Les composés organoborés sont une classe de composés organiques comportant au moins une liaison entre un atome de carbone et un atome de bore. Le terme « organoborane » est parfois utilisé comme synonyme de composé organoboré, mais il est aussi utilisé dans un sens plus restreint pour désigner les seuls dérives alkylés ou arylés du borane (BH3), comme les trialkylboranes (BR3). Parmi les autres grandes familles des composés organoborés, on compte les acides boroniques et les esters boroniques
Organoborane (au sens restreint)
Acide boronique
Ester boronique
Les composés organoborés sont d'importants réactifs en chimie organique permettant de nombreuses transformations chimiques dont la plus importante est l'hydroboration.
Liaison carbone–bore
La liaison carbone–bore (C-B) est faiblement polaire du fait de la faible différence d'électronégativité entre le carbone (2,55) et le bore (2,04). De ce fait, les alkylboranes sont généralement stables, mais facilement oxydables.
En partie du fait de sa plus faible électronégativité, le bore forme souvent des composés à déficit d'électrons(en) tels que les triorganoboranes. Les groupes vinyle et aryle tendent eux à donner leurs électrons, et rendent ainsi le bore moins électrophile, donnant alors à la liaison C-B un caractère de liaison double. Les dérivés organiques du diborane sont classés en chimie organique comme des électrophiles forts car le bore y est incapable d'obtenir un octet d'électrons.
Classes de composés
Organoboranes et hydrures
L'une des classes de composés organoborés la plus étudiée est celle des composés de formule BRnH3−n. Ces composés sont utilisés comme catalyseurs, réactifs ou intermédiaires réactionnels. Les dérivés trialkyle et triaryle présentent une géométrie plane trigonale autour du centre de bore, et sont typiquement des acides de Lewis faibles. À l'exception de certains dérivés très volumineux, les hydrures (BRnH3−n avec n = 1 or 2) existent sous la forme de dimères, comme le borane lui-même. Les dérivés trisubstitués, comme le triéthylborane sont eux monomériques[2].
Acides et esters boriniques et boroniques (BRn(OR)3-n)
Le bore est réputé pour former des clusters, par exemple le dodécaborate [B12H12]2−. De nombreux dérivés organiques sont connus pour former de tels clusters. Un exemple est [B12(CH3)12]2− et son dérivé radical [B12(CH3)12]−[3]. Les composés cluster apparentés comprenant des atomes de carbone sont appelés carboranes. Le plus connu est l'orthocarborane, de formule C2B10H12. Bien qu'ils aient peu d'applications commerciales, les carboranes ont beaucoup attiré d'attention en raison de leur structure inhabituelle. Leurs dérivés anioniques, les dicarbollures, par exemple [C2B9H11]2−, sont des ligands qui se comportent comme le cyclopentadiénure.
Composés aromatiques borasubstitués
Il existe des composés aromatiques dérivés d'hydrocarbures aromatiques où l'un groupe CH est remplacé par un atome de bore. C'est par exemple le cas du borabenzène (C5H5B). Ce type de composés est toujours isolé sous la forme d'adduits, par exemple C5H5B-pyridine. Le borole, un analogue structurel du pyrrole ou de l'azole, n'a jamais été isolé, mais on en connaît des dérivés substitués. La borépine (hétérocycle à sept) elle été isolée et, contrairement à l'azépine ou l'oxépine, est aromatique.
Boryles
Les anions boryles ont pour formule R2B−. Les composés boryles anioniques nucléophiles se sont longtemps montrés insaisissables, mais une étude de 2006 a décrit un composé de boryllithium, qui réagit comme un nucléophile[4],[5]. Les composés organométalliques avec des liaisons métal-bore (c'est-à-dire M–BR2) sont connus sous le nom de complexes boryle. Les ligands associés sont appelés borylènes (M–B(R)–M).
Les alkylidèneboranes, les composés de type RB=CRR avec une liaison double carbone–bore sont rares. Le composé parent de cette sous-classe est HB=CH2, qui peut être détecté à basses températures. Un dérivé assez stable est CH3B=C(SiMe3)2, mais il tendance à se cyclodimériser[7].
Les composés contenant une liaison double bore–bore sont rares. En 2007, le premier diborène (RHB=BHR) neutre a été présenté par Gregory Robinson de l'université de Géorgie[9],[10]. Chaque atome de bore a un proton attaché à lui, et est coordonné à un carbène N-hétérocyclique (NHC). La structure parente avec des ligands carbène supplémentaire est le diborane(2)[11],[12].
Un diboryne a été rapporté, basé sur une chimie similaire.
De alcènes peuvent être insérés dans des liaisons B-H de boranes dans un procédé appelé hydroboration. L'hydroboration des alcènes ou des alcynes par le borane (BH3) ou ses dérivés ne convertit qu'environ 33% des réactifs initiaux, le reste étant inclus après oxydation ou protonolyse dans des sous-produits borés. Un réactif organoboré couramment utilisé en synthèse est le 9-BBN[13]. L'hydroboration est stéréospécifiquesyn, et donne le produit anti-Markovnikov.
La réaction de borylation de C-H catalysée par les métaux est une réaction organique catalysée les métaux de transition qui produit de composés organoborés par fonctionnalisation de liaisons C–H aliphatiques ou aromatiques. Un réactif courant pour ce genre de réactions est le bis(pinacolato)diborane(en).
Réactivité
La liaison carbone–bore est légèrement polarisée vers le carbone, ce qui le rend nucléophile. Cette propriété est exploitée pour transférer l'un des groupes R vers un centre électrophile de façon inter- ou, plus souvent, intramoléculaire[14]. Dans ce dernier cas, le groupe nuclophile R est capable de subir une migration 1,2 vers le carbone électrophile attaché au bore. Le borane résultant peut ensuite être ensuite oxydé ou être sujet d'une protonolyse pour donner divers composés organiques :
Le monoxyde de carbone réagit avec les trialkylboranes. Il en suit un réarrangement 1,2 dans lequel un substituant alkyle migre du bore au carbone du groupe carbonyle. Il est ainsi possible des alcools primaires homologues par traitement des organoboranes par le monoxyde de carbone et un hydrure[15] :
Allylboration
L'allylboration asymétrique est une autre façon pratique de former des liaisons carbone-carbone grâce aux organoborés[16]. On peut citer par exemple la synthèse de Nicolaou des épothilones[17] où une allylboration asymétrique (utilisant allylborane dérivé de l'α-pinène) est utilisée en conjonction avec une protection par le TBS et une ozonolyse. Cela résulte au général en une homologation ajoutant deux carbones, produisant la séquence d'acétogénine recherchée.
Les trialkylboranes (BR3) peuvent être oxydés en leurs borates correspondants (B(OR)3). Cette oxydation peut aussi servir en analyse chimique à déterminer le nombre de liaisons carbone-bore que contient un composé à analyser ; le composé est ainsi mis à réagir avec l'oxyde de triméthylamine (Me3NO), la triméthylamine (Me3N) formée étant ensuite titrée.
Les borates peuvent être convertis en acides boroniques (RB(OH)2) par réaction avec un réactif de Grignard puis hydrolyse. Ces acides peuvent ensuite réagir avec le bifluorure de potassium (K[HF2]) pour former des sels de trifluoroborate (K[RBF3])[18], des précurseurs des nucléophiles difluorures d'alkyle et d'aryle, ArBF2[19]. Ces sels sont plus stables que les acides boroniques eux-mêmes, et sont utilisés par exemple pour l'alkylation de certains aldéhydes[20],[note 1] :
Les composés organoborés se prêtent également aux réactions de transmétallation, en particulier avec les composés d'organopalladium. Ce type de réaction est illustré par la réaction de Suzuki, qui implique le couplage d'un acide aryl- ou vinyl-boronique avec un halogénure d'aryle ou de vinyle, catalysé par un complexe de palladium(0)[21].
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