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Le Tasahlite ou kabyle du sahel (en berbère ⵜⴰⵙⴰⵃⵍⵉⵜ Tasaḥlit) est un ensemble de dialectes berbères spécifique à la partie berbérophone du massif des Babors en Kabylie (Nord-est de la Wilaya Sétif), du Sahel-est de la wilaya de Béjaïa, et de l'extrême ouest et sud -ouest de la wilaya Jijel , qui se désigne elle-même comme "Isahliyen / Asahliyen (masculin)", "Tisahliyan / Tisahliyin (féminin)" - les habitant(e)s du Littoral-. Toutefois, certains préfèrent désigner leur langue par le nom de leur tribu ou de leur région, comme c'est le cas à Amoucha, Aokas, Kherrata, dont les dialectes sont sensiblement différents. Les langues berbères pratiquées à partir du sud de Kherrata sont quant à elles classées comme appartenant au dialecte chaoui des Amouchas.
Localisation
Ces locuteurs berbérophones occupent les régions extrême-orientales de la Kabylie et septentrionales du pays chaoui :
Communes orientales de la wilaya de Béjaïa telles que Melbou, Aokas, Souk El Ténine, Kherrata. Schématiquement, on considère que le tasahlit est parlé à partir de la commune de Tizi N'Berber allant vers l'est, même si les villages d'Aït Slimane, d'Aït Melloul et d'Aït Amrous relevant des communes de Boukhelifa et Tichy dont le parler est plutôt le kabyle bougiotte, ont aussi quelques singularités proches du tasahlit.
Ces territoires correspondent historiquement à celui de certaines fractions de la confédération berbère médiévale des Kutamas dont le territoire s'étend sur le littoral nord-est algérien jusqu'aux limites Est de la ville de Annaba (Bône).
Caractéristiques
Les spécificités du parler dit tasaḥlit en comparaison aux variantes Kabyle (taqbaylit) et Chaoui (hacawit) - pourtant du même voisinage - sont nombreuses. Elles sont d'ordre syntaxique (absence de prétérit négatif, valeurs des différentes particules d'aoristes, etc.), phonétique (quasi absence de consonnes affriquées, phénomènes de correspondance /r/ > /l/ et /i/ > /a/, etc.), mais aussi lexical (une part significative du lexique de base ne correspondant pas à celui des variantes voisines, voir liste ci-dessous). Cette variante de la langue tamazight-nord comporte en son sein même différents parlers marqués par leurs proximités géographiques respectives avec les variantes voisines : au nord avec la langue kabyle et au sud avec le chaoui.
En tasahlite la négation se pose de différentes manières : ul ... ula (par exemple dans le parler des Aït Mhend d'Aokas) ; ul ... ani (par exemple dans le parler des Aït Meraï à Kheratta) ; ul ... ka (parlers des Aït Segoual à Melbou, des Aït Nabet, Aït Ali et Aït Issad à Ziama-Mansouriah) ; ul ... kra (Ait smail). Au lieu de ur ... ara pour le Kabyle, et ul ... ča pour le chaoui. Parfois on utilise un seul morphème (selon les localités : attḥa ; ḥa ; ula ; xa ; axa, etc.) en début de phrase afin d'exprimer la négation, par exemple attḥa ẓraɣ[2] (je ne vois pas)
Très peu d'études ont à ce jour été menées sur cette variante du berbère, encore pratiquement inconnue. Ce qui conduit beaucoup de ses locuteurs - en situation d'insécurité linguistique intense - , à l'abandonner au profit de l'arabe dialectal algérien, ou des variantes voisines plus prestigieuses (c'est le cas des habitants de certains villages à Tichy, qui abandonnent petit à petit les singularités de leurs parlers pour le kabyle de Bejaia).
Phonologie
Voyelles
Tout comme le Kabyle, le Tasahlite comporte trois voyelles, plus une voyelle neutre e :
a est moins ouvert qu'en français, entre le « a » et le « e » [æ]
i se prononce entre le « i » [i] et le « é » français [e]
u se prononce « ou » [u].
Le son e[ə] (comme dans l'anglais « children »), appelé ilem, est un schwa. Il n'est pas considéré comme une véritable voyelle, mais a pour but de faciliter la lecture. Historiquement, il est le résultat d'une réduction ou d'une fusion des trois voyelles. La réalisation phonétique des voyelles est influencée par les consonnes voisines. Par exemple, les consonnes emphatiques entraînent une prononciation plus ouverte : aẓru (pierre) se lit [az̴ru] tandis qu' amud (grain) donne [æmud][3].
Consonnes
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En tasahlite la consonne "ţ"(ts) est prononcée comme un T ordinaire, contrairement à ce qui est courant chez les autres Kabyles.
BERKAI, Abdelaziz. Les spécificités morphosyntaxiques du parler kabyle d'Aokas, Revue de l'IRACAM, 6, 2011, p. 95-114
KIRECHE, Ouerdeya. Étude comparative du vocabulaire fondamental entre les parlers de S.A.B et S.E.T, Analyse sémantique et morphologique (UMMTO)
GARAOUN, Massinissa. Amazigh et arabe dans le massif des Babors (Kabylie orientale, Algérie) : contribution à la typologie des contacts linguistiques, Thèse doctorale de l'Ecole Pratique des Hautes Études, Paris, 2024.
GARAOUN, Massinissa. La négation en berbère tasahlit: à propos des éléments de négation verbale d’étymons arabes. TIPA. Travaux interdisciplinaires sur la parole et le langage, 2021, no 37.
GARAOUN, Massinissa. Variation et classification en Berbère-Nord: Le cas des parlers tasaḥlit. In : Rencontres des Jeunes Chercheurs en Sciences du Langage 2019. 2019.
Annexes
Djeha et le « Bouzellouf »
Tasahlit
Taqbaylit
Français
Yiǧǧen ubrid, Jeḥḥa ikfa-yas-ed i baba-nnes fṛank, amek da seɣ azellaf. Isɣa-ya, icca aksum-is meṛṛa, qqimen dayen iɛekran. Iwwi-yas-ed i baba-nnes. Ma y-iẓra inna-yas : " d acu d waha ? " Inna-yas : " d azellaf".
-Ay amcum, ayen-hen imejjan-is ?
- Ttuɣ-a d amjuj.
-Ayen-hent taṭṭiwan-is ?
- Ttuɣ-a d buderɣul.
-Ayen-hu ales-is ?
- Ttuɣ-a d agugam.
-D tasrat n ukerkur-is ayen-hi?
- Ttuɣ-a d aṣelduɛ.
Yiwen webrid, Ǧeḥḥa yefka-yas-ed i baba-s frank, i wakken ad yaɣ buzelluf. Yuɣa-t, yečča aksum-ines akk°, teqqim kan lǧifa. Yewwi-yas-ed i baba-s. Mi t-yeẓra yenna-yas : " d acu d wagi ? " Yenna-yas : " d buzelluf".
-Ay amcum, anda llan imeẓẓuɣen-ines ?
- Yella d aɛeẓẓug.
-Anda llan allen-is ?
- Yella d aderɣal.
- Anda yella yiles-is ?
- Yella d agugam.
-D weglim weqerru-yines anda yella ?
- Yella d aferḍas.
Un jour, le père de Jehha lui a donné un franc, pour qu'il achète une tête de mouton. Il l'a acheté, ensuite il a mangé toutes la viande. Seule une carcasse vide a été laissée, il l'apporta à son père. Puis, quand il aperçut, il s'écria: «Qu'est-ce que c'est? Jehha a répondu: « la tête d'un mouton".
Bachir Bessai, « Insécurité linguistique en contexte minoritaire algérien : enquête sociolinguistique auprès des locuteurs de Tasahlit », Multilinguales, no 11, (ISSN2335-1535, DOI10.4000/multilinguales.4102, lire en ligne)
Garaoun Massinissa, La négation en berbère Tasahlit : à propos des éléments de négations verbales canonique d’étymons arabes, TIPA. Travaux interdisciplinaires sur la parole et le langage [En ligne : https://journals.openedition.org/tipa/4253], 37, 2021
Garaoun Massinissa, Variation et classification en Berbère-Nord : Le cas des parlers tasahlit, 19èmes Rencontres Jeunes Chercheurs en Sciences du Langage, Université Paris-Sorbonne [En ligne : https://hal-univ-paris3.archives-ouvertes.fr/hal-03192670/document], Paris, 2019.