Le développement de la pratique de l'exploration de l'espace montagnard japonais en tant que sport et loisir, impulsé vers la fin du XIXe siècle par des Occidentaux et poursuivi par les Japonais après la Seconde Guerre mondiale, amène en toute saison de nombreux randonneurs le long des chemins de randonnée qui s'étirent sur les pentes des volcans formant les monts Nikkō dont la faune et la flore sont protégées par le gouvernement japonais du fait de leur intégration au parc national de Nikkō depuis 1934.
Toponymie
Dans les monts Nikkō, le mont Nantai, montagne sacrée de l'est de l'ancienne province de Shimotsuke (la préfecture de Tochigi depuis la fin du XIXe siècle), est aussi appelé « mont Futara » (二荒山, Futara-san?)[2]. Le terme « (二荒?) » est un raccourci pour « 二荒颪 (Futara-oroshi?, litt. « deux vents catabatiques violents ») », expression qui désigne un vent catabatique qui souffle dans la préfecture de Tochigi deux fois par an, au printemps et à la fin de l'automne (ou en début d'hiver)[B 1],[B 2]. À l'époque de Shōdō Shōnin (VIIIe siècle), moine bouddhiste fondateur de la cité de Nikkō, ces vents saisonniers, venus du nord et dont la force s'amplifiait au pied du mont Nantai, constituaient des calamités climatiques pour Nikkō et au-delà[3]. En 820, Kōbō-Daishi, saint fondateur de l'école bouddhiste Shingon, séjourna à Nikkō. Ses invocations des divinités bouddhiques au sommet du mont Nantai mirent fin aux turbulences venteuses. Pour marquer l'événement, relevant que « 二荒 (?) », suivant une lecture chinoise, se prononce aussi « Ni-Kō », prononciation très proche de celle de l'expression « 日光 (Nikkō?) » signifiant « lumière solaire », il désigna la montagne sous un nouveau nom : Nikkō-san (日光山?)[4],[B 1]. Ainsi, par un jeu de mots, la cité, fondée au VIIIe siècle au pied du volcan Nantai, est baptisée Nikkō[2].
Pour assurer la réception de la parole du Bouddha auprès des gens du peuple, le moine Shōdō avait dû composer avec les croyances et les traditions locales du shintoïsme, implantées de plus longue date que celles relatives à sa foi bouddhique[B 3],[B 4]. S'est alors élaborée une forme originale de syncrétisme religieux mêlant philosophie bouddhique et spiritualité shintō : le Nikkōsan shinkō(日光山信仰?)[B 4],[5] ou la « foi dans les montagnes de Nikkō ». Les trois montagnes au cœur de cette tradition spirituelle sont les monts Nantai, Nyohō et Tarō, nommées collectivement Nikkōsanzan (日光三山?, litt. « trois montagnes de Nikkō »), et, par extension, l'ensemble du complexe volcanique est appelé monts Nikkō (日光山, Nikkō-san?)[6].
Géographie
Situation
Les monts Nikkō sont situés dans le Nord de la région de Kantō, sur l'île de Honshū. Ils s'étendent sur les deux préfectures de Tochigi et Gunma, au nord du lac Chūzenji.
Vue du mont Nikkō-Shirane depuis le village de Katashina.
Vue du mont Nantai depuis le lac Chūzenji.
Hydrographie
De nombreux ruisseaux et rivières prennent leur source sur les pentes des monts Nikkō, abondamment arrosés lors de la saison des pluies. Ils contribuent au bassin versant de la rivière Daiya à l'est du lac Chūzenji et, dans le Nord-Ouest de Nikkō, alimentent le cours supérieur de la rivière Kinu, un affluent du fleuve Tone.
Le climat des monts Nikkō correspond à celui d'Oku-Nikkō[n 1], la partie sud-ouest de la ville de Nikkō. Il est du type continental humide. La température annuelle moyenne est d'environ 7 °C et les précipitations annuelles sont de 2 169 mm. L'hiver le mercure peut descendre jusqu'à −9 °C et grimper jusqu'à 23 °C en été.
En hiver, un vent froid et humide venu de Sibérie, via la mer du Japon, apporte de la neige sur les sommets des monts Nikkō[9].
Moyennes : • Temp. maxi et mini °C • Précipitation mm
Faune et flore
Situé dans le Sud du parc de Nikkō, un parc national d'une superficie de 1 149,08 km2, administré par le ministère de l'Environnement du Japon depuis sa création en 1934[12],[13], les monts Nikkō constituent l'habitat de nombreuses espèces d'oiseaux sauvages et les pentes des volcans qui les composent offrent un terrain fertile pour diverses variétés de plantes. Ils font partie d'une zone importante pour la conservation des oiseaux : Oku-Nikkō, le Sud-Est d'un site naturel protégé de 3 130 km2 qui recouvre une partie de chacune des quatre préfectures de Tochigi, Gunma, Niigata et Fukushima[14].
Il y a environ 560 000 ans[n 4], par accumulation de coulées de lave et d'éjectas, le mont Nyohō émerge de la croûte terrestre, sur l'arc volcanique nord-est de l'île de Honshū[B 6]. Avec celle du mont Akanagi voisin, sa formation marque le début de l'activité volcanique des monts Nikkō[B 7],[B 8]. Le développement de l'édifice volcanique s'étend sur une période d'environ 290 000 ans ; il résulte de l'épanchement à la surface du sol d'un volume équivalent en « roche dense » (DRE[n 5]) d'environ 18,16 km3[B 8]. Puis, après une période de sommeil de 110 000 ans, le mont Nyohō entre en éruption, produisant des coulées pyroclastiques et des coulées de lave jusqu'à 130 000 ans BP[B 9]. Durant cette phase d'activité éruptive, autour de 135 000 ans BP, des séries d'éruptions phréatiques provoquent des avalanches de débris rocheux le long de ses pentes et, finalement, l'écroulement d'un partie du versant sud-est de son cratère. Le volume DRE de blocs de roche volcanique arrachés aux flancs de la montagne, estimé à au moins 0,79 km3, forme, au pied du volcan, une étendue rocheuse d'une superficie de 27,92 km2[20],[B 8]. Avant de s'éteindre il y a 86 000 ans, le volcan Nyohō se manifeste de nouveau pendant une période d'environ 14 000 ans, ses éruptions explosives successives produisant un volume DRE total de magma estimé à 3,7 km3[B 7],[B 8].
Il y a 100 000 ans, à l'ouest des deux premiers volcans, émergent de l'écorce terrestre des dômes de lave constitués de dacite et d'andésite parmi lesquels les monts Orogura, Sannōbōshi et Komanagō[B 7]. Puis se forment des Volcans polygéniques de petite taille dont les monts Ōmanagō et Tarō[B 7]. L'activité de tous ces volcans cesse il y a environ 50 000 ans.
Il y a 20 000 ans, du magma surgit des entrailles de la terre et donne naissance, au sud du mont Ōmanagō, au mont Nantai. Les éruptions successives de ce dernier, jusqu'à il y a environ 12 000 ans, engendrent notamment la formation du lac Chūzenji, au nord, et du plateau Senjō, à l'ouest[B 7].
À l'ère conventionnelle, le mont Nikkō-shirane reste le seul volcan actif des monts Nikkō ; son éruption la plus récente date de 1952[21].
Notes et références
Notes
↑Oku-Nikkō (奥日光?, litt. « intérieur de Nikkō ») est la zone géographique de l'Ouest de Nikkō qui comprend les monts Nikkō, le lac Chūzenji et le plateau Senjō.
↑La station météorologique d'Oku-Nikkō est située à 1 292 m d'altitude, dans le quartier Chūgūshi de Nikkō qui s'étend le long du bas du versant sud-est du volcan Nantai, au nord-est du lac Chūzenji[10].
↑Le nombre de jours avec neige sont des données de la JMA établies de 1997 à 2010.
↑Un volume équivalent en « roche dense » ou volume DRE, traduction de l'expression anglophone dense rock equivalent ou DRE, est un volume estimé de magma expulsé de terre au cours d'une éruption volcanique, une fois déduit le volume de vide interstitiel du volume mesuré sur le terrain[19].
↑(ja) Wild bird society of Japan, « 福島県・新潟県・栃木県・群馬県 : 奥只見・奥日光・奥利根 » [« Préfectures de Fukushima, Niigata, Tochigi et Gunma : Oku-Tadami, Oku-Nikkō et Oku-Tone »], sur www.wbsj.org, (consulté le ).
↑ abcdef et g(ja) Nikkō Natural Science Museum, « 男体山 » [« Mont Nantai »] (consulté le ).
↑ abcde et f(ja) Nikkō Natural Science Museum, « 女峰山 » [« Mont Nyohō »] (consulté le ).
↑ a et b(ja) NHK, « 奥日光 冬 » [« Oku-Nikkō l'hiver »], (consulté le ).
↑(ja) Hideaki Tachibana, « 栃木県北部,日光火山群女峰赤薙火山で約12-15万年前に起きた大規模山体崩壊 » [« Effondrement massif sur le volcan Nyohō-Akanagi des monts Nikkō (au nord de la préfecture de Tochigi), Il y a environ 150 000 à 120 000 ans »], Proceedings of the General Meeting of the Association of Japanese Geographers, Tokyo, Association of Japanese Geographer, vol. 67, (ISSN1345-8329, DOI10.14866/ajg.2004s.0.187.0, résumé).
(ja) Kohei Hirano et Masaki Takahashi, « 日光男体火山最末期噴出物の斑晶鉱物化学組成とマグマ溜りプロセス » [« Chemical composition of phenocrysts in products of the last eruption of Nikko-Nantai Volcano, central Japan, and its implications for the processes in magma chamber »], Proceedings of the Institute of Natural Sciences, Tokyo, Nihon University, vol. 41, (ISSN1343-2745, lire en ligne [PDF], consulté le ).
(ja) Takahiro Yamamoto, Geological survey of Japan, « 日本の主要第四紀火山の積算マグマ噴出量階段図 : 日光火山群 » [« Diagrammes de l'évolution du volume de magma d'éruption des principaux volcans du Japon : le groupe volcanique de Nikkō »] [PDF], sur www.gsj.jp, (consulté le ).
(en) Japan Travel Bureau, Inc., Must-See in Nikko [« Les « incontournables » de Nikkō »], Tokyo, JTB, coll. « Japan in your Pocket » (no 6), , 4e éd. (1re éd. 1985), 191 p. (ISBN4-533-00529-2).