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René-Antoine Ferchault de Réaumur, appelé par convenance Réaumur, né le 28 février 1683 à La Rochelle et mort le 17 octobre 1757 au château de la Bermondière, est un physicien et naturaliste français. Jeune scientifique admis à l'Académie des sciences en 1708 grâce à un mémoire de géométrie, il s'intéresse avec persévérance aux développements des arts et métiers. Aussi, l'Académie le charge de diriger l'édition de la Description générale des Arts et Métiers. Mais l'homme ne dédaigne pas l'histoire naturelle des mollusques, crustacés, insectes et oiseaux[n 2]. Réaumur est un observateur remarquable des matériaux du vivant : il est fasciné par la nacre et les fils d'araignées. En particulier, il approuve la nature animale — et non végétale — des coraux et madrépores. Par la multiplicité de ses intérêts — il propose aussi bien une manière d'éteindre les incendies et un moyen de mettre les carrosses en état de se tirer des ornières — que la ferveur encyclopédiste reprend surtout après 1750, il laisse ainsi son nom à la postérité.
Suivant pas à pas les progrès de la métallurgie, il fonde les bases de la sidérurgie scientifique dès les premières années de la décennie 1720 et la métallographie en 1724. Il vulgarise la possibilité de transformer la fonte en acier dès 1722 et promeut le fer blanc. Familier de la mise au point des fours, il écrit sur l'art du verrier et invente en 1729 un verre blanc opaque, nommé « porcelaine de Réaumur » qui n'est qu'un verre dévitrifié par chauffage et refroidissement. Ses recherches sur la vraie porcelaine ouvrent la voie aux travaux de Darcet et Macquer.
La difficulté des mesures physiques est un aiguillon pour ses recherches physiques. Avec l'étude de la température, il propose vers 1730–1731 un modèle de thermomètre à alcool sur une ligne de 80 parties égales entre la température de congélation de l'eau et la température d'ébullition de l'éthanol[sp 1]. Dans le cadre de ses travaux sur la régulation thermique, il met au point et publie en 1749 un incubateur artificiel nommé « four à poulets » ainsi qu'un moyen de conserver les œufs par enduction d'un corps gras. Il rédige un volumineux ouvrage de mémoires sur l'entomologie en six volumes in-quarto publiés de 1734 à 1742. Il est aussi l'un des précurseurs de l'éthologie, ou étude des comportements animaliers.
La famille Ferchault est originaire de Vendée[1] et possède des terres à Pouzauges.[réf. nécessaire]
Jean Ferchault, son grand-père paternel, est receveur des douanes à Luçon[réf. nécessaire]. Il achète vers 1639 le château de Réaumur[1], construit en 1576 pendant la Renaissance (ce domaine est aujourd'hui le « Manoir des Sciences » de Réaumur, présentant au public les différents travaux du scientifique)[2].
Son père est René Ferchault, conseiller au présidial de La Rochelle — une fonction surtout honorifique. Sa mère est Geneviève Bouchel[sp 2], fille d'un juge consul de Calais. Leur mariage a lieu le 28 avril 1682 à l'église Saint-Barthélemy de la Rochelle. Ils habitent dans la rue des Herbiers (actuelle rue des Augustins). René Antoine y naît le 28 février 1683[1].
Son père meurt le 20 août 1684[1], tandis que son frère Jean-Antoine (1684-1719), naît le 1er octobre de la même année[3].
Il fait des premières classes chez les oratoriens de La Rochelle[3], puis sa philosophie au collège jésuite de Poitiers. En 1699, il répond à l'appel de son oncle Gabriel Bouchel[3], chanoine de la Sainte-Chapelle de Bourges[sp 2], qui l'invite à poursuivre des études de droit à Bourges[3]. Il s'installe chez cet oncle avec son cadet Jean[sp 2] (Jean-Antoine[réf. nécessaire] ? ou/et Honoré ?).
Quatre ans plus tard en 1703, il arrive à Paris chez son cousin Hénault, fermier général, père du jeune Charles Hénault[n 3] et bien intégré dans la société intellectuelle de Paris : il a fréquenté Molière, Lully, Thomas Corneille (le frère du célèbre Pierre Corneille)… et chez lui on rencontre entre autres Fontenelle, secrétaire perpétuel de l'académie royale des sciences, savant et homme d'esprit[3]. Constatant le goût de René-Antoine pour les mathématiques, Hénault lui fait donner des leçons dans cette matière ; mais le maître est tôt dépassé. Hénault le présente alors à Jean-Paul Bignon (1662-1743), président de l'Académie des sciences, et René-Antoine fait la connaissance de Pierre Varignon, ardent défenseur du calcul différentiel. Il travaille avec ce dernier jusqu'à être admis comme son élève au sein de l'académie des sciences le 3 mars 1708[3].
Croyant convaincu, il passe plus tard beaucoup de temps dans ses domaines pour y observer la nature, qui reflète les merveilles de Dieu[4].
Il meurt le 17 octobre 1757[sp 3] dans son domaine de la Bermondière à Saint-Julien-du-Terroux (Mayenne).
Le 14 mars 1708 il obtient la place d'élève auprès de Pierre Varignon, rendue vacant par la promotion de M. Saurin au statut d'associé[sp 4]. Noter qu'une liste des membres de l'académie le cite comme tel depuis 1706 (il y est listé comme « méchanicien »)[sp 5].
Dès le 19 mai 1708, il lit devant l'Académie une communication sur un problème de géométrie, Manière de trouver une infinité de lignes courbes nouvelles, en faisant parcourir une ligne quelconque donnée, par une des extrémités d'une ligne droite donnée aussi, et toujours placée sur un même point fixe[sp 6], où il utilise une méthode mise au point par Louis Carré (1663-1711). Il présente l'année suivante deux autres mémoires portant sur le même sujet[sp 7],[sp 8]. Il est considéré comme le créateur de la notion de développée imparfaite.
Ce sont les seuls travaux de Réaumur en mathématique géométrique. En novembre 1709, il présente un mémoire intitulé De la formation et de l'accroissement des coquilles des animaux tant terrestres qu'aquatiques, soit de mer, soit de rivières[sp 9]. Ce travail, où il précise le mode de croissance des coquilles de mollusques, inaugure ses recherches sur les invertébrés. Méry lui ayant opposé deux contestations en 1710 sur sa théorie de formation des coquilles, Réaumur lui répond en 1716 avec ses Éclaircissements de quelques difficultés sur la formation des coquilles[sp 10]. Il présente en plusieurs mémoires consacrés aux invertébrés (1711[sp 11], 1712[sp 12], 1717[sp 13]), sur la soie des araignées (1710[sp 14]), les écrevisses (1712[sp 15], 1718[sp 16]), les guêpes (1719[sp 17])…
La mort de Louis Carré lui permet d'obtenir le titre de pensionnaire mécanicien à l'Académie des sciences, le 14 mai 1711.[réf. nécessaire] Il participe dès lors activement à toutes les activités de l'Académie. Il est nommé pour la première fois sous-directeur de l'Académie en 1713 (puis en 1718, 1722, 1723, 1726, 1730, 1734, 1739, 1746 et 1752) et directeur l'année suivante (ainsi qu'en 1716, 1717, 1720, 1724, 1727, 1731, 1735, 1740, 1747 et 1753).
Ses communications se succèdent : en 1712, il s'intéresse aux coquillages, à la reproduction des écrevisses et aux algues. En 1713, il se consacre à la botanique. Parallèlement à ses propres recherches, il est chargé par l'Académie de faire paraître une Description des Arts et Métiers. En 1711, il fait paraître ses deux premières études, sur la fabrication de l'ardoise et des fausses perles[sp 18], puis, l'année suivante, sur les techniques utilisées pour la fabrication de miroirs, et, en 1713, sur le travail du doreur. Ces premières évaluations de l'artisanat français, où il propose souvent des améliorations techniques, sont rassemblées et publiées par l'Académie de 1761 à 1782 en 18 volumes.
Dans cette série s'insèrent ses premières observations en métallurgie, intérêt activement soutenu par le Régent Philippe d'Orléans (1674-1723) qui constate l'importation d'acier croissante du royaume. Entre 1720 et 1722, Réaumur présente à l'Académie dix-huit mémoires consacrés à ce sujet. L'Académie des sciences décide de les rassembler et de les faire paraître en deux parties sous les titres L'Art de convertir le fer forgé en acier et L'Art d'adoucir le fer fondu ou l'art de faire des ouvrages de fer fondu aussi finis que de fer forgé[sp 19]. Dans son Art de convertir le fer forgé, Réaumur exprime avec force les principes qui vont désormais guider les académiciens et selon lesquels il s'agit de faire progresser les connaissances et de contribuer au développement de la communauté scientifique internationale[n 4]. En 1721, le Régent le récompense pour ses recherches qui ouvrent une solution pratique à l'économie nationale en lui attribuant 12 000 livres de rente annuelle[5], dont il fait cadeau à l'Académie.[réf. nécessaire]
En 1725, il fait paraître son Explication des principes établis par M. de Réaumur pour la construction des thermomètres dont les degrés soient comparables[sp 20]. En 1734, il publie le premier tome de ses Mémoires pour servir à l'Histoire des Insectes. Le deuxième tome paraît en 1736, le troisième en 1737, le quatrième en 1738, le cinquième en 1740, le sixième en 1742.
En 1742, il devient membre de l'Académie royale des sciences et des lettres de Berlin.[réf. nécessaire]
En 1749, il publie l'Art de faire éclorre et d'élever en toute saison des Oiseaux Domestiques de toutes espèces[sp 21].
En 1751 Pierre Baux, célèbre médecin, météorologiste, botaniste et naturaliste, devient son correspondant à l'Académie.[réf. nécessaire]
En plus de ses enquêtes approfondies sur les arts et métiers, Réaumur couvre toutes les facettes de la physique et de l'histoire naturelle de son temps, qui incluent ce qui deviendra la géologie, la physique appliquée, la biologie... ou plus précisément l'éthologie, la physiologie, la génétique, l'entomologie...
En 1718, Réaumur lance un inventaire des rivières aurifères de France[sp 22].
Il s'intéresse à la fabrication de l'acier et tente d'améliorer la médiocre production française. Le premier, il démontre que l'acier n'est pas du fer épuré, comme on le pensait jusqu'alors. Grâce à ses recherches il démontre la possibilité de transformer la fonte en acier, par addition de fer métallique ou d'oxyde. Il étudie également les traitements thermiques de l'acier : cémentation et trempe en inaugurant l'utilisation du microscope pour l'étude de la constitution des métaux, créant la métallographie. Il publie en 1722 « L'Art de convertir le fer forgé en acier » et « L'Art d'adoucir le fer fondu[sp 19] ». Il se consacre en effet à la mission d'appui au développement industriel confiée à l'Académie par Louis XIV, qui comprend notamment l'examen des inventions et la publication de la Description des Arts et Métiers[4].
Il est le premier à avoir fabriqué de l'acier tel qu'il est défini aujourd'hui, ce qui le place parmi les précurseurs de la révolution industrielle. C'est cette découverte qui lui vaut la pension de 12 000 livres de la part du Régent[5].
Il met au point un procédé économique de fabrication du fer-blanc en 1725 (Principes de l'art de faire le Fer blanc[sp 23]) et prend même la direction d'une usine[4]. Tout d'abord, il préconise de choisir les feuilles d'acier assez souple, de les décaper avec une solution acide (vinaigre, eau de seigle ?), puis de les frotter au sable avant de les étamer. Il indique également que le bain d'étain doit être recouvert d'une couche de suif pour limiter la formation d'impuretés.
Réaumur se penche également de 1727 à 1729 sur la fabrication de la céramique et de la porcelaine[sp 24],[sp 25]. Il découvre le moyen de fabriquer du verre dévitrifié à base d'opaline ; c'est le verre blanc opaque connu depuis sous le nom de « porcelaine de Réaumur »[sp 26]. Il donne le procédé pour transformer le verre commun en cette sorte de porcelaine dans le mémoire qu'il lit à l'Académie des sciences en 1739[sp 27].
Réaumur présente en juillet 1723 à l'Académie Fabrique des ancres, avec des notes et des additions de Duhamel du Monceau. Cet ouvrage est publié en 1761 dans les Descriptions des Arts et Métiers, faites ou approuvées par messieurs de l'Académie Royale des Sciences.
Il s'est aussi intéressé à la force de traction des câbles et cordages (1711[sp 28]) pour la marine.
Réaumur expose, dans un mémoire de 1730[sp 1], l'idée du premier thermomètre comparable à alcool, qui immortalisera son nom. L'anglais Robert Hooke avait déjà eu l'idée d'un thermomètre à alcool avec la température de congélation de l'eau comme graduation zéro. Réaumur a calibré son thermomètre de 0 à 80, entre le point de congélation de l'eau et le point d'ébullition de l'« esprit-de-vin » (alcool), qu'il confondait avec le point d'ébullition de l'eau. Noter que le point d'ébullition de l'éthanol est très précisément de 78,4 °C (en degrés Celsius) et qu'un thermomètre à alcool ne permet donc pas de mesurer la température d'ébullition de l'eau. (Voir aussi l'article « échelle Réaumur »). En 1733[sp 29], 1734[sp 30], 1735[sp 31], 1736[sp 32], 1737[sp 33] et 1738[sp 34] il présente à l'Académie les résultats d'observations faites avec ce thermomètre, comparés entre des relevés faits à l'étranger et les mêmes observations à Paris[sp 29] et autres lieux de France[sp 32]. Certains de ces lieux étranger sont la Réunion (île de Bourbon), l'île Maurice (île de France) et Madagascar, en liaison avec Cossigny — un correspondant de l'Académie —[sp 29] ; d'autres sont Alger avec le consul de France M. Taitbout[sp 32],[n 5], d'autres encore sont Pondichéry et le Sénégal[sp 34].
Dans la pratique expérimentale, l'usage du thermomètre de Réaumur est un progrès notable avant le thermomètre centigrade.
En 1752, il étudie l'influence du suc gastrique dans la digestion en utilisant des petits tubes percés de trous remplis de viande, qu'il fait avaler puis régurgiter par une buse, un rapace domestiqué dans ce but. Il montre ainsi que la viande est digérée par action chimique, et non par broyage mécanique selon la théorie des iatromécaniciens[n 6]. Il complète sa démonstration avec son second mémoire, où il fait avaler des morceaux d'éponge pour obtenir des échantillons de suc gastrique in vivo durant la digestion[6].
Ces travaux seront poursuivis par Lazzaro Spallanzani (1729-1799)[6].
Réaumur nie la génération spontanée et étudie les animalcules de la liqueur spermatique.
Il est l'un des pionniers de la génétique avec ses recherches sur l'hybridation par isolement d'un caractère. En 1751, il propose un projet d'expériences jamais réalisées. Il suggère de se procurer deux sortes de poules, toutes différentes des poules ordinaires, les unes avec un grand doigt supplémentaire, les autres avec un croupion atrophié, afin de déterminer « si c'est à la femelle ou si c'est au mâle que le germe a appartenu originairement ». À cette époque se posait la question du préformisme préexistant soit dans la femelle, soit dans le mâle[7].
Ce type d'expérience sera repris, près d'un siècle plus tard, par Gregor Mendel avec des pois.
En 1711[sp 35] et 1712[sp 36], il donne des descriptions minutieuses des « fleurs » et « graines » de plusieurs espèces d'algues marines appartenant au genre Fucus et à quelques autres. Plus tard, en 1727, il s'intéresse aux algues bleues de genre Nostoc
Réaumur est en outre l'auteur de la première méthode botanique à laquelle on ait pu donner le nom de système.
En 1720 Réaumur publie une étude sur les faluns de Touraine[n 7]. Il suppose qu'un vaste golfe marin a existé, reliant l'océan à la Manche, sans rapport avec le Déluge[sp 37].
Il collabore étroitement avec Jean-Étienne Guettard, étant en mesure de lui fournir de nombreux renseignements sur la nature des terrains du royaume, nécessaires pour l'élaboration des premières cartes « minéralogiques »[8], ancêtres des cartes géologiques.
En 1709, il effectue des études et recherches sur la formation et l'accroissement du test des coquillages.
Il fait connaître, en 1710, les moyens de locomotion des étoiles de mer, des orties de mer, des coquillages et d'autres mollusques ou zoophytes, que l'on croyait invariablement fixés au rocher qui les a vus naître. Il montre qu'ils peuvent se déplacer par un mouvement progressif de translation[sp 38].
Il retrouve en 1711 un coquillage dont le suc fournit une teinture analogue à la pourpre des Anciens ou pourpre de Tyr[sp 39].
En 1712, il démontre la capacité de régénération des pattes des crustacés comme les écrevisses, les homards et les crabes, dont les membres repoussent après section ou mutilation.
Sur la côte du Poitou, il se livre en 1715 à des observations intéressantes sur la reproduction d'un mollusque ressemblant à une limace et portant le nom de lièvre ou chat marin.
Plus tard, en 1717, il examine la formation même des perles dans les moules d'eau douce, et cherche à forcer les coquillages à en produire.
En 1723, il observe le phénomène de bioluminescence de quelques coquillages, comme les dails ou pholades[sp 40].
En 1742, il démontre ce qui avait été entrevu par Peyssonnel (1694–1759), à savoir que les coraux et les madrépores ne sont pas des plantes, mais le résultat du travail d'une classe d'animalcules présentant des analogies avec les méduses et les anémones de mer (Cnidaria)[sp 41].
Dès le début de ses recherches, il se passionne pour les invertébrés et notamment les insectes. En 1710, il écrit un mémoire intitulé Examen de la soie des Araignées[sp 14] dans lequel il étudie une proposition de François Xavier Bon de Saint Hilaire (1678–1761), président de la Cour des comptes de Montpellier, qui s'intéresse à la possibilité d'utiliser la soie d'araignée à la place de celle produite par le ver à soie. Réaumur montre que la soie d'araignée est plus onéreuse à produire tout en étant moins belle.
Il s'intéresse à la vie des fourmis, que les encyclopédistes de L'Encyclopédie ont dédaignée. Toutefois, son Histoire des Fourmis est restée inédite jusqu'au XXe siècle. Par contre, son Histoire des Guêpes est publiée dès 1719[sp 17]. Il observe le système digestif des abeilles et des guêpes.
Il publie de 1734 à 1742 les six volumes de ses Mémoires pour servir à l'histoire des insectes; l'exemplaire du duc d'Orléans de cet ouvrage, qualifié "d'étape majeure dans la constitution de l'entomologie comme science", a été vendu aux enchères le 29 mars 2024 à Paris-Drouot pour la somme de 29 900 euros ( reprod. coul. dans le n° 15 de "La Gazette Drouot" du 12/04/2024, p.102).
Par ces mémoires et observations, il est aussi considéré comme le fondateur de la parasitologie des invertébrés. Il découvre divers parasites d'insectes, comme le diptère Braula coeca chez les abeilles (1740), ou le nématode entomopathogène Sphaerularia bombi (en) chez les reines de bourdons (1742). Réaumur inaugure ainsi l'étude des insectes entomophages, qui serviront de moyens de lutte biologique contre les insectes nuisibles au début du XXIe siècle[9].
Le principe directeur de ce grand travail semble avoir été un adage bien connu à l'époque classique : Natura maxime miranda in minimis [« la Nature est la plus admirable dans les plus petites choses »]. Mais il est facile de traiter avec ironie un tel principe. Buffon, par exemple — qui déteste Réaumur — ne s'en prive pas, et c'est pour ce dernier qu'il écrit la célèbre phrase « aux petits esprits les petits objets », qui devient une sorte de lieu commun à l'époque des Lumières.
Réaumur décrit également avec précision en 1714 l'action singulière de la torpille et l'organe qu'elle met en jeu pour exercer des effets « électriques ».
En 1716, il apprend à connaître chez l'ablette la singulière substance nacrée qui donne l'éclat aux écailles des poissons et s'occupe alors de la formation et de l'accroissement de leurs écailles[sp 18].
Grâce à une belle volière construite à grands frais, il multiplie ses travaux sur les gallinacés et prépare les matériaux de ses ouvrages sur les oiseaux.[réf. nécessaire]
Parmi les travaux de Réaumur, se trouvent onze mémoires publiés en 1749 et en 1751 sur l'Art de faire éclorre et d'élever en toute saison des Oiseaux Domestiques de toutes espèces, soit par le moyen de la chaleur du fumier, soit par le moyen de celle du feu ordinaire, où il expose ses recherches relatives à l'incubation artificielle des œufs d'oiseaux[sp 21].
En 1752, dans deux mémoires consacrés à ses Observations sur la digestion des oiseaux[sp 43],[sp 44], il décrit la différence qui a lieu pour le phénomène de digestion entre les oiseaux de proie, dont l'estomac n'agit sur les aliments que par un dissolvant, le suc gastrique ; et les oiseaux granivores, chez lesquels un gésier musculeux très puissant exerce une pression assez forte pour écraser mécaniquement des corps durs.
Son dernier mémoire, en 1756, concerne la forme des nids d'oiseaux[sp 45].
Réaumur constitue un très riche cabinet d'histoire naturelle où il tente, non seulement d'obtenir un exemplaire de chacune des espèces, mais surtout d'avoir des informations sur son habitat et ses mœurs. Pour Réaumur, le cabinet n'est pas un lieu simplement voué à l'entassement des collections mais doit être avant tout un outil scientifique à part entière. Usant de la protection du Régent Philippe d'Orléans (1674-1723), Réaumur réunit un grand nombre d'informations et d'échantillons « de terres, de pierres, d'insectes, de coquilles, etc. » : « Chaque semaine, je lui donnais [au régent] des mémoires, où je faisais des questions, tant générales que particulières, par rapport à ce qui se pouvait trouver dans chaque province du royaume. Il envoyait ces mémoires aux intendants qui, pour faire leur cour à un prince si éclairé et si ami des connaissances, mettaient en œuvre dans leurs départements publics, les maires et autres officiers subalternes […] J'ai eu pour faire des collections de tout ce que la France possède dans le règne minéral, des facilités qu'aucun naturaliste n'a jamais eues[sp 46] ». Colbert a rendues courantes les enquêtes de l'administration du royaume par voie de questionnaires adressés aux intendants ; la nouveauté est de faire bénéficier l'histoire naturelle des ressources de ce procédé[10].
Son cabinet est l'un des plus riches d'Europe, seulement surpassé, sans doute, par celui de Sir Hans Sloane.
Ses collections ornithologiques sont plus réduites que ses collections de coquillages, probablement à cause des difficultés de préservation des peaux d'oiseaux, notamment des attaques des insectes. Mais elle constitue la plus riche d'Europe. Ses collections d'oiseaux sont connues grâce à l'œuvre de son neveu par alliance Mathurin Jacques Brisson (1723–1806), conservateur du cabinet de Réaumur. Il fait paraître en 1760 Ornithologie (6 volumes), l'un des plus vastes catalogues ornithologiques jamais écrit. Il accède, outre la collection de Réaumur, à des collections privées parisiennes. L'Ornithologie de Brisson demeurera une référence durant plus d'un siècle.
À la mort de Réaumur, Buffon réussit à obtenir ses collections et à les intégrer dans le Cabinet du roi, dépendant du Jardin du roi, bien que Réaumur les ait léguées à l'Académie.
« D'autres publications sont disponibles en ligne », sur academie-sciences.fr (consulté en mars 2022).
« … il s'est trouvé des gens qui n'ont pas approuvé que les découvertes qui font l'objet de ces Memoires eussent été renduës publiques, ils auroient voulu qu'elles eussent été conservées au Royaume ; que nous eussions imité les exemples de mystère, peu loüables à mon sens, que nous donnent quelques-uns de nos Voisins. Nous nous devons premièrement à notre Patrie ; mais nous nous devons aussi au reste du monde ; ceux qui travaillent pour perfectionner les Sciences & les Arts doivent même se regarder comme les Citoyens du monde entier. »
— Réaumur 1722, Préface.
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