Le texte énonce les droits fondamentaux de l'individu, leur reconnaissance, et leur respect par la loi. Il comprend aussi un préambule avec huit considérations reconnaissant la nécessité du respect inaliénable de droits fondamentaux de l'homme par tous les pays, nations et régimes politiques, et qui se conclut par l'annonce de son approbation et sa proclamation par l'Assemblée générale des Nations unies.
Le texte du préambule et de la Déclaration est invariable, on ne peut pas le modifier. Sa version en français, composée de 30 articles, est un original officiel, signé et approuvé par les membres fondateurs de l'Organisation des Nations unies, et non une traduction approuvée[9]. Cependant, depuis 1948 et sa promulgation, le terme de « droits humains » est d'usage courant dans la plupart des langues dans lesquelles il a été traduit.
Genèse et rédaction
De 1946 à 1948, les délégués des Nations unies se sont consacrés à l'élaboration de la Déclaration. Créée en 1946 par le Conseil économique et social, la Commission nucléaire des droits de l'homme a fixé comme principal mandat de la nouvelle Commission des droits de l'homme l'élaboration d'une charte internationale[10].
Au début de l'année 1947, lors de sa première session, la Commission des droits de l'homme a établi un Comité de rédaction. Initialement composé de la présidente, Eleanor Roosevelt, du vice-président, P.C. Chang, et du rapporteur, Charles Malik, le Comité de rédaction sera élargi dans un second temps. Il se compose des membres suivants[11] :
P. C. Chang, 1893-1957, Chine, vice-président du Comité de rédaction ;
Émile Saint-Lot, 1904-1976, Haïti, rapporteur du Comité de rédaction. La lecture de la DUDH a été faite pour la première fois devant l'assemblée générale de l'ONU par son rapporteur, Émile Saint-Lot ;
Charles Malik, 1906-1987, Liban, rapporteur de la Commission des droits de l'homme ;
John Peters Humphrey, 1905-1980, Canada, directeur de la Division des droits de l'homme des Nations unies.
Le Comité de rédaction se réunit pour sa première session du 9 au 25 juin 1947, puis pour une deuxième session du 3 au 21 mai 1948. Le projet de Déclaration rédigé par le Comité et transmis pour discussion à la Commission des droits de l'homme, puis au Conseil économique et social, et enfin à l'Assemblée générale. De nombreux amendements et propositions seront encore proposés par les États membres de l'ONU au sein de ces différents organes.
Structure
La structure qui sous-tend la Déclaration apparaît dans sa seconde version préparatoire, élaborée par René Cassin.
Se démarquant du premier jet de John Peters Humphrey, simple liste de droits conforme au modèle du Bill of Rights de nombreux États américains, ce texte commence par un préambule « à la manière française »[12]. Il consacre ensuite ses premiers articles à l'énoncé de principes généraux, destinés à guider l'interprétation des dispositions détaillées qu'ils précèdent, imitant sur ce point le Code civil français, dont les six premiers articles répondent au même objectif[13].
Cette structure a par ailleurs été comparée par René Cassin à celle du portique d'un temple grec : une succession de considérations comparables à des marches, quatre colonnes constituées par les droits individuels, familiaux, sociaux et politiques et un fronton unifiant l'ensemble dans une même vision de l'humanité[14], composé des trois derniers articles du texte[15].
Certains affirment que la première déclaration des droits de l'homme connue serait celle transcrite sur le cylindre de Cyrus, rédigé par Cyrus le Grand, fondateur de l'Empire perse en [17].
Durant la Seconde Guerre mondiale, les Alliés adoptèrent les « quatre libertés » : la liberté d'expression, la liberté de religion, la liberté de vivre à l'abri du besoin et la liberté de vivre à l'abri de la peur, comme leurs buts fondamentaux dans ce conflit. La Charte des Nations unies réaffirme la « foi dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine », et engage tous les États membres à promouvoir « le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. »[21]
Lorsque les atrocités commises par l'Allemagne nazie furent connues, après la Seconde Guerre mondiale, le consensus au sein de la communauté internationale était que la Charte ne définissait pas suffisamment les droits auxquels elle faisait référence[22],[23]. Une déclaration précisant les droits des individus était nécessaire afin de renforcer les dispositions de la Charte sur les droits de l'homme[24].
Portée juridique
Après avoir voté la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui n'a, en tant que telle, qu'une valeur déclarative, et ne crée donc pas d'obligations juridiques, l'Assemblée générale a souhaité une Charte des droits de l'homme qui aurait force obligatoire. La Commission des droits de l'homme de l'ONU a été chargée de la rédiger. Après de longues négociations, le projet a abouti, dans le contexte de la guerre froide avec deux textes complémentaires : le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Par ailleurs, l'article 29.1 de la DUDH évoque les devoirs de la personne : sur ce point, voir l'article Droits de l'homme.
Intégration de l'environnement et du climat
En 2024, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) intègre explicitement la protection contre le dérèglement climatique parmi les droits de l'Homme, avec un arrêt du 2 avril, la CEDH reconnaît le droit des individus d'être réellement protégés par l'État contre les effets néfastes du dérèglement climatique au travers d'une condamnation de la Suisse (pour violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme). Elle fait suite à une requête d'une association dénonçant des « manquements des autorités suisses » pour atténuer les effets du changement climatique ; la Cour a estimé que l'article 8 de la Convention consacre « un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l'État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie »[25].
Traduction de la Déclaration universelle des droits de l'homme
Le texte de la Déclaration universelle des droits de l'homme s'est vu décerner par le Livre Guinness des records en 2009, le record mondial de traduction, avec 370 langues et dialectes différents[26]. En 2019, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme dénombre 518 traductions, disponibles sur son site internet. Bien que le HCDH s'efforce de sélectionner les traductions officielles ou les meilleures traductions disponibles, et de produire de nouvelles traductions dans des langues de grande diffusion, le HCDH émet néanmoins comme réserve, la qualité et l'exactitude des traductions autres que celles effectuées dans les six langues officielles de l'ONU : anglais, arabe, chinois, espagnol, français (ici, la langue originale officielle du texte de la Déclaration et de son préambule), russe[27].
Critiques
Trois critiques principales sont faites à cette Déclaration.
D'autre part, une autre critique porte sur l'universalité supposée de ces droits de l'homme. Celle-ci rejoint parfois celle-là, ainsi lorsque les pays du Sud dénoncent une application et un intérêt à géométrie variable pour les droits de l'homme, en fonction des pays, des puissances et des conflits. Dans ce dernier cas, ce n'est pas le principe de l'universalité des droits de l'homme qui est contesté en tant que tel, comme peuvent le faire les tenants d'un relativisme culturel radical, mais plutôt l'application différenciée supposée de ceux-ci.
Enfin, le texte passe sous silence la peine de mort. L'article 3 énonce que tout individu a droit à la vie[29], notion qui peut au mieux être interprétée comme interdisant la peine de mort, et l'article 5 mentionne seulement que Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
↑Abelardo Lobato Casado, « Nouveaux droits de l'homme », dans Lexique des termes ambigus et controversés sur la vie, la famille et les questions éthiques, P. Téqui, , 1001 p. (ISBN9782740311103, lire en ligne), p. 810.
↑Michael Woods, Mary B. Woods, Seven Wonders of the Ancient Middle East, publié par Twenty-First Century Books, 2008, p. 28 : « Some modern scholars have called these words the world's first declaration of human rights ».
↑Norberto Bobbio, Le Futur de la démocratie, cf. la 1re partie et l'introduction.
↑Étienne Balibar, « La proposition de l'égaliberté », conférence du 27 novembre 1989. Une version abrégée a été publiée sous le titre « Droits de l'homme et droits du citoyen : la dialectique moderne de l'égalité et de la liberté », dans Les Frontières de la démocratie, Éditions la Découverte, Paris 1992.
↑Dans Les Droits de l'homme et le droit naturel (PUF, 1989), Blandine Barret-Kriegel insiste sur la différence entre la loi naturelle et le droit naturel, et affirme que les droits de l'homme ne sont ni liés à l'individualisme, ni à la théorie du sujet, mais à une certaine conception de l'humanité, présente dans l'école de Salamanque. Voir par exemple la conclusion de l'ouvrage.
↑Charte des Nations unies, préambule et article 56.
(en) Jean-Philippe Feldman, « Hayek's Critique Of The Universal Declaration Of Human Rights », Journal des économistes et des études humaines, vol. 9, no 4, , p. 1145-6396 (DOI10.2202/1145-6396.1172).
(en) Mary Ann Glendon, A World Made New : Eleanor Roosevelt and the Universal Declaration of Human Rights, Random House, , 333 p. (ISBN978-0-375-76046-4, lire en ligne).