Fils d'ouvriers agricoles, Auguste Fernand Auberger entre à l'école normale d'instituteurs de Moulins en 1919 et occupe ensuite différents postes dans les écoles primaires de l'Allier, avant d'être nommé à Bellerive-sur-Allier, en 1929[1].
Il adhère au SNI, le Syndicat national des instituteurs, dont il devient en 1932 conseiller syndical puis secrétaire de la section de l'Allier en 1939[2]. De 1933 à 1940, il est également délégué de l'Union locale des syndicats ouvriers CGT de Vichy[2].
Il épouse en 1928 Alice Champagnat, une institutrice, née en 1908 à Saint-Pourçain-sur-Sioule et syndiquée comme lui au SNI et qui adhère à la SFIO en 1938[3].
Il est favorable à une intervention dans la guerre d'Espagne en soutien aux républicains espagnols et accueillera pendant un an deux enfants espagnols[2].
Mobilisé au début de la Seconde Guerre mondiale, il est réformé provisoirement pour maladie[2]. Il réunit en secret les responsables du SNI en septembre 1940[2]. En 1941, le Journal officiel le mentionnait parmi les dignitaires de la franc-maçonnerie[2]. Il est révoqué de l'enseignement et interné au camp de Mons dans le Puy-de-Dôme et à celui de Nexon en Haute-Vienne. Il fait partie des 140 syndicalistes relâchés au second semestre 1941 et il est alors assigné en résidence surveillée au Bleymard en Lozère[2].
Il est d'usage de dire qu'il entre dans la Résistance (réseau Alliance[2]), bien que son activité donne lieu à des controverses[4],[2]. En effet, peu après sa libération, il travaille pour le régime de Vichy mais informe des intentions des décideurs les opposants clandestins. Il est secrétaire de Georges Vernier, chargé de mission au ministère de l'Intérieur à Vichy (13 novembre 1941-17 avril 1942) dans le service de révision des dossiers des internés administratifs et toutes questions sociales[2]. Selon un rapport des Renseignements généraux, il aurait été membre du cabinet du ministre Pierre Pucheu depuis février 1942[2]. Selon un rapport du commissaire de police de Vichy datant du 7 juillet 1943, Fernand Auberger se tenait « à l’écart de toute activité politique », ne reniait pas « son activité passée » et protestait « énergiquement contre les accusations actuellement portées contre lui ». Le préfet se montre favorable à sa réintégration dans l'enseignement mais dans un autre département que l’Allier. Quelques mois plus tard, il est désigné comme correspondant provisoire dans l'Allier par le secrétaire général à la propagande universitaire auprès des instituteurs (choix auquel le préfet fit connaitre son opposition)[Note 1].
À la Libération, à l'été 1944, il est nommé maire provisoire de Bellerive-sur-Allier[2] (commune qui fait face à Vichy, de l'autre côté de l'Allier), en remplacement du l'ancien député SFIO Paul Rives qui, devenu partisan de la Collaboration, avait suivi Déat en Allemagne. Il est élu maire lors des élections municipales de 1945, fonction qu'il occupera jusqu'à son décès.
En 1959, il se répand dans le bulletin municipal bellerivois en violentes attaques antisémites contre son adversaire[5], le docteur Maurice Benhamou. L'élection municipale de est annulée par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, lequel est désavoué en 1963 par le Conseil d’État, plusieurs mois après le décès d'Auberger. Il est condamné pour diffamation et injures en par le tribunal de grande instance de Cusset[6]. La Commission nationale des conflits de la SFIO ne le condamnera qu'à « un blâme »[7].
Alors qu'il revenait tout juste d'un voyage à la Martinique, il est frappé par une attaque cérébrale le 3 mars 1962 alors qu'il prononce un discours à une soirée organisée par la Société de gymnastique de Bellerive-sur-Allier[8]. Évacué sur la clinique de Vichy, puis à l'hôpital de la ville le lendemain, il meurt quelques jours plus tard, le 6 mars à 61 ans, suivant les sources[Note 2] à Clermont-Ferrand[2], dans la commune voisine de Chamalières[1] ou à Bellerive-sur-Allier[2].
Il est remplacé au Sénat par son suppléant, François Minard, et à la mairie de Bellerive par Pierre Corniou et par son épouse Alice Auberger, à l'occasion d'une élection partielle, au conseil général (aujourd'hui conseil départemental) de l'Allier[2],[Note 3]
↑. La situation complexe de Fernand Auberger sous le régime de Vichy sera exploitée par ses opposants politiques communistes après la Libération, auxquels il répondra que ses fonctions lui avaient permis pendant cette période de faire libérer 2000 internés, pour la plupart communistes.
↑Les sources divergent sur son lieu de décès : Le Maitron dans l'entête de sa biographie indique qu'il est mort à Clermont-Ferrand puis dans le corps de l'article à Bellerive-sur-Allier et le site du Sénat indique lui Chamalières, dans la banlieue clermontoise.
↑Son épouse Alice Auberger, après être devenue conseillère générale, aura des relations difficiles avec Pierre Corniou qui avait succédé à son mari à la maire de Bellerive. Après une comparution à la Commission fédérale des conflits de la SFIO, elle quitta ce parti en août 1965. Elle fut investie par la Convention des institutions républicaines (CIR, parti créé par François Mitterrand en 1964) pour les élections cantonales de 1967 mais fut battue par Pierre Corniou et se retira alors de la vie politique. Elle est morte le 25 février 2013.
↑M. Auberger, sénateur, condamné pour diffamation, Le Monde, 16 juin 1959 ; Dominique Chathuant, Nous qui ne cultivons pas le préjugé de race. Histoire(s) d'un siècle de doute sur le racisme en France, Paris, Le Félin, 2021, p. 232-246.
↑Emmanuel Debono, Le racisme dans le prétoire : Antisémitisme, racisme et xénophobie devant la loi, Paris, coll. « Presses universitaires de France », , 696 p. (lire en ligne), « 8. Antisémitisme municipal, l’affaire Auberger », p. 301 à 331.
↑« M. FERNAND AUBERGER sénateur socialiste de l'Allier A ÉTÉ FRAPPÉ D'UNE ATTAQUE », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
Jean Débordes, L'Allier dans la guerre. Paroles de résistants : 50 témoignages reçus, embuscades, trahisons, déportations, exécutions, Éd. de Borée, 2003, 447 p. : « Chapitre XIII : A Bellerive-sur-Allier, toujours la suspicion sur Fernand Auberger », p. 155 et suiv. (En ligne) (ISBN9782844941961)
Le Maitron : dictionnaire biographique : mouvement ouvrier, mouvement social, de 1940 à , vol. 5, E-Ge, Ivry-sur-Seine, Éditions de l’Atelier, 2009, 462 p. + 1 CD-Rom.