Fille de Segenax, Velléda était de la nation des Bructères[1] et habitait une tour sur la Lippe. Elle exerçait une influence immense sur toutes les populations germaniques : ainsi Tacite rapporte que les habitants de Colonia Claudia Ara Agrippinensium (Cologne) lui confièrent l'arbitrage de leur conflit avec les Tenctères, une nation germanique habitant hors du limes. Parce qu'elle était considérée comme une déesse vivante, en communication constante avec les dieux, les envoyés des deux parties ne furent pas admis en sa présence, et la prophétesse rendit son jugement via un intermédiaire[2].
Tacite[3] lui fait jouer dans le soulèvement des Bataves contre Vespasien en 70 un rôle aussi important que celui de Civilis. Mais, on ne sait si elle prophétisa simplement la rébellion ou eut un rôle plus actif[4].
Une démonstration de force de neuf légions placées sous le commandement de Caius Licinius Mucianus mit fin à la rébellion. Le général Petilius Cerialis captura Civilis, mais il traita les rebelles avec clémence, et Velléda ne fut pas inquiétée.
Un bref extrait de Stace[5] permet d'établir que Velléda, prisonnière en 77 ou 78 du général romain Caius Rutilius Gallicus, fut amenée à Rome, où elle vécut, semble-t-il, quelques années. Une épigramme grecque retrouvée à Ardea, au sud de Rome, se moque de ses pouvoirs magiques[6],[4].
Une légende reprenant cet épisode de la biographie de Velléda circulait au XIXe siècle dans la région de Mortain. Elle a laissé son nom à un dolmen[7]. On note la présence de Lètes lors de la période romaine, ainsi que des toponymes d'origine germanique (Bréffeland). La région a été un lieu de passage et un lieu de brassage de légendes (Chrétien de Troyes à Domfront[8], puis Chateaubriand) et la légende n'est pas datée, ce qui ne permet pas de statuer sur son origine et ses bases.
Postérité
Chateaubriand s'inspirera du personnage pour créer son héroïne des Martyrs Velléda, druidesse vierge de l'île de Sein, véritable symbole de la femme gauloise[9].
Tacite, Historiae, IV, 61 sqq. la réputation de Velléda est expliquée comme un effet de la superstition des Germains et de la chance qu'elle a eue de prédire le désastre des légions romaines.
Benedikte Naubert(en), Velleda, ein Zauberroman (« Velléda, un roman magique »), 1795 ;
Amalie von Helwig(de), Die Symbole (« Les Symboles »), 1814, où la prophétesse apparaît sous le nom Welleda, dans une tentative pour germaniser son nom ;
Anatole France : dans le chapitre VI de M. Bergeret à Paris (1901), la statue de Velléda par Maindron (cf. infra) est décrite (associée à la nostalgie du temps où elle se trouvait dans la Pépinière du Luxembourg détruite depuis), comme une figure romantique opposée au « buste du Président de la République ».
Ferdinand Cheval, dans son Palais Idéal, désigne la statue de femme entourée des géants César et Vercingétorix comme étant une représentation de la druidesse Velleda.
La figure de proue du Bretagne, vaisseau rapide mixte de 130 canons à trois ponts datant de 1855, représentait Velléda, la faucille en main, et le front ceint d'une couronne de chêne.
Jean-Baptiste Camille Corot, Velléda (vers 1868 - 1870, musée du Louvre) : ce n'est que plus tard que cette figure mélancolique se détachant sur un fond de paysage brumeux fut baptisée Velléda.
↑Fougères (Ille-et-Vilaine, France) Bibliothèque municipale, Chateaubriand: exposition organisée à l'occasion du 2e centenaire de la naissance de l'écrivain, par la ville de Fougères, avec le concours du Syndicat d'initiative et réalisée par la Bibliothèque municipale, Fougères, Salle d'exposition ... juillet-septembre 1968, la Ville, (lire en ligne)