« Parce que tout est déjà là, muri, pensé, fignolé. Du trois minutes trente pur génie. On n'en connait pas beaucoup, des gars qui arrivent tout cuits. Il y a toujours des périodes de formation, où l'on devine le grand artiste sous des balbutiements encore désordonnés. […] Mais Thelonious Monk, c'est tout le contraire. Quand il arrive avec ses petits tableaux, il n'y a plus qu'à planter les clous pour les accrocher au mur. Tout du bon. Il faut dire aussi que le fait de commencer à enregistrer aussi tard dans sa vie a permis au pianiste de murir dans son coin sans que personne, à part les initiés, ne remarque quoi que ce soit. Mais le plus important dans ces enregistrements est sans doute qu'il s'impose tout de suite, impérial, dans la catégorie compositeur. En proposant des formations variables, trio, quintet, sextet, il exhibe dans chacun de ces orchestres la vitalité de son génie. »
Les morceaux sont généralement courts, autour de trois minutes : « un bijou de mélodie angulaire, suivie par des solos courts et fulgurants, et puis c'est parti pour le morceau suivant »[5]. Bien qu'il s'agisse du premier album de Monk en tant que leader, tous les éléments de son style sont déjà présents : « jeu cubiste, décrochages déroutants, déconstruction mélodique, sens inédit du rythme, compositions géniales »[6]. Le pianiste est alors âgé de 30 ans, et joue depuis longtemps en club sans avoir enregistré[7].
Enregistrement
Le producteur de Blue Note RecordsAlfred Lion organise six sessions d'enregistrement : les 15 et , le , le , le et le [8]. Toutes les sessions sont enregistrées par Doug Hawkins au WOR Studios, sauf celle du enregistrée par Rudy Van Gelder dans son home studio.
Sortie
À partir des cinq premières sessions, Blue Note publie deux disques 10″ : Genius of Modern Music en 1951 et Genius of Modern Music, Vol. 2 en 1952. La pochette est signée Paul Bacon[9].
Après que ce format tombe en désuétude, Blue Note republie les disques en 1956 en 12″, en ajoutant les enregistrements issus d'autres sessions : Genius of Modern Music, Vol. One (BLP 1510) et Genius of Modern Music, Vol. Two (BLP 1511). Reid Miles signe une de ses premières pochettes pour Blue Note[10].
Les deux albums sont rassemblés sur un seul CD, par ordre chronologique, et la session du est publiée sur Wizard of the Vibes(en) de Milt Jackson.
Critique
Pour Rick Anderson (AllMusic), ces disques sont indispensables pour tout passionné de jazz. Monk est au mieux de sa forme, même si certains des musiciens qui l'accompagnent ne sont pas tous à la hauteur : « le jeu d'Art Blakey est correct, mais il n'a visiblement pas encore tout à fait pris la mesure du génie des compositions de Monk, et […] Sahib Shihab joue avec un son gras et gazouillant largement hors de propos »[2]. Marc Davis (All About Jazz) surenchérit : pour lui les meilleurs morceaux sont ceux en trio, avec le piano de Monk au centre[5]. Le jeu de Shihab est plus intéressant sur les enregistrements de 1951, et la qualité de l'enregistrement généralement meilleure sur le deuxième volume[11].
Ces albums figurent dans sélections discographiques[12],[3],[7].