Élections législatives hongroises de 2018

Élections législatives hongroises de 2018
199 sièges de l'Assemblée nationale
(majorité absolue : 100 sièges)
Corps électoral et résultats
Population 9 797 561
Inscrits 8 312 173
Votants 5 796 268
69,73 % en augmentation 7,9
Blancs et nuls 63 985
Fidesz-KDNP – Viktor Orbán
Voix 2 824 206
49,27 %
en augmentation 4,4
Sièges obtenus 133 en stagnation
Jobbik – Gábor Vona
Voix 1 092 669
19,06 %
en diminution 1,2
Sièges obtenus 26 en augmentation 3
MSZP-PM – Gergely Karácsony
Voix 682 602
11,91 %
en diminution 13,7
Sièges obtenus 20 en diminution 9
LMP – Bernadett Szél
Voix 404 425
7,06 %
en augmentation 1,7
Sièges obtenus 8 en augmentation 3
Carte des résultats
Carte
Représentation de l'Assemblée élue
Diagramme
Gouvernement
Sortant Élu
Orbán III
Fidesz-KDNP
Orbán IV
Fidesz-KDNP
Législature élue
VIIIe

Les élections législatives hongroises de 2018 se déroulent le afin de renouveler pour quatre ans les 199 membres de l'Assemblée nationale de la Hongrie.

Avec une participation au plus haut depuis vingt ans, la coalition Fidesz-KDNP du Premier ministre sortant, Viktor Orbán, donnée grande favorite du scrutin, conserve la majorité absolue ainsi que la majorité qualifiée des deux tiers des sièges. Le scrutin est un échec important pour les principaux partis d'opposition, dont les chefs démissionnent dans la foulée.

Contexte

Viktor Orbán est le Premier ministre sortant. En 2010 et 2014, il remporte largement les élections législatives, lui assurant un deuxième puis troisième mandat, après un premier effectué de 1998 à 2002 en coalition avec deux autres partis de centre droit. Lors de son troisième mandat, durant la crise migratoire en Europe, il s'oppose de façon virulente à l'accueil de migrants, ce qui lui assure le soutien d'une partie de la population. Pendant toute la législature, le Fidesz est donné en tête des intentions de vote.

Mode de scrutin

La Hongrie est dotée d'un parlement monocaméral, l'Assemblée nationale, qui est composé de 199 députés élus pour un mandat de quatre ans selon un mode de scrutin parallèle. Sont ainsi à pourvoir 106 sièges au scrutin uninominal majoritaire à un tour dans autant de circonscriptions électorales, auxquels s’ajoutent 93 sièges pourvus au scrutin proportionnel plurinominal de liste avec seuil électoral de 5 % dans une unique circonscription nationale. Ce seuil passe à 10 % pour les listes présentées conjointement par deux partis et à 15 % pour les listes présentées par des coalitions de trois partis ou plus[1].

Le scrutin à la proportionnelle est dit « de compensation » car l'on ajoute aux suffrages recueillis sur les listes nationales les suffrages « fragmentaires » (töredékszavazat) du scrutin uninominal, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas permis aux différentes forces de remporter des sièges dans les circonscriptions ainsi que toutes les voix des partis ayant remporté un siège qui ont dépassé le seuil nécessaire pour l'emporter, on effectue alors la répartition selon le scrutin proportionnel d'Hondt[2].

Depuis 2014, chacune des minorités ethniques de Hongrie a la possibilité de faire élire un député de manière facilitée grâce à un abaissement du seuil électoral, à la condition qu'ils s'enregistrent préalablement sur des listes électorales distinctes. Le siège est prélevé sur les 93 dédiés à la représentation proportionnelle si la liste en question franchit un seuil spécifique établit au quart du quotient inverse de ce total, soit du total des suffrages au scrutin de liste[3]. Treize minorités sont concernées : les Arméniens, Bulgares, Croates, Allemands, Grecs, Polonais, Roms, Roumains, Ruthènes, Serbes, Slovaques, Slovènes et Ukrainiens. En pratique, seuls les communautés allemandes et roms sont suffisamment nombreuses pour espérer pouvoir atteindre ce seuil et obtenir un siège, si tant est qu'une part suffisante de leurs membres s'inscrivent sur les listes dédiées.

Campagne

Viktor Orbán, Premier ministre sortant.

Le Fidesz axe sa campagne sur la lutte contre l'immigration clandestine, posant le terrorisme islamiste comme la conséquence de l’immigration de masse provoquée par la crise migratoire en Europe, transformant l’Europe de l’Ouest et la Scandinavie en zones de non-droit[4].

Durant la campagne, le Fidesz pâtit des déclarations de Kristóf Altusz, secrétaire d'État rattaché au ministère des Affaires étrangères, qui a affirmé dans un journal maltais que la Hongrie avait discrètement accueilli quelque 1 300 réfugiés en 2017[5].

Dans les circonscriptions qui élisent des députés à la majorité simple, plusieurs candidats se retirent afin de ne pas diviser les voix de l'opposition libérale face aux candidats de la majorité sortante[6]. Les libéraux sont majoritaires dans de nombreux arrondissements de Budapest.

Pour de nombreux organes de presse, ces facteurs, associés le jour du scrutin à un taux de participation record au cours des vingt dernières années, laissaient présager un moindre résultat pour Viktor Orbán et le Fidesz[6]. Pourtant, le Fidesz emporte à nouveau la majorité des deux-tiers, avec 48,9 % au scrutin de liste – soit quatre points de mieux qu'en 2014, tandis que le parti nationaliste Jobbik est stable avec 19,3 %[7],[8].

Selon Libération, le parti Jobbik, originellement classé à l’extrême droite, a fait campagne au centre[4]. Au cours des années précédant le scrutin, le succès de sa stratégie de séduction des jeunes électeurs est remarquée[9],[10]. Selon les études, cette part du vote des jeunes est cependant très variable : 53 % des 15-34 ans en selon le Magyar Tudományos Akademia Politikatudományi Intézet ; respectivement 27 % et 29 % chez les 18-24 et 25-44 ans en d'après Republikon), pour une moyenne nationale d'environ 20 %[11],[12].

Lajos Simicska, l'homme d'affaires et de médias qui fut le trésorier du Fidesz et l'allié d'Orban, s'est retourné contre lui lors des dernières années et soutient désormais le Jobbik. En riposte, le gouvernement Orban a ordonné aux entreprises publiques de cesser toute publicité et tout abonnement[Quoi ?][réf. nécessaire]

Forces en présence

Partis Positionnement et idéologie Chef de file Sièges en 2014
Fidesz-Union civique hongroise
Fidesz – Magyar Polgári Szövetség
Droite à extrême droite
National-conservatisme, démocratie chrétienne, conservatisme social
Viktor Orbán
(Premier ministre)
133 députés
Parti socialiste (MSZP)
Szocialista Párt
Centre gauche
Social-démocratie, social-libéralisme
Gyula Molnár 29 députés
Jobbik Droite à extrême droite
Ultranationalisme, irrédentisme, protectionnisme, isolationnisme
Gábor Vona 23 députés
La politique peut être différente (LMP)
Lehet Más a Politika
Centre
Écologie politique
András Schiffer 5 députés
Coalition démocratique (DK)
Demokratikus Koalíció
Centre gauche
Social-libéralisme, europhilie
Ferenc Gyurcsány 4 députés
Ensemble
Együtt
Centre
Social-libéralisme, europhilie
Péter Juhász 3 députés
Mouvement Momentum (MM)
Momentum Mozgalom
Centre
Libéralisme, conservatisme, europhilie
András Fekete-Győr Nouveau
Dialogue pour la Hongrie (PM)
Párbeszéd Magyarországért
Centre gauche
Écologie politique, europhilie, féminisme
Gergely Karácsony
Tímea Szabó
1 député
Parti libéral hongrois (MLP)
Magyar liberális párt
Centre à centre droit
Libéralisme, europhilie
Gábor Fodor 1 député
Parti hongrois du chien à deux queues (MKKP)
Magyar Kétfarkú Kutya Párt
Parti parodique
Absurdisme, satire
Gergely Kovács Nouveau

Sondages

Moyenne lissées des sondages électoraux par parti des élections de 2014 à celles de 2018.

Participation

Les 10 285 bureaux de vote du pays ouvrent le dimanche matin à six heures. La participation est rapidement notée comme très élevée. Les autorités la décomptent à 68,13 % à 18 h 30 contre 54,4 % à la même heure lors des précédentes élections. Devant l'importance des files d'attente, certains bureaux de vote, censés fermer à 19 heures, restent ouverts jusqu'à 21 h 30. Selon plusieurs instituts de sondage, la forte participation augmente la probabilité que les résultats divergent de ceux qu'ils avaient prédits[4].

Résultats

National

Résultats des législatives hongroises de 2018[8],[13]
Partis Scrutin uninominal Proportionnelle Total +/-
Voix % Sièges +/- Voix % +/- Sièges
Fidesz-Union civique hongroise (Fidesz) 2 636 203 47,89 91 en diminution 5 2 824 551 49,27 en augmentation 4,40 42 117 en stagnation
Parti populaire démocrate-chrétien (KDNP) 16 en stagnation
Total Fidesz-KDNP 133 en stagnation
Jobbik 1 276 842 23,20 1 en augmentation 1 1 092 806 19,06 en diminution 1,16 25 26 en augmentation 3
Parti socialiste - Parti du dialogue (MSZP-PM) 622 458 11,22 8 en stagnation 682 701 11,91 en diminution 13,66 12 20 en diminution 10
La politique peut être différente (LMP) 312 731 5,64 1 en augmentation 1 404 429 7,06 en augmentation 1,72 7 8 en augmentation 3
Coalition démocratique (DK) 348 178 6,28 3 en augmentation 2 308 161 5,38 -[a] 6 9 en augmentation 5
Mouvement Momentum (MM) 75 035 1,35 0 Nv. 175 229 3,06 Nv. 0 0 Nv.
Parti hongrois du chien à deux queues (MKKP) 39 763 0,72 0 Nv. 99 414 1,73 Nv. 0 0 Nv.
Ensemble (Együtt) 58 591 1,06 1 en stagnation 37 562 0,66 -[a] 0 1 en diminution 2
Minorité allemande (MNOÖ) 26 477 0,46 en augmentation 0,23 1 1 en augmentation 1
Parti ouvrier hongrois (MM) 13 613 0,25 0 en stagnation 15 640 0,27 en diminution 0,31 0 0 en stagnation
Parti de la famille (CSP) 9 839 0,18 0 en stagnation 10 641 0,19 Nv. 0 0 en stagnation
Parti hongrois de la justice et de la vie (MIÉP) 6 897 0,12 0 en stagnation 8 712 0,15 en augmentation 0,11 0 0 en stagnation
Parti de la santé et du sport (SEM) 5 525 0,10 0 en stagnation 7 309 0,13 - 0 0 en stagnation
Minorité rom (ORÖ) 5 703 0,10 - 0 0 en stagnation
Autres partis 43 256 0,78 0 en stagnation 32 948 0,57 - 0 0 en stagnation
Indépendants 55 612 1,00 1 en augmentation 1 1 en augmentation 1
Suffrages exprimés 5 732 283 98,90
Votes blancs et invalides 63 985 1,10
Total 5 504 543 100 106 en stagnation 5 796 268 100 - 93 199 en stagnation
Abstentions 2 515 905 30,27
Inscrits / participation 8 312 173 69,73

Résultats selon le positionnement gauche / droite :

Majorité absolue
20 8 9 3 133 26
MSZP-PM LMP DK I. Fidesz-KDNP Jobbik

Analyse et conséquences

La participation, plus forte que prévu et initialement considérée comme pouvant être défavorable au Fidesz[14], lui apporte finalement une large victoire avec des résultats plus élevés qu'attendus[15].

La coalition Fidesz-KDNP du Premier ministre sortant, Viktor Orbán, conserve ainsi la majorité qualifiée des deux tiers du parlement, ce qui lui assure de pouvoir continuer à modifier la constitution hongroise sans nécessairement passer par la voie référendaire[16].

À Budapest, Viktor Orbán s'adresse à une foule de ses partisans en liesse[17],[18],[19], leur demandant d'être humbles dans la victoire. Il remercie « les Hongrois qui ont prié pour nous et prié pour moi », la diaspora hongroise d'avoir aidé « à défendre la mère patrie », ainsi que le gouvernement polonais, qu'il qualifie d'ami de la Hongrie. Il parle également des résultats comme d'une chance que la population hongroise vient de se donner pour défendre la Hongrie, affirmant qu'elle n'est « pas encore là où elle veut être, mais s'est engagée dans la voie »[16].

Dans la nuit suivant le scrutin, le dirigeant du Jobbik, Gábor Vona, celui du Parti socialiste, Gyula Molnár, celle de La politique peut être différente, Bernadett Szél, et celui de Ensemble, Péter Juhász, reconnaissent leur défaite et annoncent leur démission[16].

Le lendemain, Viktor Orbán reçoit les félicitations de la chancelière allemande, Angela Merkel[20], du président du Conseil polonais, Mateusz Morawiecki, et du président du Conseil européen, Donald Tusk. Ce dernier assortit néanmoins ses félicitations d'un appel au respect des « valeurs européennes »[21].

Notes et références

Notes

  1. a b c d e f g et h Au seil de la coalition de gauche Unité lors du dernier scrutin.
  2. Les sièges indiqués ici sont ceux élus grâce au scrutin uninominal. Les pourcentages sont ceux du scrutin proportionnel.
  3. Député indépendant

Références

  1. « IPU PARLINE database: HONGRIE (Orszaggyules), Texte intégral », sur archive.ipu.org (consulté le ).
  2. (hu) Loi CCIII. de 2011, Journal officiel hongrois (site Nemzeti Jogszabálytár, Magyar Közlöny Lap- és Könyvkiadó Kft.) : loi électorale hongroise
  3. Nemzeti Választási Iroda National Election Office
  4. a b et c « Législatives en Hongrie : la forte participation jouera-t-elle contre Orbán ? », Libération.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. « Hongrie : des élections à risque pour Viktor Orban », sur Le Monde.fr, (consulté le ).
  6. a et b « Hongrie : un troisième mandat pour Viktor Orban », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  7. « Hongrie : le nationaliste Viktor Orban triomphe aux législatives », sur Le Monde.fr, (consulté le ).
  8. a et b (hu) « Index - Belföld - Választás - Mandátumok », sur index.hu (consulté le ).
  9. (en) « Hungary’s far-right Jobbik party tries to soften image », sur Financial Times, (consulté le ).
  10. (en) « Young and beautiful: the new Hungarian far-right », sur Cafebabel, (consulté le ).
  11. (hu) « A politikai közhangulat 2016 decemberében », sur republikon.hu, (consulté le ).
  12. (en-US) « Understanding Jobbik's appeal to Hungarian youth », The Budapest Beacon,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  13. (hu) « Commission électorale nationale »
  14. (en) « Hungary’s Orban claims victory as nationalist party takes sweeping poll lead », sur timesofisrael.com, (consulté le ).
  15. (en) « Orban Zeroes In on Soros-Backed NGOs After Dominating Ballot », sur Bloomberg.com, (consulté le ).
  16. a b et c (en) « Elections Hungary live: FIDESZ wins two thirds super majority amidst historic turnout », sur Hungarian Free Press, (consulté le ).
  17. « Hongrie : le parti de Viktor Orban remporte une écrasante victoire aux élections législatives », sur Franceinfo, (consulté le ).
  18. « En Hongrie, Viktor Orban remporte son troisième mandat consécutif », sur www.lesechos.fr, (consulté le ).
  19. « Hongrie: la passe de trois pour Viktor Orban », ladepeche.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  20. (en) « EU far-right hails Hungary anti-migrant PM victory », France 24,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  21. « L'UE félicite Orban mais le met en garde », LExpress.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).

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