Jacques Joseph Defermon des Chapelières est le fils de Jacques Defermon, sieur des Chapelières, avocat au parlement, procureur fiscal de la baronnie d’Ancenis, maire de Châteaubriant, député aux États de Bretagne en 1768, et de Marie Lambert. Il est le frère du baron Jean-François Defermon (1762-1840), préfet et député.
Partisan des idées nouvelles, il prend part en 1787-1788 avec ses collègues Lanjuinais et Le Chapelier au mouvement réformiste qui secoue les parlements. Il est d'ailleurs élu secrétaire de l'Assemblée des États de Bretagne.
Le député aux États généraux
Defermon se lance dans la carrière politique à l'occasion des États généraux de 1789. Il se fait élire député du tiers état de la sénéchaussée de Rennes. Dès lors il suit le mouvement révolutionnaire et se range du côté des patriotes.
Son action parlementaire est très importante et occupe plusieurs colonnes du Moniteur. La Bibliothèque de l'Assemblée nationale conserve une partie de ses notes de séance[2]. En , il soumet des amendements à la déclaration des Droits. Le de la même année, il propose de procéder à des élections par districts de département, motion qui est repoussée par ses collègues. En revanche, le il fait rejeter la proposition du comité de constitution d'élire les officiers municipaux par un scrutin de liste simple. Il propose à la place d'établir un scrutin nominal, mais finalement c'est le scrutin de liste double qui est retenu.
Le , mandaté par ses collègues bretons, il présente et fait établir un règlement des finances de la Bretagne. Dès lors il se spécialise dans les questions fiscales et financières et entre le au comité des impositions. On le voit intervenir contre des magistrats bretons, puis prendre position pour l'abolition des corvées et des tribunaux d'exception. En il est élu au comité ecclésiastique, où il se montre favorable à la Constitution civile du clergé.
Le secrétaire de l'Assemblée constituante
En 1790 et 1791 il intervient beaucoup sur des questions touchant aux finances et à la marine, ainsi qu'aux affaires de sa province d'origine. Le il est élu secrétaire de l'Assemblée. Peu après il prend position contre l'établissement d'un jury en matière civile. Il fait décréter l'impression duVoyage autour du monde de La Pérouse, et l'envoi d'une expédition de secours pour rechercher le navigateur disparu.
Finalement Defermon est élu président de l'Assemblée le , peu après la fuite de Varennes. Jusqu'à la fin de la session il est l'un des parlementaires les plus actifs.
Son mandat achevé, il revient à Rennes et est élu par ses concitoyens président du tribunal criminel de la cité.
Député à la Convention
En septembre 1792, Jacques Defermon est élu député du département de l'Ille-et-Vilaine, le deuxième sur sept, à la Convention nationale[3], où il siège, comme son collègue Jean-Denis Lanjuinais, sur les bancs de la Gironde.
Lors du procès de Louis XVI, Defermon vote la réclusion et se prononce en faveur de l'appel au peuple et du sursis à l'exécution de la peine[6]. En avril 1793, il est absent à la mise en accusation de Jean-Paul Marat[7]. En mai, il vote en faveur du rétablissement de la Commission des Douze[8]. En juillet, il est décrété d'arrestation sur motion de René Levasseur pour ne pas s'être présenté à la Convention pour s'expliquer d'une lettre hostile aux journées du 31 mai et du 2 juin[9] ; le même mois, il est mis hors de la loi après le rapport de Bertrand Barère au nom du Comité de Salut public, pour s'être enfuit de Paris et pour avoir poussé les départements à la rébellion[10]. Il se cache dans le château de Trécesson.
En , Defermon est réélu député d'Ille-et-Vilaine au Conseil des Cinq-Cents. Comme sous les précédentes assemblées il se spécialise dans les questions financières et présente un grand nombre de projets de loi qu'il prépare au sein des comités. Ainsi il propose le au nom de la commission des finances de créer le système du mandat territorial pour remplacer celui de l'assignat, initiative adoptée par les Conseils. L'échange se fait sur la base de trente francs en assignats contre un franc en mandats, au lieu de 300 contre 1, sa valeur réelle. Cette disproportion condamne cette nouvelle monnaie fiduciaire à l'échec et il est abandonné le .
Un clichyen modéré
Defermon jouit d'un grand prestige au sein du Conseil puisqu'il est élu secrétaire, puis de nouveau président de l'Assemblée le . Politiquement il est proche des royalistes modérés qui fréquentent le club de Clichy, mais se garde de toute compromission et reste au fidèle au Directoire.
Non réélu en 1797, Defermon trouve alors une place dans l'administration et devient commissaire de la Trésorerie nationale.
Un notable du régime napoléonien
En 1799, l'ancien député soutient le coup d'État du 18 brumaire et se rallie aussitôt au Premier Consul qui le récompense en le nommant au Tribunat.
Mais Bonaparte l'appelle presque aussitôt à siéger au Conseil d'État dont il devient l'un des membres les plus influents. Il préside ainsi la section des finances jusqu'à la chute de l'Empire, et participe à la création de la Caisse de garantie et d'amortissement. En 1804, il est nommé directeur général du « conseil de la liquidation de la dette publique » et reçoit la Légion d'honneur. L'année suivante il est intendant général, puis en 1808 ministre d'État et directeur des finances. Le , il est fait comte de l'Empire. Dans le cadre de ses fonctions administratives, il acquiert une réputation de sévérité et on lui reproche une trop grande rigueur envers les contribuables, d'où son surnom « Fermons la caisse ». Craint des financiers, il n'hésite pas à faire emprisonner certains d'entre eux tel le banquier Ouvrard.
Sa fidélité envers l'empereur est indéniable, au point que celui-ci envisage un temps d'en faire son ministre du Trésor.
Retiré sous la Première Restauration, le comte Defermon retrouve toutes ses fonctions lors des Cent-Jours. Le , les électeurs d'Ille-et-Vilaine l'envoient siéger à la Chambre des représentants où il est l'un des principaux représentants du parti bonapartiste. Après l'abdication de , il fait tout son possible pour faire reconnaître Napoléon II mais ses espoirs sont vains.
Il s'installe alors à Bruxelles et y vit pendant six ans, jusqu'en 1822, date à laquelle il obtient une amnistie et peut regagner la France. Il se retire alors complètement de la vie publique et s'éteint à Paris en 1831, à l'âge de 78 ans.
« Mémoires inédits d'un grand commis des finances Jacques Defermon des Chapelières », Arnaud de Maurepas (éd.), Etudes et Documents CHEFF, 1993, p. 365-460 (qui reconstitue la généalogie des familles Defermon et Duboys). Texte numérisé.