Son œuvre la plus célèbre est le livre Les Américains publié en 1958.
Selon la critique, « The Americans a changé la nature de la photographie, ce qu'elle pouvait dire et comment elle pouvait le dire [...] Cela demeure le livre de photographie du XXe siècle qui a peut-être eu le plus d'influence »[1].
Robert Frank est aussi connu pour ses films et vidéos documentaires ainsi que ses manipulations photographiques et autres photomontages.
Biographie
Issu d’une famille juive aisée[2], Robert Frank est le fils d'Hermann Frank, décorateur d'origine allemande, et de Régina Zucker[3], née dans une famille d'industriels. Robert Frank a un frère, Manfred. En 1946, la famille Frank obtient la nationalité suisse (les persécutions antisémites en Allemagne avaient fait perdre leur nationalité à la famille[1].
Ayant découvert la photographie dans sa douzième année, il entre, en 1941, en apprentissage chez Hermann Segesser : celui-ci lui fait découvrir Paul Klee[3].
En , il émigre à New York et obtient un poste de photographe d’accessoires de mode dans les studios du magazine Harper's Bazaar dont le directeur artistique est alors Alexey Brodovitch. Il se lie d’amitié avec Louis Faurer. Insatisfait, il démissionne rapidement et part voyager en Amérique latine en 1948. Il passe les années suivantes entre l’Amérique et l’Europe[4].
En 1950, il épouse l’artiste Mary Lockspeiser(en), dont il a un fils, Pablo né en 1951[4], prénommé en hommage à Pablo Casals[2], et une fille, Andrea, née en 1954[4].
En 1955 et 1956, grâce à une bourse de la fondation Guggenheim, Robert Frank voyage pendant deux ans avec sa famille à travers les États-Unis et photographie les multiples strates de société américaine. Bien que fasciné par sa culture, il adopte un point de vue ironique et extérieur sur la société américaine. Parmi les 23 000 images résultant de ce voyage, Robert Frank en choisit lui-même 83 qui formeront l'édition Les Américains[1],[5], publiée en 1958 aux éditions Delpire, Paris.
En 1974, sa fille Andrea se tue dans un accident d’avion à Tikal au Guatemala[6] et à la même époque, son fils Pablo est atteint d’un cancer et souffre de schizophrénie. Il meurt en 1994 dans un hôpital d'Allentown en Pennsylvanie après une tentative de suicide[2]. En 1995, Robert Frank fonde la « Fondation Andrea Frank », qui attribue des subventions aux artistes.
Il contribue au mouvement Beat[7], pratiquant la traversée des États-Unis ; Jack Kerouac est l'un de ses compagnons de route lors d'un voyage en Floride en 1958.
En 1960, Robert Frank met son appareil Leica de côté et se consacre davantage aux films. Il réalise en 1959 Pull My Daisy sur les Beats, en 1969 Me and My Brother, en 1972 Cocksucker Blues sur les Rolling Stones), en 1975 Keep Busy, en 1979 Life Dances On, en 1981 Energy and How to Get it et en 1983 This Song for Jack.
En 1987 sort son film Candy Mountain codirigé avec Rudy Wurlitzer(en), un road-movie tourné entre New York et Cap Breton en Nouvelle-Écosse, quintessence de la culture américaine qui a toujours passionné Robert Frank. Le leader des Clash, Joe Strummer y tient un rôle ainsi que Tom Waits et l'actrice Bulle Ogier.
À partir de 1972, Robert Frank revient peu à peu à la photographie par le biais de photomontages, de négatifs manipulés et de polaroïds griffonnés. Il s'engage alors dans un champ plus autobiographique :
« Depuis 1972, dans les temps morts que me laissent mes films ou mes projets de film, je photographie. En noir ou en couleurs. Quelquefois j’assemble plusieurs images en une seule. Je dis mes espoirs, mon peu d’espoir, mes joies. Quand je peux, j’y mets un peu d’humour. Je détruis ce qu’il y a de descriptif dans les photos pour montrer comment je vais, moi. Quand les négatifs ne sont pas encore fixés, je gratte des mots : soupe, force, confiance aveugle… J’essaie d’être honnête[9]. »
De cette entreprise d'autofiction, Robert Frank publie de nombreuses éditions. En 1972, il publie ainsi sa deuxième édition The Lines of my Hand (Les lignes de ma main), point de départ auquel suivront de très nombreuses autres éditions réalisées en collaboration étroite avec son ami Gerhard Steidl et publiées à partir des années 2000 aux éditions Steidl.
Robert Frank - L'Amérique dans le viseur
En 2013, sa monteuse, Laura Israël, qui est aussi son amie, lui consacre un film documentaire, Robert Frank - L'Amérique dans le viseur, mêlant de nombreuses archives d'interviews et d'extraits de films, balayant soixante-dix ans d'une carrière bien remplie. Interrogé chez lui à New York et dans son repaire canadien de Mabou en Nouvelle-Écosse, Robert Frank puise dans ses albums et ses caisses d'archives pour commenter, avec humour, une œuvre riche et inclassable.
Göttingen: Steidl, 2008 (ISBN978-3-86521-584-0) La plupart des photographies ne sont pas recadrées à la différence des précédentes éditions, et deux photographies sont remplacées par d'autres du même sujet mais avec un angle de vue différent.
The Lines of my Hand
Tokyo: Yugensha. édition de 1 000 ex., 500 enrichis de la photographie New York City, 1948, 500 de la photographie Platte River, Tennessee
↑ ab et c(en-GB) Sean O'Hagan(en), « Robert Frank at 90: the photographer who revealed America won't look back [Robert Frank, 90 ans : le photographe qui a révélé l'Amérique ne regardera pas en arrière] », The Guardian, (lire en ligne, consulté le ).
↑Michel Guerrin, « Sur la route de la mélancolie avec Robert Franck [article illustré d'une photographie titrée My Family, réalisée à New York] », Le Monde, no 18594, .
Annexes
Bibliographie
Georges Arnaud, « Indiens des Hauts-Plateaux. photographies de Robert Frank », Neuf, no 8, (ISSN2261-530X).
Peter Galassi (trad. Juliette Lê), Robert Frank en Amérique, Göttingen, Steidl, , 189 p. (ISBN978-3-86930-825-8).