, Thomson est revenu à seulement quatre secondes de Ward. Il repart des stands en seconde position, mais une barre de torsion brisée l'empêche de continuer sur le même rythme. Il est désormais sous la menace directe de Jim Rathmann, qui revient rapidement sur lui et le dépasse juste avant que la course ne soit une nouvelle fois neutralisée, Flaherty étant sorti de la piste. Ward profite de la neutralisation pour effectuer sereinement son dernier ravitaillement, ressortant des stands avec encore une vingtaine de secondes d'avance sur Rathmann. La course se poursuit alors sans changement, Ward l'emportant avec une confortable avance sur Rathmann qui tombe en panne sèche aussitôt après l'arrivée ! Malgré les neutralisations, la moyenne du vainqueur s'élève à 218,6 km/h, nouveau record.
Classements intermédiaires
Classements intermédiaires des monoplaces aux premier, deuxième, dixième, vingtième, trentième, quarantième, soixantième, quatre-vingtième, centième, cent-trentième, cent-cinquantième et cent-soixante-dixième tours[8].
Un (R) indique que le pilote était éligible au trophée du "Rookie of the Year" (meilleur débutant de l'année), attribué à Bobby Grim.
Pole position et record du tour
Pole position : Johnny Thomson en 1 min 01 s 683 lors de la première séance de qualification[5] (quatre tours en 4 min 06 s 73 - vitesse moyenne : 234,817 km/h).
Attribution des points : 8, 6, 4, 3, 2 respectivement aux cinq premiers de chaque épreuve et 1 point supplémentaire pour le pilote ayant accompli le meilleur tour en course (signalé par un astérisque).
Pour la coupe des constructeurs, même barème mais seule la voiture la mieux classée de chaque équipe inscrit des points. Le point du meilleur tour en course n'est pas comptabilisé. Les 500 miles d'Indianapolis ne sont pas pris en compte pour cette coupe, la course n'étant pas ouverte aux monoplaces de formule 1.
Le règlement permet aux pilotes de se relayer sur une même voiture, les points éventuellement acquis étant alors perdus pour pilotes et constructeur[5].