En 1864, l'Empire ottoman entreprend de vastes réformes administratives territoriales inspirées du modèle centralisé napoléonien, remplaçant les provinces de l'Empire par vingt-sept vilayets, prenant le nom de leur chef-lieu. Au terme de plusieurs réaménagements (en 1878, 1880 et 1895) l'Anatolie orientale se voit finalement découpée en six vilayets, visant ainsi à diluer la population arménienne dans d'autres peuples afin qu'elle ne constitue plus une majorité compacte dans une circonscription, pouvant justifier un statut de plus grande autonomie[14]. Le terme « Six provinces arméniennes » a d'abord été utilisé au congrès de Berlin en 1878, où l'Empire ottoman devait s'engager à y faire des réformes.
La plupart des historiens occidentaux modernes conviennent que le recensement officiel ottoman de 1914 sous-estime le nombre des minorités ethniques, dont celui des Arméniens[17]. Le recensement ottoman ne dénombre pas les groupes ethniques, mais les groupes religieux ; est donc considéré comme Arménien un adepte de l'Église apostolique arménienne, les Arméniens qui ont prétendu être musulmans ont été comptés en tant que musulmans, tandis que les protestants arméniens — comme les Grecs pontiques, les Grecs du Caucase et les Lazes — ont été comptés dans Autres.
Groupes religieux
Bitlis
Diyarbekir
Erzurum
Mamouret-ül-Aziz
Sivas
Van
Total
%
Musulmans1
309 999
492 101
673 297
446 376
939 735
179 380
3 040 888
79,6
Arméniens
119 132
65 850
136 618
87 862
151 674
67 792
628 928
16,5
Autres
44 348
4 020
5 797
4 047
78 173
11 969
148 354
3,9
Total
473 479
561 971
815 712
538 285
1 168 582
259 141
3 818 170
100
1 Le recensement ottoman ne donne pas d'informations pour les groupes ethniques musulmans séparés comme les Turcs, les Kurdes, les Adyguéens, etc.
Cartes
Population arménienne, 1893-1896.
Population arménienne dans les six vilayets.
Les plus grandes villes
Tous les chiffres sont en date du début du XXe siècle.
↑ a et bTraité de San Stefano du , art. 16 : « Comme l'évacuation, par les troupes russes, des territoires qu'elles occupent en Arménie et qui doivent être restitués à la Turquie, pourrait y donner lieu à des conflits et à des complications préjudiciables aux bonnes relations des deux pays, la Sublime Porte s'engage à réaliser sans plus de retard les améliorations et les réformes exigées par les besoins locaux dans les provinces habitées par les Arméniens et à garantir leur sécurité contre les Kurdes et les Circassiens. »[10].
↑ a et bTraité de Berlin du , art. 61 : « La Sublime Porte s'engage à réaliser, sans plus de retard, les améliorations et les réformes qu'exigent les besoins locaux dans les provinces habitées par les Arméniens et à garantie leur sécurité contre les Circassiens et les Kurdes. Elle donnera connaissance périodiquement des mesures prises à cet effet aux puissances qui en surveilleront l'application. »[12].
↑Gustave Meyrier, Les massacres de Diarbékir : Correspondance diplomatique du vice-consul de France (1894-1896), L'Inventaire, coll. « Valise diplomatique », , 259 p. (ISBN978-2-910490-30-0, lire en ligne), p. 41
↑Steven T. Katz,The Holocaust in Historical Context, 1994, p. 86...indique (sur la base des estimations britanniques de 1919) que si les données ottomanes étaient généralement fiables, ils ont sous-estimé la population arménienne en 1914...
[Ersal 2016] (tr) Aytekin Ersal, « Milli bütünlüğün demokratik temsille inşası sürecinde Erzurum Kongresi » [« Le Congrès d'Erzurum dans le processus de construction de l'unité nationale par la représentation démocratique »], SDÜ fen-edebiyat fakültesi sosyal bilimler dergisi, no 38, , p. 15-38 (résumé, lire en ligne, consulté le ).
[Casà 2016] Giancarlo Casà, « Les massacres arméniens de à Diyarbekir à travers le témoignage du vice-consul Gustave Meyrier », Études arméniennes contemporaines, no 8 : « « Varia » », , p. 1re partie : « Études », art. no 4, p. 91-118 (DOI10.4000/eac.1175, résumé, lire en ligne, consulté le ).
[Özbek 2012] (en) Nadir Özbek, « The politics of taxation and the Armenian Question during the Late Ottoman Empire, - » [« La politique fiscale et la Question arméniennes pendant l'Empire ottoman tardif »], Comparative Studies in Society and History, vol. 54, no 4, , p. 2e partie : « State effects in the tribal zone », art. no 2, p. 770-797 (DOI10.1017/S0010417512000412, lire en ligne, consulté le ).
[Papazian 2017] Taline Papazian, « Engagement militaire et droits politiques des Arméniens : la Légion d'Orient, exemple de négociations entre une nationalité non souveraine et ses Alliés européens », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no 141 : « Par delà le théâtre européen de 14-18 : l'autre grande guerre dans le monde musulman », , p. 1re partie, art. no 8, p. 121-137 (résumé, lire en ligne, consulté le ).
[Prévost 2016] Stéphanie Prévost, « L'opinion publique britannique et la Question arménienne (-) : quelles archives pour quel récit ? », Études arméniennes contemporaines, no 8 : « Varia », , p. 1re partie : « Études », art. no 3, p. 51-90 (DOI10.4000/eac.1170, résumé, lire en ligne, consulté le ).