Jean-Étienne Dominique Esquirol, né le à Toulouse et mort le à Paris, est un aliéniste français. Il est considéré comme le père de l'organisation de la psychiatrie française en faisant voter la loi du 30 juin 1838 obligeant chaque département à se doter d'un hôpital spécialisé. Il est à l'origine de l'aménagement de la nouvelle Maison royale de Charenton en 1825, destinée à accueillir près de trois cents malades. Il forme la majorité des aliénistes de son temps.
Biographie
Il est le fils d'un négociant toulousain, prieur de la bourse des marchands, élu capitoul en 1787[1]. À Toulouse il est élève du collège de l’Esquile[2].
Arrivé en 1799 à Paris, il fut d'abord élève de Jean-Nicolas Corvisart à la Charité, puis dès 1801 il travailla avec Pinel à la Salpêtrière.
En 1805, il écrivit : Les Passions considérées comme causes, symptômes et moyens curatifs de l'aliénation mentale .
Il joua un rôle important sur le plan administratif et législatif (loi de 1838).
Il fit la première description médicale de la trisomie 21 en 1838.
Il eut une certaine influence sur les pathologistes allemands, notamment Karl Christian Hille et Johann Christian August Heinroth, les premiers à traduire son œuvre dans leur langue.
Nosographie
Il est l'un des premiers à avoir fait la distinction entre hallucinations (perceptions sans objet externe, produites et construites par l'esprit) et illusions (erreurs de perception ; mauvaise interprétation des stimuli réels)
Parallèle Folie-Passions :
Pour lui les passions seraient ce qui nous pousse à agir et qui n'est pas d'ordre intellectuel : elles sont à l'origine de l'aliénation mentale.
La folie serait faite des passions poussées à l'extrême
Il y aurait donc une différence quantitative entre les deux.
Selon lui, dans l'enfance, il n'y a pas de passions, donc pas d'aliénés.
Thérapeutique
Pour lui, les passions doivent servir au traitement des maladies.
Il faut qu'il y ait répression pour qu'il y ait guérison du malade : inspirer un sentiment de crainte, qui dompte et subjugue le malade, et provoquer une secousse morale en plaçant l'aliéné dans un état opposé et contraire à celui dans lequel il était avant de recourir à ce moyen. C'est la méthode perturbatrice.
Pour Esquirol, il ne suffit donc plus de parler avec douceur et compassion, selon le traitement moral de Pinel.
Rôle administratif et législatif
Théoricien clair et pratique concernant les institutions psychiatriques, il est avec ses élèves à l'origine de l'adoption de la loi du 30 juin 1838 concernant les aliénés[3], qui met fin aux décisions d'internement arbitraires par simple lettre de cachet ou de décisions de justice.
Hôpital psychatrique CHAI, pavillon Esquirol à Saint-Egreve.
Œuvres et publications
Des passions considérées comme causes, symptômes et moyens curatifs de la maladie mentale, [Thèse de médecine de Paris n° 574, 1805], Didot Jeune, Paris, 1805, Texte intégral.
Note sur la monomanie homicide, J.-B. Baillière (Paris), 1827, 52 p. ; in-8, lire en ligne sur Gallica.
Des illusions chez les aliénés. Question médico-légale sur l'isolement des aliénés, Crochard (Paris), 1832, 1 vol. (83 p.) ; in-8, lire en ligne sur Gallica.
Des maladies mentales considérées sous le rapport médical, hygiénique, et médico-légal, 1838:
Examen du projet de loi sur les aliénés, J.-B. Baillière (Paris), 1838, In-8° , 39 p., lire en ligne sur Gallica.
En collaboration
avec Pariset, Étienne (1770-1847) et coll., Instruction populaire sur le régime a suivre pour se préserver du Choléra-Morbus, et sur la conduite à tenir si la maladie se déclare ; [par MM. Pariset, Esquirol, Des[...], Leroux, Juge, Chevallier, Legrand, et Marc], E. C. Bourseul, Impr. de Ve Villette (Douai), 1832, Vol. in-8° (23 pages), lire en ligne sur Gallica.
Édition scientifique
William Charles Ellis (1780-1839), Traité de l'aliénation mentale, ou De la nature, des causes, des symptômes et du traitement de la folie : comprenant des observations sur les établissements d'aliénés, [ouvrage traduit de l'anglais, avec des notes et une introduction historique par Th. Théophile Archambault, enrichi de notes par M. Esquirol], J. Rouvier (Paris), 1840, 1 vol. (CXLI-500 p.) : ill. ; in-8, lire en ligne sur Gallica.
Notes et références
↑Christian Maillebiau, Dictionnaire de Toulouse, Loubatières, 2006
Philippe Albou, « Esquirol et la démence », in: Histoire des sciences médicales, 2012, 46 (1), pp. 45-54,Texte intégral.
Jean-François Allilaire [sous la direction de], Jean-Étienne-Dominique Esquirol, une œuvre clinique, thérapeutique et institutionnelle, Levallois-Perret : Interligne, 2001. 202 p.
Henri Baruk, « L'œuvre d'Esquirol et la régression actuelle », in: Histoire des sciences médicales, 1988, 22 (2), pp. 155-158, Texte intégral.
Alfred Binet , Simon Th., « Folie avec conscience », in: L'année psychologique, 1909 vol. 16. pp. 123-163. doi : 10.3406/psy.1909.3790 Texte intégral.
Michel Caire, « Esquirol en 1805: titres, travaux, services rendus », in: Histoire des sciences médicales, 1997, 31 (1), pp. 45-52, Texte intégral.
Michel Craplet, « L'architecture dans les textes d'Esquirol » , in: Histoire des sciences médicales, 1991, 25 (1), pp. 73-77, Texte intégral.
Idelette De Bures, « À propos de la loi sur les aliénés du », Histoire des sciences médicales, 2006, 40 (3), pp. 301-304, Texte intégral.
« Discours prononcé sur la tombe d'Esquirol le », in: Des maladies mentales et des asiles d'aliénés, Baillière (Paris), 1864. p. 711-773. Texte intégral.
« Observations sur le projet de loi relatif aux aliénés »in: Des maladies mentales et des asiles d'aliénés, Baillière (Paris), 1864. p. 774-785. Texte intégral.
Danielle Gourevitch, « Une campagne contre la loi de 1838 régissant le statut des aliénés. Hector Malot, Léopold Turck, Théophile Huc, un romancier, un médecin, un juriste », Histoire des sciences médicales, 2014, 48 (2), pp. 251-260.
Michel Gourevitch,, « Vitalité de la loi de 1838 »,Histoire des sciences médicales, 1988, 22 (2), pp. 175-180, Texte intégral.
Michel Gourévitch, « Obsession-impulsion infanticide », in: Histoire des sciences médicales, 2006, 40 (3), pp. 293-296, [ Texte intégral]..
Jean-Yves Guiroy, « Quand Esquirol écrivait au sous-préfet de Foix “Hautes Pyrénées” », in: Histoire des sciences médicales, 2006, 40 (3), pp. 297-300,Texte intégral.
(en) Rafael Huertas, "Between doctrine and clinical practice: nosography and semiology in the work of Jean-Etienne-Dominique Esquirol (1772—1840)", History of Psychiatry, 19,2 (2008), 123-140
Pierre Lefebvre, « Le traité des maladies mentales d'Esquirol: cent cinquante ans après », in: Histoire des sciences médicales, 1988, 22 (2), pp. 169-174, Texte intégral.
François Ledermann, « La psychiatrie française et les médicaments : Pomme, Pinel, Esquirol, Morel », in: Revue d'histoire de la pharmacie, 70e année, N. 254, 1982. pp. 189-206. doi : 10.3406/pharm.1982.2614 Texte intégral.
Georgette Legée, « Jean-Étienne-Dominique Esquirol (1772-1840). La personnalité d'un élève de Philippe Pinel », in: Histoire des sciences médicales, 1988, 22 (2), pp. 159-168, Texte intégral.
Postel J., Postel, M., « Esquirol et la monomanie homicide », in: Histoire des sciences médicales, 1988, 22 (2), pp. 181-186 Texte intégral.
Régis Pouget: « Jean Étienne Dominique Esquirol (1772-1840) et la loi du . Un précurseur de génie », in Bulletin de l'académie des sciences et lettres de Montpellier, n°38, pp. 121-133, Article intégral en ligne.
S., « Jean-Étienne Dominique Esquirol », in: Dictionnaire des sciences médicales, Tome 4, p. 58-9, Texte intégral.
Jean-Christophe Maillard, « Les pères de la Doctrine chrétienne à Toulouse : les enjeux du théâtre et de la musique au collège de l’Esquile à la fin du xviie siècle », dans Anne Piéjus (dir.), Plaire et instruire : Le spectacle dans les collèges de l'Ancien Régime, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Interférences », , 374 p. (ISBN9782753503632, DOI10.4000/books.pur.28918, lire en ligne), p. 255-269.