Alexandre Bonnier fit ses études à l'école des beaux-arts d'Aubusson (Creuse). Après quatre années d'obligations militaires en Algérie, il fut nommé directeur de l'École des beaux-arts de Moulins (Allier)[3] puis de celle de Lille[4], enfin responsable des arts plastiques à l'Institut de l'Environnement[5] (rebaptisé en 1974 "Service de l'enseignement de l'architecture et des arts plastiques").
Peignant et écrivant simultanément (son plus ancien Autoportrait connu correspond à son retour d'Algérie[6]), ne dissociant intellectuellement pas du reste ces deux disciplines (« Il peignait l'été, écrivait l'hiver » témoignera son amie Jeanne Gatard en 1993[7],[8]), son engagement dans l'administration française des enseignements artistiques se coupla rapidement d'une activité picturale soutenue: après une toute première exposition à Toulouse en 1965, il fit partie des peintres permanents de la Galerie Pierre Domec à Paris, aux côtés de Robert Lapoujade, Robert Wogensky et Geùla Dagan. Il laisse à sa mort de nombreux inédits.
Les récurrences contenues dans l'œuvre d'Alexandre Bonnier, celles du fantasme (Éros) et de la mort (Thanatos), ne manquent pas de suggérer les écrits de Georges Bataille (en particulier Madame Edwarda[9]) et ont été résumées par Jean-Pierre Delarge: « Evocateur des aventures mentales les plus extrêmes, Bonnier transpose sur toile les perceptions des sens, proposant des équivalences plastiques aux sensations captées[10] ». Si donc les corps, discernables mais non objectivement figurés, sont présents dans les premières toiles d'Alexandre Bonnier (Homme nu, 1964, Madame Petit Cul, 1966[11]), ceux-ci vont tendre à disparaître, ne laissant rien d'autre à constater plus tard à Jean Paulhan (« Que sont devenus les êtres qui peuplaient ses premières toiles ? Soient filles, fruits ou femmes, elles ont changé… Elles échappent à nos prises » s'interroge-t-il[12]) qu'une peinture de sensations transposées dans une abstraction nuagiste, informelle.
Œuvres (sélection)
Œuvres originales
Homme nu, Huile sur toile 1964-1965, format 130 × 97 cm, exposition Galerie Pierre Domec 1965.
Madame Petit Cul, Huile sur toile 1966, format 92 × 65 cm, exposition Galerie Pierre Domec, 1967.
Jean Demélier: Toupies de chair, eaux-fortes d'Alexandre Bonnier, Editions Voix/Richard Meier, 1985.
Livres écrits par Alexandre Bonnier
Le Rose. Éloge et inventaire, Paris, Institut de l'Environnement, 1973.
Les Bagues amoureuses, Pages sans titre, 1976.
Triche, triche, triche et chie dans la mort... (Editions hors commerce François Norguet, collection "Pages sans titre", 1978. Tirage limité à 80 exemplaires numérotés et signés.)
Les Tartines, Marseille, Institut scientifique de Recherche paranaturaliste, 1979. (Tirage limité à 50 exemplaires numérotés et signés.)
Journal d'esthétique I, Éditions du musée de Tourcoing, 1981.
Couillos Démios et Jules suivi de Compte-Conte, Œ et de Mozart-Tennis, préface d'Igor Glose (pseudonyme d'Alexandre Bonnier), Paris, galerie NRA, 1982.
Portraits philosophiques en forme de médaillons, Éditions de la Galerie N.R.A., Paris, 1984.
Portraits, autoportraits et quelques écrits, précédé de "Portrait de profil", par Jean-Marie Touratier, Paris, Limage 2, coll. "L'Imaginée", 1984.
La Mort quotidienne, Marseille, les éditions chemin de ronde, 1985.
Les Jeux de dames, avec 10 linogravures de Joël Desbouiges, postface de Serge Hélias, Montmorency, Carte Blanche, 1985.
Les Dessins en crise de Jeanne Gatard, Angoulême, A.C.A.P.A., 1986.
Journal intact, Limoges, Éditions Sixtus, 1990.
Journal d'esthétique II, Éditions Lefor-Openo/Voix, 1991.
L'Encrier ou la Plume, Paris, Éditions Area, 1994.
La Mort quotidienne, Cadenet, les éditions chemin de ronde, coll. "Cadratins”, 2016.
Textes enregistrés
Poèmes et fraiseuses de mots, disque compact, DAO La Petite École, Annecy, 1994. Textes d'Alexandre Bonnier dits par lui-même.
« Comme Gustave Moreau ou Jean Fautrier, Alexandre Bonnierest amené à chercher et à trouver des équivalences picturales aux sensations olfactives, gustatives, tactiles. Équivalences par lesquelles il tente de capter un certain reflet qu'il porte en lui de l'objet de sa préoccupation principale… la femme, ou plutôt le corps de la femme… », où « l'observation amoureuse s'accommode d'un certain éclairage qui n'est pas moins cruel que tendre. » - André Pieyre de Mandiargues[15]
« Dans une première période, la peinture d'Alexandre Bonnier réalisée dans des matériaux traditionnels pouvait être située entre des pôles apparemment antagonistes, l'érotisme surréel et l'abstraction informelle… Dans la dernière partie de sa vie, s'il a poursuivi son œuvre peint, en technique mixte, ptéférant crayons et peinture à l'eau, partant souvent de thèmes personnels, voire obsessionnels, associant volontiers la suavité des couleurs à l'ambigüité du dessin, il a accordé dans son activité une place accrue à ses propres œuvres poétiquesle peintre les délaissant parfois pour illustrer celles de ses poètes amis. Et puis, après avoir tant flirté avec sa mie la mort, elle l'a rattrapé. » - Jacques Busse[4]
↑ ab et c Frédéric Valabrègue et Bernard Lattay: Alexandre Bonnier, peintre et écrivain, éditions Voix Richard Meier, 1994.
↑ Citée par Frédéric Valabrègue et Bernard Lattay, op. cit. Page 149.
↑ Sur Jeanne Gatard, artiste peintre et dessinatrice, voir Dictionnaire Bénézit, op. cit. Tome 5 page 897.
↑ Frédéric Valabrègue et Bernard Lattay (op. cit.) ont placé en page de tête de leur monographie un extrait de Madame Edwarda théorisant élogieusement l'extase, la transgression et la mort.
↑ Jean-Pierre Delarge: Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, Grïnd, 2001, p. 147.
↑ Catalogues Galerie Pierre Domec 1965 et 1967. Tableaux vraisemblablement aujourd'hui en collections particulières.
↑ Jean Paulhan: A. B., dans Œuvres complètes (Cf. Bibliographie ci-dessus).
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
André Pieyre de Mandiargues : Alexandre Bonnier, plaquette biographique et analytique, Galerie Pierre Domec, Paris, 1965.
Henry Lhong, « L'atelier » in Bulletin d'information de l'Atelier de Toulouse, (lire en ligne) — réédité par la revue d'arts plastiques Esprits nomades.
Sous la direction de Jeanne Gatard, Frédéric Valabrègue (texte) et Bernard Lattay (Photos): Alexandre Bonnier, peintre et écrivain, monographie, éditions Voix Richard Meier (avec le concours du Ministère de la Culture et de la Francophonie), 1994.
Les échelles multiples d'Alexandre Bonnier, film documentaire (25 min) de Bernard Lattay, 1972. Diffusion: Alexandre Bonnier.
Ma mort ou celle d'un autre, court-métrage (11 min) réalisé par Alexandre Bonnier, Jean-Claude Bonfanti et Jean-Louis Richet, 1972. Diffusion: Alexandre Bonnier.
Angkor, en corps, encore, moyen-métrage (26 min) réalisé par Alexandre Bonnier, texte de Fernand Jacquet, 1973. Production: Axe Films.
Fleur d'os, moyen-métrage (25 min) réalisé par Alexandre Bonnier, 1973. Diffusion: Institut de l'Environnement.
La Mort quotidienne, court-métrage (10 min) réalisé par Alexandre Bonnier, 1984.