Il prend sa retraite en juin 2023[14] et fait la couverture de Libération[15] et Le Figaro le qualifie de « héraut de la justice moderne »[16]. La même année, les auditeurs de Justice de l’École nationale de la magistrature le choisissent comme nom et parrain de promotion.
Sa nomination est un temps suspectée de partialité par la gauche. Les syndicats de magistrats jugent « malsain » qu’un directeur de cabinet du garde des Sceaux deviennent procureur de Paris, premier tribunal de France, estimant que ses décisions seraient entachées de suspicion (risques de conflits d’intérêts)[21]. Cette discussion est brièvement évoquée lors du débat du second tour de l'élection présidentielle de 2012[22]. Plusieurs précédents avaient déjà eu lieu quelques années auparavant, concernant Jean-François Burgelin, Laurent Le Mesle, Yves Bot et Vincent Lamanda, qui tous ont fait partie de cabinets ministériels avant d’occuper d'importants postes au sein de la magistrature.
Il ouvre une instruction sur le ministre socialiste Jérôme Cahuzac, mais se montre également déterminé à faire avancer les investigations sur le financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy autour de l'affaire Bygmalion, ce qui lui permet d'obtenir la reconnaissance de son professionnalisme[23]. En 2013, sous la présidence de François Hollande, son périmètre de compétences est amputé de certaines affaires politico-financières, désormais prises en charge par le nouveau parquet national financier.
En septembre 2016, il juge que l'idée lancée par certaines personnalités politiques de placer en rétention les individus fichés « S » par les services de renseignement n'est pas envisageable « Il ne peut y avoir de détention préventive en dehors d'une procédure pénale. C'est le socle de l'État de droit. On ne peut pas détenir quelqu'un avant qu'il ait commis une infraction »[28].
Il s'oppose également en septembre 2016 au projet d'un parquet national antiterroriste, soulignant « le fait que la section antiterroriste soit nichée au sein du parquet de Paris vous donne une force, une mutualisation extraordinaire, parce que ça nous permet de faire face à ce que vous me permettrez de qualifier de « coup de chauffe » ou de « coup de bourre » quand vous avez un attentat terroriste[29] », avant de s'y déclarer favorable fin 2017 [30].
François Molins est entendu en octobre 2022 dans le cadre du procès de l'attentat du 14 juillet 2016 à Nice, à la demande de l'association « Promenade des Anges ». En effet, le prélèvement d'organes qui a lieu à la suite du décès des victimes est vu d'un mauvais œil par des familles qui n'en ont pas été informées. François Molins déclare que « les légistes niçois ont voulu bien faire », mais que « si c'était à refaire, il n'y aurait eu aucun prélèvement ». Il insiste également sur le fait que ce protocole ne s'appliquerait pas à Paris[31].
En 2020, il se prononce en faveur de l’indépendance des magistrats du parquet[32]. Avec Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassation, il propose l’organisation des États généraux de la justice[33].
En septembre 2020, il signe une tribune dans Le Monde aux côtés de Chantal Arens dans laquelle il alerte sur un possible conflit d’intérêts après que le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, « autorité de décision des sanctions disciplinaires à l’égard des membres du parquet après avis du Conseil supérieur de la magistrature, a saisi l’Inspection générale de la justice d’une enquête administrative contre trois magistrats du parquet national financier (PNF) chargés d’une procédure qui l’avait concerné »[34]. À la suite de plaintes des principaux syndicats de magistrats et d’Anticor allant dans le même sens, Francois Molins, en tant que représentant du ministère public devant la Cour de justice de la République, ouvre le 13 janvier 2021 une information judiciaire contre Éric Dupond-Moretti pour prise illégale d’intérêt.
Controverses
Implication dans l'enquête contre le ministre de la Justice
Alors qu’il est reproché au garde des Sceaux d’avoir diligenté pour se venger des enquêtes administratives contre trois magistrats du parquet national financier avec lesquels il a eu des différends lorsqu’il était avocat, au cours de l’instruction, la défense du garde des Sceaux a révélé que François Molins a été consulté par le cabinet du ministre de la Justice avant que les enquêtes ne soient ouvertes.
En effet, après qu’Eric Dupond-Moretti a reçu le 15 septembre 2020 de l’Inspection générale de la Justice le rapport de fonctionnement sur le PNF commandé par sa prédécesseur Nicole Belloubet, afin de définir les suites à lui donner, sa directrice de cabinet Véronique Malbec l’avait fait instruire par les services du ministère compétents mais avait également sollicité l’avis de François Molins.
François Molins a indiqué au cabinet du ministre qu’il fallait ouvrir des enquêtes administratives.
Le 18 septembre 2020, la Chancellerie communique donc sur l’ouverture de trois enquêtes administratives après l’avis conforme du bureau de la déontologie de la direction des services judiciaires du ministère et l’avis identique de François Molins.
Le 29 septembre 2020 pourtant, François Molins signe une tribune avec Chantal Arens dans Le Monde pour affirmer qu’il « est de la responsabilité du garde des Sceaux, garant de l’indépendance des magistrats… de veiller à préserver l’institution judiciaire de toute forme de déstabilisation » pour dénoncer l’ouverture de ces mêmes enquêtes administratives. Une position totalement inverse à ce qu’il a lui-même conseillé dix jours auparavant.
C’est à la suite de cette tribune que les syndicats de magistrats et Anticor déposent une série de plaintes et de signalements auprès de la Cour de Justice de République et c’est le même Procureur général près la Cour de cassation François Molins qui ouvre le 13 janvier 2021 une information judiciaire pour prise illégale d’intérêt contre Éric Dupond-Moretti.
Après avoir systématiquement refusé d’être entendu à la demande de La Défense du ministre lors de l’information judiciaire alors qu’il est considéré comme le principal témoin à décharge, Francois Molins finit par témoigner devant la formation de jugement de la Cour de Justice de la république le 9 novembre 2023. À cette occasion, non seulement il confirme avoir bien dit à Véronique Malbec qu’il fallait selon lui ouvrir des enquêtes administratives mais en plus il révèle l’existence d’un mail, caché durant toute l’instruction, qu’il a envoyé le soir même de son appel avec Véronique Malbec, à Jean-Paul Sudre, collègue à la cour de cassation pour lui demander également son avis. En réponse à son mail, Jean-Paul Sudre lui a également indiqué que l’enquête administrative s’imposait.
Plusieurs commentateurs dénonce le conflit d’intérêts du procureur général Molins, à la fois autorité de poursuite devant la cour de justice de la République, en charge de l’accusation, mais également témoin à décharge dans la procédure, alors même qu’il a déjà pris des positions différentes publiquement et en privé.
À la suite d'une action des syndicats de magistrats, le le Conseil d'État annule le décret du qui nomme François Molins avocat général près la Cour de cassation. En effet, à son arrivée au poste de directeur de cabinet de Michèle Alliot-Marie, il s’est fait en parallèle nommer pour ordre avocat général à la cour de Cassation, ce qui lui offre un complément de salaire et des avantages pour la retraite. Le Conseil d'État considère qu'il s'agit d'un emploi fictif. C'est en 2017 que François Molins rembourse la somme de 15 720,83 euros indûment perçue[35],[36].
Le secours en montagne : présentation et aspects juridiques, Bordeaux, Association d'études et de recherches de l'École nationale de la magistrature, coll. « Les documents pratiques de l'ENM », , 43 p. (ISBN2-904825-94-0, BNF37172934)
Au nom du peuple français, Flammarion, coll. « Documents », , 368 p. (ISBN2081497735).
↑Thomas Savage, « Le magistrat François Molins rejoint l’Institut catholique de Vendée à la tête d’une chaire éponyme », Ouest-France, (lire en ligne)
↑« « Nous demandons justice pour l’environnement » : l’appel du « Nouvel Obs » », Le Nouvel Obs, (lire en ligne)
↑François Hollande : « Et vous avez fait nommer procureur de la République de Paris le directeur de cabinet du garde des sceaux, ça ne s'était jamais fait […] Ce n'est pas l'homme que je mets en cause, c'est celui qui l'a nommé ». Nicolas Sarkozy : « le CSM a donné son accord pour cet homme d'une intégrité absolument remarquable » « Compte-rendu intégral du débat : nucléaire, institutions, politique étrangère (partie 5) », sur lemonde.fr, .
↑« François Molins et Jean-Louis Nadal : « Il est urgent de garantir l’indépendance statutaire des magistrats du parquet » », Le Monde, (lire en ligne)
↑Jean-Baptiste Jacquin, « Des Etats généraux de la justice pour répondre à la « désespérance collective » des magistrats », Le Monde, (lire en ligne)
↑« Chantal Arens et François Molins : « Les magistrats sont inquiets de la situation dans laquelle se trouve l’institution judiciaire » », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑Aziz Zemouri, « Quand le Syndicat de la magistrature attaquait François Molins », Le Point, (lire en ligne)