L'origine du nom de genre Phyllobates dérive des termes grecsphyllo qui signifie « feuille » et bates qui veut dire « grimpeur », faisant référence au comportement de certains amphibiens de la famille des Dendrobatidae aux mœurs très arboricoles, pouvant évoluer sur les feuilles[2].
Les cinq espèces de ce genre se rencontrent au Nicaragua, au Costa Rica, au Panama et en Colombie. Les batrachotoxines, qui sont des toxines extrêmement létales, ont été seulement détectées sur les grenouilles du genre Phyllobates et sont stockées dans les glandes de leur peau. Trois des cinq espèces (Phyllobates aurotaenia, Phyllobates bicolor et Phyllobates terribilis) composant ce genre sont notamment connues pour être utilisées dans le cadre de la chasse par des peuples amérindiens de Colombie afin d'empoisonner leurs flèches.
Toutes les espèces de ce genre ont été inscrites à l'annexe II de la Cites afin de contrôler leur commercialisation.
Trois des cinq espèces vivent dans l'ouest de la Colombie. Ainsi, Phyllobates aurotaenia se rencontre entre 90 et 1 000 m d'altitude dans les départements de Chocó et de Valle del Cauca dans le bassin des río Atrato et río San Juan, sur le versant ouest de la cordillère Occidentale[4]. Phyllobates bicolor se trouve dans les départements du Cauca, du Chocó, de Risaralda et de Valle del Cauca[5], à une altitude comprise entre 400 et 1 500 m[A 1], au niveau du bassin supérieur du río Atrato et du río San Juan, près du río Raposo et à la source du río Sipí[6]. Quant à Phyllobates terribilis, elle se rencontre sur la côte du Pacifique de la Colombie dans le département de Cauca, à une altitude comprise entre 100 et 200 m, au niveau du bassin supérieur du río Saija[7]. Des spécimens de cette espèce ont également été découverts dans le département de l'Antioquia[8].
Phyllobates lugubris vit dans l'extrême Sud du Nicaragua, au Costa Rica et dans l'ouest du Panama tandis que Phyllobates vittatus se rencontre au Costa Rica, dans les environs du golfe Dulce, entre 20 et 550 m d'altitude.
Les grenouilles du genre Phyllobates sont extrêmement dangereuses. En effet, elles sécrètent de la batrachotoxine, un des poisons les plus violents connus. Chez les batraciens, cet alcaloïdestéroïdien a été seulement détecté sur elles[9]. La batrachotoxine empêche les nerfs de transmettre les impulsions électriques, laissant les muscles dans un état de relâchement et pouvant ainsi entraîner une insuffisance cardiaque ou une fibrillation[10].
Phyllobates terribilis est la plus toxique de toutes les grenouilles. Ainsi, avec Phyllobates aurotaenia et Phyllobates bicolor qui sont également très toxiques, elles sont toutes les trois connues pour être utilisées dans le cadre de la chasse par des peuples amérindiens de Colombie. C'est notamment le cas de deux groupes constitutifs du peuple Chocó : les Noanamá et les Emberá[A 3] qui, pour empoisonner leurs flèches de sarbacane, les frottent au préalable sur la peau de Phyllobates terribilis lorsqu'elle est vivante[A 4]. Avec ces fléchettes, ils peuvent ainsi tuer des animaux comme des tapirs[14]. La méthode est différente pour les deux autres espèces de grenouilles qui sont moins toxiques. En effet, après les avoir empalé sur une tige de bambou[A 5], les indiens chocoes les exposent vivantes au-dessus d'un feu afin que leur corps exsude une sorte d'huile jaune[15]. Ils imprègnent ensuite la pointe de leur flèches avec le liquide[16] qu'ils ont recueilli en raclant la peau du batracien[15]. Bien que le poison utilisé sur les flèches soit très puissant, les indiens peuvent manger sans risque d'intoxication les animaux qu'ils ont tués durant la chasse. En effet, bien que toutes les toxines ne soient pas thermolabiles, la cuisson de la viande va globalement les détruire[17].
Publication originale
Duméril & Bibron, 1841 : Erpétologie générale ou Histoire naturelle complète des reptiles, vol. 8, p. 1-792 (texte intégral).
(en) Charles W. Myers, John W. Daly et Borys Malkin, « A dangerously toxic new frog (Phyllobates) used by Emberá Indians of Western Colombia, with discussion of blowgun fabrication and dart poisoning », Bulletin of the American Museum of Natural History, New York, American Museum of Natural History, vol. 161, no 2, , p. 307-366 (lire en ligne).
↑ a et b(en) John William Daly, John P. Dumbacher et Thomas F. Spande, « Batrachotoxin alkaloids from passerine birds: a second toxic bird genus (Ifrita kowaldi) from New Guinea », Proceedings of the National Academy of Sciences of the USA, (lire en ligne)
↑(en) John William Daly et Bernhard Witkop, Chemistry and pharmacology of frog venoms (dans Venomous animals and their venoms), vol. II, New York, Academic Press,
↑Selon l'ouvrage The alkaloids : chemistry and physiology [1993 (ISBN978-0-1246-9543-6), p. 192], chez plusieurs populations de Phyllobates lugubris du Panama et du Costa Rica, les quantités de batrachotoxines peuvent même ne pas être détectables.
↑ a et bHenri Desmaisons, Empoisonnement des armes primitives, vol. 11, Bulletin de la Société préhistorique de France, (lire en ligne), p. 493-496.
↑Eusèle Ferrand, Aide-mémoire de pharmacie, vade-mecum du pharmacien à l'officine et au laboratoire, Paris, J.-B. Baillière et fils, , 812 p. (lire en ligne), p. 265.
↑(en) Jiri Patocka, Kräuff Schwanhaeuser Wulff et María Victoria Marini Palomeque, « Dart poison frogs and their toxins », The ASA Newsletter, no 74, , p. 80-89 (ISSN1057-9419, lire en ligne)