La loi Tréveneuc se compose de six articles[9],[10].
Elle prévoit son application dans le cas où le Parlement serait illégalement dissout[N 1] ou serait empêché de se siéger, pour quelque cause que ce soit, dans les lieux qui leur sont affectés[N 2] à Paris[N 3] ou dans toute autre ville où le Gouvernement aurait transféré le siège des pouvoirs publics.
Elle institue les mesures à mettre en œuvre si le Parlement national se trouve dans l'incapacité de se réunir : il revient ainsi aux conseils généraux de se réunir et de pourvoir « d’urgence au maintien de la tranquillité publique et de l'ordre légal » (article 2).
Les articles 3 à 6 sont relatifs à l'assemblée des délégués des conseils départementaux. Chaque conseil départemental doit élire deux délégués. Les conseils généraux doivent envoyer chacun deux délégués auprès du Gouvernement (article 3) — ce qui suppose que ce dernier a pu échapper à la cause qui empêche le Parlement de se réunir —, afin de constituer une assemblée délibérative provisoire avec les éventuels députés nationaux qui auraient pu suivre le Gouvernement.
La loi s'assigne un double objectif : pourvoir aux mesures immédiatement nécessaires à l'administration du pays, et au rétablissement de la mandature constitutionnelle, soit de celle précédemment en cours, soit d'une nouvelle, issue d'élections générales, qui doivent être convoquées après un mois d'exercice de « l'Assemblée des délégués ».
On reconnaît dans ce texte les événements de la guerre de 1870, et donc une volonté de se prémunir contre leur répétition, ou contre une guerre civile qui empêcherait le Parlement de se réunir.
La loi a été utilisée pour justifier la création de la France libre puis de la représentation provisoire à Alger[13], et elle est toujours en vigueur[14].
Le soir du , Paul Valentino annonce qu'il va demander au conseil général de la Guadeloupe d'appliquer la loi Tréveneuc[15] ; le , il réitère sa demande en session
extraordinaire[15]. René Cassin soutient que l'armistice du est nul et non avenu en vertu de la loi Tréveneuc[16]. Afin de prévenir sa mise en œuvre, l'État français prend deux lois : la première, du , interdit aux conseils généraux de se réunir spontanément[15],[17] ; la seconde, du , suspend les sessions des conseils généraux et en transfère les attributions aux préfets[15],[18]. La loi Tréveneuc figure en tête des visas de la déclaration organique du par laquelle Charles de Gaulle complète le Manifeste de Brazzaville du [19]. D'après Michèle Cointet-Labrousse, en , les conseils généraux d'Algérie envisagent de mettre en œuvre la loi Tréveneuc[15],[20].
Maintien en vigueur
La loi Tréveneuc n'a été ni abrogée ni modifiée par la loi no 82-213 du relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions (loi Deferre)[21],[22]. Elle n'a été ni abrogée ni codifiée par la loi no 96-142 du relative à la partie législative du Code général des collectivités territoriales[23],[24],[25]. Elle n'a pas été abrogée par la loi no 2011-525 du de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (loi Warsmann). Elle a été amendée par la loi no 2013-403 du relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.
Modifications
Le , Jean-Louis Masson dépose une proposition de loi no 1968 tendant à compléter la loi Tréveneuc[22].
Notes et références
Notes
↑En vertu de la Constitution du , la dissolution est une prérogative exclusive du président de la République. La Constitution lui interdit de dissoudre le Sénat. La dissolution de l'Assemblée nationale connaît, quant à elle, trois limites : le président de la République ne peut dissoudre à nouveau l'Assemblée nationale pendant l'année qui suit une dissolution ; il ne peut la dissoudre pendant l'application de l'article 16 de la Constitution ; et l'Assemblée nationale ne peut être dissoute par le président du Sénat exerçant l'intérim de la présidence de la République.
↑En vertu de l'article 2 de l'ordonnance no 58-1100 du relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, l'Assemblée nationale siège au palais Bourbon ; et le Sénat, au palais du Luxembourg.
↑Aux termes de l'alinéa 1er de l'article 1er de l'ordonnance précitée, l'Assemblée nationale et le Sénat siègent à Paris.
Henri Fournier, Rapport sommaire fait au nom de la 6e commission d'initiative parlementaire, sur la proposition de loi de MM. le vicomte de Tréveneuc, de Janzé [et] Depasse, relative au rôle éventuel des présidents des commissions départementales et des conseils généraux (urgence déclarée), dans Journal officiel de la République française, vol. 3e année, no 233, , Assemblée nationale, annexe no 485, p. 2865, col. 3.
Henri Fournier, Rapport supplémentaire fait au nom de la commission chargée d'examiner les propositions : 1o de M. le vicomte de Tréveneuc et plusieurs de ses collègues ; 2o de M. Vétillart et plusieurs de ses collègues ; 3o de M. le vicomte d'Aboville et de plusieurs de ses collègues ; 4o de MM. Vente et Depeyre, relatives au rôle éventuel des conseils généraux dans des circonstances exceptionnelles (urgence déclarée), dans Journal officiel de la République française, vol. 4e année, no 18, , Assemblée nationale, annexe no 782, p. 417, col. 2-3.
[Bull. ] Loi du relative au rôle éventuel des conseils généraux dans des circonstances exceptionnelles, dans Bulletin des lois de la République française, XIIe série, t. 4, no 83, , texte no 928, p. 178-179.
[JO ] Loi du [relative au rôle éventuel des conseils généraux dans des circonstances exceptionnelles], dans Journal officiel de la République française, vol. 4e année, no 53, , partie officielle, texte no 1, p. 1281, col. 1-2.
[JO ] Loi du portant suspension des conseils généraux et des conseils d'arrondissement, dans Journal officiel de la République française. Lois et décrets, vol. 72e année, no 261, , lois, texte no 1, p. 5274, col. 2-3.
[Chathuant] Dominique Chathuant, « Loi Tréveneuc de (applicabilité à la Guadeloupe en -) », dans Jack Corzani (dir.), Dictionnaire encyclopédique des Antilles et de la Guyane, t. 7 : Quimbois – Zyébôy, Fort-de-France, Désormeaux, 1 vol., p. 1981-2343, 30 cm (ISBN2-85275-020-1, OCLC30009816, SUDOC01852088X), s.v.Tréveneuc, loi.
[Duguit 1923] Léon Duguit, Manuel de droit constitutionnel : théorie générale de l'État, le droit et l'État, les libertés publiques, l'organisation politique de la France, Paris, E. de Boccard, , 4e éd., 1 vol., 605, in-16 (19 cm) (OCLC491826194, BNF37748672, SUDOC102229589, lire en ligne).
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[Sausse 2017] Julien Sausse, « La loi de Tréveneuc du , relative aux rôles éventuels des conseils généraux dans des circonstances exceptionnelles », dans Éric Gojosso (dir.) et Institut d'histoire du droit de l'université de Poitiers (publ.), Cahiers poitevins d'histoire du droit, nos 8-9, Paris et Poitiers, LGDJ et université de Poitiers, coll. « Faculté de droit et des sciences sociales [de l'université de Poitiers] » (no 87), , 1re éd., 1 vol., 468 (ISBN979-10-90426-76-4, EAN9791090426764, OCLC1001459179, SUDOC203601270, présentation en ligne), I (« Le droit face aux circonstances exceptionnelles »), chap. 2.
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[Verpeaux 2015] Michel Verpeaux, « La démocratie parlementaire sous la IIIe République », dans Droit constitutionnel, t. 1 : Théorie générale de l'État. Histoire constitutionnelle de la France, Paris, Université numérique juridique francophone, coll. « Cours et méthodologie en démonstration / Cours / Droit public », (présentation en ligne), leçon no 8, p. 13 p. (lire en ligne).