Il est le frère de l'artiste Hubert-François Gravelot, graveur et illustrateur célèbre, qui réalisa un grand nombre des cartouches de ses cartes.
Biographie
Fils d'un tailleur parisien, Jean-Baptiste Bourguignon d'Anville a bénéficié d'une éducation de qualité, notamment au Collège des Quatre-Nations. Nommé géographe du roi à 21 ans en 1718, il était aussi lié avec la famille du Duc d'Orléans qui l'a soutenu « pendant près de quarante ans[1] » et qu'il initia au dessin de cartes géographiques. Il forma le jeune Louis XV sur le conseil de Claude Delisle avec lequel il travailla[2]. D'Anville produisit 211 cartes, considérées comme les meilleures de son époque. Leur précision, basée sur les découvertes les plus récentes, révolutionna la cartographie. Parmi les plus importantes[3] se trouvent les cartes de la Chine (1735) dressées pour accompagner la Description de la Chine de Jean-Baptiste Du Halde, qui restèrent la référence jusqu’au XIXe siècle, de l’Italie (1743), de l’Afrique (1749), de l’Asie (1751) et de l’Inde (1752).
Il publia un Atlas général en 1737, des atlas historiques et de nombreux écrits sur la géographie et la météorologie anciennes. Il ne donne à l’Encyclopédie qu'un seul article, Etésiens (Vents)[4], ce que regrette d'Alembert : « Un bon dictionnaire géographique serait un ouvrage bien digne des soins & des connaissances de M. d’Anville, de l’académie des Belles-Lettres, l’homme de l’Europe peut-être le plus versé aujourd’hui dans cette partie de l’histoire ; un pareil travail demanderait à être encouragé par le gouvernement[5].
Jean-Baptiste d'Anville a épousé une fille de Herbert de Hauteclair, procureur d'Alençon, trésorier et conseiller du roi, avec qui il était lié. Ce mariage l'amena à séjourner régulièrement au château de la Chevallerie (Arçonnay, Sarthe)[7].
Collection de cartes
En plus des cartes dont il était l’auteur, d’Anville avait constitué une abondante collection de documents cartographiques, tant gravés que manuscrits, la plus complète et la plus précieuse, selon Bon-Joseph Dacier, qui ait peut-être jamais existé. De son vivant, elle avait été enrichie de multiples donations faites par des savants, des collectionneurs et des voyageurs de tout pays. Il avait songé dès 1772 à céder cette collection au roi, mais ce n’est qu’en 1779 que l’affaire fut réglée. Lorsque survint la mort de d’Anville, plus riche d’honneurs que d’argent, la collection passa du Louvre, où il logeait, à Versailles, où Jean-Denis Barbié du Bocage poursuivit l’inventaire qui faisait tant défaut depuis que la collection appartenait au roi et qu’il acheva en 1828. Louis-Charles-Joseph de Manne, conservateur-administrateur de la Bibliothèque du Roi, qui avait hérité les fonds de d'Anville et tous ses papiers, donna en 1802 une notice des ouvrages du géographe. Les œuvres de d'Anville devaient contenir 6 volumes accompagnés de cartes dessinées par le géographe mais l’édition fut interrompue par la mort de M. de Manne en 1832 et seuls 2 volumes furent publiés en 1834 par sa veuve et son fils.
La collection passa ensuite au ministère des Affaires étrangères[8] avant de venir, en 1924, enrichir les collections du département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France. Le récolement entrepris alors par Charles Du Bus permit de constater la perte ou le vol de certaines cartes manuscrites survenus pendant le séjour de la collection chez les diplomates, de sorte qu’elle renferme aujourd’hui près de 10 500 cartes de toute région et de toute époque depuis les premières éditions de la Géographie de Ptolémée jusqu'aux années 1770-1780. Marcel Destombes a retrouvé au département des Estampes et de la Photographie trente-quatre plans manuscrits de villes chinoises utilisées par d’Anville pour ses plans de la Description du P. Du Halde et acquise par la Bibliothèque du roi en 1763 (BNF, Estampes, Vol. mat. 11).
Hommages
Jean-Baptiste Bourguignon d'Anville figure sur un tableau contemporain d'Anicet Lemonnier (au château de Malmaison), représentant les encyclopédistes dans le salon de Mme Geoffrin, en compagnie de Mme Du Deffand et de Julie de Lespinasse.
Une statue de Jean-Baptiste Bourguignon d'Anville figure parmi les hommes illustres sur la façade de l'hôtel de ville de Paris du côté de la rue de Rivoli. Une autre version se trouve au château de la Chevallerie, qui était sa résidence de campagne, avec la dédicace suivante: « Johanni Baptistae d'Anville, primo Ludovici XV regis geographo, hoc monumentum ejusdem apud parisias statuae ad exemplar pietatis necnon orati animi pignus nepotes exegerunt ».
Le département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France[10] propose dans les pages du serveur Gallica[11] les cartes géographiques et les plans de villes représentant l’ensemble du territoire de la France métropolitaine, dont des documents de géographie ecclésiastique, militaire, fiscale et administrative, des cartes de côtes, de rivières, de routes et de forêts, assemblés par d’Anville, certains autographes. Le bel ensemble des plans de villes permet d’étudier le monde urbain, les fortifications et l’embellissement des villes au XVIIIe siècle. L’on a joint, dans un souci de cohérence, les deux séries de la Carte de France de Cassini : l’édition complète, coloriée, présentée à l’Assemblée nationale en 1790 et la seconde édition de 1815.
En plus des cartes représentant la géographie de la France, du Piémont, de la Savoie et de l’Île de Corse, se trouve une série de cartes cosmographiques, des mappemondes, des cartes de voyages et des cartes générales de l’Europe.
Un programme de recherches sur trois années a été inauguré en 2010 au département des Cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France.
Notes et références
↑Mémoire de M.d'Anville inséré dans le 14ème volume de l'Histoire ancienne de M.Rollin
↑Pascale Mormiche, « La géographie apprise aux princes : Bourguignon d’Anville et son élève Louis XV (1718-1730) », Paris, Presses universitaires d’Oxford, , p. 25-51, dans « Jean-Baptiste d'Anville, un cabinet savant à l'époque des Lumières », sous la dir. de Catherine Hofman
↑Cédric Gras, L'hiver aux trousses : Voyage en Russie d'Extrême-Orient, Paris, Gallimard, , 267 p. (ISBN978-2-07-046794-5), « Le liman »
Lucile Haguet, Catherine Hofman, Une carrière géographique au siècle des Lumières: Jean Baptiste d'Anville, ouvrage collectif, Bibliothèque Nationale de France/Oxford University, 2018
M. d'Anville, Géographe ordinaire du Roi, Proposition d'une mesure de la terre, dont il résulte une diminution considérable de sa circonférence par les parallèles, chez Chaubert, quai des Augustins, 1735.
JBL Crevier, Histoire des Empereurs romains, depuis Auguste jusqu’à Constantin, chez Desaint & Saillant, Paris 1750-56, illustrée 4 cartes gravées par d’Anville.
Nicolas de Condorcet, Éloge de M. d'Anville, dans Histoire de l'Académie royale des sciences - Année 1782, Imprimerie royale, Paris, 1785, p. 69-77(lire en ligne)
Charles Du Bus, « Les collections d’Anville à la Bibliothèque nationale », dans Bulletin de la Société de géographie, 1926, tome XLI, p. 93-145.
M. Prévost, article Anville dans Dictionnaire de biographie française, Paris, tome III, 1939, col. 84-86.
Edwige Archier, article « Anville », dans Lexikon zur geschichte der Kartographe, Wien, 1986, tome 1er, p. 18-21.